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Pride of Angels (Le Livre LGBT des Anges et des Humains)

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Un méga-post au thème qu'on pourrait aisément qualifier de capilotracté. En l'occurrence, c'est l'occasion de revenir sur une obsession du tenancier de la présente maison mais aussi de proposer quelques albums (ou EP) aussi distants les uns des autres que réussis. Enjoie !

n°17 : Rose (la sexualité)
Banquet of the Spirits "Caym: Book of Angels Volume 17" (2011)
ou "Voyage en Terres Inconnues"

Si on n'est pas vraiment surpris de retrouver le Banquet of the Spirits de Cyro Baptista (30 ans de collaborations avec John Zorn !) pour une participation au Masada Book Two (The Book of Angels), on ne s'attendait pas à ce que la fusion brasiliana-worldo-foutraque de sa formation colle aussi bien à l'avant-gardisme klezmero-jazzo-contemporain de Zorn...
On aurait cependant du se souvenir que Cyro avait participé à deux des plus beaux volumes du Livre des Anges (le Lucifer de Bar Kokhba et le Ipos des Dreamers) et prendre ces "credentials" pour argent comptant. Encore plus en tenant compte que, dans le groupe, figure un autre vétéran de la galaxie Zornienne (et producteur de moult albums de la Radical Jewish Culture du Label Tzadik) en la personne de Shanir Ezra Blumenkranz responsable ici des arrangements et qui fit un si bon boulot que Zorn l'a reconvoqué (sous son nom cette fois) pour un prochain volume: Abraxas, 19ème du second livre de Masada.
Pour totalement prendre possession du répertoire, Cyro, Shanir et leurs deux compagnons (Tim Keiper et Brian Marsella) l'ont rôdé sur scène avant d'entrer en studio pour son enregistrement, et ça se sent. Le catalogue mélodique n'est pas plus exceptionnel que sur un (très) bon Book of Angels, c'est donc forcément l'interprétation qui fait la différence. Le tour de force, en l'occurrence, réside dans la capacité de la formation de ne pas renier ses racines tout en embrassant totalement celles de son auguste compositeur. Sur Matafiel par exemple, l'interpénétration des sources séfarades et de la coloration carioca qu'y accole le quatuor contribuent à créer un « autre-chose » aussi passionnant que déroutant, qui était la visée originelle de Zorn quand il décida de confier ses compositions à une large palette d'interprètes. Tout n'est pas aussi radical cependant. Souvent, le groove tropical de Cyro est l'épice dépaysante d'une musique clairement orientée klezmer. Même en cette instance Banquet of the Spirits trouve toujours le truc - en ajoutant des chants latino-tribaux ou des instruments nord-africains tel le guembri ou l'oud, tous deux tenus par le multi-talentueux Shanir - pour se démarquer de ce qui nous avait jusqu'alors été proposé dans la série.
Voyage en terres inconnues, Caym nous ballade de Rio à Java en passant par Jerusalem, Alexandrie ou Cracovie (et j'en passe !) sans jamais se départir de son esprit frondeur, de son modernisme fusionnant ou de sa salutaire liberté de ton. Ca en fait, vous l'aurez compris, une pleine et entière réussite et (encore !) une nouvelle richissime page d'un Livre des Anges décidément incontournable.

PS 12/2015 : Cyro, je l'aime ! Tout ce qu'il touche se transforme en or incrusté de rutilants joyaux dessinant de potaches et virtuoses scénettes, grand, même quand il ne compose ni n'arrange comme c'est le cas ici.

1. Chamiel 4:27
2. Matafiel 5:22
3. Briel 4:19
4. Zaphaniah 3:53
5. Tzar Tak 3:45
6. Flaef 2:05
7. Hutriel 4:27
8. Yeqon 4:55
9. Yahel 2:26
10. Tahariel 4:47
11. Natiel 4:00
12. Phaleg 4:07

Cyro Baptista: percussions, voix
Shanir Ezra Blumenkranz: oud, basse, guembri, voix
Tim Keiper: batterie, percussions, xalam, voix
Brian Marsella: piano, clavecin, orgue, accordéon, voix
John Zorn: composition

CYRO BAPTISTA

n°20 : Rouge (la vie et la guérison)
Pat Metheny "Tap: Book of Angels Volume 20" (2013)
ou "Two Masters"

Ca faisait des mois qu'on l'attendait, depuis que la rumeur que Pat Metheny interviendrait dans la série des Book of Angels (pour l'ultime volume disait-elle, vilaine !). Voila, c'est fait, elle est là la rencontre au sommet d'un guitariste ô combien révéré et d'un compositeur toujours avide de nouvelles expériences, d'entendre sa musique triturée, réinterprétée par d'autres mains, d'autres cerveaux.
En l'occurrence, il n'y a pas pléthore, que ce soit pour la tracklist ou le line-up (6 et 2) mais les émotions sont bien au rendez-vous et la rencontre de deux univers à priori pas exactement compatibles porte magnifiquement ses fruits. Pas qu'on n'en attendait quoique ce soit d'autre, notez, quand deux géants se croisent, ça fait forcément quelques étincelles... Et si peu de musiciens interviennent ici, c'est tout bonnement parce que Metheny bouffe toute la place faisant montre, comme il l'a souvent fait sur ses récentes livraisons, de ses qualités de producteur/arrangeur/multi-instrumentiste. De fait, il n'a recours qu'au seul Antonio Sanchez, frappeur de peau de service, pour s'inviter sur les plates bandes d'un Zornô combien consentant.
Musicalement, la surprise est, finalement, de ne jamais en rencontrer vraiment. Je m'explique... Si, en effet, le traitement que se voient infligées les compositions de John Zorn est unique (tout en étant multiple, j'y viens), il est totalement dans les valeurs et inclinaisons stylistiques de Metheny qui s'est, en la circonstance, totalement réapproprié les notes de son compositeur. En introduction, ça donne un Mastema au "klezmerisme" discret occulté qu'il est par la folie fusion à bruitages électroniques que commet Metheny... Et ça fonctionne du feu de Dieu (ou des Anges, c'est bienvenu pour la série !). Suit Albim qui, plus respectueux des cannons du compositeur Zorn, est une charmante ballade nous emmenant presque jusqu'à Buenos Aires avec sa guitare acoustique, son discret bandonéon, son doux chaloupement et sa fin dramatique, parfait, et parfaitement maîtrisé, ça va sans dire ! Tharsis, piste 3, plus électrique et rapide n'est pas bien différent, comme si les deux thèmes qui le précédent se retrouvaient... Si l'empreinte Zorn y est impossible à rater, ça ne signifie pas que Metheny se soit laisser aller à la facilité, pièce à la fois rythmée et ambiante, elle bénéficie de son exceptionnelle qualité de guitariste en plus de ses capacités d'arrangeur/metteur en son, devenant "autre chose" au contact d'un imaginaire riche, "autre chose" de particulièrement prenant en son magnifique crescendo.
J'arrête là menu non sans préciser que la seconde moitié des titres propose d'au moins aussi fortes émotions, d'au moins aussi belles révélations musicales pour une satisfaction finale évidemment acquise.
Formellement, les petits plats ont été mis dans les grands et, grande première dans la série sans doute motivée par quelques obligations contractuelles, ce Tap bénéficie d'une double sortie, chez Nonesuch (label attitré de Metheny) et chez Tzadik (la maison de qui vous savez). C'est finalement, sauf pour Tzadik peut-être, une bonne nouvelle qui, espérons-le, permettra à un compositeur toujours trop méconnu de récolter quelques suiveurs fanatiques supplémentaires dans l'opération, Zorn le mérite, Metheny le lui offre... Elle est pas belle la vie ?
Reste que cette rencontre (un sommet au sommet !) donne extrêmement envie d'en entendre plus, que John Zorn fasse plus de nouvelles rencontrent qui élargiront encore le spectre d'une série et d'un monde pourtant déjà si riche parce que, si vous ne l'aviez pas compris, ce Tap, 20ème Book of Angels, c'est de l'or en barre... Tout simplement !

PS 12/2015 : Je minorerais un chouïa mon enthousiasme d'époque mais ça reste un authentique évènement et une galette réussie.

1. Mastema 7:20
2. Albim 9:07
3. Tharsis 5:54
4. Sariel 11:09
5. Phanuel 10:55
6. Hurmiz 6:12

John Zorn: composition
Pat Metheny: production, arrangements, electric & acoustic guitars, baritone guitar, sitar guitar,
tiples, bass, piano, keyboards, marimba, bells, bandoneon, percussion, electronics, flugelhorn
Antonio Sanchez: drums

PAT METHENY

n°6 : Orange (la santé et la fierté)
Uri Caine "Moloch: Book of Angels Volume 6" (2006)
ou "Solo Piano"

Dans ce genre d'exercice - l'album en solitaire - il n'est pas rare qu'une certaine aridité se fasse jour. Fatalement, ce Moloch - 6ème levée du deuxième livre de MasadaJohn Zorn explore ses racines juives - n'échappe pas à l'exception. Il faut cependant compter sur les qualités de mélodiste de Zorn et l'excellence des arrangements et interprétations d'Uri Caine pour faire de cet album, sur le papier un peu rebutant, une vraie, belle et complète réussite.
Un peu rebutant parce que, si l'excellence n'avait pas été au rendez-vous, ces 77 minutes de piano auraient paru extrêmement fastidieuses voire carrément endormissantes. Or, il y a les compositions de John Zorn mariant klezmer, jazz, classique et avant-garde comme nul autre ne sait le faire. Un Zorn inspiré, qui plus est dont les dissonances si couramment aperçues dans le catalogue sont ici gardées dans les limites de l'acceptable même pour les oreilles les plus sensibles. Et puis il y a les interprétations (et arrangements) d'Uri. On sait le garçon virtuose de son instrument et arrangeur malin et versatile (son Primal Light, version personnelle de certaines pièces de Mahler paru chez Winter & Winter, fait encore référence) et le moins que l'on puisse dire c'est qu'il ne nous déçoit pas ici. Que ce soit dans les pièces à la douce-amère saveur nostalgique, celles plus emportées ou celles plus complexes, il brille de tous ses feux.
Moloch n'est pas une œuvre aisée, ce n'est pas non plus un album où il est difficile de rentrer. Comme souvent chez Zorn c'est - à l'image de son créateur - un assemblage précieux et délicat qui, s'il peut s'écouter distraitement, ne livrera sa substantifique moelle qu'à ceux prêts à y donner toute leur attention. On y découvre alors moult détails et nuances qui en font tout l'attrait.

PS 12/2015 : Le plus raide des Livre des Anges mais pas le moins intéressant. Uri est un virtuose sensible en plus d'aimer l'exploration, et ça s'entend.

1. Rimmon 4:46
2. Domiel 3:55
3. Mehriel 4:30
4. Savliel 2:24
5. Tufrial 4:03
6. Jerazol 3:39 
7. Harshiel 3:34
8. Dumah 3:12
9. Harviel 5:00
10. Segef 1:57
11. Sahriel 4:59
12. Shokad 2:56
13. Zophiel 5:01   
14. Hayyoth 2:29
15. Nuriel 5:51
16. Ubaviel 5:17
17. Hadrial 4:41
18. Cassiel 2:37
19. Rimmon 6:14

Uri Caine: piano
John Zorn: composition, production

URI CAINE

n°10 : Jaune (la lumière du soleil)
Bar Kokhba "Lucifer: Book of Angels Volume 10" (2008)
ou "Diablement bon !"

Dans la série des Book of Angels de John Zorn, beaucoup s'accordent à dire que le Lucifer de Bar Kokhba est un des sommets... Voire LE sommet.
Il est vrai que Bar Kokhba, composé du Masada String Trio (Cohen, Feldman et Friedlander) additionné de quelques brillants pensionnaires de la maison Zorn, offre un équilibre et une grâce rarement atteints ailleurs dans le catalogue de l'hyperactif compositeur de Downtown. Cet exquis nectar jamais ne vrille oreille mais jamais, non plus, cède-il à trop de facilité. A vrai dire, cette musique, à la fois moderne et traditionnelle semble avoir été touchée par les Dieux. Des pizzicati et glissandi divins des cordes, des chaloupes rythmiques renversantes, de l'experte surf-guitar... Tout ici appelle à l'harmonie, à l'amour !
Il faut dire que John Zorn a, pour la circonstance, offert quelques unes de ses plus belles pièces et le fait est que jamais la déception ne pointe le bout de son vilain nez. C'est d'ailleurs aussi l'occasion de se rappeler le compositeur inspiré et mélodieux que Zorn peut (et sait !) être, lui à qui on accole plus facilement les qualificatifs de difficile, élitiste, abscons... Ce qui est preuve d'une méconnaissance crasse de sa discographie riche de mille facettes et dont le côté profondément mélodique n'est pas le moindre. Mais rien de tout ça ici. Le Bar Kokhba (enregistré en live en studio) est admirable de mélodie jusque dans ses emportements, qui sont nombreux et toujours bienvenus.
A ceux qui n'auraient pas encore goûté cet album exemplaire je dis « Veinards que vous êtes ! Comme j'aimerais moi aussi connaître de nouveaux les frissons qui me prirent à sa découverte ! ». Bien sûr, je l'aime encore énormément, comme on aime un charmant petit coin de campagne qu'on connait comme le dos de sa main et qu'on aime visiter régulièrement mais, la première fois... Ha ! La première fois !

PS 12/2015 : Mon Livre des Anges préféré ? C'est comme de me demander de choisir entre mon fils et ma fille, je pourrais m'y résoudre (wink wink) mais c'est douloureux. Un sommet, assurément.

1. Sother 5:58
2. Dalquiel 6:07
3. Zazel 3:22
4. Gediel 6:12
5. Rahal 3:49
6. Zechriel 7:53
7. Azbugah 3:02
8. Mehalalel 9:54
9. Quelamia 4:57
10. Abdiel 3:24

Cyro Baptista: percussions
Joey Baron: batterie
Greg Cohen: basse
Mark Feldman: violon
Erik Friedlander: violoncelle
Marc Ribot: guitare
John Zorn: composition, arrangements, production

MARC RIBOT

n°19 : Vert (la nature)
Shanir Ezra Blumenkranz "Abraxas: Book of Angels Volume 19" (2012)
ou "The Devil's Wonders"

Il n'est pas vraiment surprenant de voir Shanir Ezra Blumenkranz apparaître dans la série des Book of Angels. Vieux compagnon de route de John Zorn (alors qu'il n'a que 37 ans !) et collaborateur régulier du label Tzadik, il était écrit qu'il poserait un jour ses mains et son inspiration sur les compositions du maître sous son seul nom quand, avec le Banquet of the Spirits de Cyro Baptista ou le Rashanim de Jon Madof, il l'a déjà fait collectivement.
Musicalement, c'est une furieuse session dont nous sommes les témoins. Accompagné de deux guitaristes (Eyal Maoz et Aram Bajakian, tous deux publiant leurs travaux de leaders chez Tzadik) et d'un batteur (Kenny Grohowski, furieux et versatile), il nous propose une musique où se télescopent violemment jazz, klezmer et metal. Stylistiquement, il serait aisé de rapprocher cet Abraxas de l'Asmodeus de Marc Ribot dont il partage la centralité guitaristique et les emportements bruitifs et puissants, Abraxas n'en a pourtant ni l'approche minimaliste ni la froideur agressive. Si les guitares dépotent, que la batterie ne plaisante jamais et que Shanir himself envoie sérieusement le bois (qu'il soit à la basse ou au guembri), les chaloupements ne sont jamais bien éloigné d'une musique qui garde toujours un petit rayon de soleil dans son cœur. Ponctuellement, sur Yaasriel par exemple, le tempo se ralentit, le mood se fait plus pensif, plus rêveur... C'est une parfaite pause avant de réattaquer « dans le dur » avec un Muriel aux furieuses dissonances. Ces respirations, peu nombreuses mais ô combien salutaires !, permettent de jouir de leurs voisins excès avec un enthousiasme encore plus béat devant tant de maîtrise et de fougue. En bref, on en reste baba.
Abraxas, musiques de John Zorn et arrangements de Shanir Ezra Blumenkranz, est donc une réussite de plus dans la longue et glorieuse série du Livre des Anges dont on ne saurait trop recommander les précédents volumes. Un album sans compromis qui fera fuir les plus sensibles des tympans (tant pis pour eux !) et enchantera les autres devant les galipettes osées et rétablissements de chats noirs de ces quatre talentueux trublions.

PS 12/2015 : Un cas d'école de Zorn furieux et maîtrisé par des musiciens connaissant parfaitement leur sujet... Rock me again, Johnny Johnny Johnny !

1. Domos 4:00
2. Tse'An 4:09
3. Nachmiel 3:35
4. Yaasriel 5:22
5. Muriel 3:27
6. Maspiel 5:51
7. Aupiel 3:44
8. Nahuriel 4:57
9. Biztha 3:37
10. Zaphiel 5:21

Shanir Ezra Blumenkranz: guembri, arrangements
Aram Bajakian: guitare
Kenny Grohowski: batterie
Eyal Maoz: guitare
John Zorn: composition

EYAL MAOZ

n°16 : Turquoise (la magie/l'art)
Masada String Trio "Haborym: Book of Angels Volume 16" (2010)
ou "Volume 2"

Une première dans la série des Book of Angels ! Une formation, le Masada String Trio, remet le couvert et nous propose une nouvelle exploration klezmero-contemporaine de quelques pièces sélectionnées dans le second livre de Masada.
Tout de suite, on se demande quelle mouche à piqué ce bon John Zorn ? Lui si habitué au changement convoque de nouveau le violoniste Mark Feldman, le contrebassiste Greg Cohen et le violoncelliste Erik Friedlander (tous des réguliers de la maison Zorn en plus d'appartenir à la présente formation) à tenter d'égaler la magie d'Azazel, second album de la série et une de ses plus belles plages, accessoirement.
Forcément, avec pareil devancier, le challenge est de taille. Et si le Masada String Trio tutoie parfois les ses sommets passés, force est de constater qu'Haborym ne supporte que difficilement la comparaison. On y retrouve évidemment des musiciens hors-pair dans un univers qu'ils possèdent totalement. Oui mais, des mélodies un tout petit peu moins inspirées que pour le premier tour, un effet de surprise forcément écorné sont des facteurs objectifs qui handicapent une galette empiriquement tout à fait recommandable. De fait, deux choix s'imposent à nous : rejeter la création purement et simplement en ne la voyant que comme un exercice de facilité pour le mastodonte projet de l'album par mois que s'imposa Zorn en 2010 (ce qui serait se priver de quelques exquises pièces), ou le considérer comme un volume complémentaire d'une formation qui avait si bien réussi son premier que reprendre ainsi l'ouvrage tombait sous le sens.
Clairement, j'ai choisi le second camp, trop de grâce, d'intelligence et de virtuosité pour que je boude mon bonheur.

PS 12/2015 : Comment j'ai changé d'avis sur cet album, sans doute étais-je déçu de ne pas avoir un nouveau groupe dans le Livre des Anges... Avec le recul, il vaut le premier volume du trio, ce qui n'est pas peu dire !

1. Turel 6:20
2. Tychagara 3:39
3. Carniel 4:42
4. Bat Qol 2:56
5. Gamrial 6:40
6. Elimiel 3:04
7. Techial 2:05
8. Umikol 2:31
9. Malkiel 4:24
10. Raamiel 6:24
11. Gergot 3:48

Greg Cohen: basse
Mark Feldman: violon
Erik Friedlander: violoncelle
John Zorn: composition, arrangements, direction

ERIK FRIEDLANDER

n°8 : Bleu (la sérénité/l'harmonie)
Erik Friedlander "Volac: Book of Angels Volume 8" (2007)
ou "My Cello is rich!"

Pour ceux qui ne le connaitraient pas encore, Erik Friedlander est un violoncelliste fréquemment employé par John Zorn que ce soit dans ses filmworks, en musique contemporaine ou dans diverses formations de la galaxie Masada (Bar Kokhba, Masada String Trio). Cette fois, seul maître à bord, il a eu l'honneur de se voir confier un volume du livre des Anges (Masada Book Two), soit des compositions de Zorn ici arrangées et interprétées par Erik, seul.
Sur le papier, l'exercice pourrait faire peur - Pensez ! Un violoncelle et rien d'autre ! - le fait est que comme pour l'album d'Uri Caine dans la même série (Moloch, Book of Angels Volume 6), et ce malgré un instrument mélodiquement plus limité que le piano, le résultat, pour ascétique qu'il soit, est bourré d'un charme contagieux. Les arrangements de Friedlander y sont pour beaucoup, toujours respectueux des mélodies de Zorn, mais sans flagornerie, ils sont le parfait pendant de sa gigantesque maîtrise instrumentale (qu'il joue à l'archet ou aux doigts), et ce n'est pas peu dire. De fait, pas une fois on ne regrette l'absence d'autres instruments, le violoncelle de Friedlander se suffit ici amplement à lui seul, prend tout l'espace (sans l'envahir, un silence est une note, rappelons-le) et sert, avec une immense profondeur d'âme, une musique riche où se côtoient classique contemporain (parfois chaotique et cartoonesque, un aspect décisif de la grammaire zornienne) et « mélodisme » klezmer.
Pour avoir vu Friedlander jouer ces compositions sur scène (de la Salle Pleyel au Teatro Manzoni de Milan), je peux vous assurer que pas la moindre tricherie de studio ne se glisse dans cette extraordinaire performance, Erik est un cador, voilà tout, et Volac un indispensable que vous aimiez John Zorn, le violoncelle ou tout simplement la musique quand elle s'approche d'aussi près du divin.

PS 12/2015 : Chaque écoute est un ravissement, Friedlander est grand, vraiment !

1. Harhazial 4:36
2. Rachsiel 2:39
3. Zumiel 1:39
4. Yeruel 3:24
5. Sannul 1:18
6. Haseha 4:35
7. Kadal 3:51
8. Ahaniel 5:45
9. Ylrng 1:36
10. Anahel 4:18
11. Sidriel 3:01
12. Zawar 4:38

Erik Friedlander : violoncelle, arrangements
John Zorn: composition, production


n°15 : Violet (la sérénité/l'harmonie)
Ben Goldberg "Baal: Book of Angels Volume 15" (2010)
ou "Comfort Zone"

En réunissant des habitués de la série du Livre des Anges - le batteur Joey Baron, le pianiste Jamie Saft et le batteur Kenny Wollesen - autour du clarinettiste jazz/avant-garde Ben Goldberg (issu comme Zorn de la scène dite de Downtown et leader de l'excellent New Klezmer Trio en plus d'une prolifique carrière solitaire), Zorn ne prend pas franchement de risque collant au plus près à la grammaire originelle du projet Masada.
Il est vrai qu'au regard du récent et explosif Pruflas de David Krakauer, Baal a des allures d'enfant (trop ?) sage. Et de fait, là où Krakaueréparpille façon puzzle, Golberg charme... tout en douceur. Evidemment, sans diminuer la performance de chaque instrumentiste, le mérite revient majoritairement à un John Zorn qui, en plus de composer, dirige la formation et est l'auteur des arrangements. Cela va sans dire, cette musique, évocatrice du klezmer originel aussi bien que du free jazz, a ses dissonances et bizarreries, du type de celles dont les fervents de Zorn ont l'habitude. Ainsi a-t-on droit tant à de courtes et chaotiques saillies (Lahash) qu'à des pièces nettement plus contemplatives (Asimor ou Uzza, ce dernier joué par la seule clarinette de Goldberg) ou à de passionnants explorations aux confins du free jazz et du klezmer (l'introductif et explosif Chachmiel ou le dispersé Irin).
Rien que de très classique, en somme, et c'est sans doute ce qui empêche de considérer un album, autrement d'une fort belle tenue, comme une des œuvres les plus essentielles de ce second livre de Masada. Baal est cependant recommandé, plus qu'aux complétistes de la chose Zornienne, et plaira à tous ceux qui aiment leur jazz exploratoire mais néanmoins mélodique et accessible.

PS 12/2015 : Sur celui-ci mon avis n'a pas changé, ce n'est pas le plus excitant des Livres des Anges mais définitivement un bon album qui s'il ne surprend pas sait contenter.

1. Chachmiel 7:21
2. Asimor 4:27
3. Irin 4:32
4. Pharzuph 7:18
5. Lahash 2:52
6. Reqel 7:17
7. 'ifafi 5:09
8. Uzza 3:10
9. Poteh 5:55

Ben Goldberg: clarinette
Jamie Saft: piano
Greg Cohen: contrebasse
Kenny Wollesen: batterie
John Zorn: composition, arrangements, direction

BEN GOLDBERG

LiSTe CoMPLéMeNTaiRe

Rose (la sexualité)
Milemarker "Anaesthetic" (2001)
ou "Remontées de Synth"

Des caroliniens du nord qui poussent le post-hardcore dans ses ultimes retranchements synth-poppistes et new-waveux ? C'est Milemarker et leur 3ème album, le second pour le lable indépentant étatsunien de référence, Jade Tree.
En l'occurrence, Anaesthetic est court, en titres et en durée, 7 des premiers, 41 minutes des autres, avec un élément féminin nouvellement acquis (Monika Bukowska) apportant un vrai plus au style d'un groupe s'éloignant encore et toujours  des fondamentaux agressifs de ses racines pour développer une musique qui, sans tout à fait se départir de ses derniers oripeaux punkoïdes, a de notables ressemblances avec l'explosion de l'usage des synthétiseurs dans la musique anglaise de la fin des années 70 et des années 80.
Comme en plus, en colère post-punk, atours angulaires et synthétiseurs rappelant les heures de gloire de la synth-pop et de la new wave, les garçons et la fille savent produire des compositions tantôt directement accrocheuses (Shrink to Fit), tantôt sinueusement progressives (Ant Architect), il n'y a pas à hésiter plus longtemps pour recommander une formation et un album qui, si elle n'a pas réalisé tout le potentiel commercial qu'on percevait, n'a pas, malgré les ans et les modes passantes, pris une ride, bravo Milemarker !

1. Shrink To Fit 4:17 
2. Food For Worms 5:34 
3. A Quick Trip To The Clinic 4:46 
4. Lost The Thoughts But Kept The Skin 7:33 
5. Ant Architect 8:27 
6. The Fear Is Back In Town 2:46 
7. The Installment Plan 7:53 

Dave Laney - Guitar, Bass, Vocals, Drums, Computer
Al Burian - Bass, Guitar, Vocals, Synthesizer
Roby Newton - Vocals, Synthesizer
Monika Bukowska - Vocals, Synthesizer
Sean Husick - Drums, Fizmo

MILEMARKER

Rouge (la vie et la guérison)
Morcheeba "Big Calm" (1998)
ou "Trip-Pop"

Peut-être les plus abordables, les plus ear-friendly des groupes de la première vague dite Trip-Hop, Morcheeba sont à leur comment quand sort, en 1998, l'excellent Big Calm, plus belle pièce de leur discographie comme va nous l'expliquer JJ (XSilence.net) :
"Peut-être chaque groupe ou artiste n'a-t-il en réalité sorti qu'un seul disque, dont les autres en seraient l'écho plus ou moins lointain. Big Calm est de ceux-là. Bien sûr, Who Can You Trust est un très bon album, une réussite. Mais il faut sans doute le voir (ou l'entendre) comme une ébauche. Big calm est une oasis de pureté, de sérénité et de simplicité. En quelques morceaux, dont d'assez nombreuses véritables pépites, Morcheeba signe un album de référence trip pop [sic]. Si vous n'êtes pas de suite emballé, votre oreille le sera pour vous : les mélodies sont simples, belles et gaies, le travail de composition est remarquable. Sans parler de Skye Edwards, dont les vocalises (et surtout les inspirations!) sont absolument envoûtantes. Morcheeba a réussi à concevoir un album, il faut bien reconnaître, assez easy listening, mais qui en fait un atout majeur : chose plutôt rare, mais très significative.
L'art dans ses productions les plus magistrales s'est en général appuyé sur des sentiments mélancoliques, pessimistes, destructeurs ; quelques exceptions font entorse à la règle, et si en musique, ce sont les Beatles qui incarnent au mieux cet exemple, Morcheebaégalement arrive à nous envahir de gaieté et de sérénité, et d'une manière profonde ; chose rare donc, mais d'autant plus belle. Un album parmi les 5 plus importants du trip hop."
Voilà, c'est dit, vous savez ce qu'il vous reste à faire !

1. The Sea 5:47
2. Shoulder Holster 4:04
3. Part of the Process 4:24
4. Blindfold 4:37
5. Let Me See 4:20
6. Bullet Proof 4:11
7. Over and Over 2:20
8. Friction 4:13
9. Diggin' a Watery Grave 1:34
10. Fear and Love 5:04
11. Big Calm 6:00

Skye Edwards– vocals and reproduction
Paul Godfrey– navigation, programming, scratching, live drums and lyrics
Ross Godfrey– all guitars, sitar, pedal steel, lap steel, clavinet, Hammond, Fender Rhodes, Wurlitzer piano, drums, EMS synthesizer, MKS 80, and no factory presets
Pete Norris– sound surgery, synthesizer programming and dropping science

MORCHEEBA

Orange (la santé et la fierté)
Pet Shop Boys "Very" (1993)
ou "Golden Orange"

A part Depeche Mode, vous en connaissez beaucoup des groupes de synth-pop ayant résisté, parce qu'ils surent s'adapter et imposer leur qualité d'écriture, à l'extinction de la mode qui les avaient vu éclore ? Ha oui, il y a ce duo anglais de garçons bien propres sur eux et définitivement gay-friendly, les Pet Shop Boys qu'ils s'appellent. Et sur leur Very, leur cinquième galette studio, vous pouvez me croire sur parole, Tennant et Lowe n'ont pas perdu le truc.
Aussi, qu'il s'attaquent à une reprise des Village People (Go West), ou fassent dans leur habituel mélange de joie et de tristesse, parce qu'il y a toujours un petit pincement au cœur au milieu de leur fête, comme sur le single Can You Forgive Her? ou la déchirante ballade To Speak Is a Sin, ces deux gars-là, en la circonstance glorieusement entourés d'un casting au petits oignons, réussissent encore une fois le tour de force de faire du léger demeurant substantiel, de la pop à danser qui fait aussi vibrer l'âme. C'est d'ailleurs sans doute pour ça, parce que Neil et Chris, entertainers hors-pair comme tous ceux qui ont vu leur grand-messes synthétiques "in vivo", parvinrent à imposer leur Pet Shop Boys comme une formation qui compte alors que, factuellement, elle arrivait un peu sur la queue de la comète.
Et donc Very, galette sans le moindre faux-pas, vous est chaudement recommandé, que vous vous pensiez client du style pratiqué par ces messieurs ou pas. Oui, elle est juteuse à ce point là, cette orange d'exception.

1. Can You Forgive Her? 3:53
2. I Wouldn't Normally Do This Kind of Thing 3:03
3. Liberation 4:05
4. A Different Point of View 3:26
5. Dreaming of the Queen 4:19
6. Yesterday, When I Was Mad 3:55
7. The Theatre 5:10
8. One and One Make Five 3:30
9. To Speak Is a Sin 4:45
10. Young Offender 4:50
11. One in a Million 3:52
12. Go West 8:22

Neil Tennant
Chris Lowe
&
Pete Gleadall
– programming
J.J. Belle– guitar on tracks 3 and 12
Frank Ricotti– percussion on track 5
Phil Todd, Snake Davis, John Barclay, John Thirkell and Mark Nightingale– brass on track 12
Anne Dudley– orchestra arrangement and conduction on tracks 3, 5 and 7
Richard Niles– brass-, choir- and additional keyboard arrangement on track 12
Sylvia Mason-James– additional vocals on tracks 7, 11 and 12
Dainton Connell– additional vocals on track 8
Carol Kenyon– additional vocals on tracks 9 and 10
Katie Kissoon and Tessa Niles– additional vocals on track 10
Joanna Wyatt, Thomas Rogers, Laurie Smith, Hody Smith, Nigel Francis, Francis Hatson, Lee Harris, Lucy Clark, Marie-Claire Peterson and Victoria Ferher – choir on track 7
Scott Altman, James Bassi, Hugh Berberich, Rodne Brown, Maurizio Corbino, Martin Doner, Dan Egan, James Gandre, Paul Houghtaling, Michael Hume, Robert Kuehn, Drew Martin, Joseph Nelson Neal, Mark Rehnstrom, Steven Tachell and Frank Nemhauser. With thanks to Graeme Perkins and Jaqueline Pierce – choir on track 12

PET SHOP BOYS

Jaune (la lumière du soleil)
Hank Roberts "Everything Is Alive" (2011)
ou "Jazz de Chambre"

Partenaire récurrent de Bill Frisell ou Tim Berne, le violoncelliste Hank Roberts sort sont 8ème album solitaire toujours pour le label Winter&Winter. Pour le peu que je connaisse de l'oeuvre de Roberts, Everything Is Alive ne chamboulera pas la perspective qu'on a de sa (bonne) musique.
A l'image du premier morceau (le blues progresso-jazzé Crew Cut, qui n'aurait pas déparé sur un album de Caravan ou National Health), cette musique hybride, métissée de jazz, de folk, de blues et de tout ce qui lui passe par l'esprit et « colle à l'ambiance », est libre de toute étiquette. Il faut dire qu'avec un line-up impeccable (Bill Frisellà la guitare, Kenny Wollesenà la batterie et Jerome Harrisà la basse) et l'alternance d'une douce langueur communicative et d'un attractif chaos spécifique de sa musique, Roberts joue sur du velours. Contemplatif et serein dans ses plages les plus calmes et harmonieuses (Necklace), Everything Is Alive n'en devient pas pour autant un vrille-neurones imbittable quand les bizarreries arrivent comme sur Treats with a Blind Dog, sorte de country jazz ivre et cahotant où la fine équipe démontre un solide sens de l'humour.
Œuvre sensible, intelligente et libre, Everything Is Alive est avant tout une machine à rêver d'une résolue puissance où des musiciens experts et s'amusant visiblement beaucoup nous invitent au partage du résultat de leurs brillantes cogitations, un trip rendu d'autant plus vibrant qu'il est aidé par la proximité de la prise de son Et ça, franchement, ça ne se refuse pas.

1. Crew Cut 4:58
2. Cayuga 6:31
3. Easy's Pocket 4:52  
4. Treats With a Blind Dog  5:13  
5. Joker's Ace 5:34
6. Open Gate 8:11
7. Necklace 5:10
8. Jb 3:16  
9. Sapphire 7:41  
10. Sapphire Blue 3:02 

Hank Roberts: violoncelle, voix, violon "jazzaphone"
Bill Frisell: guitares électriques et acoustiques
Jerome Harris: guitare et basse acoustiques, voix
Kenny Wollesen: batterie, percussions

HANK ROBERTS

Vert (la nature)
Robert Wyatt "A Short Break" (1992)
ou "Robert en solitaire"

Aussi court que minimaliste, A Short Break a tout d'une collection de chutes de studio, normal !, c'en est ! Mais comme c'est de Robert Wyatt dont il s'agit (l'Ange à roulettes, le martien progressif, le sage entre l'éther et la terre), on ne boude pas son plaisir à savourer des ébauches dont la richesse laisse déjà béat d'admiration. Parce que, comme à son habitude, Robert fait du Wyatt, trouve des mélodies dont lui seul a le secret et, ultimement, ravit celles et ceux qui ne se lasseront décidément jamais de son art gracile et libre. Sans doute pas essentiel, A Short Break sera surtout recommandé aux zélotes et autres admirateurs transis d'un Homme qui mérite toutes les louanges qui lui sont régulièrement tressées, de la presse la plus "in" au geeky nerds à lunettes et cheveux gras peuplant la masse progressive.

1. A Short Break 4:14
2. Tubab 3:29
3. Kutcha 3:54
4. Venti Latir 5:11
5. Unmasked 3:35

Robert Wyatt (chant, piano, claviers, batterie)

ROBERT WYATT

Turquoise (la magie/l'art)
Thomas Fersen "Les Ronds de Carotte" (1995)
ou "Du neuf avec du vieux"

Après un premier album remarqué si encore un peu contrit, Thomas Fersen revient avec ce qui demeure une des plus belles pièces de sa pourtant très réussie discographie. Présentement, c'est Christian Larrède (Music Story) qui vous fait le détail:
"Dès la photo de pochette (signée Mondino), on comprend qu’il y a le réel et, juste à la marge, le monde de Thomas Fersen, un univers agencé avec une précision d’horloger mais qui, à l’instar de toute création artistique, ne répond qu’à ses propres règles. Des ronds de carotte, ce n’est pas grand-chose (et carotter, ce n’est pas bien), sauf pour un lapin.
Pour son deuxième album, celui qui n’est encore qu’un chanteur débutant, s’entoure en tout cas d’une équipe renouvelée (Joseph Racaille assure la production et on croise les silhouettes d’Arthur H, ou de Philippe Delettrez, saxophoniste et homme d’habillages musicaux). Mais ce qui ne change pas, c’est le goût du chanteur pour les ambiances acoustiques et les images décalées, comme une lecture approfondie des thèmes du premier album (Le Bal des Oiseaux, 1993).
En ouverture du disque, « Louise» reste comme l’une des plus belles chansons de Thomas Fersen et « Un parapluie pour deux» ou « Hugo, à la bougie» ne pédalent pas très loin derrière. Et puis, il y a, naturellement, cette « Bella ciao» empruntée à la mémoire des révolutionnaires italiens. Grand moment de frénésie en concert, l’hymne a au moins le mérite de faire voler en éclats des temps de frilosité et de recentrage. Et Thomas Fersen nous y rappelle que l’insurrection reste l’étape la plus captivante de la création artistique."
Définitivement, Thomas est l'une des plus sûres valeurs de la nouvelle chanson française, si vous n'avez pas encore été vous rafraichir à sa source pleine de fantaisie, il n'est que temps de réparer ce scandaleux oubli !

1. Louise 2:22
2. Au café de la paix 4:05
3. Hugo, chanson du cyclone 2:40
4. Les Ronds de carotte 2:44
5. Dans les transports 3:19
6. Un temps de chien 3:42
7. Ne pleure plus 4:05
8. Hugo, à la bougie 2:34
9. Pommes, pommes, pommes 3:47
10. Un parapluie pour deux 2:59
11. Pont Mirabeau 4:04
12. Bella Ciao 1:52
13. L'Histoire d'une heure 2:39
14. L'Escalier 1:45

Thomas Fersen - chant
Cyrille Wambergue - piano
Frank Ridacker - batterie
Jeff Pevar - guitare, dobro, mandoline
Bernard Viguié - contrebasse, basse
Pierre Sangra - guitare, violon
Michel Marin - harmonica, saxophone, flûte, guitare
Victor Durox - chant (6)
Vincent Frèrebeau - accordéon, tambourin, chœurs
Francis Aubier - trompette
Eric Louis - trombone
Florent Maupetit - cor
Philippe Czeladka - tuba
Gérard Augé, Thierry Neurantier - flûte
Patrick Verveille - clarinette
Catherine Bost - hautbois
Hervé Duhamel - basson
Marc Chantereau - percussions
Rodica Bogdanas, Sophie Stéphanica, François Polanswky, Laurence Dupuis, Rose-Marie Négréa - violon
Nathalie Carlucci, Jérôme Duchemin - alto
Marie-Christine Colmonc, Mariette Laport - violoncelle

THOMAS FERSEN

Bleu (la sérénité/l'harmonie)
Antony & the Johnsons "Antony & the Johnsons" (2000)
ou "Premiers sangs"

Retour sur les débuts d'Antony & the Johnsons, avant la gloire quoi, avec l'assistance de la plume de Stéphane Deschamps (Les Inrocks) qui en parle fort bien :
"Quand ils ont entendu I Am a Bird Now, le deuxième album d’Antony And The Johnsons, beaucoup ont pensé : tiens, un ange passe. Personne ne l’avait vu, mais Antonyétait déjà passé quelques années plus tôt, sur ce premier album enfin dignement distribué en France. A l’origine, Antony And The Johnsons est sorti en toute discrétion sur Durtro, le petit label de l’Anglais à tête chercheuse David Tibet. Réédité par Secretly Canadian, maison de qualité, Antony And The Johnsons n’est pas moins bon que I Am a Bird Now. Pas meilleur non plus. Mais aussi indispensable. L’enregistrement date de 1998, mais Antony chante déjà comme un lys humain, qui semble éclore et faner dans le même mouvement. Une créature fragile et majestueuse, un crooner lyrique au paradis, qu’on pourrait rapprocher de Klaus Nomi, Scott Walker, Jimmy Scott ou Elizabeth Fraser des Cocteau Twins. Ou qu’on pourrait aussi ne rapprocher de personne, tant Antony s’est affirmé comme un des rares talents singuliers du moment.
Inspirées par la musique classique, les orchestrations d’Antony And The Johnsons sont somptueuses, mais la production est un peu trop uniforme, conventionnelle. Antony nous expliquait un jour qu’il avait enregistré ce premier album en deux semaines ? contre deux ans et demi pour le second. Une sorte de premier jet, qui le propulsait d’entrée dans la stratosphère de la pop orchestrale. Grand fan de musique soul (Nina Simone, Otis Redding, Donny Hathaway sont dans son panthéon personnel), Antony a depuis eu la bonne idée, et le courage, d’intégrer des influences soul à sa musique blanche et un brin glaçante. Mais c’est surtout au niveau vestimentaire qu’il a fait de gros progrès : on le préfère vraiment période I Am a Bird Now, en brune lascive coiffée de la perruque de Keren Ann, plutôt qu’en version immaculée de La Denrée (Jacques Villeret) dans La Soupe aux choux."
Mais franchement, qu'importe le flacon pourvu qu'on l'ait l'ivresse parce que des premiers pas comme ça, ça n'arrive pas tous les jours. Aussi rare que précieux, donc, ce premier Antony & the Johnsons qu'on n'hésite pas à recommander, ardemment.

1. Twilight 3:49
2. Cripple and the Starfish 4:11
3. Hitler in My Heart 3:32
4. Atrocities 3:53
5. River of Sorrow 4:03
6. Rapture 3:57
7. Deeper than Love 4:40
8. Divine 3:13
9. Blue Angel 3:35

Bass - François Gehin
Cello - Vicky Leavitt
Clarinet - William Basinski
Clarinet, Saxophone - Barb Morrison
Drums - Todd Cohen
Engineer - Alan Douches, Erika Larsen, Rich Lamb, Roger Fife, Steve Regina
Flute - Mariana Davenport
Guitar [Effects] - Charles Neiland
Harp - Baby Dee
Mastered By - Denis Blackham
Violin - Cady Finlayson, Liz Maranville
Voice, Piano - Antony Hegarty

ANTONY & THE JOHNSONS

Violet (la sérénité/l'harmonie)
Nico Gori, Fred Hersch "Da Vinci" (2012)
ou "Jazz intime"

Da Vinci ou quand le minimalisme factuel d'une formation (duo en l'occurrence) vole en éclat à l'usage d'un album définitivement réussi.
Concrètement, rencontre du clarinettiste italien Nico Gori (un sideman récurrent de Stefano Bollani) et du pianiste américain Fred Hersch (Bill Frisell, Stan Getz, Charlie Haden, en tant que leader aussi, etc), fruit d'une amitié et d'une attirance artistique développées au fil de rencontres dans différents festivals, Da Vinci offre bien, comme son titre l'indique, une palette à la fois émotionnelle et savante où la maîtrise et la technique ne visent qu'à servir les mélodies (on n'en attendait pas moins de deux instrumentistes de cette trampe). Millimétrée et harmonieuse (toujours !), c'est une musique cousine du jazz qui en emprunte souvent la grammaire (mais pas toujours ou plutôt pas seulement) qui nous est ici dévoilée.
De fait, si l'inaugural Old Devil Moon (un standard) propose un jazz d'un extrême classicisme, et le fait très bien ceci dit en passant, le sel de la rencontre, l'attrait et la particularité de l'opus se retrouve définitivement plus dans des thèmes aussi cousins de la classique que du terrain habituellement occupé par les deux compères, musique qu'on taxera volontiers de jazz de chambre (dénomination tout sauf péjorative). Pour transformer le projet, il fallait bien entendu des compositions et ce sont justement elles (majoritairement signées de la main du pianiste) qui justifient, unissent pleinement et entièrement cette rencontre binationale, cette osmose entre un pianiste expert et son contrepoint soufflant.
Intime, forcément, le résultat ne déçoit jamais et s'impose comme un excellent compagnon de moments calmes où l'harmonie, ô combien bien employée par le duo, est une nécessité impérieuse.
Une beauté simple (mais pas simpliste) pour un album chaudement recommandé.

1. 2-5 7:37
2. Old Devil Moon 7:12
3. Mandevilla 6:10
4. Da Vinci 5:29
5. Doce De Coco 8:11
6. At The Close Of The Day 6:00
7. Down Home 6:25
8. Lee's Dream 6:30
9. Tea For Two 7:03
10. Hot House Flower 4:24

Nico Gori: clarinette
Fred Hersch: piano

NICO GORI, FRED HERSCHhttp://mangemesdix.blogspot.com/2015/12/pride-of-angels-le-livre-lgbt-des-anges.html?showComment=1450481856253#c8774464149139695889

Double Dose de Plaisir (Volume 2)

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Une double dose de plaisir pour un Noël anticipé ? Parce qu'on ne fait pas les choses à moitié chez le Zornophage ! Vous y retrouverez d'énormes classiques (tellement classiques que je n'y ai même pas mis d'extrait) et d'autres, plus récents, que vous ne connaissez sans doute pas encore. Allez, Ho Ho Ho, Joyeux Noël et toutes ces sortes de choses, et, bien-sûr, Enjoie !

BoB Deluxe
Bob Dylan "Blonde on Blonde" (1966)
ou "Double Blonde"

C'est un Bob Dylan au sommet de sa gloire, au summum de son inspiration aussi. C'est un Bob Dylan qui a gagné la bataille de l'électricité, trouvé un nouveau public et imposé une liberté de ton inhabituelle dans une scène folk dont il s'éloigne de plus en plus. C'est un Bob Dylan bien entouré, enfin, et donc prêt à en découdre sur une double galette noire depuis dûment entrée dans la légende, Blonde on Blonde, évidemment.
Présentement, sur les talons de deux albums qui ont affiché sa notable évolution, nommément Bring It All Back Home et Highway 61 Revisited, Dylan a une pression phénoménale sur ses frêles épaules tant tout le monde ou presque s'attend à ce qu'il ne parvienne pas à maintenir l'hallucinant niveau dont il fait montre depuis le tout début de sa carrière discographique, 4 ans et demi plus tôt seulement. C'est avec un double album que le Zim' réalise son tour de force, le premier du genre dans la musique populaire destiné à un public plutôt jeune ceci dit en passant, un sacré pari relevé par un artiste dont l'inspiration ne se dément nullement. Parce qu'il faut le dire, avec un groupe évoluant de celui employé sur les deux fameuses galettes précédentes, Bobépate par les trésors qu'il est encore et toujours capable de délivrer. Des textes, bien-sûr, parce que la plume du petit gars de Duluth est une des plus sûres de son époque, des mélodies aussi parce que si Dylan n'est objectivement pas le plus grand vocaliste de la création, les limitations de son timbre n'amoindrissent en aucun cas la porté harmonique de sa production. Ainsi a-t-on droit à quelques morceaux destinés à devenir d'authentiques classiques (Rainy Day Women #12 & 35, I Want You et Just Like a Woman sur lesquels il n'est pas besoin de faire l'article) entourés d'une sélection qui, franchement, en impose. A titre informatif, on citera Visions of Johanna (une déchirante ballade), Stuck Inside of Mobile with the Memphis Blues Again (où ce diable prouve que le blues est aussi, encore et toujours, dans ses divines cordes), Absolutely Sweet Marie (où Bob prouve qu'il sait aussi faire de la pop) ou Sad Eyed Lady of the Lowlands (une longue ballade dit-on dédicacée à sa chérie d'alors) mais, vraiment, c'est toutes les pistes de cette mine à chansons précieuses qui méritera votre attention pointilliste et, conséquemment, récoltera votre absolue admiration.
Blonde on Blonde, c'est aussi un Bob Dylan qui brûle le cierge de son inspiration par les deux bouts ce qui ne tardera pas à annoncer des heures moins enthousiasmantes, mais pas avant d'avoir dûment exploré des racines étatsuniennes traditionnelles (John Wesley HardingNashville Skyline) pour le magnifier. Blonde on Blonde c'est aussi, surtout !, une immanquable galette d'un artiste essentiel, mais ça, vous le saviez déjà.

1. Rainy Day Women #12 & 35 4:36
2. Pledging My Time 3:50
3. Visions of Johanna 7:33
4. One of Us Must Know (Sooner or Later) 4:54
5. I Want You 3:07
6. Stuck Inside of Mobile with the Memphis Blues Again 7:05
7. Leopard-Skin Pill-Box Hat 3:58
8. Just Like a Woman 4:52
9. Most Likely You Go Your Way And I'll Go Mine 3:30
10. Temporary Like Achilles 5:02
11. Absolutely Sweet Marie 4:57
12. 4th Time Around 4:35
13. Obviously 5 Believers 3:35
14. Sad Eyed Lady of the Lowlands 11:23

Bob Dylan– vocals, guitar, harmonica, piano
&
Bill Aikins
– keyboards
Wayne Butler– trombone
Kenneth Buttrey– drums
Rick Danko or Bill Lee– bass guitar (New York)
Bobby Gregg– drums (New York)
Paul Griffin– piano (New York)
Jerry Kennedy– guitar
Al Kooper– organ, guitar
Charlie McCoy– bass guitar, guitar, harmonica, trumpet
Wayne Moss– guitar, vocals
Hargus "Pig" Robbins– piano, keyboards
Robbie Robertson– guitar, vocals
Henry Strzelecki– bass guitar
Joe South– bass guitar, guitar

BOB DYLAN

PSyCHéBLue
The Jimi Hendrix Experience "Electric Ladyland" (1968)
ou "Jimiland"

Progmonster de chez Guts of Darkness :
"Riche. Intense. Intelligent. Puissant. Mystique. Il doit manquer des milliers de pages à mon dictionnaire puisque je me retrouve tout à coup à cours d'adjectifs mélioratifs pour tenter seulement de vous décrire le torrent d'émotion qui vous submerge à l'écoute de ce disque mythique. Ce n'est pas possible autrement.
Non, je ne deviens pas gâteux. Je ne vous écris pas sous l'effet d'une soudaine nostalgie de vieux soixante-huitard mal embouché, chose que je ne suis pas d'ailleurs (pas embouché, soixante-huitard je veux dire). Parce que, merde quoi, il ne s'agit pas de n'importe quoi ! Je vous parle de "Electric Ladyland", le double album de la fin des années soixante qui surpasse facilement tous les autres. Un monument de musique pop qui revisite à coup de baguette magique tout ce qui fût, tout ce qui est et tout ce qui sera. Ce disque a tout simplement des allures de chef-d'oeuvre visionnaire ou chaques notes se revêtissent d'une importance capitale, tout en s'abandonnant à l'insouciance et à l'urgence de l'instant.
Bon, ouais, ça va, j'avoue, "Little Miss Strange" fait peut-être exception à cette règle d'excellence qui habite le troisième disque de l'Experience. Mais on peut se dire aussi que ce titre, s'il est présent, l'est de manière tout à fait emblématique, comme dernière trace d'une époque à jamais révolue. Car après cette pause légère (en fait, bien venue après ce sommet de blues psychédélique qu'est "Voodoo Chile", jouissant de plus des interventions lumineuses de l'organiste de Traffic, Steve Winwood), on repart de plus belle avec une série de titres toujours aussi terriblement accrocheurs, remplis de pépites d'inventivités tant harmoniques que rythmiques à vous en donner le vertige. Ce sont l'adaptation musclée du "Come On (Let the Good Times Roll)" de Earl King, "Gypsy Eyes", "Burning of the Midnight Lamp" et "Rainy Day, Dream Away", autant d'incontournables du songbook d'Hendrix. Mais on n'est pas au bout de nos peines ; avant de refermer le disque sur d'autres monuments laissés au patrimoine de l'humanité ("House Burning Down", sa version du "All Along the Watchtower" de Dylan et le célebrissime "Voodoo Child"), s'intercale le vrai gros morceau de la session. J'ai nommé "1983", sa suite en deux parties, qui pourrait bien suffire à toute personne désireuse de goûter au progressif sans se risquer à s'y plonger d'avantage. Jazz, psyché, rock, tout est là, tout ça à la fois.
Toute cette part de notre culture musicale réunit et extrapolée en un peu moins d'une heure et vingt minutes. "Electric Ladyland" serait-il donc l'album parfait ? Je ne suis pas loin de le penser. Et vous ?"
...J'aurais pas mieux dit.

1. ...And the Gods Made Love 1:21
2. Have You Ever Been (To Electric Ladyland) 2:11
3. Crosstown Traffic 2:25
4. Voodoo Chile 15:00
5. Little Miss Strange 2:52
6. Long Hot Summer Night 3:27
7. Come On (Part I) 4:09
8. Gypsy Eyes 3:43
9. Burning of the Midnight Lamp 3:39
10. Rainy Day, Dream Away 3:42
11. 1983... (A Merman I Should Turn to Be) 13:39
12. Moon, Turn the Tides... Gently Gently Away 1:02
13. Still Raining, Still Dreaming 4:25
14. House Burning Down 4:33
15. All Along the Watchtower 4:01
16. Voodoo Child (Slight Return) 5:12

Jimi Hendrix– lead vocals, guitar, piano, percussion, comb and tissue paper kazoo, electric harpsichord, bass on "Have You Ever Been (To Electric Ladyland)", "Long Hot Summer Night", "Gypsy Eyes", "1983", "House Burning Down", and "All Along the Watchtower"
Noel Redding– backing vocals, bass on "Crosstown Traffic", "Little Miss Strange", "Come On (Let the Good Times Roll)", "Burning of the Midnight Lamp", and "Voodoo Child (Slight Return)", acoustic guitar and lead vocals on "Little Miss Strange"
Mitch Mitchell– backing vocals, drums (except on "Rainy Day Dream Away" and "Still Raining, Still Dreaming"), percussion, lead vocals on "Little Miss Strange"
&
Jack Casady
– bass on "Voodoo Chile"
Brian Jones– percussion on "All Along the Watchtower"
Al Kooper– piano on "Long Hot Summer Night"
Dave Mason– twelve string guitar on "All Along the Watchtower", backing vocals on "Crosstown Traffic"
The Sweet Inspirations– backing vocals on "Burning of the Midnight Lamp"
Steve Winwood– organ on "Voodoo Chile"
Chris Wood– flute on "1983... (A Merman I Should Turn to Be)"
- On "Rainy Day, Dream Away" and "Still Raining, Still Dreaming":
Larry Faucette– congas
Mike Finnigan– organ
Buddy Miles– drums
Freddie Smith– tenor saxophone


THE JIMI HENDRIX EXPERIENCE

FRee SToNeS
The Rolling Stones "Exile on Main St" (1972)
ou "Blue Exile"

Grand album de blues rock malade d'un combo en exil forcé pour diverses et peu reluisantes raisons fiscales et judiciaires, Exile on Main St est, surtout !, le grand chef d'œuvre de la seule mouture des Rolling Stones à avoir jamais possédé un authentique guitar-hero dans ses rangs, celle avec Mick Taylor, évidemment.
Dans les faits, l'album final est un collage de trois sessions s'étalant de 69 à 72, un collage qui, mis bout à bout, fait totalement sens, un collage qui recadre les Rolling Stones dans ce qu'on attend fondamentalement d'eux, une version sale gosse british du rock et du blues américain, ce qu'explicite divinement la pochette... en collage. Cette cohérence de ton, malgré l'espacement des enregistrements donc, ce côté à la fois laid-back et énervé, on s'en fout mais on va tous péter !, est la force de ces dix-huit chansons bricolées avec moult guests venu palier les absences de, surtout, Bill Wyman et Charlie Watts sans doute trop occupés à mener la belle vie sur la Côte d'Azur, lieu d'élection de leur doux exil. Et donc, ce qui devrait être un grand fourre-tout, le Double Blanc de Jagger/Richards, s'avère le plus aboutis, le plus poisseux aussi, des albums de ces londoniens à nuls autres pareils. En chanson, ça donne une très solide collection, ce n'est pas toujours le cas chez les Rolling Stones, où quelques pépites se démarquent tout de même : Rocks Off où le riff typique de Richards et la morgue bluesy de Jagger font tellement merveille qu'on n'aurait presque pas besoin de ce piano honky-tonk, des ces cuivres staxiens en diable et de la guitare de Mick mais si en fait, Tumbling Dice qui sait pousser ces Pierres Qui Roulent dans leurs derniers retranchements soul'n'blues, Tom and Frayed en impeccable country rock à faire pâlir d'envie tous ceux, nombreux !, qui s'adonnent alors à l'exercice, ce Ventilator Blues rampant en résurgence de Chicago via le Delta qui confirment que les angliches "ont des lettres" et les moyens de leurs envies, Let It Loose en magnifique ballade rock rondement menée et si joliment enrichie d'aptes flaveurs gospel qu'on n'y résiste pas, ou Shine a Light où, vraiment !, Taylor est trop bon pour qu'on ne le dise pas... Comme ces perles articulent un album dans réel faux-pas, quelques dérapages contrôlés, ça oui !, le bonheur est évidemment au bout du chemin.
Exile on Main Street ? C'est sans le moindre doute la dernière grande-œuvre des Rolling Stones, un album séminal et essentiel, et pas seulement pour les afficionados du groupe, un album que tout amateur de rock qui se respecte se doit de posséder dans sa collection, un immense classique, quoi.

1. Rocks Off 4:31
2. Rip This Joint 2:22
3. Shake Your Hips 2:59
4. Casino Boogie 3:33
5. Tumbling Dice 3:45
6. Sweet Virginia 4:27
7. Torn and Frayed 4:17
8. Sweet Black Angel 2:54
9. Loving Cup 4:25
10. Happy 3:04
11. Turd on the Run 2:36
12. Ventilator Blues 3:24
13. I Just Want to See His Face 2:52
14. Let It Loose 5:16
15. All Down the Line 3:49
16. Stop Breaking Down 4:34
17. Shine a Light 4:14
18. Soul Survivor 3:49

Mick Jagger– lead vocals, harmonica, percussion; guitar on "Tumbling Dice" and "Stop Breaking Down"
Keith Richards– guitars, backing vocals; lead vocals on "Happy"; electric piano on "I Just Want to See His Face"; bass guitar on "Casino Boogie", "Happy" and "Soul Survivor"
Mick Taylor– guitars, slide guitar; bass guitar on "Tumbling Dice", "Torn and Frayed", "I Just Want to See His Face" and "Shine a Light"
Bill Wyman– bass guitar
Charlie Watts– drums
&
Nicky Hopkins
– piano
Bobby Keys– saxophone, percussion on "Happy"
Jim Price– trumpet, trombone, organ on "Torn and Frayed"
Ian Stewart– piano on "Shake Your Hips", "Sweet Virginia" and "Stop Breaking Down"
Jimmy Miller– drums on "Tumbling Dice" (the outro), "Happy" and "Shine a Light", percussion on "Sweet Black Angel", "Loving Cup", "I Just Want to See His Face" and "All Down the Line"
Bill Plummer– upright bass on "Rip This Joint", "Turd on the Run", "I Just Want to See His Face" and "All Down the Line"
Billy Preston– piano and organ on "Shine a Light"
Al Perkins– pedal steel guitar on "Torn and Frayed"
Richard Washington– marimba on "Sweet Black Angel"
Clydie King, Venetta Fields– backing vocals on "Tumbling Dice", "I Just Want to See His Face", "Let It Loose" and "Shine a Light"
Joe Green– backing vocals on "Let It Loose" and "Shine a Light"
Gram Parsons– backing vocals on "Sweet Virginia"
Chris Shepard– tambourine on "Turd on the Run"
Jerry Kirkland– backing vocals on "I Just Want to See His Face" and "Shine a Light"
Mac Rebennack, Shirley Goodman, Tami Lynn– backing vocals on "Let It Loose"
Kathi McDonald– backing vocals on "All Down the Line"

THE ROLLING STONES

UNDeR WaTeRS
Pink Floyd "The Wall" (1979)
ou "Concept névrotique"

Sous la coupe d'un Roger Waters plus que jamais en contrôle de la destiné d'un quatuor qu'il considère désormais comme le véhicule de sa cafardeuse inspiration, Pink Floyd produit le dernier grand concept album de 70s finissantes, à une époque où, punk oblige, le format, et le style psychédélico-progressif pratiqué par le groupe, n'a plus vraiment le vent en poupe. Vous y êtes ? Alors place aux mots d'Oli de W-Fenec :
"The Wall est l'album d'une vie, celle de Roger Waters, un concept album autobiographique qui interpelle le monde en 1979 mais qu'il avait en tête depuis toujours. Avant de se lancer dans l'écriture finale de l'album, il avait présenté deux idées : celle-là, sombre et personnelle et une autre The Pros and Cons of Hitch-Hiking, concept album construit autour d'un auto-stoppeur, album qu'il enregistrera plus tard en solo. L'histoire de Waters, mûre, s'est imposée. En même temps que la musique, il imagine un film mais le projet qui est devenu un double album est suffisamment ambitieux... le film viendra deux ans plus tard (une fois le succès assuré) avec les incroyables participations de Bob Geldorf (le rôle de Pink), Gerald Scarfe (dessinateur) et Alan Parker (réalisateur). The Wall est le résultat de l'enfance de Roger et de sa starisation. Il se construit un mur, son mur à l'intérieur duquel il est prisonnier. Les briques qui le façonnent sont la guerre avec ses incertitudes et ses bombes ("Goodbye Blue Sky", "Vera", "Bring the Boys Back Home"), la guerre qui lui prend son père ("Another Brick in the Wall - part 1"), sa mère ultra possessive et protectrice ("Mother"), le système éducatif anglais qui réprime sa créativité ("Another Brick in the Wall - part 2"), puis les problèmes relatifs à la célébrité ("In the Flesh", "The Show Must Go On") et l'explosion de son couple ("Young Lust", "Nobody Home"). Face à tout cela, Roger n'arrive à pas à réagir, ne trouve pas les moyens de fuir comme il le conseille dans un délire mégalomaniaque ("Run Like Hell"), il s'enferme, culpabilise, tente de se suicider ("Goodbye Cruel World"), il attend la fin, sa fin ("Waiting for the Worms").
L'album est sombre, violent ("In the Flesh ?"), formidablement triste ("The Thin Ice", "Hey You", "Outside the Wall"), on s'apitoie sur un Roger isolé, incompris, qui cherche désespérément un peu de réconfort ... il le trouve dans "Comfortably Numb", rare titre (Roger Waters a quasiment tout écrit seul) où David Gilmour (qui n'a pas autant de tourments !) participe, il l'enrichit majestueusement de parties de guitares magistrales, Wright, plus discret, joue sur les atmosphères et la tension pendant que Mason alterne retenue et défoulement ("Run Like Hell").
The Wall est la psychanalise de Waters interprétée par un Pink Floyd qui nous offre un nouveau visage : le chant n'a jamais eu autant d'importance, l'ambiance n'a jamais été aussi glauque ("Don't Leave Me Now"), jamais un album n'avait mis aussi mal à l'aise son auditeur.
Le succés est lui, toujours aussi planétaire, dans certains pays les étudiants contestataires s'approprient "Another Brick in the Wall - part 2", les autorités interdisent la vente de l'album..., aujourd'hui encore ce titre est connu de tous (we don't need no education) et subi des reprises plus ou moins heureuses (de Pearl Jamà Artsonic en passant par Class of '99 et des DJs innommables). Cet album de a contribué à l'écriture de la légende Pink Floyd et clôt le dernier grand chapitre, The Final Cut, sorte de suite malheureuse de The Wall (la guerre et le père de Waters y étant omniprésents) marquant plus le début de la carrière solo de Waters que la fin de celle du groupe dont il vient de prendre (et perdre) définitivement possession.
"
On précisera que, remasterisation dernière génération oblige, c'est aussi à un festin sonore, de ceux qui font oublier la galette noire originelle, pas moins !, dont il s'agit. A vos souris, en gros !

CD 1
1. In the Flesh? 3:16
2. The Thin Ice 2:27
3. Another Brick in the Wall (Part I) 3:21
4. The Happiest Days of Our Lives 1:46
5. Another Brick in the Wall (Part II) 3:59
6. Mother 5:32
7. Goodbye Blue Sky 2:45
8. Empty Spaces 2:10
9. Young Lust 3:25
10. One of My Turns 3:41
11. Don't Leave Me Now 4:08
12. Another Brick in the Wall (Part III) 1:48
13. Goodbye Cruel World 0:48

CD 2
1. Hey You 4:40
2. Is There Anybody Out There? 2:44
3. Nobody Home 3:26
4. Vera 1:35
5. Bring the Boys Back Home 1:21
6. Comfortably Numb 6:23
7. The Show Must Go On 1:36
8. In the Flesh 4:15
9. Run Like Hell 4:20
10. Waiting for the Worms 4:04
11. Stop 0:30
12. The Trial 5:13
13. Outside the Wall 1:41

Roger Waters - bass, vocals, rhythm guitar, synthesizers, sound effects
David Gilmour - lead and rhythm guitars, vocals, bass, synthesizers
Nick Mason - percussion
Richard Wright - piano, hammond organ, electric piano, synthesizers, bass pedals
&
Bruce Johnston
– backing vocals
Toni Tennille– backing vocals
Joe Chemay– backing vocals
Jon Joyce– backing vocals
Stan Farber– backing vocals
Jim Haas– backing vocals
Children of Islington Green School– vocals
Bob Ezrin– piano, hammond organ, synthesizers, reed organ, backing vocals
James Guthrie– percussion, synthesizer, sound effects
Jeff Porcaro– drums
Joe Porcaro, Blue Ocean & 34 others– snare drums
Lee Ritenour– guitars
Joe (Ron) di Blasi– classical guitar
Fred Mandel– hammond organ
Bobbye Hall– congas, bongos
Frank Marrocco– concertina
Larry Williams– clarinet
Trevor Veitch– mandolin
New York Orchestra– orchestra
New York Opera– choral vocals
Unnamed children's choir from New York– children’s choral vocals
"Vicki & Clare"– backing vocals
Harry Waters– child's voice, "Goodbye Blue Sky"
Chris Fitzmorris– male telephone voice
Trudy Young– voice of the groupie
Phil Taylor– sound effects

PINK FLOYD

RoYaL !
Prince "Sign "O" the Times" (1987)
ou "Funk progress"

Il en parle tellement bien de ce Signe O' the Times de Roger "Prince" Nelson, Korama de chez Forces Parallèles, que, sans coup férir, je lui laisse la main :
"Nous voici donc en 1987, et Prince, désormais seul aux manettes, sort son nouvel album un an tout pile après Parade. Sign O' The Times : le disque de tous les classements, de toutes les discothèques idéales, de tous les superlatifs. Pourquoi une telle unanimité ?
Peut-être parce que Sign O' The Times est en réalité le “best of” de trois projets refusés par Warner, signant le début des bisbilles entre l’artiste et sa maison de disque : le double Dream Factory concocté en 1986 avec The Revolution, le side project Camille, alter égo féminin de Prince interprété par Prince lui-même et dont la voix est pitchée dans les aigus, et le triple Crystal Ball regroupant ces deux précédents projets en y ajoutant des nouveautés. Devant le refus de Warner de sortir un triple album, Prince n’a d’autre choix que de le réduire à un double. Il conserve 15 titres triés sur le volet du projet Crystal Ball, et enregistre un duo avec Sheena Easton. Ça donnera le 16ème titre, “U Got The Look”.
Peut être parce que Sign O' The Times est aussi un album somme. Un véritable catalogue de genres musicaux, retraçant trente ans de musique populaire tout en se payant le luxe d’être novateur. C’est bien simple, tout y passe :
- de la soul à la Curtis Mayfield ? “Slow love” et “Adore”. Check.
- de la ritournelle pop à la Beatles ? “Starfish and Coffee” et “Strange Relationship”. Check.
- un petit hommage jazzy à Joni Mitchell ? “The Ballad Of Dorothy Parker”. Check.
- du funk robotique façon Herbie ? “It” et “Hot Thing”, deux techno-funk minimalistes avec une grosse louche de sexe pour faire bonne mesure. Check.
- du blues 21eme siècle ? “Forever In My Life”. Avec en plus, une petite subtilité qui en fait tout le sel : les chœurs sont constamment en avance sur ce que prononce le lead. Inversion des rôles. Check.
- du rock à guitare virant hymne de stade ? “I Could Never Take The Place of Your Man”, mais surtout “The Cross” qui démarre dans un quasi silence pour terminer en explosion de guitares (on en fait des belles choses avec un Mi et un La…). Check.
- de la pop efficace calibrée charts ? “U Got The Look”. Check.
- du jam funk festif ? “It’s Gonna Be A Beautiful Night”, premier titre live paru officiellement sur disque, et c’est en France que cela a été capturé (Paris 1986) ! Check.
Peut être enfin parce que Sign O' The Times possède en son sein de véritables osnis (objets sonores non identifiés) - enfin, des trucs encore plus bizarres que le reste du disque, pour être exact. Des titres qui font que cet album est définitivement ailleurs et écrase forcément la concurrence de l’époque.
Commençons par le titre qui ouvre l’album et donne son nom à cet opus, je veux bien sûr parler de “Sign O' The Times”. Un beat de Linn Drum, des percussions synthétiques, et ce “Oh yeah” qui résonne comme une invitation. Et là, Prince nous envoie sa chanson la plus politique depuis un bail. Prince devient, le temps d’un titre, un Dylan funk, évoquant tour à tour le sida, l’explosion de Challenger, les homeless, la drogue… Dance on man ! Sur ce rythme robotique, une guitare se balade, comme autant de ponctuations d’un discours désabusé. Cette guitare se fera hargneuse dans les versions live. La chronique du déclin du rêve américain.
Deuxième ovni, “Housequake”. Mais c’est quoi, ça ! C’est funk, c’est jazz, et ça renvoie le rap naissant à ses chères études. C’est autre chose, on ne sait pas quoi, mais c’est unique. Ce titre, c’est l’essence de Prince. Un morceau qui est toujours d’actualité, vingt cinq ans après sa sortie.
Enfin, troisième morceau d’exception, le troublant “If I Was Your Girlfriend”, attribué à Camille. Drôle de morceau construit sur une basse slappée sur fond de nappe synthétique, un beat de Linn Drum et un motif mélodique au clavier doté d’un son d’accordéon. Et les voix de Prince, la lead étant pitchée dans les aigus alors que les chœurs étant pitchés dans les graves. De tant d’artifices devrait naître une certaine distance, mais c’est au contraire toute une humanité, toute une sensibilité étrange qui se dégage, les lyrics renforçant la confusion des sentiments et des genres.
Voila peut être pourquoi Sign O' The Times est, encore aujourd’hui, classé parmi les disques incontournables. Alors, doit on se féliciter du choix de la Warner d’avoir refusé les autres projets ? Au vu du résultat, on serait tenté de dire oui. Mais à la vérité, quand on connait les titres écartés - et qui sortiront quasiment tous dans les années qui suivront - Prince avait largement de quoi remplir un triple album qui tienne la route. Tout simplement parce que sa boulimie créatrice était sans limite durant cette période, et qu'il était intouchable, tout comme son modèle Stevie Wonder dominait outrageusement la musique entre 1972 et 1976.
"
Personellement, ça demeure mon Prince préféré, celui où les expérimentations de son passées se rencontrent et s'épousent en un tout ô combien recommandable que, si vous l'avez jusqu'à ce jour manqué, c'est mal !, je ne puis que chaudement vous conseiller.

CD 1
1. Sign o' the Times 4:57
2. Play in the Sunshine 5:05
3. Housequake 4:42
4. The Ballad of Dorothy Parker 4:01
5. It 5:09
6. Starfish and Coffee 2:50
7. Slow Love 4:22
8. Hot Thing 5:39
9. Forever in My Life 3:30

CD 2
1. U Got the Look 3:47
2. If I Was Your Girlfriend 5:01
3. Strange Relationship 4:01
4. I Could Never Take the Place of Your Man 6:29
5. The Cross 4:48
6. It's Gonna Be a Beautiful Night 9:01
7. Adore 6:30

Prince - all vocals and instruments except as noted below
Wendy Melvoin - guitar and backing vocals (7), tambourine and congas (12, 15)
Lisa Coleman - backing vocals (7), Fairlight sitar and wooden flute (12), keyboards and backing vocals (15)
Sheila E. - drums and percussion (10), percussion and rap (15)
Dr. Fink - keyboards (15)
Miko Weaver - guitar (15)
Brown Mark - bass (15)
Bobby Z. - drums (15)
Eric Leeds - saxophone (3, 7, 8, 15, 16)
Atlanta Bliss - trumpet (3, 7, 15, 16)
Susannah Melvoin - backing vocals (2, 4), vocals (15)
Jill Jones - vocals (15)
Sheena Easton - co-lead vocals (10)

PRINCE

BRiT aNGST
Manic Street Preachers "Generation Terrorists" (1992)
ou "Punk's Not Dead"

Oser un double album studio dès son premier opus, il faut être un peu punk, carrément décadent et assurément plein de morgue et d'envie pour s'y essayer. Ca tombe bien c'est exactement le cas d'un quatuor gallois répondant au doux nom de Manic Street Preachers.
Mais quelle est exactement l'ambition de ces quatre gars quand ils se lancent dans un projet semblant destiné à rabibocher le plus "pomp" du rock avec l'éthos punk d'un Clash ? Et comment parvenir à réaliser telle tour de force quand on n'en est, fondamentalement, qu'au tout début d'une carrière prometteuse, le MSP s'étant fait un nom avant de signer chez la major Columbia ? En ne faisant rien comme tout le monde, forcément ! En ayant un guitariste/parolier, Richey Edwards, qui ne chante pas ni ne joue de guitare sur l'album, icelles enregistrées par le chanteur, James Dean Bradfield, en osant, de la power-ballade la plus typique qui soit (Motorcycle Emptiness, un machin à deux doigts de Whitesnake, carrément !), du riff à la Keith Richards pour un post-glam réussi (Slash 'n' Burn), du stadium rock grungisé de compétition (You Love Us), une lecture très personnelle de l'electro (Repeat (Stars and Stripes) ou les Manic Beaties pour situer), ou de la pop (ici punkisée) comme ils en réussiront beaucoup quelques années plus tard (So Dead)... En élargissant, en s'essayant à tous les possibles sur une base rock hard en solide et utile fondation ce que confirme dès son titre l'ultime chanson de l'opus originel, Condemned to Rock 'n' Roll. Une belle collection de mec "qui en ont".
Et puis il y a les bonus, édition Deluxe commémorative du 20ème anniversaire de l'album oblige, et là, majoritairement grâce aux moult démos préparatoires de l'album, on peut constater des changements, des enrichissements, une faim grandissante de faire du punk rock théâtral qui séduira surtout les vrais fans du groupe, les autres, passée une première écoute amusée, relègueront la chose au rang des souvenirs.
Presque aussi têtes à claques qu'Oasis (ça s'est amélioré depuis pour les gallois), mais tellement plus talentueux, c'est l'évidence dès ce premier long-jeu aux ambitions pas toutes réalisées mais terriblement gonflées, les Manic Street Preachers s'installaient, en 1992, comme une force avec laquelle il allait falloir compter dans le petit monde du rock britannique, prédiction depuis largement confirmée.

CD 1 - Album
1. Slash 'n' Burn 3:59
2. Nat West–Barclays–Midlands–Lloyds 4:32
3. Born to End 3:55
4. Motorcycle Emptiness 6:08
5. You Love Us 4:18
6. Love's Sweet Exile 3:29
7. Little Baby Nothing 4:59
8. Repeat (Stars and Stripes) 4:09
9. Tennessee 3:06
10. Another Invented Disease 3:24
11. Stay Beautiful 3:10
12. So Dead 4:28
13. Repeat (UK) 3:09
14. Spectators of Suicide 4:40
15. Damn Dog 1:52
16. Crucifix Kiss 3:39
17. Methadone Pretty 3:57
18. Condemned to Rock 'n' Roll 6:06
Bonus
19. Theme from M*A*S*H (Suicide Is Painless)

CD 2 - Bonus
1. Slash 'n' Burn (House in the Woods Demo) 3:59
2. Nat West–Barclays–Midlands–Lloyds (Marcus Demo) 4:01
3. Born to End (Marcus Demo) 2:54
4. Motorcycle Emptiness (House in the Woods Demo) 6:26
5. You Love Us (Heavenly Version) 4:26
6. Love's Sweet Exile (House in the Woods Demo) 3:15
7. Little Baby Nothing (House in the Woods Demo) 4:25
8. Repeat (Marcus Demo) 2:42
9. Tennessee (House in the Woods Demo) 2:55
10. Another Invented Disease (House in the Woods Demo) 3:32
11. Stay Beautiful (Marcus Demo) 3:13
12. So Dead (House in the Woods Demo) 4:24
13. Repeat (House in the Woods Demo) 3:11
14. Spectators of Suicide (House in the Woods Demo) 5:49
15. Damn Dog (Live) 1:47
16. Crucifix Kiss (Marcus Demo) 3:41
17. Methadone Pretty (House in the Woods Demo) 4:11
18. Suicide Alley (South Wales Demo) 2:34
19. New Art Riot (South Wales Demo) 2:54
20. Motown Junk (London Studio Demo) 2:53
21. Motown Junk 3:59

James Dean Bradfield– lead vocals, lead, rhythm and acoustic guitars
Richey Edwards– rhythm guitar, lyrics
Sean Moore– drum programming, drums, percussion, backing vocals
Nicky Wire– bass guitar
&
May McKenna
– backing vocals on "Another Invented Disease"
Jackie Challenor– backing vocals on "Another Invented Disease"
Lorenza Johnson– backing vocals on "Another Invented Disease"
Dave Eringa– piano, organ on "Nat West–Barclays–Midlands–Lloyds", "You Love Us", "Spectators of Suicide" and "Crucifix Kiss"
Traci Lords– vocals on "Little Baby Nothing"
Spike Edney– keyboards on "Little Baby Nothing"
Richard Cottle– keyboards on "Motorcycle Emptiness"

MANIC STREET PREACHERS

PLaNe-HeR
The Gathering "How to Measure a Planet?" (1998)
ou "Dreamland"

Des Hollandais abandonnant leurs oripeaux gothiques pour de nouveaux habits électro rock planant du plus bel effet ? C'est la transformation de The Gathering avec How to Measure a Planet? (un double, pas moins !) et c'est Dead de chez Trashocore qui nous en parle :
"Lorsque l'on place "How To Measure A Planet?" dans sa platine, il faut tout de même se remettre en tête qu'un an seulement avant lui, les hollandais de the Gathering avaient sorti le plutôt métallique et tout bonnement excellent "Nighttime Birds". Vous l'aurez compris, entre ces deux albums, le groupe a opté pour une direction musicale bien différente, laissant derrière un style qu'ils avaient contribué à créer pour explorer de nouveau horizons. A l'époque, ce nouvel opus a fait un tomber des têtes dans le cheptel des fans du groupe à cause justement de cette nouvelle orientation.
Et pourtant, si vous êtes un temps soit peu sensible, vous ne pourrez pas résister à un tel album. Pour un premier essai, les hollandais ont fait très fort, transformant l'ambiance très froide du précédent album, en une ambiance chaude et intimiste où se mêlent la douceur de la voix d'Anneke et la beauté de la musique distillée par le reste du groupe. Le travail de composition a été réalisé tout en subtilité, la magie de cet l'album reposant sur une savante utilisation de tous les instruments et de multiples arrangements qui lui donnent une grande richesse. Petit bémol : je ne sais pas si c'est dû à la production ou aux qualités intrinsèques d'Anneke, mais bien que le chant demeure très bon, il l'est bien moins que sur les précédents albums, dégageant moins de puissance et se révélant même parfois un peu hésitant.
L'album se décompose en deux CDs (et vu la durée totale, il fallait bien ça). Le premier disque (le plus important) est gorgé de titres plus magnifiques les uns que les autres, dans la majorité très calmes et atmosphériques ("Frail", "Red Is A Slow Colour", "Marooned"), parfois plus électriques ("Great Ocean Road", "Travel") et parfois très très calmes ("Rescue Me", "My Electricity", "The Big Sleep"). Mis à part le single "Liberty Bell" qui est sans conteste le titre le plus mauvais de l'album (Dommage...), l'ensemble est d'une qualité exemplaire, très touchant et prenant comme the Gathering a toujours su le faire.
Le second CD fait plus office de bonus avec 5 titres (dont "How To Measure A Planet?" qui dure près de 30 minutes !!!) et surtout trois excellents morceaux : "Illuminating", "Locked Away" et "Probably Built In The Fifties".
Le tout possède une durée vraiment impressionnante (plus d'une heure quarante de musique) que vous aurez sûrement du mal à vous enfiler en une fois, mais l'ensemble vaut vraiment la peine d'être écouté.
Bien loin de son grand frère "Nighttime Birds", "How To Measure A Planet?" marque donc un tournant dans le carrière de ce grand groupe qu'est The Gathering, annonçant un changement de cap qu'ils ne quitteront plus pour en arriver à leur style actuel que l'on peut découvrir sur le sublissime "Souvenirs". Malgré quelques imperfections, le groupe signe tout de même une de ses meilleures productions, dégageant tout ce dont un album de cette trempe doit dégager : émotions et sensibilité. Tout simplement magnifique.
"
Si les ambitions du groupe ont, depuis, été revue à la baisse, et sans doute étant trop élevées pour eux était-ce une bonne idée, reste ce How to Measure a Planet? plus qu'intéressant et assurément réussi et attachant jusque dans ses (rares) maladresse, un album recommandé.

CD 1
1. Frail (You Might as Well Be Me) 5:04
2. Great Ocean Road 6:19
3. Rescue Me 6:22
4. My Electricity 3:32
5. Liberty Bell 6:01
6. Red is a Slow Colour 6:26
7. The Big Sleep 5:01
8. Marooned 5:56
9. Travel 9:06

CD 2
1. South American Ghost Ride 4:25
2. Illuminating 5:51
3. Locked Away 3:24
4. Probably Built in the Fifties 7:26
5. How to Measure a Planet? 28:33

Anneke van Giersbergen– lead vocals/guitars
René Rutten– guitars
Frank Boeijen– keyboards
Hugo Prinsen Geerligs– bass
Hans Rutten– drums


THE GATHERING

SKyHiGH
Godspeed You Black Emperor! "Lift Yr. Skinny Fists Like Antennas to Heaven!" (2000)
ou "Post-Symphonic"

Une œuvre transcendantale, le must ultime d'un post-rock orchestral absolument pas brainy mais définitivement trippy, ce sont les canadiens de Godspeed You Black Emperor! et leur incontesté chef d'œuvre, Lift Yr. Skinny Fists Like Antennas to Heaven! (ce nom !, ce titre !), une légende de plein droit.
De fait, passé à la postérité qu'il est, ce qui n'est que justice, on ne s'étendra pas sur le contenu de l'opus parce que, vraiment, on ne décrit pas ces crescendos de cordes tumultueuses, ces puissantes vagues instrumentales émotionnelles qui savent emporter l'auditeur dans un monde qui n'est plus vraiment le notre, on le vit, on s'immerge dans ces quatre suites instrumentales d'une vingtaine de minutes chacune qui, tant héritières des exploration krautrock que du mouvement du classique minimaliste en général et de Philip Glass en particulier, ne demandent à l'auditeur qu'un complet abandon de soi. Et vous pouvez faire confiance à ces lascars-là pour vous transporter dans des paysages mentaux jusqu'alors inexploré.
Ha, Lift Yr. Skinny Fists Like Antennas to Heaven!... What a trip!

CD 1
1. Storm 22:31
I. Lift Yr. Skinny Fists, Like Antennas to Heaven...
II. Gathering Storm/Il Pleut à Mourir [+Clatters Like Worry]
III. 'Welcome to Barco AM/PM...' [ L.A.X.; 5/14/00]
IV. Cancer Towers on Holy Road Hi-Way
2. Static 22:35
I. Terrible Canyons of Static
II. Atomic Clock
III. Chart #3
IV. World Police and Friendly Fire
V. [...+The Buildings They Are Sleeping Now]

CD 2
1. Sleep 23:17
I. Murray Ostril: '...They Don't Sleep Anymore on the Beach...'
II. Monheim
III. Broken Windows, Locks of Love Pt. III.
2. Antennas to Heaven 18:57
I. Moya Sings 'Baby-O'...
II. Edgyswingsetacid
III. [Glockenspiel Duet Recorded on a Campsite In Rhinebeck, N.Y.]
IV. 'Attention...Mon Ami...Fa-Lala-Lala-La-La...' [55-St. Laurent]
V. She Dreamt She Was a Bulldozer, She Dreamt She Was Alone in an Empty Field
VI. Deathkamp Drone
VII. [Antennas to Heaven...]

Thierry Amar– bass guitar
David Bryant– electric guitar
Bruce Cawdron– drums
Aidan Girt– drums
Norsola Johnson– cello
Efrim Menuck– guitar
Mauro Pezzente– bass guitar
Roger Tellier-Craig– guitar
Sophie Trudeau– violin
&
Alfons
– horn
Brian– horn

GODSPEED YOU BLACK EMPEROR!

HoMeMaDe
Eels "Blinking Lights and Other Revelations" (2005)
ou "Les petites histoires de Mister E."

Une collection de chansons enregistrées en 1998 et 2004, un machin sur deux CDs et 33 chansons, dire que la sixième sortie des Eels de Mark Oliver Everett est une impressionnante somme tient du doux euphémisme. Comme, en plus, la qualité est au rendez-vous, on l'accueille avec tout l'enthousiasme mérité. Ha oui, Blinking Lights and Other Revelations porte beau.
Alors forcément, comme il y a beaucoup d'outtakes et de sessions différentes, le tout ne brille pas forcément de la folle cohésion qu'avaient chacun des précédents albums d'Eels. Mais il y a le songwriting de Mark Oliver Everett et, là, on est assuré que la qualité sera au rendez-vous parce qu'indéniablement, le monsieur s'est affirmé comme une belle plume ce que confirme la massive sélection du double album. Il y a aussi de belles guests venues prêter main forte, tout en entérinant sa place dans un club informel de happy-fews d'exception, dont Peter Buck de R.E.M. sur deux chansons (To Lick Your Boots, To See Natalie), John Sébastian (oui de Lovin' Spoonful, sur le délicieux Dusk: a Peach in the Orchard), ou, honneur ultime, de Tom Waits venu pousser la chansonnette sur un très réussi Going Fetal. Pas qu'Everett ait vraiment besoin de tous ces gens, puisque de nombreux autres musiciens renforce son quatuor d'alors. A la limite, Mister E ne nous balancerait que des machins enregistrés seul dans sa chambre, à l'acoustique et au chant, qu'on n'ergoterait pas sur le minimalisme du bidule tant l'écriture se suffit à elle-même. Mais pas ici, même si en effet la tessiture acoustique domine, où la richesse des arrangements vient taquiner la couenne des 33 bulles d'inspiration.
Vous avez besoin de plus pour vous ruer sur cet excellemment réussi Blinking Lights and Other Revelations ? Mais vous êtes fous ? Quand il s'agit de Mark Oliver Everett et de ses frémissantes Anguilles, le nom seul devrait suffire !

CD 1
1. Theme from Blinking Lights 1:44
2. From Which I Came/A Magic World 3:13
3. Son of a Bitch 2:27
4. Blinking Lights (For Me) 2:01
5. Trouble with Dreams 4:33
6. Marie Floating Over the Backyard 2:03
7. Suicide Life 2:41
8. In the Yard, Behind the Church 4:05
9. Railroad Man 4:16
10. The Other Shoe 2:32
11. Last Time We Spoke 2:22
12. Mother Mary 3:21
13. Going Fetal 2:21
14. Understanding Salesmen 2:43
15. Theme for a Pretty Girl That Makes You Believe God Exists 2:06
16. Checkout Blues 2:27
17. Blinking Lights (For You) 2:00

CD 2
1. Dust of Ages 2:21
2. Old Shit/New Shit 3:17
3. Bride of Theme from Blinking Lights 1:52
4. Hey Man (Now You're Really Living) 3:02
5. I'm Going to Stop Pretending That I Didn't Break Your Heart 3:56
6. To Lick Your Boots 3:30
7. If You See Natalie 3:41
8. Sweet Li'l Thing 3:27
9. Dusk: A Peach in the Orchard 1:17
10. Whatever Happened to Soy Bomb 2:26
11. Ugly Love 2:58
12. God's Silence 1:26
13. Losing Streak 2:52
14. Last Days of My Bitter Heart 1:35
15. The Stars Shine in the Sky Tonight 3:31
16. Things the Grandchildren Should Know 5:22

E– vocals, guitar, keyboards, melodica, production
Butch– drums, percussion
The Chet– guitar
Koool G. Murder– bass guitar
Puddin'– drums
&
Wayne Bergeron
– trumpet
Bobby, Jr.– "wails" ("Last Time We Spoke")
Peter Buck– guitar ("To Lick Your Boots", "If You See Natalie")
Matt DeMerritt– saxophone
Wally Gagel– keyboards
Ludvig Girdland– violin
Joe Gore– guitar
Probyn Gregory– horns
David Hlebo– saxophone
Jim Jacobsen– keyboards, horn, string arrangements, programming
Jim Lang– strings, mixing
Bill Liston– woodwinds
Andy Martin– trombone
Joe Meyer– horn
Dick Mitchell– flute
John Sebastian– organ ("Dusk: A Peach in the Orchard")
Todd Simon– trumpet
Gerri Sutyak– cello
Michael Valerio– bass guitar
Tom Waits– vocals ("Going Fetal")

E de EELShttp://mangemesdix.blogspot.com/2015/12/double-dose-de-plaisir-volume-2.html?showComment=1450976477807#c2314098629638848970

Funk Story (le groove par 12)

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Comme les douze coups de minuit d'un réveillon bien groovy, voici l'ultime offrande de l'an du Zornophage. Comme, traditionnellement, la Saint-Sylvestre et son inéluctable passage sur l'année calendaire suivante est dévolu à une grosse fiesta, je me suis dit qu'une petite histoire du funk serait la bienvenue, j'espère que vous apprécierez. Enjoie !

Le PaRRaiN
James Brown "Cold Sweat" (1967)
ou "En Funkation"

Ce serait presque un album normal ce Cold Sweat. Oui mais il y a Cold Sweat, le titre, et, l'air de rien, l'invention d'un nouveau genre dont l'auteur, le remuant et électrique James Brown, demeurera l'éternel parrain, le Funk. Mais place au mots de Maniac Blues (Forces Parallèles) pour le détail de l'affaire :
"Et en 1967 James Brown créa le funk. Avec le single « Cold Sweat», le Parrain de la soul jette un pavé dans la mare : il va en effet changer la face de la musique noire de la fin des années soixante. De George Clintonà Sly Stone en passant par Michael Jackson et Prince, James Brown va exercer une influence considérable sur plusieurs générations d’artistes.
Etymologiquement, le sens du mot funk évolue selon les époques et les régions. Evoquant d’abord la peur, puis l’odeur âcre du tabac avant de désigner des odeurs sexuelles et corporelles comme la sueur, ce mot traduit en tout cas quelque chose de sale et de brut. A l’origine, dans la musique noire américaine, ce qui est funky caractérise des formes primitives de blues et de jazz précurseurs du rhythm’n’blues et de la soul. En 1967, alors que des morceaux pionniers comme « Funky Broadway» d’ Arlester « Dyke » Christian enflamment les pistes de danse, James Brown contribue avec « Cold Sweat » à faire de cette forme musicale un genre à part entière.
Après avoir enregistré brillamment un nouveau concert à l’Apollo en juin, James Brown grave dans le studio du label King le single deux faces « Cold Sweat». Révolutionnaire, ce grand succès commercial pose les fondamentaux du funk. Morceau de rythme pur, « Cold Sweat» fascine par son riff obsédant qui se répète imperturbablement pendant sept minutes. Les cuivres dirigés par Alfred « Pee Wee » Ellis, la basse imposante de Bernard Odum, la batterie de Clyde Stubblefield imposent un rythme en béton armé. James Brown, quant à lui, rugit, hurle les paroles et sue comme un beau diable, tandis que les soli de sax de Maceo Parker font monter encore un peu plus la température.
Après tant de sueurs froides dans cette fournaise funky, la tension ne peut que retomber. En effet, le reste de l’album déçoit grandement. Il faut savoir qu’à cette époque, l’usine King sort environ un single de Brown toutes les trois semaines et un album tous les trois mois. James Brown doit suivre ce tempo d’enfer en enregistrant des hits entre deux tournées et en meublant les albums de vieilleries. Des vieilleries, il y en a un bon petit paquet. Les pistes cinq à dix, c’est-à-dire de « Good Rockin Tonight» à « I Loves You Porgy», sont déjà présentes sur l’album Out Of Sight sorti trois ans plus tôt.
Autrement, quatre autres chansons, uniquement des reprises, viennent apporter un peu de variété. Le standard « Fever» est superbement interprété par un James Brown plus sensuel que jamais. Il dynamite également deux classiques de rhythm’n’blues, « Kansas City» et « Stagger Lee». La version de « Kansas City» a même plutôt bien marché dans les charts. Enfin, James Brown se fait plaisir à l’orgue sur l’instrumental « Back Stabbin» qui clôt ce disque avec entrain.
En définitive, comme bien des albums de JBà l’époque, Cold Sweat est un disque curieux, à la fois novateur et rétrograde. « Cold Sweat», une vraie merveille du répertoire de JB, sort irrémédiablement du lot. La révolution Funk est en marche!
"

1. Cold Sweat, Pt. 1 2:24
2. Cold Sweat, Pt. 2 4:46
3. Fever 3:04
4. Kansas City 3:22
5. Stagger Lee 2:43
6. Good Rockin' Tonight 2:25
7. Mona Lisa 1:54
8. I Want to Be Around 2:20
9. Nature Boy 2:38
10. Come Rain or Come Shine 2:47
11. I Loves You Porgy 2:30
12. Back Stabbin' 2:43

JAMES BROWN

LeS MéTiSSéS
Sly & the Family Stone "Stand!" (1969)
ou "Debout!"

Au rayon du proto-funk, il y a une bande de garçons et de filles de toutes les couleurs qu'il s'agit de ne surtout pas oublier, Sly & the Family Stone bien-sûr !
Après quelques albums déjà bien sympathiques mais encore pas tout à fait définis montrant un collectif en constante progression (ainsi, Life, le prédécesseur immédiat est-il le plus recommandé), la bande revient avec un féroce appétit et des idées qui jaillissent dans tous les sens. Epoque oblige, tout ceci est gonflé de psychédélisme jammy, d'un flower power militant mais, musicalement, c'est indéniablement un des albums qui définit cette musique à trémousser des hanches, à suer sur les dance-floors au sons de vocaux passionnés et de cuivres rutilants... Le funk ! C'est évident sur I Want to Take You Higher, le "supra-bœufante (13 minutes 45 secondes !) Sex Machine, qui n'est pas une reprise du titre du même nom de James Brown mais une folie psyché/rock/groove du plus bel effet, et le très "street cred'"Sing a Simple Song qu'on imagine bien illustrer un nanar blaxploitation où il serait, bien entendu, la star. Ceci dit, plus généralement, c'est tout l'album qui est infusé de ce groove poisseux et sexuel qui identifie le genre. Alors, évidemment, il reste des échos de la génération Woodstock (c'est d'actualité, après tout) comme sur un Stand! ou un Everyday People des marguerites plein l'afro, deux excellentissimes singles, est-ce encore à préciser ?
La collection est si bluffante et tellement passionnément habitée par ses interprètes, et si bien bonnussée dans l'édition remasterisée (deux beaux inédits et les version mono des trois singles), qu'il est tout simplement impossible d'y résister. Si on ajoute l'importance historique de l'album, c'est bel et bien d'un immense classique incontournable dont il s'agit, ce que vous saviez d'ailleurs sans doute déjà. Si ce n'est pas le cas, vous savez ce qu'il vous reste à faire...

1. Stand! 3:08
2. Don't Call Me Nigger, Whitey 5:58
3. I Want to Take You Higher 5:22
4. Somebody's Watching You 3:20
5. Sing a Simple Song 3:56
6. Everyday People 2:21
7. Sex Machine 13:45
8. You Can Make It If You Try 3:37
Bonus
9. Stand! (mono single version) 3:10
10. I Want To Take You Higher (mono single version) 3:03
11. You Can Make It If You Try (mono single version) 3:40
12. Soul Clappin' II (previously unreleased) 3:28
13. My Brain (Zig-Zag) (previously unreleased instrumental) 3:19

Sly Stone: vocals, organ, guitar, piano, harmonica, vocoder, and bass guitar on "You Can Make It If You Try."
Freddie Stone: vocals, guitar
Larry Graham: vocals, bass guitar (tracks one through seven)
Rose Stone: vocals, piano, keyboard
Cynthia Robinson: trumpet, vocal ad-libs, background vocals on "I Want to Take You Higher"
Jerry Martini: saxophone, background vocals on "I Want to Take You Higher"
Greg Errico: drums, background vocals on "I Want to Take You Higher"
Little Sister (Vet Stone, Mary McCreary, Elva Mouton): background vocals on "Stand!", "Sing a Simple Song", "Everyday People", and "I Want to Take you Higher"

SLY & THE FAMILY STONE

LeS SPaTiauX, DéBaRQueMeNT
Funkadelic "Free Your Mind... and Your Ass Will Follow" (1970)
ou "Funky Trip I"

C'est toute une branche du funk de référence, et tout part de George Clinton, un bête vocaliste de Doo-Wop qui a pris le virus du groove. Ca s'appelle le P-Funk et c'est Dioneo (Guts of Darkness) qui va nous en parler :
"Bien sûr qu’elle compte : la Couleur. Celle de la peau, celle de la rue, des rues autour, du voisinage. Ça n’est pas une question de race, d’ethnologie, de théories superstitieuses. C’est social, historique, génétiquement détourné. C’est humain. Comme l’étreinte, comme un coup de brique. Comme une trahison. Comme frères et sœurs. Comme l’amour, la drogue et l’ennui. Comme de crever au coin de la rue, Rejoindre la Cause ou descendre à la cave…
Il y avait tous ces hippies de bonne famille, des classes moyennes, avec leur liasse au fond du sac, petit passeport précieusement gardé pour regagner en cas de coup dur le pavillon parental. Au cas où la Révolution ferait faillite une saison de trop. De fait, ça n’a pas raté. L’alternative psychédélique - acides, rock’n’roll, galetas et Amour Libre - s’est bien vite ravalée au rang de marché parallèle, réduit à ces quatre seuls éléments vidés de leur substance, de leur potentiel de renversement. En dépit - ô grand dépit - des premiers élans de liberté, des bonnes idées du départ. Et puis il y avait ces types et ces filles des taudis, parqués dans leurs réserves ; cantonnés au folklore, aux yeux des nations, dans leur propre pays. Ceux-là n’eurent guère le choix : de ce qu’ils embrassaient, il leur fallait tout prendre. En entier, et dans le détail. S’ils n’avaient, comme disait l’autre, ‘rien d’autre à perdre que leurs chaînes’, ceux-ci savaient bien aussi tout ce qu’ils avaient à y gagner. Leur propre vie, ni plus ni moins.
Le son de Funkadelic, à cette époque, c'est encore le bruit que font les humains en s’emparant de leur existence, pour leur propre compte et sans demander la permission. Alors forcément, il y a excès. Le LSD s’écoule sans compter. La production est brute, énorme, sommaire. Le fuzz des guitares grésille sans pitié aux membranes des amplis, en vagues, en solo sans fin, en wha tranchantes, en grooves chargés jusqu'aux yeux. L’orgue est gorgé d’une même électricité, saturée à l’extrême, acide à faire monter les larmes. La batterie fracasse tout, enfonce ses syncopes dans les crânes et les entrailles. La basse fait sauter les clous. Et les voix… Les voix deviennent folles, déployées en chœurs sublimes et grotesques, hurlées toujours avec l’implacable justesse, pour toucher le ciel et fendre les murs. Le tout, bien sûr, dans la débauche stéréophonique, rebondissant et tournoyant d’une enceinte à l’autre le flot de rythme, de parole, de mélodie vivace. Il y a dans cette musique noyée d’échos, hantée de timbres déformés, toute une charge d’émotions, de joies, de rages trop longtemps comprimées, de frustrations qui se brisent en rires inextinguibles. Une intelligence à l’œuvre, aussi : fulgurante, instantanée, qui ne s’embarrasse pas de programmes et de motifs. À l’axiome pop : ‘un peu de chaque chose bien dosée, pour avoir une chance de plaire à tout le monde’, Clinton et son gang répliquent par la déferlante : trop de tout, afin que chacun se prenne en pleine face le prix du rêve et le poids du réel. Car au fond rien ne se perd, en ce somptueux chaos, en ce lâcher prise intégral. La lucidité qui fait mal, qui libère ou qui démange, ne s’émousse pas un seul instant. Les paroles balancent un humour féroce, le regard et la plume saisissent tous les détails d’une misère entretenue, d’une mauvaise faim de papier vert qui étouffe toute âme, toute chaleur naissante ; le désespoir de la vie mutilée est retourné contre lui-même, en éclats sardoniques, en répliques imparables ; la chair est là aussi, bien sûr, avec ses sécrétions, ses manques et ses frénésies : affirmée, jetée crue, dévorée dans le ravissement ; tous les élans vitaux, les plus nobles et les plus vils, bien mêlés pour qu'on sente à quel point ils se causent en intimes. Rien ne se délite, non plus, de cette science pragmatique, de cet art de contrebande, de ce savoir brillant du jeu, des arrangements, emmagasinés depuis des décennies, des siècles, dans les cellules où l’Amérique séquestrait ses parias, ses amuseurs. Grossis par l’amplification, dilatés par les substances, déchirés par l’ironie et par l’exultation, ce sont les riffs des vieux blues, des rythmes de danses qui sont un siècle d’histoire (souterraine et publique), les harmonies complexes et décalées, polymorphes, de ces chants d’églises qui furent signal d’évasion, vers les Cieux ou le Canada. L’expérimentation, dans un tel contexte, à tout de l’instantané, de l’acte perpétré dans l’urgence, parce que c’est ça qu’il faut faire. Bandes à l’envers, ritournelles obsédantes de clavier, mises en boucles et en panoramiques… Tout fait sens et mystère. Presque quarante ans plus tard, rien n’a moisi, rien ne s’est desséché…
Et les perruques, les colifichets, queues de renards et montures improbables, ne dissimulent rien : sous leur souveraine décontraction, ces types-là ne cherchent même pas à cacher qu’ils savent encore manier la lame si la situation l’exige. S’ils prêchent la paix, ça n’est pas mus par la peur ni pour cacher une impuissance : c’est qu’ils ont mis la main sur eux-mêmes, dans cet effort violent où l'on dépasse l'ordure et l'épuisement ; après quoi tout existe encore, de part et d'autre de la peau. ‘Libère ton Esprit et ton Cul suivra’. Ça n’a rien d’un boniment. Ça n’est pas un sarcasme, même pas, ni une pauvre provocation. C’est une philosophie, vitale et directe, riche et dangereuse. Ne compte que sur toi, sans t’abstenir d’aimer. Existe sans excuse, toujours au-dessus de toi-même. Une voie directe, exigeante, physique et supérieure dans l'ordre des raisons. La seule forme du Cool qui ne soit pas une pose. C'est revenir de loin."

1. Free Your Mind and Your Ass Will Follow 10:04
2. Friday Night, August 14th 5:21
3. Funky Dollar Bill 3:15
4. I Wanna Know If It's Good to You? 5:59
5. Some More 2:56
6. Eulogy and Light 3:31
Bonus
7. Fish, Chips and Sweat 3:22
8. Free Your Mind Radio Advert 0:55
9. I Wanna Know If It's Good to You 2:50
10. I Wanna Know If It's Good to You (instrumental)  3:12

George Clinton - lead vocals (tracks 1, 6)
Raymond Davis, Fuzzy Haskins, Calvin Simon, Grady Thomas– vocals
Eddie Hazel– guitar, lead vocals (tracks 4, 5)
Tawl Ross– guitar, lead vocals (tracks 3)
Bernie Worrell– Hammond organ, Vox organ, keyboards
Billy Nelson– bass guitar, lead vocals (tracks 2, 4)
Tiki Fulwood– drums
Martha Reeves, Telma Hopkins, Joyce Vincent - backing vocals

FUNKADELIC

L'aFRiCaiN
Fela Ransome-Kuti "Fela's London Scene" (1971)
ou "Africa...on the Beat!"

On ne peut pas parler de l'histoire du développement de la musique funk sans parler de l'immense Fela, c'est chose faite avec l'excellent billet de Progmonster pour le très webzine Guts of Darkness :
"Fela Kuti, The Black President, est à considérer parmi une des figures les plus emblématiques de la musique mondiale du vingtième siècle dernier. Il est, sans conteste possible, l'artiste le plus important à émerger de l'Afrique noire de l'après colonialisme, l'un des rares aussi pour lequel l'engagement politique était une réalité et non pas un faire-valoir juste assez bon pour soulager sa conscience et apporter du crédit à sa démarche artistique. Il avait l'aura des plus grands, le même magnétisme électrique que des Miles Davis, Sun Ra, John Coltrane, James Brown, voire Bob Marley ou Frank Zappa - qu'on les apprécie ou pas - la même attitude despote aussi.
Après une escale décisive en Californie fin des années soixante où il enregistre une série de singles qui préfigurent déjà le devenir de l'Afro-Beat, le charismatique Fela retourne à Lagos où il assoit son dictat sur une formation désormais appelée Africa'70. L'accueil est disproportionné. En moins de temps qu'il m'en faut pour vous l'écrire, Fela devient un véritable phénomène culturel sur sa terre natale où son style musical rencontre un succès sans précédent. Les vibrations de l'évènement s'apparentent à une onde de choc qui va jusqu'à frapper l'Angleterre. De là, l'ancien batteur des Cream, Ginger Baker, ira faire le déplacement jusqu'au Nigeria, lui aussi interpellé par toute la puissance dégagée par cette nouvelle sensation. S'ils jamment ensemble et se lient vite d'amitié, la providence veut que Baker ait grandement aidé Felaà décrocher des dates en dehors du continent africain, le ramenant avec lui sur Londres où il fit ses études une dizaine d'années plus tôt ; l'engouement est tel que les portes des studios Abbey Road s'ouvrent à lui. Il y enregistrera ce "Fela's London Scene", premier authentique manifeste Afro-Beat où rythmes entêtants, élasticité des compositions (s'aventurant pour la première fois au-delà des dix minutes), lyrisme porté à bout de bras par les cuivres et force de la contestation sociale célèbrent la naissance d'un langage nouveau.
Les bandes seront exploitées seulement deux ans plus tard, surfant sur la vague de son succès alors grandissant."
Pour conclure ? Le beat de Fela, ça ne se manque pas.

1. J’Ehin-J’Ehin 7:26
2. Egbe Mio 13:13
3. Who’re You 9:30
4. Buy Africa 5:51
5. Fight to Finish 7:26

Fela Kuti - electric piano, vocals
Eddie Faychum, Tunde Williams - trumpet
Igo Chico - tenor saxophone
Lekan Animashaun - baritone saxophone
Peter Animashaun - guitar
Maurice Ekpo - bass guitar
Tony Allen, Ginger Baker - drums
Akwesi Korranting, Friday Jumbo, Henry Kofi - congas
Tony Abayomi - percussion

FELA KUTI

L'HoMMe De L'oMBRe
Isaac Hayes "Shaft" (1971)
ou "Blaxploitation"

Est-il encore besoin de présenter la plus fameuse bande son de toute l'histoire de la blaxploitation, ce sommet de funk/soul au thème mille fois repris mais jamais égalé ? Sûrement pas, Shaft fait partie de la légende.
L'auteur de cet absolu tour de force, qui n'est pas que le cuisiner de South Park, n'est, il faut dire, pas exactement un débutant. Isaac Hayes, 29 ans au moment des faits, a entamé sa carrière professionnelle plus d'une décennie plus tôt, comme session man pour Stax Records, pour qui il devient bientôt compositeur (Soul Man de Sam & Dave, c'est lui !) avant, logiquement, de se lancer dans une carrière solo en 1968. Fort de toute cette expérience, Hayes est idéalement taillé pour produire une musique à la fois variée et viscérale pour un polar violent et cru, il ne lui reste plus qu'à étaler "son jeu" soit un exercice d'équilibriste entre soul, funk, jazz, blues et score orchestral, tous des genres à qui il rend justice avec un vibrant talent de mélodiste et d'arrangeur, variant savamment les climats et les ambiances... Une bombe qui récoltera trois Grammy et un Oscar en plus d'un large et mérité succès public.
Ultime honneur, l'album a été ajouté au catalogue de la Librairie du Congrès en 2014 car étant "culturellement, historiquement et esthétiquement significatif", ce qui est tout à fait justifié parce que Shaft, c'est de l'immanquable par excellence.
 
1. Theme from Shaft (Vocal) 4:39
2. Bumpy's Lament 1:51
3. Walk from Regio's 2:24
4. Ellie's Love Theme 3:18
5. Shaft's Cab Ride 1:10
6. Cafe Regio's 6:10
7. Early Sunday Morning 3:49
8. Be Yourself 4:30
9. A Friend's Place 3:24
10. Soulsville (Vocal) 3:48
11. No Name Bar 6:11
12. Bumpy's Blues 4:04
13. Shaft Strikes Again 3:04
14. Do Your Thing (Vocal) 19:30
15. The End Theme 1:56

Lead vocals, keyboards and lyrics : Isaac Hayes
Rhythm, Horns and Strings arranged by Johnny Allen, J. J. Johnson , and Isaac Hayes
Backing vocals by Pat Lewis, Rose Williams, and Telma Hopkins
Instrumentation by The Bar-Kays and The Isaac Hayes Movement Electric piano by Lester Snell
Bass guitar by James Alexander
Guitar by Charles Pitts
Guitar by Michael Toles
Drums by Willie Hall
Conga, and Bongo drums by Gary Jones
Lead Trumpet by Richard "Johnny" Davis
Flute by John Fonville

ISAAC HAYES

Le ReCyCLé
Stevie Wonder "Talking Book" (1972)
ou "The Wonder of Funk"

Enfant prodige de la Motown, toujours en recherche de nouvelles sensations musicales, pas seulement pour rester au gout du jour, il n'était que logique que Stevie Wonder penche vers la funk, la tentation était trop forte. A sa manière à lui, c'est ce que va nous explique le Religionnaire (destination rock) :
"Music of My Mind est déjà un album extraordinaire, par lequel Stevie Wonder se propulse dans de nouvelles contrées musicales que lui seul connait. Mais que dire de ce Talking Book paru la même année, si ce n'est qu'il pousse encore plus sa musique vers une incontestable universalité.
Oscillant toujours entre deux thèmes : amour et société, Stevie Wonder ne les aura rarement aussi bien traité, musicalement et textuellement. Faussement simpliste, affublé de clichés et de reprises dégueulasses depuis plus de 30 ans, "You are the Sunshine of My Life" survit pourtant admirablement et mérite largement sa place au panthéon des plus belles chansons d'amour car ce titre est magique, tout simplement magique.
Talking Book est aussi l'album d'un des plus grand titres funk de tous les temps! Il s'agit bien sur de "Superstition", ce morceau acide, corrosif et totalement irrésistible, qui a également résisté aux pompeurs en tout genre et surtout à son statut de générique officiel de Téléfoot pendant de nombreuses années (beaucoup auraient préféré revenir du Vietnam avec une jambe en moins...).
Mais Talking Book vaut bien plus que ces deux magnifiques titres. Le groove massif et agressif de "Superstition" semble se réincarner sur le long et lourd "Maybe Your Baby" tandis que les chansons d'amour foisonnent ("You and I", "Tuesday Heartbreak", "Looking for Another Pure Love" et le solo de Jeff Beck, "I Believe") et surpassent absolument tout ce qui a été fait ou le sera par la suite. "You've Got it Bad Girl" est quant à lui l'illustration parfaite de la maitrise totale du groove par Stevie Wonder à cette époque. Emmené par cette ligne de basse encore et toujours jouée au synthé, sur laquelle se greffe à merveille ce chant si particulier, ce titre n'arrive pourtant toujours pas à figurer sur le moindre best of à mon grand désespoir.
"Big Brother", bien que musicalement inférieure, est une chanson historique car la première vraie critique sociale directe de Stevie Wonder. Il y dénonce la propension des politiciens à séduire les classes inférieures, dans l'idée d'obtenir toujours plus de votes. Tout cela parait aujourd'hui franchement banal voire démagogique, mais j'aime à penser qu'à l'époque, il doit en être autrement...
"Blame it on the Sun" ou "I Believe"? Il s'agit tout simplement d'essayer de départager les deux plus belles chansons de l'album. Pour les textes, la première est coécrite avec sa femme Syreeta Wright, la seconde avec sa sœur Yvonne Wright... Musicalement, aussi grandioses qu'elles soient, ces deux chansons semblent se départager une fois de plus parla puissance de l'amour et c'est la seconde qui finit forcément par l'emporter. Une fois l'album terminé, il n'y a qu'une seule phrase qui compte, celle ci :
"I believe, when I fall in love, with you, it will be forever"...
"
Mitou.

1. You Are the Sunshine of My Life 2:58
Stevie Wonder– lead vocal, background vocal, Fender Rhodes, drums
Jim Gilstrap– first lead vocal, background vocal
Lani Groves– second lead vocal, background vocal
Gloria Barley– background vocal
Scott Edwards– electric bass
Daniel Ben Zebulon– congas

2. Maybe Your Baby 6:51
Stevie Wonder– lead vocal, background vocal, Hohner clavinet, drums, Moog bass
Ray Parker Jr.– electric guitar

3. You and I (We Can Conquer the World) 4:39
Stevie Wonder– lead vocal, piano, T.O.N.T.O. synthesizer
4. Tuesday Heartbreak 3:02
Stevie Wonder– lead vocal, background vocal, Fender rhodes, Hohner clavinet, drums, Moog bass
David Sanborn– alto saxophone
Deniece Williams– background vocal
Shirley Brewer– background vocal

5. You've Got It Bad Girl 4:56
Stevie Wonder– lead vocal, background vocal, Fender Rhodes, drums, Moog bass, T.O.N.T.O. synthesizer
Jim Gilstrap– background vocal
Lani Groves– background vocal
Daniel Ben Zebulon– congas

6. Superstition 4:26
Stevie Wonder– lead vocal, Hohner clavinet, drums, Moog bass
Trevor Laurence– tenor saxophone
Steve Madaio– trumpet

7. Big Brother 3:34
Stevie Wonder– lead vocals, Hohner clavinet, drums, harmonica, Moog bass
8. Blame It On the Sun 3:26
Stevie Wonder– lead vocal, background vocal, piano, drums, Moog bass, T.O.N.T.O. synthesizer
Jim Gilstrap– background vocal
Lani Groves– background vocal
Uncredited– guitar

9. Lookin' for Another Pure Love 4:44
Stevie Wonder– lead vocal, background vocal, Fender Rhodes, drums, Moog bass
Debra Wilson– background vocal
Shirley Brewer– background vocal
Loris Harvin– background vocal
Jeff Beck– electric guitar
Howard "Buzz" Feiten– electric guitar

10. I Believe (When I Fall in Love It Will Be Forever) 4:51
Stevie Wonder– lead vocal, background vocal, piano, Hohner clavinet, drums, Moog bass

STEVIE WONDER

Les CuiVRéS
Tower of Power "Tower of Power" (1973)
ou "Rutilances I"

Contrairement à ce son éponymie pourrait faire penser, Tower of Power est le troisième album de Tower of Power. C'est aussi le premier sommet du collectif multiracial d'Oakland, Californie lancé par le saxophoniste Emilio Castillo, celui où les attraits d'un big band jazzy épousent enfin victorieusement le groove funky qui fait alors fureur.
Il faut dire que l'arrivée d'une voix bien soul, celle de Lenny Williams, fait beaucoup pour booster le combo, chaude et puissante, elle est l'exact élément qui manquait pour synthétiser toutes les bonnes idées des deux précédents opus en un tout... Bluffant. Parce qu'ici la mécanique d'une des plus belles section de cuivres de l'histoire de la musique, pourtant déjà bien huilée et ne souffrant aucune concurrence, brûle de feux encore plus ardents, parce que le groove s'y fait plus lourd, plus poisseux et sensuel et que même un Bruce Conteà la discrète guitare s'y fait ponctuellement remarquer, parce que les compositions y sont simplement meilleures aussi, c'est enfin une bonne raison de célébrer la qualité jusqu'alors seulement entrevue d'une sacrée belle équipe. Et l'excellent résultat !, ces quarante minutes de haute-volée où, évidemment, voix et cuivres sont les stars du répertoire.
Premier des trois immanquables de Tower of Power (tous avec Lenny Williams, y a pas de hasard), l'éponyme de 1973 est une des plus belles offrandes du funk des années 70. Pas mal pour une bande de petits blancs du nord de la Californie.

1. What Is Hip? 5:08
2. Clever Girl 2:56
3. This Time It's Real 2:54
4. Will I Ever Find a Love? 3:51
5. Get Yo' Feet Back on the Ground 4:52
6. So Very Hard to Go 3:41
7. Soul Vaccination 5:13
8. Both Sorry Over Nothin' 3:25
9. Clean Slate 3:22
10. Just Another Day 4:34

Greg Adams– Strings, Trumpet, Arranger, Conductor, Flugelhorn, Horn, Vocals, String Arrangements
Brent Byars– Bongos, Conga
Emilio Castillo– Saxophone (Tenor), Vocals, Production Supervisor
Bruce Conte– Guitar, Vocals
David Garibaldi– Drums
Mic Gillette– Trombone, Trumpet, Flugelhorn, Horn, Baritone, Vocals
Stephen "Doc" Kupka– Oboe, Saxophone (Baritone), Vocals
Lenny Pickett– Clarinet, Flute, Saxophone (Tenor), Vocals
Francis "Rocco" Prestia– Bass
Jay Spell– Piano
Bruce Steinberg– Harmonica, Art Direction, Design, Photography, Illustrations, Cover Design
Chester Thompson– Organ, Keyboards, Vocals
Lenny Williams– Vocals

TOWER OF POWER

Le GaNG
Kool & the Gang "Wild and Peaceful" (1973)
ou "Street Cred'"

Loin des succès radiophoniques millimétrés qui feront leur gloire planétaire et leur considérable fortune, c'est ici que tout commence pourtant vraiment pour Kool & the Gang.
Pourtant le groupe n'en est pas à ses premières armes ayant sorti, depuis 1969, une collection d'album jazz/soul vaguement funky et instrumentaux. Ici, pour la première fois, Kool & the Gang est un vrai groupe de Funk. L'ajout du chant mais aussi un plus total abandon à un son qui fait alors florès dans une bouillonnante scène black américaine dopée par la récente affirmation de sa noire fierté. Et la concurrence est rude ! De James Brownà Parliament/Funkadelic en passant par Earth Wind & Fire, les Ohio Players, Sly Stone et une multitude d'autres tout aussi recommandables, la qualité s'ajoute alors à la quantité pour le plus grand plaisir d'auditeurs comblés. Dans ce foisonnant panorama, les, donc, néo-funksters de Kool & the Gang n'ont aucunement à rougir. Ici, les cuivres rutilent, les voix soulent, la basse sautille, la batterie groove... C'est de Funk de compétition dont il s'agit ! Crue, urbaine, suante, profondément sexuée aussi, cette musique, souvent orgasmique, est faite pour secouer le bas des reins sur ses cadences diaboliques, pour se pâmer sur la soie de sa profonde sensualité... Un appel du corps au corps, un appel au corps à corps !
Evidemment, plus tard, la formation rencontrera encore plus de succès, en refourguant sa « street cred'» au profit d'une image policée et d'un son à l'avenant. Ce n'est pas de ce Kool & the Gang FMiné dont il s'agit mais bien d'une vraie formation de bon gros funk, ici très inspirée du Soul Makossa de Manu Dibango (cela se devait d'être précisé), comme il se faisait si bien dans les 70s. Une très recommandable si hélas trop courte (38 minutes) rasade de bon son et, crénonvindiou !, qu'est-ce que ça joue !

1. Funky Stuff 3:00
2. More Funky Stuff 2:50
3. Jungle Boogie 3:03
4. Heaven at Once 5:01
5. Hollywood Swinging 4:36
6. This Is You, This Is Me 5:23
7. Life Is What You Make It 3:53
8. Wild and Peaceful 9:26

Robert "Kool" Bell: basse, chant
"Funky" George Brown: batterie, percussions, chant
Ricky West: piano, chant
Clay Smith: guitare
Dennis "Dee Tee" Thomas: saxophone alto, flute, congas, chant
Ronald Bell: saxophone ténor et soprano, chant
Robert "Spike" Mickens: trompette, chant

KOOL & THE GANG

LeS PeTiTS BLaNCS
Average White Band "AWB" (1974)
ou "Highland Funk"

C'est de l'album blanc des écossais de l'Average White Band dont il s'agit principalement ici, mais puisque j'avais fait un billet sur le coffret qui l'unit à leur premier et à leur album perdu (respectivement Show Your Hands et How Sweet Can You Get?). C'est donc un cadeau augmenté pour vous, petit chanceux ! Enjoie.
Voir un groupe de Soul'n'Funk d'exception débarquer d'Ecosse au début de années 70 ne devrait surprendre personne, le nord du Royaume Uni ayant, déjà à l'époque, une vraie propension à recycler avec talent la musique à gigoter du popotin noire américaine (un peu comme les irlandais s'y entendent en blues). C'est donc sans étonnement, quoiqu'avec une certaine perplexité, que furent accueillis les débuts du combo d'enkiltés le plus funky de la planète.
Déjà, Average White Band, quel nom tout de même ! Groupe Blanc Moyen ? L'undestatement si cher à nos cousins d'outre-Manche est dans l'air, pas de doute ! Parce que la musique est extrêmement convaincante sur les deux premiers opus, et quelques uns par la suite, ici bonussés d'un album perdu, How Sweet Can You Get?, et de quelques titres supplémentaires pour bonne mesure... Riche, donc.
Tout commence en 1973 avec Show Your Hand mais pas le succès puisque la formation devra attendre l'année suivante, sa signature sur la Warner et un album éponyme du feu de Dieu pour véritablement exploser commercialement. Pourtant, tout est déjà là, une funk/soul resplendissante évoquant ce qui se fait alors de mieux en la matière, de Tower of Powerà Blood Sweat and Tears, d'Earth Wind & Fire aux Ohio Players... Et les compositions à l'avenant ! Parce qu'il y a matière à se réjouir sur les 8 titres de cet initial tour de force : voix pleines de soul, cuivres rutilants, grooves implacables, soli triomphants... Une fête de tous les instants mais, donc, pas vraiment de succès et on imagine bien volontiers qu'il ne fut pas facile de "vendre" une bande d'écossais goguenards à des stations soul qui ne manquaient pas d'équivalents afro-américains à diffuser. Il fallut en fait les irrésistibles Pick Up the Pieces, Person to Person ou Work to Do (ce dernier repris des Isley Brothers) sur leur blanc second album, où on retrouve, excusez du peu, les Brecker Brothers en session men de luxe, pour que la garde corporatiste baisse et qu'enfin la mayonnaise prenne. Et que les highlanders du funk s'installent durablement dans les oreilles et dans les cœurs des amateurs du genre.
Un package attractif, une musique inattaquable, un riche livret, la réédition Edsel, quart d'une série de quatre double CDs documentant la période faste de l'Average White Band (1973-1982), est, vous l'aurez compris, un investissement obligatoire, et finalement fort peu onéreux, à qui aime la funk music de qualité. Une bonne façon, aussi, de se remémorer la classe absolue d'un groupe trop souvent oublié aujourd'hui.

CD 1
Show Your Hand (1973)
1. The Jugglers 4:51
2. This World Has Music 5:58
3. Twilight Zone 5:28
4. Put It Where You Want It 5:16
5. Show Your Hand 4:29
6. Back In '67 4:12
7. Reach Out 4:04
8. T.L.C. 8:06
Bonus
9. Reach Out (First Version) 3:43
10. The Jugglers (First Version) 4:05
11. It Didn't Take Me A Minute 2:24
12. In The Beginning 3:45
13. Look Out Now 2:14
14. Back in '67 (First Version) 4:04
15. White Water Dreams 4:00
16. How Can You Go Home? 3:05

CD 2
How Sweet Can You Get (1974)
1. Person To Person 3:23
2. Keepin' It To Myself 3:09
3. There's Always Someone Waiting 5:01
4. McEwan's Export 4:47
5. Got The Love 3:41
6. Work To Do 3:42
7. Just Want To Love You Tonight 4:42
8. Pick Up The Pieces 3:56
9. I Just Can't Give You Up 3:45
10. How Sweet Can You Get? (First Version) 3:41
Average White Band (1974)
11. You Got It 3:30
12. Got The Love 3:47
13. Pick Up The Pieces 3:54
14. Person To Person 3:36
15. Work To Do 4:20
16. Nothing You Can Do 4:04
17. Just Want To Love You Tonight 3:53
18. Keepin' It To Myself 3:56
19. I Just Can't Give You Up 3:26
20. There's Alway Someone Waiting 5:27

Show Your Hand
Alan Gorrie– bass, guitar, vocals
Hamish Stuart– bass, guitar, vocals
Roger Ball– keyboards, alto saxophone, vocals
Malcolm Duncan– tenor saxophone, vocals
Onnie McIntyre– guitar, vocals
Robbie McIntosh– drums, percussion

Average White Band
Alan Gorrie– lead vocals (on "Keepin' It To Myself" and "There's Always Someone Waiting"), co-lead vocals (on "You Got It", "Work To Do", "Nothing You Can Do", and "Just Wanna Love You Tonight"), background vocals, bass, guitar (on "You Got It")
Hamish Stuart– lead vocals (on "Got The Love", "Person To Person", and "I Just Can't Give You Up"), co-lead vocals (on "You Got It", "Work To Do", "Nothing You Can Do", and "Just Wanna Love You Tonight"), background vocals, lead guitar, bass (on "You Got It")
Roger Ball– keyboards, alto & baritone saxophones
Malcolm (Molly) Duncan– tenor saxophone
Onnie McIntyre– background vocals, guitar, guitar solo on "Work To Do"
Robbie McIntosh– drums, percussion
&
Ralph MacDonald– congas, percussion
Michael Brecker– tenor saxophone
Randy Brecker– trumpet
Marvin Stamm– trumpet
Mel Davis– trumpet
Glenn Ferris– trombone
Ken Bichel– mellotron (on "Just Wanna Love You Tonight")

AVERAGE WHITE BAND

LeS LouiSiaNaiS
The Meters "Fire on the Bayou" (1975)
ou "Funk épicé"

Fire on the Bayou est le 6ème album des Meters et 3ème pour Reprise. Le groupe de funk louisianais est alors totalement confortable avec sa musique qui, après quelques tentatives mainstream peu recommandables, est revenue vers un son roots de bon aloi.
On retrouve donc ici une musique rythmique et groovy par essence, un machin qui pulse et fait secouer le bas des reins. Les voix, évidemment, sont une composante importante les cinq membres donnant volontiers de la gorge. L'effet est plus tribal que religieux d'ailleurs, vaudou presque. Et puis il y a le son, brûlant, caniculaire. La lourdeur de la basse, les entrechats de l'orgue, les jonglages de la batterie et des congas, aussi. La sarabande dure 46 minutes, c'est peu mais suffisant pour en ressortir avec une belle suée.
Tout ceci contribue à un album de funk poisseux (et un poil jazzy en particulier sur l'extraordinaire Middle of the Road) typiquement 70's et chaudement (vous l'aurez compris) recommandé.

1. Out in the Country 3:38
2. Fire on the Bayou 4:10
3. Love Slip Upon Ya 4:59
4. Talkin''Bout New Orleans 3:38
5. They All Ask'd for You 4:12
6. Can You Do Without? 3:52
7. Liar 5:12
8. You're a Friend of Mine 4:11
9. Middle of the Road 7:57
10. Running Fast 1:27
11. Mardi Gras Mambo 2:39

Leo Nocentelli: chant, guitare
Art Neville: orgue
George Porter Jr: basse
Zig Modeliste: batterie
Cyril Neville: congas
Wardell Quezergue: arrangements de cuivres
(autres musiciens inconnus)

THE METERS

LeS oRFèVReS
Earth, Wind & Fire "Gratitude" (1975)
ou "Rutilances II"

Surfant sur le succès de That's the Way the World Is (sorti seulement 6 mois plus tôt) et de la conséquente tournée qui le suivit, les funksters d'Earth Wind & Fire sortent en novembre 1975 un album (3/4) live où ils déroulent toute la classe qu'on leur connait alors.
Dès le fusionnant Africano/Power, il est évident que ces garçons maîtrisent parfaitement leur sujet. Les cuivrent rutilent, les percussions percutent, les guitares sont tour à tour acérées ou sensuelles, la rythmique tient son groove avec flegme et savoir-faire et - bien sûr - ça chante divinement bien.
Notons aussi que le son, puissant et précis, rend parfaitement hommage à ces compositions ne sombrant jamais dans la mièvrerie même quand elles donnent dans le sentimentalisme. C'est l'évidence, si en studio EWF est un générateur de tubes comme on n'en rencontre pas souvent, sur scène, c'est une machine de guerre qui ne fait pas de prisonniers.
Spiritualité, sensualité, ferveur, puissance, précision sont autant de qualités que possède cette formation. Bien sûr, comme c'est très souvent le cas, quelques retouches de studio ont dû être appliquées afin de pour booster (perfectionner) encore plus ce bouillonnant live. Et ? Seul le bonheur de l'auditeur importe et, ici, il est total.
Quand on sait, en plus, que les albums live d'EWF sont rares et que ceux de leur période la plus faste le sont encore plus, on se dit qu'il serait vraiment dommage de passer à côté... que vous aimiez le funk ou pas (carrément !).

1. Introduction by MC Perry Jones 0:21
2. Africano/Power 5:56
3. Yearnin' Learnin' 4:16
4. Devotion 5:07
5. Sun Goddess 7:41
6. Reasons 8:23
7. Sing a Message to You 1:19
8. Shining Star 4:55
9. New World Symphony 9:28
10. Musical Interlude #1 0:15
11. Sunshine 4:24
12. Sing a Song 3:23
13. Gratitude 3:23
14. Celebrate 3:06
15. Musical Interlude #2 0:27
16. Can't Hide Love 4:10
Bonus
17. Live Medley: Serpentine Fire/Saturday Nite/Can't Hide Love/Reasons 6:13

Johnny Graham: guitare
Al McKay: guitare, percussions
Verdine White: basse, percussions, chant
Don Myrick: saxophone
Michael Harris: trompette
Louis Satterfield: trombone
Larry Dunn: orgue, piano, moog
Andrew Woolfolk: percussions, saxophone
Fred White, Ralph Johnson: batterie, percussions
Maurice White: chant, batterie, timbales, kalimba
Philip Bailey: percussions, conga, chant


EARTH, WIND & FIRE

LeS SPaTiauX, Le ReTouR
Parliament "Mothership Connection" (1975)
ou "Funky Trip II"

Fina en beauté avec un retour dans l'espace avec l'autre formation de George Clinton, Parliament, c'est TomTom (Force Parallèles) qui nous en parle :
"M’avancerais-je de beaucoup en affirmant que « Unfunky UFO» est la plus grande chanson de funk de tous les temps ?
Après deux très bons albums (Up For Down Stroke et Chocolate City), Parliament livre ici son grand classique, pas indépassable (Dr Funkenstein suivra bientôt) mais furieusement efficace. De « Give Up The Funk» à « P Funk» en passant par « Mothership Connection», l’album enchaîne les hymnes à ne plus savoir qu’en faire.
Avec la seconde partie de « Night Of The Thumpasorus Peoples», Bootsy Collins tient sûrement le meilleur riff de basse de sa carrière. Entre voix solistes étranglées et choristes soul, chacun sied parfaitement au poste qu’on lui a assigné.
Partout, les arrangements de Fred Wesley sont magnifiques, le clavier de Bernie Worrell apporte cette ambiance électro-furiste gentiment désuète mais qui fait toujours autant triper.
Servi par la crème des musiciens blacks de l’époque, « Mothership Connection» place Parliament en orbite et n’a pas fini de les faire tourner. Complètement marteau, George Clinton va vite devenir le gourou le plus créatif de la fin des années 70, à des années lumières de la concurrence.
Mothership Connection, c’est un peu le trip funky ultime. Heureusement, tout ce bazar n’est pas prêt de s’arrêter.
"
Rien à rajouter... Ha, si, il vous le faut, maintenant !

1. P. Funk (Wants to Get Funked Up) 7:41
2. Mothership Connection (Star Child) 6:13
3. Unfunky UFO 4:23
4. Supergroovalisticprosifunkstication 5:03
5. Handcuffs 4:02
6. Give Up the Funk (Tear the Roof off the Sucker) 5:46
7. Night of the Thumpasorus Peoples 5:10
Bonus
8. Star Child (Mothership Connection) (Promo Radio Version)  3:08

Lead vocals - George Clinton (Lead in "P. Funk (Wants to Get Funked Up)", "Mothership Connection (Star Child)"), Calvin Simon, Fuzzy Haskins, Ray Davis, Grady Thomas, Gary Shider (lead in "Handcuffs"), Glen Goins (lead in "Unfunky UFO", "Handcuffs"), Bootsy Collins
Horns - Fred Wesley, Maceo Parker, Michael Brecker, Randy Brecker, Boom, Joe Farrell
Bass guitar - Bootsy Collins (Only in "Mothership Connection (Star Child)", "Unfunky UFO", "Handcuffs" and "Night of the Thumpasorus Peoples"), Cordell Mosson
Guitars - Garry Shider, Michael Hampton, Glen Goins, Bootsy Collins
Drums and percussion - Tiki Fulwood, Jerome Brailey, Bootsy Collins, Gary Cooper
Keyboards and synthesizers - Bernie Worrell (Minimoog, Wurlitzer electric piano, ARP Pro Soloist, Hammond organ, grand piano, Fender Rhodes, clavinet D6)
Backing vocals and handclaps - Gary Cooper, Debbie Edwards, Taka Kahn, Archie Ivy, Bryna Chimenti, Rasputin Boutte, Pam Vincent, Debra Wright, Sidney Barnes

PARLIAMENT

Il manquait une fille, vous l'aurez au moins en photo :
BETTY DAVIS, bête de scène et ex de Miles Davis

3 for Lemmy

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Trois albums pour rendre hommage à celui dont la disparition nous touche tous un peu, ça a du sens, le bonhomme étant un adepte du power trio, que de trouver dans sa carrière trois albums qui le représente complètement : d'abord le freak, avec Hawkwind, puis le speed-freak avec Motörhead et enfin le gamin des fifties tombé amoureux du rock'n'roll avec The Head Cat.

HiGHWiND
Hawkwind "Hall of the Mountain Grill" (1974)
ou "Lemmy in Space"

Si les primo-recommandations concernant Hawkwind cochent souvent la case live, avec Space Ritual en particulier, il est un album studio des plus fameux space rockers de la galaxie qui rivalise, Hall of the Mountain Grill où le line-up classique de cette première période de leur carrière (avant le renvoi de Lemmy et le départ de Nik Turner, quoi) atteint sa plénitude créative et trippante.
Evidemment, certains regretteront de ne pas y retrouver l'organe d'un Robert Calvert qui avait été une des attractions de Space Ritual, l'insaisissable personnage menait alors sa propre petite affaire avec le large soutien de ses ex et futurs partenaires (voir Captain Lockheed and the Starfighters et Lucky Leif and the Longships). C'est donc à trois voix, Brock, Lemmy et Turner que "ceux qui restent" se partage un festin spatial largement concocté par l'indéboulonnable Dave Brock (qui laisse un petit crédit à chacun de ses compagnons, rien de plus).
Et quel festin !, parce que de The Psychedelic Warriors (Disappear in Smoke)à Paradox, c'est à l'Hawkwind studio le plus convaincant jusqu'alors (et même le plus convaincant tout court comme nous le savons désormais) auquel nous avons affaire, une formation qui sait exprimer sa folie psyché-progressive par une alliance de grâce, d'étrangeté et de puissance qui laisse baba et un petit peu groggy. Parce qu'il y a chez Hawkwind, une belle bande de zozos utilisatrice de "substances"à gogo, plus que ces constructions kaléidoscopiques pour un public aux similaires addictions récréatives, il y a la puissance de feu des riffs d'un Brock fondamental, il y a les lourdes et électriques tortures des quatre cordes de la basse du sieur Kilmister, et les stridences et libertés de quelques "tisseurs de sons" hors du commun (le violon de Simon House, le saxophone de Nik Turner, les claviers de Del Dettmar) le tout bien soutenu par le tonnerre rythmique d'un Simon King, batteur de son état. Et que de bonne chansons pour articuler ces possibles de la puissante pièce d'ouverture en passant par les planeries d'un Wind of Change, la freak-folk revisitée de Web Weaver, les crescendos réussis de You'd Better Believe It, la pause bienvenu d'un beau petit instrumental à la Satie tout en légèreté (Hall of the Mountain Grill) avant de replonger dans le grand bain électrique avec Lemmy et son Lost Johnny et le solide et inspiré Paradox de Brock, que du bon !
Tout ça fait d'Hall of the Mountain Grill, 4ème opus studio des furieux spationautes, un absolu indispensable pour les amateurs d'envolées acides et de redescentes contrôlées, un album dont on pourra juste reprocher la mise en son parfois un peu confuse (même sur le remaster) qui, cependant, contribue à perdre l'auditeur dans les méandres d'une conception sonique pas comme les autres.

1. The Psychedelic Warlords (Disappear in Smoke) 6:50
2. Wind of Change 5:08
3. D-Rider 6:14
4. Web Weaver 3:15
5. You'd Better Believe It 7:13
6. Hall of the Mountain Grill 2:24
7. Lost Johnny 3:30
8. Goat Willow 1:37
9. Paradox 5:35
Bonus
10. You'd Better Believe It (Single Version Edit) 3:22
11. The Psychedelic Warlords (Disappear in Smoke) (Single Version) 3:57
12. Paradox (Remix Single Edit) 4:04
13. It's So Easy 5:20

Dave Brock– lead guitar, 12-string guitar, synthesizer, organ, harmonica, vocals
Lemmy Kilmister– bass, vocals, guitars
Simon House– synthesizer, Mellotron, violin
Nik Turner– saxophone, oboe, flute, vocals
Simon King– drums, percussion
Del Dettmar– keyboards, synthesizer, kalimba

HAWKWIND

aFFReuX SaLeS eT MéCHaNTS
Motörhead "Ace of Spades" (1980)
ou "Speed Freaks"

Cette fois, on y est, Motörhead, le vrai, trio d'affreux sales et méchants despérados d'un rock cru et speedé, sorte d'hybride de hard rock et de punk rock mené par un ex-bassiste des space rockers d'Hawkwind, Lemmy bien sûr, est arrivé ! Parce qu'avec Ace of Spades, c'est du lourd, du rageur, et du classique incontestable, le mètre étalon du groupe, un bon gros brûlot qu'on n'a même plus besoin de conseiller. Comment ça c'était pareil sur les deux albums d'avant (Overkill et Bomber) ? Pas ma faute, Lemmy m'a trépané.
Et c'est compréhensible parce que l'assaut du machin, quoi, impressionnant ! Evidemment, en ces temps où les extrêmes se sont encore radicalisés, Motörhead parait presque comme un bon vieux groupe de hard mais, à l'époque, croyez-moi, c'était quelque chose ! Déjà, il y a la voix de Lemmy et ses cordes vocales qui ont dû être passées au papier de verre pour être si abrasives, ensuite, il y a la basse du même, en quatre ou en huit cordes, qu'il martyrise consciencieusement, et puis il y a la guitare de Fast Eddie Clarke qui, rien de bien compliqué en somme, booste les standards du rock'n'roll avec une dynamique, une attaque à peine croyable, enfin, il y a les martellements trépidants d'un Philthy Taylor, l'équivalent humain de l'Animal des Muppets, pas moins, et un surnom bien choisi, un ! Mais, outre l'agression rock'n'rollesque du trio, il y aussi des chansons, et quelles chansons ! Un petit coup d'œil à la tracklist du présent vous révèlera que les classiques n'y manquent pas de la chanson titre à (We Are) The Road Crew, de Jailbaità The Chase Is Better Than the Catch, ça dépote d'autant plus inspiré que ce qu'il y a autour est loin d'être négligeable. Comme, en plus, le tout est idéalement mis en son, cru et sale mais pas sans maîtrise, par l'excellent Vic Maile (qui fera le bonheur d'autres rockers costauds tels que les Inmates, les Godfathers ou Dr. Feelgood), et que la version remasterisée propose, bonheur !, les deux titres enregistrés en commun par Motörhead et leurs bonnes copines électriques (Girlschool) et une face B pas piquée des verts (Dirty Love), vous comprendrez que la fête est complète et que, en l'occurrence, le power trio le moins sexy du monde vient de réussir son troisième album référentiel d'affilée, le plus monumentalement réussi d'iceux.
Ace of Spades ? Si tu ne l'as pas c'est que tu as raté ta vie !

1. Ace of Spades 2:49
2. Love Me Like a Reptile 3:23
3. Shoot You in the Back 2:39
4. Live to Win 3:37
5. Fast and Loose 3:23
6. (We Are) The Road Crew 3:13
7. Fire, Fire 2:44
8. Jailbait 3:33
9. Dance 2:38
10. Bite the Bullet 1:38
11. The Chase Is Better Than the Catch 4:18
12. The Hammer 2:48
Bonus
13. Dirty Love 2:57 (B-side of "Ace of Spades")
14. Please Don't Touch 2:49 (St. Valentine's Day Massacre EP)
15. Emergency 3:00 (St. Valentine's Day Massacre EP)

Lemmy Kilmister  - bass, lead vocals
"Fast" Eddie Clarke - guitar, backing vocals on "Emergency"
Phil "Philthy Animal" Taylor - drums
&
14 - 15

GIRLSCHOOL
Kim McAuliffe - rhythm guitar
Kelly Johnson - lead guitar, vocals
Enid Williams - bass, vocals
Denise Dufort - drums

MOTÖRHEAD

SéQueNCe NoSTaLGie
The Head Cat "Fool's Paradise" (2006)
ou "Rockalemmy"

Quand Lemmy rend hommage au rock'n'roll, en compagnie de rockers de goutière dont l'histoirique Slim Jim Phantom, il jouait du tambour debout, ça donne ?
Ca donne The Head Cat et le second, si l'on compte celui où seuls les noms de musiciens sont mentionnés, de leur trois albums, le plus fameux du lot, Fool's Paradise. Au programme que des reprises, que du rock'n'roll originel comme l'affreux et pourtant si attachant bassiste (R.I.P.) l'affectionnait particulièrement. Cela réinvente-t-il quoique que ce soit ? Certes non mais là n'était de toute façon pas le but d'un album où l'omniprésence de Buddy Holly (la moitié de l'album) démontre que l'amour vrai du sieur Kilmister était bien pour cette musique-là, à laquelle il avait biberonné, tout en laissant de la place à quelques très jolies surprises comme le Big River de Johnny Cash. Par contre ça surprend. Parce que Lemmy n'y martèle pas violemment sa Rickenbacker mais gratte de la six-cordes acoustique, souffle dans l'harmonica et chante... presque comme s'il s'essayait à une berceuse. Bon, j'exagère mais le contraste avec les abrasifs éructations de la Tête de Möteur en chef est plus que flagrant, immense ! Et ça fonctionne, parce que l'on sent que ces trois messieurs (chacun bien dans son rôle) se font un réel plaisir, et donc nous avec, c'est aussi simple que ça.
Fool's Paradise, si vous aimez Lemmy, je vous le recommande, au-delà de la curiosité et du souvenir d'un incontournable du rock mondial.

1. Fool's Paradise 2:29
2. Tell Me How 1:50
3. You Got Me Dizzy 3:00
4. Not Fade Away 2:16
5. Cut Across Shorty 2:04
6. Lawdy Miss Clawdy 2:01
7. Take Your Time 2:03
8. Well...All Right 2:19
9. Trying to Get to You 1:40
10. Learning the Game 2:17
11. Peggy Sue Got Married 2:15
12. Crying, Waiting, Hoping 2:13
13. Love's Made a Fool of You 1:57
14. Big River 2:28
15. Matchbox 2:31

Lemmy Kilmister - vocals, acoustic guitar, harmonica
Danny B.Harvey - guitar, keyboards, bass guitar, background vocals
Slim Jim Phantom - drums, percussion, background vocals

THE HEAD CAT

Ian Fraser "Lemmy" Kilmister
24/12/1945 - 28/12/2015
R.I.P.

Un p'tit coup d'fil pour la nouvelle année ?

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S'il ne sont qu'un alinéadans la grande histoire du rock'n'roll mondial, ils sont tout un chapitre dans celle de la musique électrique française. A l'occasion de la sortie de leur presque intégrale, il en manque !, il n'est que temps de se pencher sur le cas de Jean-Louis Aubert, Louis Bertignac, Corinne Marienneau et Richard Kolinka... Téléphone !
 
aLLo?
Téléphone "" (2015)
ou "La presque intégrale du plus grand groupe de rock français de tous les temps"

Téléphone le plus grand groupe de rock français de tous les temps ?
Artistiquement, ça se discute parce que, fondamentalement, ils n'ont pas inventé grand chose les parisiens. Numériquement, commercialement (le vilain mot !) c'est inexact puisqu'ils sont devancés par Indochine (qui a sorti beaucoup plus d'albums, ceci dit). Culturellement, par contre, c'est assez indéniable et si certains qui suivirent, qu'on les aime ou pas, les précités presque de la même génération, Trust le temps de deux albums et puis s'écroule, et Noir Désirévidemment, ils furent les premiers et demeurent les plus "importants" (des guillemets parce que ça reste tout de même du rock'n'roll). Or donc, quand sort une quasi-intégrale remasterisée, il n'est que temps !, il est difficile de passer à côté.
Surtout qu'en plus d'un trésor nostalgique que les moins de vingt ans ne pourront pas connaître, c'est à une exemplaire collection de rock'n'roll à la française qui nous est offerte, et l'évolution d'une formation qui, si elle ne se départira jamais vraiment d'un charme post-adolescent, sans doute un peu calculé après quelques années et quelques albums, aura fait du chemin en un laps de temps finalement fort court, un septennat (de création discographique) et puis s'en va...
Premier constat, concernant l'objet en lui-même, la maison de disque a mis les petits plats dans les grands : des vinyl-replicas absolument convaincantes (on peut déshabiller Téléphone sur Crache ton Venin, Au cœur de la nuit a bien son trou central d'origine et Dure Limite sa pochette fenêtre), un gros livret reprenant moult photos et articles d'époque, trois cds de titres bonus et 5 jolies photos sur papier glacé le tout glissé dans un beau coffret noir du plus bel effet, ça le fait. Second constat concernant, cette fois, le contenu du package précédemment décrit, les remasters font un bien fou à un matériau tellement classiquement rock qu'il n'a pas pris une ride. Et si les bonus, quelques démos, beaucoup de live, finalement assez peu d'inédits d'un groupe qui ne stockait pas beaucoup, ne sont pas le festival de nouveauté qu'on aurait cru, ils prolongent agréablement l'expérience des 5 albums et 2 lives officiels.
Est-il vraiment la peine de revenir individuellement sur chaque album ?, d'expliciter que la verve adolescente de l'éponyme de 1977 se mue en savoir-faire sur ses deux successeurs (Crache ton venin, Au cœur de la nuit) ?, de préciser que les deux qui suivirent marquent le signe d'un schisme stylistique entre les deux leaders, Aubertétant de plus en plus intéressé par le funk quand Louis garde les fondamentaux pop, rock et blues accrochés à ses cordes électriques ? Qu'un batteur d'exception (le Keith Moon français, pas moins !) est très utile pour "tenir la baraque" surtout avec une bassiste qui n'outrepasse jamais le petit rôle qui lui a été confié ? Certes pas, c'est de la grande histoire de Téléphone dont il s'agit, celle que les quarantenaires et plus connaissent par cœur et que les jeunes-pousses auront tout loisir de "wikipédier" si le cœur leur en dit, avec pour excellente base un coffret qui donne enfin à la discographie de cette incontournable de notre scène à nous, l'écrin qu'il méritait.
Au cœur de Téléphone ? C'est une petite bombe qui, malgré ses quelques oublis (des versions alternatives, des versions anglophones, quelques live aussi), séduira les nostalgiques et saura, nulle doute, conquérir un nouveau public curieux de savoir de quoi il en retournait quand au succès phénoménal de la formation. Et ce n'est pas la confirmation d'une reformation, dont on ne connaît pas encore tout à fait les tenants et aboutissants (sauf que Corinne n'en sera pas, elle qui s'est brouillée depuis si longtemps avec Jean-Louis, sans, semble-t-il d'espoir de retour), qui viendra nier cet état de fait... Téléphone is back et c'est une excellente nouvelle !

CD 1
- Téléphone (1977)

1. Anna 3:02
2. Sur la route 4:03
3. Dans ton lit 3:30
4. Le Vaudou (est toujours debout) 2:15
5. Téléphomme 4:38
6. Hygiaphone 2:54
7. Métro (c'est trop) 4:26
8. Prends ce que tu veux 3:23
9. Flipper 6:05

CD 2
- Crache Ton Venin (1979)

1. Crache ton venin 4:58
2. Fait divers 3:17
3. J'suis parti de chez mes parents 2:41
4. Facile 3:12
5. La bombe humaine 4:23
6. J'sais pas quoi faire 3:40
7. Ne me regarde pas / Regarde - moi 5:40
8. Un peu de ton amour 2:41
9. Tu vas me manquer 5:42

CD 3
- Au Cœur de la Nuit (1980)

1. Au cœur de la nuit 3:29
2. Ploum ploum 1:55
3. Pourquoi n'essaies - tu pas ? 3:24
4. Seul 3:02
5. Laisse tomber 4:24
6. Un homme + un homme 2:00
7. Les Ils et les Ons 2:58
8. Argent trop cher 4:08
9. Ordinaire 2:38
10. 2000 nuits 2:28
11. Fleur de ma ville 3:15
12. La laisse 3:23
13. Le silence 4:40

CD 4
- Dure Limite (1982)

1. Dure limite 4:39
2. Ça (c'est vraiment toi) 4:28
3. Jour contre jour 3:37
4. Ex - Robin des bois 3:26
5. Le chat 4:54
6. Serrez 3:59
7. Le temps 4:18
8. Cendrillon 3:58
9. Juste un autre genre 3:42
10. Ce soir est ce soir 6:25

CD 5
- Un Autre Monde (1984)

1. Les dunes 4:11
2. New York avec toi 2:22
3. Loin de toi (un peu trop loin) 3:01
4. 66 heures 2:17
5. Ce que je veux 3:03
6. Le garçon d'ascenseur 4:56
7. Oublie ça 4:13
8. T'as qu'ces mots 2:51
9. Le taxi las 3:54
10. Electric cité 4:05
11. Un autre monde 4:33

CD 6
- Téléphone, Le Live (1986)

1. Au cœur de la nuit 4:28
2. Faits divers 3:27
3. Dure limite 4:26
4. Un peu de ton amour 5:05
5. La bombe humaine 3:54
6. Cendrillon 4:40
7. New York avec toi 2:44
8. Electric cité 4:44
9. Le taxi las 5:04
10. Juste un autre genre 4:15
11. Ce que je veux 3:06
12. Argent trop cher 4:03
13. Ça (c'est vraiment toi) 7:24
14. Un autre monde 6:32
15. Hygiaphone 2:43
16. Fleur de ma ville 5:29

CD 7
- Paris '81 (2000)

1. Crache ton venin 4:56
2. Fait divers 3:32
3. Au cœur de la nuit 3:31
4. Ploum ploum 2:11
5. Fleur de ma ville 4:36
6. Argent trop cher 4:06
7. Ordinaire 2:47
8. La bombe humaine 4:24
9. Laisse tomber 4:19
10. Seul 3:58
11. Telephomme 7:27
12. Hygiaphone 3:02
13. Tu vas me manquer 6:47
14. Le Silence 5:40

CD 8
Bonus

1. Hygiaphone (Démo 17 mai 1977) 3:07
2. Ma guitare (est une Femme) (Démo 17 mai 1977) 6:29
3. New York avec toi (Session de travail 12 février 1982) 2:33
4. Serrez (Session de travail 17 février 1982) 4:02
5. Métro (c'est trop) (Démo 17 mai 1977) 4:31
6. Dure limite (Session de travail 18 février 1982) 4:04
7. Cendrillon (Acoustique - Session de travail 12 mars 1982) 3:56
8. Argent trop cher (maquette juillet 1980) 4:41
9. Changer les lois (Instrumental - Session de travail Janvier 1979) 5:57
10. Shangaï (Instrumental - Session de travail 1983) 4:24
11. Ordinaire (Session de travail 1980) 2:58
12. Need in Mi (Instrumental - Session de travail 1980) 4:07
13. Ça (Démo 1982) 3:07
14. La même chose (répétition 1983) 3:07
15. Waterfall (Instrumental - Répétition juillet 1980) 2:54
16. Crache ton venin (prise console inédite Bataclan 1994) 6:24

CD 9
Bonus

1. Sur la route (07/06/1977 Olympia - Paris) 4:52
2. Métro (c'est trop) (07/06/1977 Olympia - Paris) 5:44
3. Medley 66 (07/06/1977 Olympia - Paris) 7:24
4. Annonce François Ravard + le public ''Bon anniversaire'' (live 12/11/1979 Montreuil) 0:44
5. J'sais pas quoi faire (live 12/11/1979 Montreuil) 3:28
6. Fait divers (live 12/11/1979 Montreuil) 3:14
7. Facile (live 12/11/1979 Montreuil) 5:01
8. Le Vaudou (est toujours debout) (live 12/11/1979 Montreuil) 4:58
9. Crache ton venin (27/03/1980 CBGB's - New York) 6:19
10. Métro (c'est trop) (27/03/1980 CBGB's - New York) 5:21
11. Ne me regarde pas / Regarde moi (27/03/1980 CBGB's - New York) 4:56
12. Flipper (27/03/1980 CBGB's - New York) 8:35
13. Pourquoi n'essaies - tu pas? (16/02/1981 Olympia) 5:00
14. Les Ils et les Ons (live 17/02/1981 Palais des Sports) 3:05
15. Ploum Ploum (live 17/02/1981 Palais des Sports) 2:19

CD 10
Bonus

1. Le jour s'est levé 4:50
2. Quelqu'un va venir 5:02
3. Tout ça c'est du cinéma 5:33
4. Hygiaphone (Bus Palladium 8 juin 1977) 3:03
5. Métro (c'est trop) (Bus Palladium 8 juin 1977) 5:04
6. Congas (Live - 1981) 1:47
7. Crache ton venin (Live - 1981) 4:30
8. 2000 nuits (Live - 1981) 2:42
9. Le Vaudou (est toujours debout) (Live - 1981) 5:46
10. Prends ce que tu veux (Live - 1981) 3:13
11. Fleur de ma ville (Live - 1981) 4:13
12. Un peu de ton amour (Live - 1981) 4:36

Jean-Louis Aubert - chant, guitare rythmique
Louis Bertignac - guitare solo, chant, choeurs
Corinne Marienneau - basse, chant, choeurs
Richard Kolinka - batterie, percussions
&
(sur "Un Autre Monde")
John Entwistle : cuivres sur T'as Qu'Ces Mots
Paul « Wix » Wickens : accordéon, synthétiseur

Corinne, Jean-Louis, Richard, Louis

SynthPop I: Avant-Garde (1977-1980)

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Avant d'attaquer le vif du sujet avec un second volume plus directement en rapport avec le thème, il n'est pas inutile d'explorer ceux qui influencèrent la future scène synthpop. Dont acte et, comme d'habitude, enjoie !

BeRLiNaDe
David Bowie "Low" (01/1977)
ou "Les Arts Electroniques"

A l'avant-garde de ce qui se passera dans les années 80, et pourtant encore fermement ancré dans les années 70, le David Bowie de Low est l'hybride trans-générationnel par excellence, un album rabibochant par anticipation le rock progressif des septantes et la synthpop des octantes, un petit miracle accompli à Berlin, dans les frimas de 1976.
Force est de constater que Low amorce donc une nouvelle mue pour David, une mue à laquelle l'ex-Roxy Music  Brian Eno, son compagnon principal de l'album, n'est certainement pas étranger. On retrouve aussi Tony Visconti aux manettes, lui qui n'avait pas été convoqué sur le précédent opus du Thin White Duke, Station to Station. Pour conclure avec l'équipe qui réalisa le tour de force que demeure Low, on précisera que si Carlos Alomar (guitare), Dennis Davis (percussion) et George Murray (basse) sont partiellement reconduits, c'est avant tout d'un album de duo (Bowie/Eno) dont il s'agit, il suffit d'ailleurs de jeter un œil aux crédits pour s'en convaincre.
Musicalement, autant du fait de la volonté de Bowie que de l'influence d'Eno, c'est un Bowie parti dans l'espace, avant-gardiste d'une new wave et d'une synthpop encore à l'état proto-embryonnaires, parce que sur Low ce sont bel et bien les synthétiseurs prennent le pas sur des guitares reléguées au rang d'épice certes important mais absolument pas force de traction de l'opus. Un opus composé de compositions faisant montre d'un retour d'inspiration pour David qui, déjà à la relance sur Station to Station après une phase moins reluisante (de Pin-Upsà Young Americans), mais qui, présentement, trouve vraiment quelque chose de nouveau, de frais à dire. C'est évident sur certaines chansons de Low (Breaking Glass, What in the World, Always Crashing in the Same Car) mais encore plus sur un emballage final (de Warsawaà Subterraneans) où, entre musique électronique ambiante, minimalisme et bricolage, Bowie met le doigt sur un ailleurs qu'il ne cessera ensuite de titiller, un ailleurs fait de grâce et d'étrangeté qui lui va tellement bien au teint.
Low ? C'est énorme, c'est incontournable, c'est influent comme rarement un album aussi tardif d'un artiste aussi installé l'aura été. Low ? Indispensable !

1. Speed of Life 2:46
2. Breaking Glass 1:52
3. What in the World 2:23
4. Sound and Vision 3:05
5. Always Crashing in the Same Car 3:33
6. Be My Wife 2:58
7. A New Career in a New Town 2:53
8. Warszawa 6:23
9. Art Decade 3:46
10. Weeping Wall 3:28
11. Subterraneans 5:39

David Bowie– vocals (2-6, 8, 10, 11), saxophones (4, 11), guitar (6, 9-11), pump bass (6), harmonica (7), vibraphone (9-10), xylophone (10), pre-arranged percussion (10), keyboards: ARP synthesiser (1, 10-11), Chamberlin: "tape horn and brass" (1), "synthetic strings" (1, 4, 9-10), "tape cellos" (5) and "tape sax section" (7), piano (7, 9-11)
Brian Eno– keyboards: Minimoog (2, 8-9), ARP (3, 11), E.M.I. (3, 5), piano (7-9, 11), Chamberlin (8-9), other synthesisers, vocals (4), guitar treatments (5), synthetics (7)
Carlos Alomar– rhythm guitars (1, 3-7), guitar (2)
Dennis Davis– percussion (1-7)
George Murray– bass (1-7, 11)
Ricky Gardiner– rhythm guitar (2), guitar (3-7)
Roy Young– pianos (1, 3-7), Farfisa organ (3, 5)
&
Iggy Pop
– backing vocals (3)
Mary Visconti– backing vocals (4)
Eduard Meyer– cellos (9)

DAVID BOWIE

SyNTHPuNKS uK
Ultravox "Ultravox!" (02/1977)
ou "Première incarnation"

Alors que le punk rock n'en est qu'à ses premières gesticulations britanniques, déjà, quelque part en Angleterre, l'avenir se prépare...
Evidemment, l'élément qui changera tout du son du groupe et le transformera en authentique formation synthpop, Midge Ureévidemment, n'est pas encore arrivé mais déjà, sous le vernis post-punk, les tentations pop et électroniques apparaissent déjà. Evidemment, l'assistance de Brian Eno (producteur de l'opus) est pour beaucoup dans un esthétisme abouti et avant-gardiste à la fois permettant à moult compositions du groupe de prendre un tout autre essor en plus d'un cousinage avec quelques gloires passées (Roxy Music et Hawkwind en particulier).
Dans les faits, ça donne des chansons tantôt encore largement assimilables à l'explosion crêtée qui vient de secouer les sujets de sa gracieuse majesté (Sat'day Night in the City of the Dead qui n'est pas moins énergique qu'un Clash de la même année, Life at Rainbow's End (For All the Tax Exiles on Main Street) qui bien que plus calme contient une vraie colère larvée, Wide Boys qui semble vouloir réveiller le glam rock à l'aulne d'une régénération punkoïde), tantôt d'authentiques chansons pop aux arrangements révélant ce que le groupe deviendra quelques années plus tard (le presque progressif I Want to Be a Machine, les tentations synthé-reggae de Dangerous Rhythm, la kraftwerkerie réussie de My Sex) mais, surtout, d'excellentes compositions n'ayant pas pris la moindre ride aujourd'hui, ce n'était pas gagné d'avance.
Et donc, alors que son quarantième anniversaire n'est plus très loin, Ultravox! demeure un album à la fois typique de son époque et en même temps intemporel et, par conséquent, aussi écoutable aujourd'hui que le jour de sa révélation au monde ébahi, oui, au monde ébahi et tant pis si ce ne sera pas le plus grand succès du groupe, c'est indéniablement une de ses plus belles pages.

1. Sat'day Night in the City of the Dead 2:35
2. Life at Rainbow's End (For All the Tax Exiles on Main Street) 3:44
3. Slip Away 4:19
4. I Want to Be a Machine 7:21
5. Wide Boys 3:16
6. Dangerous Rhythm 4:16
7. The Lonely Hunter 3:42
8. The Wild, The Beautiful and the Damned 5:50
9. My Sex 3:01
Bonus
10. Slip Away (Live) 4:12
11. Modern Love (Live) 2:31
12. The Wild, The Beautiful and the Damned (Live) 5:18
13. My Sex (Live) 3:05

Warren Cann– drums, backing vocals
Chris Cross– bass, backing vocals
Billy Currie– keyboards, violin
John Foxx– lead vocals, acoustic guitar on "I Want to Be a Machine"
Stevie Shears– guitars
&
Phil Collins
- drums (sampled from "Sky Saw") on "My Sex"



ULTRAVOX

SyNTHPuNKS uSa
Suicide "Suicide" (12/1977)
ou "Much ado about something"

Gonflés ! C'est ce qu'on pourrait dire de deux zozos new-yorkais se départissant de l'habillage habituel du bruit blanc dont ils sont les héritiers puisqu'optant pour une formation où le minimalisme le dispute à déchainement, l'un n'étant, en l'occurrence, pas exclusif de l'autre comme va nous l'expliquer Zardoz (X.Silence.net) :
"32 minutes (pour 7 titres) de délire malsain et sonore. Sans doute le disque le plus flippant de tous les temps. Et pour cause : Suicide (nom extrêmement commercial, pas vrai ?) se compose de deux dingues, Alan Vega (chants, hurlements, gémissements, halètements, crises de colère) et Martin Rev (claviers).
En guise de claviers, ne vous attendez pas à un mellotron, un Hammond ou a des pianos cristallins. Non ; c'est un sampler pourri, désaccordé, 'd'occasion', qui sert d'instrument. Le tout sonne comme un orgue fantômatique, et donne un ton funèbre et malsain à la musique de Suicide.
Le groupe ne joue plus, mais n'est pas séparé. Selon Vega, Suicide se reformera dès que le besoin d'argent se fera ressentir, voilà qui est franc.
Le groupe le plus haï de tous les temps. Lorsqu'ils se produisaient sur scène, ils ne laissaient personne indifférent (dans la réédition 1998 de ce magistral premier disque se trouve, sur un second CD -c'est une réédition 2 CD- un show à Bruxelles, 23 Minutes Over Brussels, où le groupe tenta de jouer l'intégralité de ce disque, en live, et dû s'arrêter au bout de 23 minutes -sur "Frankie Teardrop"- alors que le micro leur fut retiré, et que les spectateurs les insultaient, en français). Un document historique. Tétanisant.
Alan Vega, en parfait samouraï, n'hésitait pas à frapper les spectateurs (qui faisaient de même avec lui) et à les empêcher de sortir pour qu'ils 'profitent du show jusqu'au bout'. Sympa.
Imapssible, Martin Rev, toujours caché derrières de grosses lunettes noires de ski, jouait d'une main et, de l'autre, se protégeait des détritus lancés sur le groupe.
Ambiance.
Le disque ? 7 titres, donc. "Ghost Rider", "Rocket U.S.A.", "Cheree" (chanson d'amour, si, si), "Johnny", "Girl" sur la face A.
Et la face B, alors là... "Frankie Teardrop", 10 minutes de terreur pure, la chanson la plus effrayante jamais enregistrée, l'histoire d'un ouvrier qui bute sa famille (femme, gosses) avant de se revolvériser la tronche. Halètements, cris et hurlements stridents et absolument tétanisants de Vega. On 'vit' littéralement chaque meurtre -et le suicide- de Frankie, comme si... comme si on était Frankie, où bien un observateur invisible. Effrayant.
Puis, "Che", qui termine le disque. Après un tel déluge de terreur qu'est le morceau précédent, on a du mal à être marqués par "Che". C'est, cependant, un grand morceau.
La réédition CD offre un remix de "Cheree", deux bonus ("I Remember" et "Keep Your Dreams"), et, sur le CD 2, en plus des "23 minutes over Brussels", on trouve 5 titres joués en 'live' au CBGB, parmi lesquels les deux bonus tracks du disque 1, et une reprise de "96 Tears". Bref, des bonus tracks plus qu'intéressants : cruciaux.
Pochette dégoulinante, titre de groupe et de disque assez rebutants... Mais un album qui figure largement parmi les meilleurs du monde.
Attention : violent et perturbant. On ne préviendra jamais assez à ce sujet.
"
Parce qu'il faut être carrément punk pour déshabiller le rock'n'roll de ses habituels oripeaux électriques tout en le poussant dans ses derniers retranchements, parce qu'à l'avant-garde de l'industriel et de la synthpop cet inaugural album se pose un peu là, Suicide entre en mode bulldozer dans la légende de la musique du XXème siècle ...Vous aurez été prévenus.

1. Ghost Rider 2:34
2. Rocket U.S.A. 4:16
3. Cheree 3:42
4. Johnny 2:11
5. Girl 4:05
6. Frankie Teardrop 10:26
7. Che 4:53
Bonus
8. Cheree (Remix) 3:47
9. I Remember 3:11
10. Keep Your Dreams 4:49

CD Bonus
Live at CBGB's
1. Mr Ray 6:29
2. Las Vegas Man 4:23
3. 96 Tears 3:48
4. Keep Your Dreams 3:19
5. I Remember 5:11
6. Harlem 4:05
23 Minutes Over Brussels
7. 23 Minutes Over Brussels 22:56

Martin Rev - keyboards
Alan Vega - vocals

SUICIDE

ELeCTReNo
Brian Eno "Before and After Science" (12/1977)
ou "The Science of Music"

Un peu plus tôt dans l'année, Brian Eno a participé à la création d'un des albums majeurs de la seconde moitié des années 70, le Low de David Bowie, point encore repu, il enchaine sur sa création personnelle, un opus comparable en bien des points du précité, c'est un compliment, évidemment.
Before and After Science, puisque c'est de lui dont il s'agit, comme Low, est un exercice d'équilibriste entre le passé, le présent et le futur, comme Low il propose des chansons formatées pop et des plages ambiantes, comme Low il sera une influence majeur dans le développement du post-punk qui deviendra la new wave, qui deviendra la synthpop... Un album important, quoi. Un album fomenté de A à Z par un Eno qui, cependant, a su s'entourer de quelques une des authentiques pointures de son carnet d'adresses : Phil Collins, Robert Wyatt, Fred Frith ou Robert Fripp, pour ne citer que les plus fameux d'entre-eux.
Evidemment, sans chansons de qualité cet étalage n'aurait aucun sens, c'est heureux, elles sont là. Des exemples ? Il y a By This River d'abord, immense classique de l'album, moment de grâce absolu pour une chanson qui ne ressemble à rien d'autre sur l'album, petite ballade piano/chant qu'elle est. Le reste de l'opus offre une dichotomie entre chansons pop flirtant avec le funk et le post-punk naissant (No One Receiving a un petit côté Talking Headsà moins que ce ne soit l'inverse, King's Lead Rat, carrément un acronyme des précités, itou), d'autres encore plus ouvertement pop (Backwater pour le versant rythmé, Here He Comes pour la rêverie) et des explorations dans l'ambient (discipline dont Eno deviendra un spécialiste) comme sur les très réussis Kurt's Rejoinder, Julie With... ou Through Hollow Lands, ce dernier dédicacé à un compositeur qui ne tardera pas à faire parler de lui Harold Budd. Enoncé comme ça, tout ça n'a pas l'air bien novateur mais il faut écouter les détails de la production, les trouvailles des arrangements, détecter le rôle ô combien central de claviers divers et variés et de boîtes à rythmes encore relativement rare dans la musique "populaire" pour réellement se rendre compte du travail novateur ici accompli.
De grandes chansons (pas le moindre soupçon du moindre manqué que ce soit), une mise en forme annonciatrice d'un futur radieux ou embarrassant selon les goûts de chacun, c'est Before and After Science, un album qu'on n'a de cesse de recommander parce que l'art et la pop on rarement fait aussi bon ménage qu'ici. 

1. No One Receiving 3:52
2. Backwater 3:43
3. Kurt's Rejoinder 2:55
4. Energy Fools the Magician 2:04
5. King's Lead Hat 3:56
6. Here He Comes 5:38
7. Julie With ... 6:19
8. By This River 3:03
9. Through Hollow Lands (for Harold Budd) 3:56
10. Spider and I 4:10

Brian Eno– voices, synthesizers (Minimoog, EMS Synthi AKS, Yamaha CS-80), guitar, synthesised percussion, piano, brass, vibes, metallics, bell
Paul Rudolph– bass, rhythm guitar, harmonic bass
Phil Collins– drums
Percy Jones– fretless bass, analogue delay bass
Rhett Davies– agong-gong, stick
Jaki Liebezeit– drums
Dave Mattacks– drums
Robert Wyatt– brush timbales, time
Kurt Schwitters– voice
Fred Frith– modified guitar, cascade guitars
Andy Fraser– drums
Phil Manzanera– rhythm guitar
Robert Fripp– guitar
Achim Roedelius– grand piano, electric piano
Möbi Moebius– bass fender piano
Bill MacCormick– bass
Brian Turrington– bass

BRIAN ENO

eaRLy GeRMaiNS
Kraftwerk "The Man-Machine" (05/1978)
ou "Popwerk"

Kraftwerk goes Pop ! C'est, en peu de mots, le résumé de The Man-Machine, septième album d'avant-gardistes de Düsseldorf semblant bien décidés à séduire les masses avec des mélodies accrocheuses et une esthétique qui, c'est entendu, n'appartient qu'à eux (quoique Devo, par exemple, s'en soit largement inspiré).
Est-ce l'influence d'un nouveau compositeur dans l'équipe, Karl Bartos qui bien que présent depuis Radioactivity fait ses débuts créatifs ici, toujours est-il que, sans fondamentalement changer leur style, The Man-Machine est notablement plus pop que les précédents exercices de kraut-rockers électroniques. C'est évident dès The Robots où jamais Kraftwerk, vocoders, boîtes à rythmes et synthétiseurs vibrionnants  n'avait été aussi immédiatement accessible et accrocheur, dansant même. Cet état de fait est bientôt confirmé par le reste de l'album mais, plus particulièrement, par la première authentique (synth)pop song du groupe, The Model, une complète réussite avec, c'est à noter, un chant naturel ô combien inhabituel chez ces messieurs. Mais que les amateurs du trip Kraftwerk ne fuient pas pour autant, certes, c'est un nouveau Kraftwerk, plus ear-friendly, plus simple aussi où il y a cependant de beaux restes de leur esthétique passée (écoutez l'excellent Neon Lights si vous n'êtes pas convaincus).
Bref... Si l'album n'aura pas, à sortie, rencontré le succès escompté, l'anomalie a été depuis longtemps été réparée et l'opus célébré comme il se doit comme l'œuvre avant-gardiste et pourtant absolument abordable qu'il est.

1. The Robots 6:11
2. Spacelab 5:51
3. Metropolis 5:59
4. The Model 3:38
5. Neon Lights 9:03
6. The Man-Machine 5:28

Ralf Hütter–electronics, keyboards, Orchestron, Synthanorma Sequenzer, synthesiser, vocoder, voice
Florian Schneider– electronics, synthesiser, vocoder, Votrax
Karl Bartos– electronic drums
Wolfgang Flür– electronic drums

KRAFTWERK

NuSouND
Gary Numan "The Pleasure Principle" (09/1979)
ou "Cold Cold World"

Le dernier avant-gardiste de la synthpop des années 70 et pas des moindres, Gary Numan inventa tout dans un mode froid et paranoïaque qui fout carrément les miquettes comme va nous l'expliquer Trouble World (X.Silence.net) :
"Artiste britannique considéré par certains comme l'un des pionniers de l'électronique, aujourd'hui digne représentant de la scène industrielle aux côtés de NiN, pour ne citer que le plus célèbre (d'ailleurs, Trent Reznor ne nie pas la grande influence qu'a eu Numan sur son travail), et anciennement (1978-1979 pour être plus exact) leader de l'éphémère mais non moins important groupe Tubeway Army au single qui avait bousculer son monde en 1979 "Are "friends" Electric?", inspiré d'un livre de Philip K. Dick, il me semble que Gary Numan a laisser une certaine trace dans le paysage musical à partir de l'ère post-punk...
Après ce démarrage prometteur, Numan pense avoir les cartes en main pour se lancer dans une carrière solo qui sera aussi intéressante que chaotique, alternant entre véritables chef-d'œuvres (notamment durant sa période dite "classique" ou "machinique" qui couvre grosso modo 1979 à 1982 ainsi que sa période actuelle, plus industrielle) et cuisants echecs (les années 80 l'auront vu sortir d'horribles galettes au goût douteux d'une synthpop mièvre comme on en voyait par centaines à cette époque).
Mais concentrons-nous avant tout sur son premier album solo.
The Pleasure Principle, puisque c'est son nom, est sorti sous le label Beggars Banquet (au Royaume-Uni) et Atco (USA) en Septembre 1979. Enregistré au milieu de la même année et en même temps que l'album Replicas, sorti sous le nom de Tubeway Army, il se veut être l'un des albums, si ce n'est l'album, le plus intéressant de sa carrière, du moins du point de vue de ses fans. Contenant en outre la pièce "Cars", single au grand succès, ce premier album solo parviendra à la 1ère place des charts anglais, au coude-à-coude avec OMD, Depeche Mode ou Ultravox. Un succès mérité pour une musique pourtant pas si accessible qu'il n'y parait. En effet, Numan distille, tout au long de cet album, une atmosphère lourde, presque oppressante, frisant la claustrophobie. Sa recette ? Des synthétiseurs utilisés avec subtilité, au son qu'on pourrait presque qualifié de plaintif, la voix inimitable et presque inhumaine de Numan, une sorte d'alien perdu au hasard des machines, dans une ambiance grise et fermée. Le seul côté organique, qui donne toute l'ambiguité propre au charme de l'album se révèle être la batterie, tenu par un certain Cedric Sharpley. En effet, s'il est bien question de musique électronique, Gary Numan a recours à une batterie tout ce qu'il y a de plus traditionnelle, même si Sharpley possède un jeu d'une froideur exemplaire qui vient encore renforcer cette atmosphère si particulière.
L'album s'ouvre tout d'abord sur un morceau d'introduction purement instrumental "Airplane", qui pose les bases de cette ambiance décrite précédemment, une sorte de clair-obscur dont le thème principal semble solliciter, inviter l'auditeur à s'immerger plus loin dans l'album. Après cette mise en bouche efficace quoiqu'au synthétiseur relativement fatiguant, on approche un morceau tout simplement génialissime, peut-être l'un des meilleurs du répertoire de Numan et reprise plus tard par NiN dans son Fragile : "Metal". Le synthé nous accueille tout d'abord avec un thème efficace et entrainant avant que la batterie ne s'invite à la fête. On y découvre enfin la voix de Numan, exemplaire de machinisme, traitant d'une réflexion métaphysique dont seul lui possède le secret. On goûte également à une composition plus aérée et sombre, les nappes de synthés se superposant au fur et à mesure rajoutant à la tension palpable d'un morceau décidément sublime. Le morceau suivant, "Complex", se défend bien notamment grâce à l'introduction étonnante du violon, qui vient donner une note de fraicheur dans une composition qui reste grosso modo dans le même ton que précédemment, bien que moins sombre. "Films", quant à lui, est d'une qualité remarquable, qui vient donner un côté nocturne grâce à une association synthétiseur/basse du plus bel effet. On imagine des rayons lumineux dansant au beau milieu de la nuit. Autre morceau culte de ce Pleasure Principle : "M.E". Sorte de ballade nocturne où l'on imagine des OVNI défiler dans le ciel. Là encore, la mélodie vise juste et le morceau nous transporte volontiers sur une autre planète même si la petite partie instrumentale vers la fin du morceau est un peu longuette, désavantagée par un synthétiseur peut-être un iota criard. Morceau plus faible, "Tracks" nous fais ressentir une certaine lassitude et peine à nous tenir en éveil après des morceaux d'une qualité exemplaire. "Observer" ne relève pas forcément la sauce même s'il reste plaisant : "Tracks" et "Observer" représentent donc le petit passage faible de l'album. Du haut de ses 7 minutes, "Conversation" vient enfin prendre la relève et nous propose une composition relativement complexe même s'il nécessitera plusieurs écoutes avant d'être vraiment apprécié, du moins à mon sens. "Cars" et "Engineers" viennent clôturer un album décidément bien loti. Inutile de présenter "Cars", morceau très connu, qui avait fait carton à l'époque malgré sa structure original qui peut étonner de premier abord, notamment de par un synthétiseur au refrain aussi marquant que... présent. Enfin, 'Engineers' ferme la marche et vient clôturer ce premier album de Gary Numan, qui signe là l'une des premières oeuvres importantes de l'électronique moderne ou, dans une moindre mesure, de l'electro-pop.
Je tiens malgré tout à préciser que, de prime abord, l'album peut paraître très répétitif, l'artiste semblant privilégier une certaine homogénéité entre les différentes pistes. Ainsi, la première écoute peut laisser relativement perplexe, c'est après plusieurs écoutes qu'on finit par vraiment se laisser emporter par le travail de Numan.
"
Un festin qu'on met un peu de temps à digérer, donc. Une beauté glaçante ici bonussée de démos permettant de mieux comprendre la genèse de ce si étrange animal Essentiel.

CD 1
1. Airlane 3:18
2. Metal 3:32
3. Complex 3:12
4. Films 4:09
5. M.E. 5:38
6. Tracks 2:51
7. Observer 2:53
8. Conversation 7:37
9. Cars 3:57
10. Engineers 3:59

CD 2
1. Airlane (Demo Version) 3:18
2. Metal (Demo Version) 3:36
3. Complex (Demo Version) 3:17
4. Films (Demo Version) 2:42
5. M.E. (Demo Version) 4:30
6. Tracks (Out Take Mix) 2:51
7. Observer (Demo Version) 3:03
8. Conversation (Demo Version 2) 6:49
9. Cars (Demo Version) 3:14
10. Engineers (Demo Version) 3:50
11. Random (2009 Re-Master) 3:48
12. Oceans (2009 Re-Master) 3:00
13. Asylum (2009 Re-Master) 2:30
14. Photograph (2009 Re-Master) 2:27
15. Gymnopedie No. 1 (Demo Version) 2:26
16. Conversation (Demo Version 1) 3:56
17. M.E. (Out Take Mix) 5:15

Gary Numan– vocals, keyboards (Minimoog, Polymoog, ARP Odyssey), synthetic percussion
Paul Gardiner– bass
Chris Payne– keyboards (Minimoog, Polymoog, piano), viola
Cedric Sharpley– drums, percussion
&
Billy Currie– fadeout violin on "Tracks" and "Conversation"
Garry Robson– backing vocals on "Conversation"

GARY NUMAN

ViDeoSTaR
Buggles "The Age of Plastic" (01/1980)
ou "they've got the Horn!"

Prenez une dose de Kraftwerk pour l'influence électronique, une dose de Beatles pour la qualité de mélodie d'origine pop, un peu de l'énergie du post-punk et de la new wave naissante, un solide sens de l'humour et une obsession totalement nerdy/geeky pour la science-fiction et vous obtenez... The Age of Plastic, le premier album des Buggles de Trevor Horn et Geoff Downes.
Mais, fondamentalement, The Age of Plastic c'est surtout une collection d'excellentes chansons à l'esthétique et à la mise en son absolument cohérentes, un collection menée tambours battants par un énorme tube que vous connaissez forcément tous (Radio Killed the Video Star) qui fut, d'ailleurs, le tout premier clip diffusé sur une MTV naissante. A l'écoute de l'ensemble de l'album une évidence se fait jour : le tube n'est, cette fois, pas l'arbre d'inspiration qui cache la forêt du tout-venant puisque dès le sautillant et fun tour de force proto-synthpop Living in the Plastic Age, on entend que le groupe a des mélodies et des idées pour les mettre en forme à foison, impression confirmée les inflexions rétro-futuristes de Kid Dynamo, la relecture du Kraftwerk sur I Love You (Miss Robot), le dynamisme d'un Clean Clean qu'on situera quelque part entre la power-pop des Cars de Ric Ocasek et les œuvres de Giorgio Moroder, etc. puisque, sur cet opus extrêmement bien produit (par Horn et Downes) il n'y a rien à jeter et certainement pas les deux inédits de la version remasterisée (Island et Technopop) venant joliment prolonger l'expérience.
On sait maintenant qu'après un second album presque aussi réussi, Adventures in Modern Technology, le duo pliera les gaules, que, dans l'intervalle, ils surprendront leur monde en jouant les remplaçants de luxe pour Jon Anderson et Rick Wakeman dans un Yesà la relance (pour un excellent Drama, précision utile puisque l'album ne rencontrera pas le succès qu'il méritait), avant d'aller chacun de leur côté, Horn en producteur star (de Yesà Paul McCartney en passant par Frankie Goes to Hollywood ou t.A.T.u), Downes en claviériste "progopoppiste" chez Asia, reste cet opus originel, une réussite de tous les instants, donc, qu'on ne peut que chaudement recommander, même à ceux qui se croient allergique à pareille entreprise parce qu'il en connaissent l'emblématique single.

1. Living in the Plastic Age 5:13
2. Video Killed the Radio Star 4:13
3. Kid Dynamo 3:29
4. I Love You (Miss Robot) 4:58
5. Clean, Clean 3:53
6. Elstree 4:29
7. Astroboy (And the Proles on Parade) 4:41
8. Johnny on the Monorail 5:28
Bonus
9. Island 3:33
10. Technopop 3:50
11. Johnny on the Monorail (A very different version) 3:49

Geoff Downes– keyboards, drums, percussion
Trevor Horn– vocals, bass guitar, guitar
&
Bruce Woolley
– guitar
Paul Robinson– drums
Richard James Burgess– drums
Debi Doss– background vocals, on "Video Killed the Radio Star"
Linda Jardim– background vocals on "Video Killed the Radio Star"
Tina Charles– background vocals
Dave Birch– guitars on "The Plastic Age" and "Video Killed the Radio Star"

BUGGLES

SyNTHDeVo...
Devo "Freedom of Choice" (05/1980)
ou "...Priez pour nous"

Les synthétiseurs sont de plus en plus omniprésents dans la musique de Devo ? Maid Devo, au fond, ne change pas et produit aux octantes naissantes sont dernier grand album, un album dont ARP2600 (Forces Parallèles) va nous entretenir plus en détail :
"Comme la plupart des grands groupes de new wave, DEVO a tenu un bon rythme d'un album par an à la grande époque, pour eux entre 1978 et 1982, leurs cinq premiers constituant manifestement l'essentiel de leur œuvre. Il n'est pas illogique que le troisième, Freedom of Choice, soit le plus important car il se situe au milieu de cet ensemble. C'est aussi ici que se trouve leur plus grand (et unique ?) tube, c'est ici qu'apparaît le fameux dôme d'énergie, c'est ici que le style est le plus équilibré entre guitares et synthés, le plus important étant que la plupart des chansons sont bonnes, et qu'elles s'agencent de façon très cohérente.
La première chose dont il faut parler est ce fameux dôme d'énergie. Il s'agit de ce chapeau qu'on voit sur la pochette. C'est un genre de cône en plastique, en forme de ziggourat plutôt, la plupart du temps rouge vif, mais des versions verte, bleu foncé et cyan ont existé. Basé sur la théorie de l'orgone du Dr Reich, il est censé récolter l'énergie qu'on perd bêtement par la tête et la renvoyer vers les centres vitaux, donnant entre autres une meilleure longévité et de l'énergie sexuelle. Il s'agit d'une blague, bien sûr, dans la tradition des théories fantaisistes véhiculées par le groupe. Une façon habile de renforcer leur côté geek et de fidéliser encore plus leur public. Quoi qu'il en soit, ce machin reste trente-cinq ans plus tard leur marque de fabrique, qu'ils n'oseraient probablement plus ne pas porter en concert.
Le problème avec l'imagerie geek/nerd, c'est qu'elle comprend une part de sexisme. L'archétype du jeune homme intelligent, de préférence boutonneux et à lunettes, timide, passionné par la technologie mais ayant des difficultés avec les femmes. D'où la partie sexuelle du dôme d'énergie, par exemple. On ne peut rien considérer comme sérieux avec DEVO, et ils ont sans doute adopté ce cliché avec beaucoup de dérision. En tout cas, on trouve beaucoup de chansons assez peu flatteuses pour les femmes dans leur musique, et surtout à partir de ce Freedom of Choice. Ceci dit, c'est simplement une des composantes du rock de base, et DEVO n'est qu'un groupe de rock employant des sonorités et des looks bizarres, ce qui est un peu l'idée de toute la new wave, d'ailleurs. Ainsi, des chansons comme « Girl U Want» ou « Cold War» peuvent créer un petit malaise, mais surtout à cause de la froideur du son par rapport aux paroles.
Parlons-en de cette froideur. Après le travail assez léché de Ken Scott sur Duty Now for the Future, le groupe a cette fois adopté, avec l'aide de Robert Margouleff, un son tranchant, dynamique et glacé. Les guitares sont encore bien présentes, souvent assez abrasives et texturées. Elles se combinent avantageusement avec des sons électroniques assez crus, rappelant déjà ceux de The HUMAN LEAGUE, un rapprochement qui ne fera que s'amplifier sur les albums suivants. Les rythmes, quant à eux, sont plus mécaniques que jamais, et viennent sans doute de Düsseldorf... mais bon, tout groupe de new wave doit quelque chose à NEU! et KRAFTWERK. On peut dire que le son de Freedom of Choice est un des meilleurs exemples qui soient du genre, à citer auprès des grands albums d'ULTRAVOX : un mélange ambigu, à la fois dansant et inquiétant, parfois kitsch mais jamais ridicule, daté mais toujours intéressant à notre époque.
Parlons du grand tube du groupe, « Whip it». Une des meilleures chansons de l'album, sans doute, mais en rien spéciale par rapport aux autres titres. Elle est fort électronique, assez agressive. Le texte est un bon exemple de cette ambiguïté. Que doit-on fouetter au juste ? Il s'agirait de donner un coup de fouet à son ambition pour parvenir à son but, mais des doubles sens ne sont pas à exclure, n'est-ce pas. La mélodie n'est pas mauvaise non plus, et c'est un progrès par rapport à Duty. DEVO ne sera jamais un groupe de mélodistes, ils sont trop rock, trop punk pour faire dans les grandes envolées, d'autant qu'ils ne sont sans doute pas de grands chanteurs non plus, et ça n'a aucune importance dans leur style. Freedom of Choice offre toutefois un peu plus de diversité dans les hauteurs de son, et un meilleur emballage instrumental de la mélodie principale, qui suffisent à rendre la plupart des chansons crédibles.
Comme autres moments forts, citons « Ton o' love», au son particulièrement agréable et au chant lorgnant sur Brian Ferry, puis la chanson-titre et son texte un peu limite philosophiquement, à placer dans la continuité de la dé-évolution. Comme presque tous ceux du mouvement punk/new wave, il est assez évident que DEVO ne faisait qu'édifier au sujet du totalitarisme, et non pas l'approuver. Certains prennent toujours tout au premier degré, mais le groupe aura la bonne attitude de s'amuser de ces accusations, nous en reparlerons. Citons encore « Gates of Steel» et le final « Planet Earth», deux exemples impeccables de leur musique et de la new wave en général. Ce sera notre conclusion... Freedom of Choice est un des albums du style principal de la new wave à écouter en priorité, et sans doute la meilleure contribution américaine, si on classe à part les TALKING HEADS.
"
Pas le plus souvent recommandé des album de ces furieux rigolards, sans doute l'un des plus essentiels néanmoins, Freedom of Choice est un opus à ne pas louper.

1. Girl U Want 2:55
2. It's Not Right 2:20
3. Whip It 2:37
4. Snowball 2:28
5. Ton o' Luv 2:29
6. Freedom of Choice 3:28
7. Gates of Steel 3:26
8. Cold War 2:30
9. Don't You Know 2:14
10. That's Pep! 2:17
11. Mr. B's Ballroom 2:45
12. Planet Earth 2:45
Bonus
13. Freedom of Choice Theme Song (Live) 2:46
14. Whip It (Live) 2:41
15. Girl U Want (Live) 2:56
16. Gates of Steel (Live) 3:17
17. Be Stiff (Live) 2:50
18. Planet Earth (Live) 2:32

Mark Mothersbaugh– guitar; keyboards; vocals
Gerald V. Casale– bass guitar; keyboards; vocals
Bob Casale– guitar, keyboards; vocals
Bob Mothersbaugh– guitar; vocals
Alan Myers– drums

DEVO

Hippies à la Montagne

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Catherine Ribeiro + Alpes
"Intégrale des Albums Studio (1969-1980)" (2015)

C'est l'histoire d'un oublié des bilans anthologiques de la scène française, une formation qui, malgré une bonne dizaine d'années d'activité, 9 albums et moult concerts aux quatre coins (!) de l'Hexagone, semble quelque peu tombé en désuétude, c'est l'histoire de Catherine Ribeiro + Alpes.
Premier challenge au chroniqueur quand se présente pareille bande de zozos hallucinés, tenter l'impossible description d'une musique qui, fondamentalement, se décrit d'autant moins qu'elle est multiple et variable, bref, allons y. Parlons de la voix de Catherine d'abord, que certains connaissent peut-être pour une carrière solo un poil moins confidentielle que celle de son épopée avec Alpes, entre tradition d'une chanson française classique et explosion hippie de la fin des années 60, ou plutôt en ajoutant l'un à l'autre, avec un petit quelque chose de Nico mais en plus barré, plus trippé, et auteure de ses propres textes surtout, et là il y a du grain à moudre pour ceux qui apprécient Léo Ferré avec qui la miss Ribeiro possède une comparable écriture écorchée vive souvent noire de noire et fréquemment politisée versant révolutionnaire qui fait d'elle une passionaria rouge baiser autant que rouge sang. Parlons ensuite de la musique et de son artificier en chef, le majoritairement guitariste Patrice Moullet, une musique empruntant tant à une tradition folk nationale et internationale (l'Inde est passée par là) qu'à un psyché-progressisme aux correspondances britanniques évidentes mais point envahissantes (on pense notamment à Comus ou à Vashti Bunyan sans que ça enlève quoique ce soit à la personnalité forte d'Alpes). Parlons, enfin, de la progression qui vit le groupe apparaître à la fin des années 60 pour disparaître au début d'une décennie matérialiste par excellence, les 80s, des débuts freak folk à l'ajout progressif de synthétiseurs élargissant le spectre et tirant Ribeiro et Alpes vers un space rock folkisé sans rien perdre du charme originel de la troupe puis à une normalisation des instrumentations leur faisant perdre un poil du charme déjanté de leurs débuts et de leur période glorieuse (jusque Le Temps de l'Autre de 1977).
Et puis il faut saluer l'initiative de cette bienvenue réédition, noter que la transcription d'un format à l'autre se fit dans un parfait professionnalisme et qu'on peut donc librement jouir du festin sonore martien qui s'offre à nous. A part ça, l'affaire est d'une extrême sobriété dans sa petite boîte avec une simple pochette cartonnée pour chaque opus, on pourrait même dire que tout ça est un peu cheap s'il n'y avait un joli livret biographique (en français et en anglais) augmenté de quelques photos d'époque. Rien de bien spectaculaire, en somme, mais comme l'intérêt est surtout dans la musique et les textes on ne fera pas trop la fine bouche.
Evidemment, on se dit, et on a sans doute raison, qu'il y a beaucoup d'improvisation là-dedans, que certains étirements pas forcément tout à fait nécessaires sont représentatifs d'une époque, de substances, d'un trip qu'on écoute plus aujourd'hui comme un anthropologue amusé que comme un auditeur passionné, à moins de donner dans le magic mushroom, of course. Mais tout ceci se tient bien, emporte bien l'auditeur dans un temps qui savait le prendre, son temps, et laisser parler sa folie, moins de formatage, plus de délire, c'est plaisant, et dépaysant.
En gros et en résumé, un salutaire changement de braquet pour les curieux de 2015 trop souvent traités au supra-ciblé, un festival beat rare et précieux d'un presque oublié de chez nous qu'on recommande, forcément. Quand à ceux qui connaissaient déjà se contentant de rips vinyl  approximatifs, qu'ils se réjouissent d'une remasterisation enfin accomplie et d'une salutaire mise à disposition d'une œuvre passionnée et passionnante.

CD 1
- "Catherine Ribeiro + 2bis" (1969)
1. Lumière écarlate 4:13
2. Soeur de race 2:43
3. Les fées carabosses 5:23
4. Voyage 1 5:34
5. La solitude 3:12
6. Un sourire, un rire, des éclats 4:10
7. Le crime de l'enfant dieu 4:36
8. Le point qui scintille 6:08

CD 2
- "N°2" (1970)
1. Prélude 0:28
2. Sîrba 5:45
3. 15 août 1970 4:18
4. Silen voy kathy 7:21
5. Prélude 0:28
6. Poème non épique 18:36
7. Ballada das aguas 3:22

CD 3
- "Âme debout" (1971)
1. Âme debout 7:23
2. Diborowska 3:37
3. Alpes 1 5:45
4. Alpes 2 6:21
5. Alpilles 1:23
6. Aria populaire 2:07
7. Le kleenex, le drap de lit et l'etendard 3:26
8. Dingue 4:37

CD 4
- "Paix"(1972)
1. Roc alpin 3:04
2. Jusqu'à ce que la force de t'aimer me manque 3:00
3. Paix 15:49
4. Un jour... la mort 24:41

CD 5
-"Le Rat débile et l'Homme des champs" (1974)
1. La petite fille aux fraises 5:11
2. L'ère de la putréfaction 13:05
3. Un regard clair 4:48
4. Poème non épique (suite) 25:22


CD 6
- "(Libertés ?)" (1975)
1. Une infinie tendresse 6:01
2. Prélude médiéval 2:53
3. Parle-moi d'un homme heureux 5:18
4. Qui à parlé de fin 4:45
5. Poème non épique nº3 22:37


CD 7
- "Le Temps de l'autre" (1977)
1. Le temps de l'autre 7:32
2. Cette voix 8:54
3. Aimer quoi qu'il arrive 5:53
4. Le silence de la mort 10:13
5. Kel epik epok opak ! 9:40


CD 8
- "Passions"(1979)
1. Iona mélodie 4:35
2. Frères humains 4:48
3. Cristalpin 3:52
4. Prélude 0:58
5. Tous les droits sont dans la nature 7:15
6. L'oiseau devant la porte 11:08
7. Alpinette 2:10
8. Femme témoin 3:35
9. Détournements de chants 4:23

CD 9
- "La Déboussole" (1980)
1. La vie en bref 3:36
2. Voyage au fond de l'amour 3:02
3. La grande déglingue 3:24
4. Ne pas partir ne pas mourir 2:19
5. Dis-moi qui tu embrasses 5:30
6. La nuit des errants 5:30
7. La parole est à la victime 3:03
8. Paix 11:56


Avec
Catherine Ribeiro - chant
Patrice Moullet - guitare à 24 cordes, guitare classique, percuphone, cosmophone
Alain Aldag - batterie, orgue
Patrick Rousset - batterie
Claude Thiébaut - percuphone
Denis Cohen - piano, synthétiseur, percussion d'orchestre
Patrice Lemoine - synthétiseurs, orgue Viscount
Sébastien Lemoine - basse électrique et percuphone
Daniel Motron - orgue Farfisa, synthétiseurs
Gérald Renard - basse, percuphone
Henri Texier - contrebasse et basse électrique
Carole Rayne - batterie
Jean-Daniel Couturier- basse
Francis Campello - basse
Mireille Bauer - percussions
David Rose - violon
Pierre Gasquet - percussions

Catherine et ses Freaks (noyau dur) !

Catherine Ribeiro + Alpes en scène

SynthPop II: Gloire ! (Première Partie, 1980-1982)

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Pour ce second volume couvrant tout ou partie des années 1980 à 1982, on entre dans le vif du sujet avec des groupes ayant largement participé au développement et à la réussite commerciale de la pop synthétique, la succession de ceux du coup d'avant, quoi. Enjoie !

DaViD eT LeS GaRCoNS
Japan "Gentlemen Take Polaroids" (09/1980)
ou "la classe Japonaise"

C'est l'album de la maturité, celui où l'alchimie d'un quintet jamais tout à fait comme les autres atteint sa plénitude, le dernier à cinq aussi, Rob Dean quittant bientôt le navire pour ne pas être remplacé, c'est le mètre-étalon de la new wave classieuse et synthétique aussi, c'est Gentleman Take Polaroids, quatrième album du Japan de David Sylvian.
Evidemment, stylistiquement, il y a ceux qui vous dirons que c'est là que Japan se lance corps et âme dans des odyssées pop synthétiques par pur opportunisme commercial. Premièrement, ça n'a rien de surprenant David et ses amis arrivant là suite à une évolution logique, c'est aussi la marque, toujours aussi présente, de l'influence bien digérée de David Bowie et Brian Eno qui sont y passés avant et desquels Japan est le plus bel héritier. Deuxièmement, c'est ici fait avec goût, intelligence et un sens harmonique jamais battu en brèche et puis, franchement, pour évidemment new romantic (comme on disait alors) et synthpop que soit l'emballage (de John Punter, qui a déjà collaboré avec Japan le coup d'avant, sur Quiet Life, mais aussi avec Bryan Ferry, autre figure tutélaire de l'art des samouraïs du synthétiseur) on est loin des accrocheurs refrains et blips-blips post-Kraftwerkiens étant généralement l'apanage du genre. Si on osait, osons !, on dirait même que Japan a quelque chose de progressif dans ses climats ouateux et riches, dans les entrelacs de claviers, percussions et cordes. Et puis il y le baryton chaud de Sylvian, autre caractère absolument distinctif de la formation, et l'ambiance douce-amère qu'il apporte, parfait complément d'une musique toute en nuances et trompe-l'œil.
Parfois dansant, comme on imagine Bowie se trémousser sur un faux-funk blanc de blanc, toujours passionnant dans ses détails et ses trouvailles, Gentlemen Take Polaroids est plus qu'un bête album des années 80, plus qu'une galette typique de son temps, même si elle l'est indubitablement aussi, c'est une œuvre d'art que je vous engage fortement à découvrir.

1. Gentlemen Take Polaroids 7:08
2. Swing 6:23
3. Burning Bridges 5:23
4. My New Career 3:52
5. Methods of Dance  6:53
6. Ain't That Peculiar 4:40
7. Nightporter 6:57
8. Taking Islands in Africa 5:12
Bonus
9. The Experience of Swimming 4:04
10. The Width of a Room 3:14
11. Taking Islands in Africa (Steve Nye Remix) 4:53

David Sylvian– vocals, synthesizers (ARP Omni, Oberheim OB-X, Minimoog, Roland System 700), piano, electric guitar
Mick Karn– fretless bass guitar, oboe, saxophone, recorder
Steve Jansen– drums, synthesizer (Roland System 700, Sequential Circuits Prophet 5), percussion
Richard Barbieri– synthesizers (Roland System 700, Micromoog, Polymoog, Prophet 5, Oberheim OB-X, Roland Jupiter 4), sequencer, piano
Rob Dean– guitar, ebow
&
Ryuichi Sakamoto
– synthesizers
Simon House– violin on "My New Career"
Cyo– vocals on "Methods of Dance"
Barry Guy– double bass
Andrew Cauthery– oboe

JAPAN

SyNTH WaVe
Depeche Mode "Speak & Spell" (10/1981)
ou "New Pop"

Ils disent alors qu'ils sont des punks avec des synthétiseurs, ce n'est pas exactement ce qu'on entend, toujours est-il que c'est dès ce premier album, Speak & Spell, que les petits gars de Basildon s'imposent comme une force vive et un incontournable d'un "mouvement" alors en pleine explosion populaire, la synthpop.
Evidemment, formation débutante y compris dans le style qu'elle a décidé de jouer, une affection qui ne remonte alors qu'à quelques cours mois, Depeche Mode est encore très dérivatif de Kraftwerk, Gary Numan ou des travaux débutants de The Human League mais, avec l'enthousiasme de la jeunesse et les talents mélodiques combinés de Vince Clarke (compositeur principal pour son unique opus avec le groupe avant de nouvelles aventures) et de Martin Gore (deux chansons seulement, Tora! Tora! Tora! et Big Muff, ce dernier un instrumental tout droit venu de Düsseldorf) ils s'en sortent déjà très bien. Des exemples ? Il y a le gros tube de l'album d'abord, Just Can't Get Enough, tout en blips blips infectieux et mélodie accrocheuse, parfaite pop song synthétique qui réjouit encore les masses (et l'industrie publicitaire) aujourd'hui, mais aussi de quasiment aussi addictives petites douceurs (New Life, Boys Say Go!, What's Your Name? ou Dreaming of Me) autant d'exemple d'une innocence compositionnelle comparable à celle de Beatles débutants mais où, autres temps autres mœurs, on fait se trémousser les corps blancs adolescents au son d'une nouvelle génération, d'une nouvelle Angleterre. On est donc loin des trésors de noirceur qui, développéss ensuite, dès A Broken Frame en 1982 mais surtout à partir de Some Great Reward (1984), donneront au groupe une profondeur, une substance, une portée émotionnelle aussi, qu'il ne fait qu'effleurer ici. Le départ de Vince Clarke n'y est sans doute pas pour rien mais ça, c'est une autre histoire...
Bref, album imparfait mais absolument sympathique, œuvre débutante pleine de fraicheur et d'allant, oui même sur des chansons aux titres aussi dépressifs que I Sometimes Wish I Was Dead, Speak & Spell est une jolie petite réussite d'une formation dont on imagine pas alors l'importance historique ou l'excellente carrière à venir.

1. New Life 3:43
2. I Sometimes Wish I Was Dead 2:14
3. Puppets 3:55
4. Boys Say Go! 3:03
5. Nodisco 4:11
6. What's Your Name? 2:41
7. Photographic 4:44
8. Tora! Tora! Tora! 4:34
9. Big Muff 4:20
10. Any Second Now (Voices) 2:35
11. Just Can't Get Enough 3:40
12. Dreaming of Me 4:03

Dave Gahan - lead vocals
Martin Gore - keyboards, backing vocals, lead vocals on "Any Second Now (Voices)"
Andy Fletcher - keyboards, backing vocals
Vince Clarke - keyboards, programming, backing vocals

DEPECHE MODE

SyNTHPoP STaNDaRD
The Human League "Dare" (10/1981)
ou "Garçons coiffeurs"

C'est la transformation du vilain petit canard qui essaye mais n'y arrive décidément en beau signe caracolant en tête des charts britanniques, c'est l'arrivée du nouveau The Human League sur un troisième album touchant enfin le coeur de la cible, et c'est Twilight (Guts of Darkness) qui va nous en parler :
"'Dare' porte bien son nom; c'est pour The Human League l'album dangereux, celui qui repart à neuf, qui opte pour le commercial sans perdre sa créativité tout en regardant de très près le miroir de la célébrité.
Après deux albums plutôt bien écrits mais trop audacieux pour le public visé, Phil Oakey se trouve seul avec le responsable des visuels, Adrian Wright. Ses anciens collègues lui laissent le nom de Human League en échange de la promesse de leur verser 1% des recettes du futur album (auquel personne ne croyait). Un bassiste, Ian Burden, est engagé ainsi que deux choristes que Phil avait repéré dans une boîte. La présence des deux filles va comme par miracle permettre au groupe de se débarasser de son image d'intellos prétentieux.
Avec l'aide du producteur Martin Rushent, spécialiste de la new wave, les artistes épurent les lignes, s'approchent de schémas plus classiques dans la composition, moins expérimentaux en apparence, et parviennent à donner à leurs sonorités cette touche pop recherchée depuis le début. Le véritable génie de Human League est d'avoir réussi cette réorientation commerciale sans perdre une forme d'audace. 'Dare' est bourré de tubes tels que 'Open your heart', 'Sound of the crowd', 'Do or die' ou l'énorme 'Don't you want me'; pourtant mille et uns détails font que le groupe ne sonne pas comme une simple formation pop. Un morceau tel que 'Sound of the crowd' n'a pas de véritable refrain, les passages musicaux à l'intérieur des chansons sont nombreux mais épurés comme des lignes à chantonner... Le rythme est là, les sons sonnent plus chaleureux pourtant il subsiste une évidente trace de mélancolie ('I'm the law'), quelque chose de légèrement sulfureux, un peu à l'image du look de Phil plus androgyne que jamais.
Cet équilibre parfait entre le rythme, des mélodies efficaces et une légère ombre pour conférer la gravité nécessaire aux titres font de 'Dare' le meilleur essai de Human League et son succès sera d'ailleurs énorme. La suite se révélera moins intéressante, le groupe développant hélas une pop toujours plus insipide et commerciale."
Dans le genre, on fait difficilement mieux, laissez-vous tenter !

1. The Things That Dreams Are Made Of 4:14
2. Open Your Heart 3:53
3. The Sound of the Crowd 3:56
4. Darkness 3:56
5. Do or Die 5:25
6. Get Carter 1:02
7. I Am the Law 4:09
8. Seconds 4:58
9. Love Action (I Believe in Love) 4:58
10. Don't You Want Me 3:56

Philip Oakey: Vocals & Synthesizer
Philip Adrian Wright: Synthesizer & Slides
Ian Burden: Synthesizer, Bass
Jo Callis: Synthesizer
Joanne Catherall: Vocals
Susan Ann Sulley: Vocals

THE HUMAN LEAGUE

GoLDeN MaNœuVReS
Orchestral Manœuvres in the Dark "Architecture & Morality" (11/1981)
ou "DarkSynth"

Après deux albums où ils cherchent leur chemin dans l'explosion synthpop/new wave qui déferle sur les territoires de Mamie Liz', c'est sur Architecture & Morality qu'Orchestral Manœuvres in the Dark trouve enfin son sombre chemin comme va nous l'expliquer Alessandro (Bout de vie) :
"Véritable Eldorado de souvenirs pour les uns, bac à matières fécales pour les autres, les années 80 déchirent autant qu’elles passionnent. Il faut dire que la période fut propice aux productions abjectes et intrinsèquement aux morceaux scandaleusement kitsch et souvent dépourvus de toute élaboration musicale. Soit. Il est de toute façon fâcheux de ranger tout et n’importe dans le même panier sous prétexte qu’une grande partie des disques de cette période est représentatif du mauvais goût absolu. Cela ne fait que nuire à la démarche artistique de nombre de groupes à la vocation toute autre de l’époque. Preuve en est avec Architecture & Morality, véritable mastodonte de la new wave romantique, peut-être l’un des meilleurs albums du genre qui soit, et encore aujourd’hui plus d’actualité qu’il n’y paraît.
Fin des années 70, la musique électronique bat son plein et est surtout rattachée à la scène expérimentale. Fort d’une envie de la sortir de ce carcan, Orchestral Manœuvres in the Dark (comme d’autres groupes) décide de démocratiser l’electro et de la rendre plus accessible que ce qu’elle n’était tout en veillant à garder une part d’expérimentation (on retrouve même un rescapé issu de la scène progressive : le mellotron). Après deux premiers albums satisfaisants, le groupe, alors plus connu sous le doux acronyme de OMD, nous offre cette parure de morceaux tous plus réussis les uns que les autres. Un condensé d’un peu plus de 35 minutes de new wave mélancolique, riche, travaillée et surtout intemporelle, essentiellement propulsée par un jeu de claviers et une rythmique saisissants de maturité et de justesse.
Certains morceaux tels que « Joan of Arc», « Maid of Orleans»  ou bien encore « Souvenir», le tube dédié au défunt Ian Curtis de Joy Division, contribuèrent à la réputation du duo anglais. Architecture & Morality accueille aussi l’un des morceaux les plus touchants et dramatiques du conglomérat : « Sealand». Véritable requiem à la rythmique intense et aux claviers scandant une douleur sans pareille. Un morceau long de presque 8 minutes à rattacher facilement avec les grands hits de la coldwave. Un tube en puissance qui saperait sans problème le moral à Mickey Mouse himself, et qui a la bonté de ne pas voler la vedette au reste de la galette tout en faisant la liaison avec la conclusion : « The Beginning And The End», tout aussi fataliste et d'une beauté sans pareille.
Conclusion, Architecture & Morality est indispensable à toute personne désirant se lancer en quête des grands crus des années 80. Intense, couvant une pop expérimentale qui n’en fait pas de trop, installant les prémices de la synthpop que l’on connaît aujourd’hui, d’une véritable intemporalité, riche et varié, absolument rien n’est à jeter. Un disque qui se savoure de préférence d’une traite et que l’on se repassera à loisir pour être bien sûr d’avoir capté le moindre éclair de génie qui s’en dégage.
"
Un album important mais, surtout, un excellent album.

1. The New Stone Age 3:22
2. She's Leaving 3:28
3. Souvenir 3:39
4. Sealand 7:47
5. Joan of Arc 3:48
6. Joan of Arc (Maid of Orleans) 4:12
7. Architecture and Morality 3:43
8. Georgia 3:24
9. The Beginning and the End 3:48
Bonus
10. Extended Souvenir 4:16
11. Motion and Heart (Amazon version) 3:07
12. Sacred Heart 3:30
13. The Romance of the Telescope (Unfinished) 3:22
14. Navigation 3:00
15. Of All the Things We've Made 3:25
16. Gravity Never Failed 3:24

Paul Humphreys– synthesisers, piano, mellotron, acoustic and electronic percussion, organ, rhythm programming, radios, melodica and vocals
Andy McCluskey– synthesisers, mellotron, guitar, bass, rhythm programming, acoustic and electronic percussion, reed horns, organ and vocals
Malcolm Holmes– drums, electronic and acoustic percussion, bass synthesiser
Martin Cooper– saxophone

ORCHESTRAL MANOEUVRES IN THE DARK

oNe GReaT SHoT
Visage "Visage" (11/1981)
ou "Traits seyants"

Un haut fait new romantic/synthpop ?, avec de vraies stars en devenir dedans ? C'est Visage et son premier album éponyme !
En l'occurrence, mené par un Steve Strange quelque part entre Düsseldorf et Berlin, entre Kraftwerk et David Bowie, comprenant la participation de gens aussi recommandables que Midge Ure (futur Ultravox et également metteur en son de l'exercice), John McGeoch (ex-Magazine, futur P.I.L. mais surtout un extraordinaire guitariste), Dave Formula (ex-Magazine itou), Bill Currie (passé par Tubeway Army et évidemment Gary Numan) et Rusty Egan (alors ex-Rich Kids), mais aussi les apparitions de Barry Adamson (ex-Magazine et Luxuria, un garçon dont la carrière solitaire est chaudement conseillée) et Chris Payne et Cedric Shapley de chez une autre formation synthpop prometteuse, Dramatis, c'est du premier super-groupe du genre dont il s'agit.
Avec tant de talent réuni, pas étonnant que l'album soit le triomphe qui nous est offert. Evidemment, il y a l'imparable single, Fade to Grey, mais il n'est pas le majestueux arbre cachant la maigre forêt, simplement l'étendard, le maître-étalon des possibilités de la bande puisqu'on retrouve quasiment les mêmes qualités d'ambiance et de mélodie sur Blocks on Blocks ou Mind of a Toy, deux autres flamboyantes réussites d'électro-pop fin et frais. Mais si Visage sait faire rêver, voir ce qui précède, il sait aussi faire danser sur d'infectieux beats synthétiques ornés de synthétiseurs typiques mais pas toc (Visage, la chanson, The Dancer), amuser sur un hommage au grand Clint infusé d'influences western (Malpaso Man) ou réfléchir sur son hymne tabacophage (Tar), un si beau package qu'on oublie bien vite un instrumental final pas franchement affolant (The Steps).
Par la richesse de sa musique, par la qualité de sa production, par son côté si typique, si tellement de son temps, l'inaugural œuvre de Visage est devenu un classique de plein droit, ce n'est que mérité pour une si belle réussite, de celles qui permettront à l'auditeur débutant dans le style de savoir s'il vaut le coup d'aller plus avant parce que, francehment, si vous n'aimez pas Visage, c'est que la synthpop ne sera jamais votre affaire.

1. Visage 3:53
2. Blocks on Blocks 4:00
3. The Dancer 3:40
4. Tar 3:32
5. Fade to Grey 4:02
6. Malpaso Man 4:14
7. Mind of a Toy 4:28
8. Moon Over Moscow 4:00
9. Visa-age 4:20
10. The Steps 3:14

Steve Strange– lead vocals
Midge Ure– guitar, backing vocals, synthesizers
John McGeoch– guitar, backing vocals, saxophone
Dave Formula– synthesizer
Billy Currie– electric violin, synthesizer
Rusty Egan– drums, backing vocals, electronic percussion
&
Barry Adamson
– bass guitar (1, 2, 4)
Chris Payne– synthesizer (5)
Cedric Sharpley– drums, electronic drums programming (5)
Brigitte Arens– voice (5)

VISAGE
(1979)

SoFTPoRN
Soft Cell "Non-Stop Erotic Cabaret" (11/1981)
ou "Synth Decadence"

Sans plus de commentaires, je cède la place à l'excellent billet de Nicolas Lejeune (etat-critique.com) sur le sommet de la jeune carrière de Marc Almond et David Ball aka Soft Cell :
"Les années 1980 et la new wave font un retour en force dans la mode, la pub et bien sûr la musique. Le nec plus ultra aujourd’hui pour un groupe étant de sonner comme Joy Division, New Order ou les Talking Heads, repenchons nous sur cette décennie un peu oubliée, si ce n’est, dans son versant le plus commercial, par les radios pour trente et quarantenaires qui matraquent à longueur d’onde les mêmes tubes depuis la nuit des temps.
"Tainted Love", de Soft Cell, est depuis sa sortie en 1981 un des morceaux favoris des rallyes et autres soirées de la haute bourgeoisie française où les enfants du Bottin Mondain dansent toujours le même rock saccadé en col rond et Weston reluisantes.
Et pourtant, s’ils savaient…
Que Marc Almond (chanteur et icône gay absolue) et Dave Ball (synthétiseurs) donnaient, dans leur école d’art de Leeds, des concerts-performances, la plupart du temps dans le plus simple appareil ? Qu’Almond vivait au sous-sol d’une maison de passe, dans la ruelle où sévissait Peter Sutcliffe,  le Yorkshire Ripper, serial killer tueur de prostituées qui terrorisa le Nord de l’Angleterre à la fin des années 1970 ?
Que l’album Non-Stop Erotic Cabaret qui renferme "Tainted Love" se vit comme une énorme tournée des quartiers chauds, avec ses titres comme "Seedy Films", "Sex Dwarf", "Entertain Me" ou "My Secret Life" vantant toutes les formes de déviance sexuelle possible ?
Le tout chanté dans un style proche du cabaret (d’où le titre) et sur un beat électro (à l’époque on disait pop synthétique, mais c’est tout comme) qui influença de nombreux groupes actuels.
Car la nouvelle vague de groupes électro-pop comme LCD Soundsystem, Hot Chip ou SimianMobile Disco doit énormément à ces pionniers qui surent s’engouffrer dans les traces de Kraftwerk. Mais à la froideur conceptuelle des Allemands de Düsseldorf, Almond et son complice ajoutent des touches de cabaret, mais aussi de disco et de soul, avec une passion qui fait de cet album un petit chef d’œuvre de chaud et de froid.
Il y ajoute des textes drôles et parfois graves (la solitude du jouisseur magnifiquement exprimée dans Bedsitter) mais qui font toujours mouche par leur authenticité.
Si quelques titres ont mal vieilli (notamment le premier, "Frustration"), certains sonnent comme s’ils avaient été enregistrés hier, et l’album contient deux véritables bombes à dancefloors : "Tainted Love", d’abord, bien sûr, magnifique tube, reprise d’une chanson soul de Gloria Jones, couplé dans sa version maxi avec le "Where Did Our Love Go?" des Supremes, merveille d’arrangements avec son « bink bink » inaugural et récurrent, trouvaille d’Almond ; et "Sex Dwarf" (non, ce n’est pas une déclaration d’amour à Prince !)  et son imparable riff de synthé, ultra-actuel, des paroles complètements délirantes (Je te promènerai dans la grand’rue au bout d’une longue laisse noire), à la fois glaçantes et hilarantes,  et dont la vidéo (où l’on voyait le duo dans une boucherie, entouré de tronçonneuses, de nains et de personnes dévêtues) fut censurée et remplacée par une autre, plus sobre, où Marc, en smoking, dirige un orchestre symphonique uniquement composé de personnes de petite taille. D’ailleurs, le groupe, très visuel (Almond avait fait des études de théâtre), avait parallèlement sorti un « Non-stop exotic video show» constitué de clips de Tim Pope, qui s’illustra plus tard avec The Cure.
Soft Cell, grâce aux mélodies et à la richesse des synthés de Dave Ball et à la personnalité touchante de Marc Almond, très authentique derrière ce masque grandguignolesque, se place  très au-dessus de la concurrence de l’époque, dans cette scène cabaret-pop et néo romantique qui comprit également Duran Duran, Human League ou Spandau Ballet.
A ceux qui croient que les synthétiseurs ne génèrent qu’une musique froide et sans âme, l’écoute de ce petit brulot est fortement recommandée.
"
Vous savez ce qu'il vous reste à faire !

1. Frustration 4:12
2. Tainted Love 2:34
3. Seedy Films 5:05
4. Youth 3:15
5. Sex Dwarf 5:15
6. Entertain Me 3:35
7. Chips on My Shoulder 4:05
8. Bedsitter 3:36
9. Secret Life 3:37
10. Say Hello, Wave Goodbye 5:24
Bonus
11. Where Did Our Love Go 3:13
12. Memorabilia 4:48
13. Facility Girls 2:21
14. Fun City 7:44
15. Torch 4:08
16. Insecure Me 4:38
17. What? 2:50
18. ...So 3:49

SOFT CELL

youPLa !
Thomas Dolby "The Golden Age of Wireless" (03/1982)
ou "Dolby Digital"

Peut-être l'album le plus rigolo, le plus addictif et le plus malin de toute l'histoire de la synthpop, certainement le sommet de la carrière de son auteur, The Golden Age of Wireless est une petite galette qui n'a l'air de rien mais a tout pour vous conquérir.
Premier argument en la faveur de Thomas Dolby et de son écriture, c'est un festival de petits machins pop qui vous accrochent l'oreille pour ne plus l'abandonner, pour couronner le tout il y a les arrangements et en particulier l'usage ludique et décontracté de synthétiseurs comme constructeurs d'ambiances, bruiteurs émérites qui rend l'écoute de l'opus encore plus fun. Sachant que ledit opus fut enregistré dans une atmosphère conviviale et bon-enfant, que les invités y furent légion tous venu apporter leur petit caillou à l'édifice du maître de cérémonie (regardez la liste des participants, vous en reconnaitrez forcément quelques-uns) ont n'est pas surpris d'y prendre un plaisir immédiat, plus surpris par contre qu'icelui perdure avec les ans et les écoutes successives. Parce qu'au-delà de son aspect rigolo, une sorte de sapin de noël synthpop avec claviers en guirlandes, b-a-r en boules scintillantes et tout le reste en décorations assorties, c'est surtout d'une œuvre reposant sur les vraies qualités d'écriture du sieur Dolby et des capacités de producteur d'un Tim Friese-Greene qui deviendra bientôt le partenaire privilégié d'un certain Mark Hollis, mais c'est une autre histoire.
Vous aimez la synthpop ?, The Golden Age of Wireless est un absolu immanquable du genre, c'est, en substance, tout ce que vous aviez besoin de savoir, vous le savez, n'hésitez plus, plongez !

1. She Blinded Me with Science 3:43
2. Radio Silence 3:45
3. Airwaves 5:16
4. Flying North 3:50
5. Weightless 3:43
6. Europa and the Pirate Twins 3:17
7. Windpower 4:20
8. Commercial Breakup 4:17
9. One of Our Submarines 5:11
10. Cloudburst at Shingle Street 5:44

Thomas Dolby– vocals, drum programs, wave computer, backing vocals, synthesizer, piano, monk voice, kalimba
James Allen– backing vocals
Kevin Armstrong– guitar, backing vocals
Dave Birch– guitar, monk voice
Bosco – percussion
Les Chappel– backing vocals
Judy Evans– backing vocals
Lesley Fairbairn– backing vocals
Mark Heyward-Chaplin– bass guitar
Justin Hildreth– drums
Simon House– violin
Tim Kerr– violin
Mutt Lange– backing vocals
Simon Lloyd– leadline brass, flute
Lene Lovich– backing vocals
John Marsh– shipping forecast
Daniel Miller– synthesizer
Guido Orlando– Chilean translations, distress, grace
Andy Partridge– harmonica, percussion
Dr. Magnus Pyke– voiceover
Matthew Seligman– Moog bass
Miriam Stockley– backing vocals
Bruce Woolley– backing vocals, monk voice
Akiko Yano– Backing vocals

THOMAS DOLBY

MoueTTe MoueTTe !
A Flock of Seagulls "A Flock of Seagulls" (04/1982)
ou "Discrets héros"

Ce sont un peu les oubliés de service, ceux qui avaient tout pour réussir sauf ce petit supplément de chance qui fait la différence, peut-être que leur nom accrochait moins, que la pochette un peu criarde de leur premier opus n'attirait pas l'acheteur... Et pourtant, quelle belle fête synthpop comme va nous l'expliquer Fromage Enragé (Forces Parallèles) :
"La capitale du Kenya est Nairobi. Le tournesol fleurit en été. Le médaka est le premier vertébré à s’être reproduit dans l’espace, en 1994, lors d’une mission de quinze jours. Si on compte en langue anglaise, il faut attendre mille ("thousand") pour trouver la lettre "a". La ville de Paris compte 37 ponts. L'ornithorynque est le seul mammifère ovipare, et... oh et puis MEEEEEEEEEEEEEERDE. Je craque. J'ai essayé de gagner du temps, de tourner autour du pot. De reculer pour mieux sauter. Mais là, j'en peux plus. Alors j'en viens directement à ce que j'essayais de retarder, et que tout le monde attend en fait :
OUI, c'est bien sur cet album que figure le méga-tube "I Ran (So Far Away)", que vous avez sûrement déjà entendu dans GTA Vice City. Voilà. J'ai lâché le morceau. Z'êtes contents ? J'suis sûr que vous avez fébrilement cliqué sur la chronique dans le seul espoir de lire ça. Eh bien c'est fait. Je me sens... comme libéré d'un poids, en fait. A présent, peut-être vais-je pouvoir vous parler de l'album dans son ensemble.
Nous sommes en 1979 dans la ville des Beatles quand deux frères fondent un groupe de new wave / synthpop dont le nom provient d'une chanson des Stranglers. Le premier album, éponyme, sort en 1982, et rencontre un assez joli succès, notamment grâce à ce fameux "I Ran". Voyons ça en détails.
Ah, avant que nous commencions, je tiens à dire que la tracklist de ma version de l'album est différente de l'originale, et comprend un onzième titre : "Tokyo."
Ainsi, au lieu de commencer par le tube mentionné, ma version s'ouvre avec "Modern Love Is Automatic", qui, dans ses gimmicks, dans ses vocaux froids et désincarnés, me rappellerait presque Kraftwerk. Transition réussie avec "Messages" qui dégage une réelle sensation d'urgence ; les synthés répondent sans répit au chant sur un tempo bien soutenu, et on a même le droit à quelques chœurs sur les dernières secondes. Un des meilleurs titres de l'album, en dépit de sa courte durée.
Ce n'est qu'en 3e place qu'arrive enfin le single mentionné plusieurs fois un peu plus haut. On fait pas mieux niveau accroche. Lignes de guitare furtives mais léchées, refrain imparable, break bien mené... ce n'est pas le tube pour rien... Je pourrai continuer comme ça, titre après titre, mais le track by track n'est pas une pratique je j'apprécie particulièrement.
Pour aborder le disque de manière un peu plus globale, je dirais que nous avons donc affaire à un bon album de synthpop bien typique, bien produit, bien chanté, et assez digeste (car homogène et court : 41 minutes pour la version 11 titres, moins de 40 pour celle qui en comporte 10). Et malgré des titres qui coulent dans l'oreille sans faire trop de vagues ("You Can Run", "Telecommunication" : mélodies un peu trop faciles, où le chant vient se calquer sur les synthés ; "Man Made", conclusion traînante), l'album se réserve quelques moments de fraîcheur fort bienvenus. Je citerais volontiers "Standing in the Doorway", l'occasion pour la six-cordes de se risquer à quelques hardiesses. En effet, ce n'est clairement pas Paul Reynolds, le guitariste, que l'on entend le plus au sein de l'album, celui-ci faisant la part belle au trio chant-batterie-synthés. "DNA", titre instrumental, se révèle vachement plaisant aussi : ce morceau serait parfait comme générique d'une série de SF kitsch, à mon avis. Et puisque vous vous demandez à quoi ressemble la bonus track "Tokyo", eh bien elle ne fait pas partie des moins bons titres, avec ses quelques effets asiatiques (très discrets cependant !) et son coup de gong final.
Ainsi, on se retrouve avec un petit album sans prétention, où les titres les plus urgents, les plus immédiats, côtoient quelques-uns plus lourdauds. Les mordus de synthpop bien kitschouille 80's devraient adorer, les autres passeront leur chemin gentiment. Après tout, chacun est juge.
"
Evidemment, tout le monde n'aura pas la réaction nostalgique de Monsieur Fromage (ou est-ce Monsieur Enragé ?) mais, franchement, ces mouettes-là méritent bien que vous leur jetiez quelques sardines.

1. Modern Love Is Automatic 3:50
2. Messages 2:52
3. I Ran (So Far Away) 3:58
4. Space Age Love Song 3:48
5. You Can Run 4:26
6. Telecommunication 2:32
7. Standing in the Doorway 4:40
8. Don't Ask Me 2:46
9. D.N.A. 2:31
10. Tokyo 2:54
11. Man Made 5:40
Bonus
12. Pick Me Up 3:07
13. Windows 3:30
14. Tanglimara 4:30
15. Intro 3:24

Mike Score– lead vocals, keyboards, additional rhythm guitar
Paul Reynolds– lead & rhythm guitar, backing vocals
Frank Maudsley– bass guitar, backing vocals
Ali Score– drums, percussion

A FLOCK OF SEAGULLS

Goodbye Mr Jones (1947-2016)

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DAVID JONES
1947-2016

1967
David Bowie "David Bowie (Deluxe Edition)"
ou "David est déjà là... Bowie suivra"

Non mais regardez moi cette tronche de premier communiant ! Amusez vous juste à comparer avec le même 5 ans plus tard, la mue est totale !
Parce qu'en 1966 (année des enregistrements de cet inaugural et éponyme opus), David Bowie est encore un peu David Jones, pas encore le glam rocker flamboyant qui, de Ziggy Stardust) en Aladdin Sane (etc.), éblouit les 70s de sa superbe et de son extravagance. Non, David Jones, pardon, Bowie colle au peloton, suce la roue de ce qui se fait de mieux et lui va le plus agréablement au teint, c'est un honnête ouvrier débutant de la mélodie pop qui va bien, un trousseur de chansons déjà efficace mais pas encore affirmé... Un "work in progress".
Ca ne fait pas de la présente collection de chanson une part congrue, un vilain petit canard qu'on pourrait ignorer en commençant l'exploration du catalogue du sieur Bowie directement par Space Oddity... parce qu'il y a le tube dessus, en plus ! Non ! Parce que tous les germes de l'artiste en devenir sont là et que, déjà, un joli talent à conter d'étranges historiettes aux paroles pas si anodines qu'il y parait se fait jour.
Musicalement, l'album est définitivement de son temps naviguant entre pop baroque et psychédélisme contenu... Un peu Pink Floyd (le cousinage avec Barrett est assez évident à mon sens même si Bowie a plus de discipline, un tout autre entourage et sans doute moins de problèmes de substances...), un peu Kinks ou Beatles (un peu plus Kinks que Beatles, d'ailleurs, pour un détachement déjà marqué et remarqué)... Mais bon, album de son temps, visée mainstream évidente égale arrangements... parfois un peu douteux qu'on en croirait presque que Paul Mauriat a été convié aux sessions. Sans doute l'influence de Scott Walker, qui s'y entendait alors pour en rajouter dans le pathos à coup de luxuriances orchestrales et avait particulièrement accroché l'oreille du jeune David Jones que ce soit avec ses Brothers ou en solitaire, on l'entend d'ailleurs sur les morceaux les plus mélodramatiques.
Tout ça serait parfait si le répertoire de Bowie n'avait une sautillante énergie à laquelle les arrangements "ce-mec-est-too-much" donnent fatalement une certaine "kitchitude". Et ce n'est pas désagréable même si ça n'est pas très sérieux, ma bonne dame... Reste que, par moment, on touche au but comme sur There Is a Happy Land où, les arrangements pour une fois en mode discret n'interférant que marginalement, on sent le Bowie, une certaine froideur classieuse, pousser sous le Jones.
Bref, c'est un bon petit album comme il s'en faisait alors, un peu pris dans des élans putassiers mais sauvé par l'écriture et la voix de son auteur. Un album qui n'a pas eu de chance, aussi, puisque sorti le même jour que Sgt. Pepper de qui vous savez, ça fait de l'ombre, forcément, et, enfin une exploration intéressante de l'archéologie d'un mythe.
Concernant la présente édition "deluxe", et parce que, c'est bien connu, "il ne faut pas gâcher", Decca (ton univers(sale) impitoyable) rallonge la sauce autant que faire se peut et transforme la courte pige d'un Bowie débutant en un double et pantagruélique cd avec, n'en jetez plus !, le mix stéréo, le mix mono, des outtakes, des remixes, des singles perdus, des inédits, des sessions BBC (pour, déjà !, John Peel et son émission Top Gear), qui combleront d'aise les complétistes et les fans mais n'intéresseront que peu, au delà d'une première écoute curieuse et de quelques retours d'affection (pour les jolis inédits par exemple), l'auditeur lambda. Rien qui n'aurait pu tenir sur un bon simple remaster, en tout cas. Ca n'en reste pas moins un bel objet avec un bon gros livret (sans les paroles, hélas). Sans doute pas essentiel mais indéniablement sympathique.

CD 1
- The Original Stereo Album Mix
1. Uncle Arthur 2:07
2. Sell Me a Coat 2:58
3. Rubber Band 2:17
4. Love You Till Tuesday 3:09
5. There Is a Happy Land 3:11
6. We Are Hungry Men 2:59
7. When I Live My Dream 3:22
8. Little Bombardier 3:23
9. Silly Boy Blue 4:36
10. Come and Buy My Toys 2:07
11. Join the Gang 2:17
12. She's Got Medals 2:23
13. Maid of Bond Street 1:43
14. Please Mr. Gravedigger 2:35
- The Original Mono Album Mix
15. Uncle Arthur 2:07
16. Sell Me a Coat 2:58
17. Rubber Band 2:17
18. Love You Till Tuesday 3:09
19. There Is a Happy Land 3:11
20. We Are Hungry Men 2:59
21. When I Live My Dream 3:22
22. Little Bombardier 3:23
23. Silly Boy Blue 4:36
24. Come and Buy My Toys 2:07
25. Join the Gang 2:17
26. She's Got Medals 2:23
27. Maid of Bond Street 1:43
28. Please Mr. Gravedigger 2:35

CD 2
- Bonus
1. Rubber Band (Mono single A-side) 2:01
2. The London Boys (Mono single B-side) 3:19
3. The Laughing Gnome (Mono single A-side) 2:56
4. The Gospel According to Tony Day (Mono single B-side) 2:46
5. Love You Till Tuesday (Mono single A-side) 2:59
6. Did You Ever Have a Dream (Mono single B-side) 2:06
7. When I Live My Dream (Mono single master) 3:49
8. Let Me Sleep Beside You (Mono single master) 3:24
9. Karma Man (Mono Decca master) 3:03
10. London Bye Ta-Ta (Mono Decca master) 2:36*
11. In the Heat of the Morning (Mono Decca master) 2:44
12. The Laughing Gnome (New stereo mix) 2:59*
13. The Gospel According to Tony Day (New stereo mix) 2:49*
14. Did You Ever Have a Dream (New stereo mix) 2:05*
15. Let Me Sleep Beside You (Stereo single version) 3:20*
16. Karma Man (New stereo version) 3:03*
17. In the Heat of the Morning (Stereo mix) 2:58
18. When I'm Five 3:05
19. Ching-a-Ling (Full-length stereo mix) 2:48*
20. Sell Me a Coat (1969 Re-recorded version) 2:58
21. Love You Till Tuesday (BBC version) 2:56*
22. When I Live My Dream (BBC version) 3:33*
23. Little Bombardier (BBC version 3:25*
24. Silly Boy Blue (BBC version) 3:22*
25. In the Heat of the Morning (BBC version) 4:16*
* previously unreleased

1967

1971
David Bowie "Hunky Dory"
ou "Le premier chef d'oeuvre de David Bowie"

Hunky Dory a beau être le, déjà !, 4ème album de David Bowie, c'est une avancée décisive dans une carrière qui peine à combler les rêves de gloire d'un jeune auteur, compositeur, interprète et multi-instrumentiste plein de talent mais n'ayant pas encore à son catalogue une collection aussi intouchable artistiquement parlant que commercialement gorgée de tubes imparables... Jusqu'à Hunky Dory, donc.
On peut attribuer, outre le hasard cosmique qui fait se rencontrer un artiste et sa muse, le succès de l'entreprise à une équipe et d'abord à un groupe - avec le guitariste /co-arrangeur Mick Ronson et le batteur Mick Woodmansey déjà présents sur The Man Who Sold The World, le tout récemment disparu (21 mai 2013) Trevor Bolderà la basse et à la trompette, et le revenant Yes-man Rick Wakeman (déjà aperçu sur Space Oddity où il mélotronisait à merveille le morceau éponyme) au piano - mais aussi un producteur, Ken Scott, transfuge des studios Abbey Road présentement résident des studios Trident qui suivra Bowie jusque Pin Ups (soit 4 albums consécutifs), avant que Bowie ne prenne lui-même les choses en main pour Young Americans. Historiquement, l'association, moins Wakeman, se cristallisera sous le nom des Spiders from Mars dès l'album suivant, le fameux Ziggy Stardust, avec le résultat qu'on connait... C'est dire si Bowie tient là une fine équipe !
Mais, évidemment, refrain connu, sans bonnes chansons tout ceci serait vain et, pour le coup, alors que ses précédents long-jeux de David, pour recommandables furent-ils, étaient marqués du sceau de l'inconsistance, de l'irrégularité, Hunky Dory est une collection sans faille menée qu'elle est par les deux tubes absolument imparables et immortels que sont Changes et Life on Mars?. Ces deux là n'étant plus, vous en conviendrez, à présenter nous nous intéresserons aux autres, malchanceux petits moments de grâce n'ayant pas connu les spotlights et les charts alors qu'ils les méritaient autant ! On citera naturellement un Oh! You Pretty Things totalement addictif que ce soit pour sa mélodie de chant, sa partie de piano (jouée par Wakeman) et son démarrage glam pop du refrain... Succulent ! et merveilleusement enchaîné à un Eight Line Poem, jazz/blues transitoire où Ronson brille par sa retenue et son feeling. La suite ne vient jamais démentir l'exceptionnel niveau que ce soit sur le jazz pop Kooks (qui m'a toujours fait l'impression de finir trop vite tant il est bon), Quicksand avec ses crescendos divins et ses relents de Dylan folk et de Beatles orchestral, Fill Your Heart avec sa préciosité et ses arrangements gentiment surannés, petite bulle de nostalgie joyeuse (si, si !), Andy Warhol avec son intro bizarroïde et le folk quasi-Kinksien qui suit... Bref, arrêtons là l'énumération... Il suffit de dire que les trois qui restent ne déparent pas du lot, que tout y est (très) bon et fonctionne magnifiquement en cohérence (une première chez David). Certes, ce n'est pas encore tout à fait le Bowie rock, on s'en approche sur Queen Bitch ceci dit, qui ravira son monde dès l'année suivante avec l'album que vous savez mais, quelle inspiration, quelle maîtrise, quel pied !
Pas vraiment par hasard, l'album décrochera le premier numéro 1 de David Bowie en sa natale Angleterre, marquera le décollage de la carrière du même outre-Atlantique... Et ce n'est que justice parce que David Bowie a tout bon sur Hunky Dory et a pondu sa première Grande Œuvre, une galette imparable, signe d'un artiste dont l'état de grâce ne fait alors que commencer. Décisif, je vous dis !

1. Changes 3:37
2. Oh! You Pretty Things 3:12
3. Eight Line Poem 2:55
4. Life on Mars 3:53
5. Kooks 2:53
6. Quicksand 5:08
7. Fill Your Heart 3:07
8. Andy Warhol 3:56
9. Song for Bob Dylan 4:12
10. Queen Bitch 3:18
11. The Bewlay Brothers 5:22

David Bowie: vocals, guitar, alto and tenor saxophone, piano
Mick Ronson: guitar, vocals, mellotron, arrangements
Rick Wakeman: piano
Trevor Bolder: bass guitar, trumpet
Mick Woodmansey: drums

1971

1977
David Bowie "Low"
ou "Berlinade"

A l'avant-garde de ce qui se passera dans les années 80, et pourtant encore fermement ancré dans les années 70, le David Bowie de Low est l'hybride trans-générationnel par excellence, un album rabibochant par anticipation le rock progressif des septantes et la synthpop des octantes, un petit miracle accompli à Berlin, dans les frimas de 1976.
Force est de constater que Low amorce donc une nouvelle mue pour David, une mue à laquelle l'ex-Roxy Music Brian Eno, son compagnon principal de l'album, n'est certainement pas étranger. On retrouve aussi Tony Visconti aux manettes, lui qui n'avait pas été convoqué sur le précédent opus du Thin White Duke, Station to Station. Pour conclure avec l'équipe qui réalisa le tour de force que demeure Low, on précisera que si Carlos Alomar (guitare), Dennis Davis (percussion) et George Murray (basse) sont partiellement reconduits, c'est avant tout d'un album de duo (Bowie/Eno) dont il s'agit, il suffit d'ailleurs de jeter un œil aux crédits pour s'en convaincre.
Musicalement, autant du fait de la volonté de Bowie que de l'influence d'Eno, c'est un Bowie parti dans l'espace, avant-gardiste d'une new wave et d'une synthpop encore à l'état proto-embryonnaires, parce que sur Low ce sont bel et bien les synthétiseurs prennent le pas sur des guitares reléguées au rang d'épice certes important mais absolument pas force de traction de l'opus. Un opus composé de compositions faisant montre d'un retour d'inspiration pour David qui, déjà à la relance sur Station to Station après une phase moins reluisante (de Pin-Upsà Young Americans), mais qui, présentement, trouve vraiment quelque chose de nouveau, de frais à dire. C'est évident sur certaines chansons de Low (Breaking Glass, What in the World, Always Crashing in the Same Car) mais encore plus sur un emballage final (de Warsawaà Subterraneans) où, entre musique électronique ambiante, minimalisme et bricolage, Bowie met le doigt sur un ailleurs qu'il ne cessera ensuite de titiller, un ailleurs fait de grâce et d'étrangeté qui lui va tellement bien au teint.
Low ? C'est énorme, c'est incontournable, c'est influent comme rarement un album aussi tardif d'un artiste aussi installé l'aura été. Low ? Indispensable !

1. Speed of Life 2:46
2. Breaking Glass 1:52
3. What in the World 2:23
4. Sound and Vision 3:05
5. Always Crashing in the Same Car 3:33
6. Be My Wife 2:58
7. A New Career in a New Town 2:53
8. Warszawa 6:23
9. Art Decade 3:46
10. Weeping Wall 3:28
11. Subterraneans 5:39

David Bowie– vocals (2-6, 8, 10, 11), saxophones (4, 11), guitar (6, 9-11), pump bass (6), harmonica (7), vibraphone (9-10), xylophone (10), pre-arranged percussion (10), keyboards: ARP synthesiser (1, 10-11), Chamberlin: "tape horn and brass" (1), "synthetic strings" (1, 4, 9-10), "tape cellos" (5) and "tape sax section" (7), piano (7, 9-11)
Brian Eno– keyboards: Minimoog (2, 8-9), ARP (3, 11), E.M.I. (3, 5), piano (7-9, 11), Chamberlin (8-9), other synthesisers, vocals (4), guitar treatments (5), synthetics (7)
Carlos Alomar – rhythm guitars (1, 3-7), guitar (2)
Dennis Davis– percussion (1-7)
George Murray– bass (1-7, 11)
Ricky Gardiner– rhythm guitar (2), guitar (3-7)
Roy Young– pianos (1, 3-7), Farfisa organ (3, 5)
&
Iggy Pop– backing vocals (3)
Mary Visconti– backing vocals (4)
Eduard Meyer– cellos (9)

1977

1989
Tin Machine "Tin Machine"
ou "La renaissance planquée de David B"

On ne vantera jamais assez les mérites résurrectionnels qu'eurent les deux album de Tin Machine sur la carrière alors déliquescente d'un Bowie en fin de course, à bout de souffle... Un Bowie pas forcément si adapté à l'ère MTV qu'on aurait pu le penser, un Bowie en mal d'ailleurs et d'une certaine liberté créative aussi, un Bowie qui a envie d'en découdre après des albums "fortement tièdes", enfin.
Parce qu'il faut bien le dire, les ondes du"choc-médiocre" d'un Tonight et d'un Never Let Me Down ont laissé des traces, et pas que de jolies jolies... On ne reviendra pas plus avant sur les maigres qualités des deux successeurs d'un Let's Danceà la relance, tout a déjà été dit et écrit sur le sujet par de nombreux rock-critics dont même les plus flagorneurs ne purent sauver l'ex-Ziggy du naufrage via quelques remarques bien senties voire assassines (et hélas souvent méritées).
Croyez-vous que Bowie est alors dans sa tour d'ivoire à planifier sa prochaine extravagance ? Que nenni ! Sans doute lui-même conscient de l'impasse dans laquelle il se trouve, il décide de changer radicalement le ton, de faire du passé table rase... A commencer par effacer son nom de la pochette, ce n'est pas rien !, et d'y figurer à égalité avec ses nouveaux copains de chambrée, c'est encore plus ! Et puis la dégaine costumière, le noir et le blanc, la barbe du discret, une sobriété qu'on ne lui connaissait plus... Profil bas, attendre la fin de l'orage et en profiter pour s'amuser, tant qu'à faire ! Parce que, fondamentalement, c'est ce qu'on entend sur ce premier Tin Machine, un Bowie décontracté qui se fait plaisir et, ce faisant, nous fait plaisir avec ce qu'il est convenu de considérer comme un simple album de (hard) rock'n'roll, un bon album de (hard) rock'n'roll.
Simple ? Parce que c'est, tout bêtement, à une collection de chansons basée sur les riffs tranchants et revivalistes de Reeves Gabrels qui se présente à nous. Pour l'originalité, vous repasserez, mais le sel est ailleurs et les atouts d'énergie, de l'audible plaisir que prend la formation (n'oublions pas les frères Sales, rythmique impeccablement complémentaire de sa paire de solistes) à jouer comme, peu ou prou, une bande d'ados découvrant l'originel plaisir d'une musique électrisée et électrisante. On ne dira pas que Bowie y est méconnaissable, ce serait mentir, juste totalement fondu dans un collectif cohérent et fonctionnel.. Un groupe de rock, quoi !
Bon ? Parce qu'il y a ici, tout de même, quelques chansons qui font leur beau petit effet à commencer par l'introductif Heaven's in Here, un solide blues mid-tempo où Gabrels nous régale de ses belles dispositions guitaristiques, ici dans un registre classique et efficace où, de licks fins en soli inspirés, il meuble une composition un peu commune avec, pour le coup, le beau David bien effacé. C'est aussi une bonne façon d'établir la crédibilité groupe. Plus loin, Prisoner of Love, après un pas extraordinaire Tin Machine, rappelle un peu Absolute Beginners avec son petit côté rétro et China Girl par son refrain orientalisant, on ne se refait pas mais, présentement, on ne regrette pas non plus parce que ça fonctionne et donne une composition habitée, un rock stratosphérique et trippant de fort belle qualité, et du Bowie pur sucre, vous l'aurez compris. Passé un pas désagréable mais trop dérivatif pour être vraiment marquant ("Troggsien") Crack City, s'avance une belle quadruplette avec, en tête de liste, le rock revivaliste d'I Can't Read et sa guitare ivre by Gabrels (qu'on se croirait en 1976 !), l'hard-rockant Under the God (puissant, efficace et sans artifice), le faussement planant et un poil soul Amazing (un single qui s'ignore) et, finalement, la cover du Working Class Hero de Lennon revitalisé par un quatuor pas prêt à rendre ses armes électriques ni sa classe naturelle. Le reste est moins enthousiasmant, plus inégal surtout avec de bonnes choses (Bus Stop, Video Crime, Baby Can Dance) et d'autres plus anecdotiques qui viennent un peu tempérer l'admirable tenue d'une grosse première moitié pleine d'assurance.
Tin Machine 1er du nom n'est pas un grand album, Tin Machine 1er du nom n'est pas une révélation non plus, Tin Machine 1er du nom est, simplement, c'est déjà énorme !, la renaissance électrique, le premier jalon de la reconquête d'un des plus grands artistes pop/rock des septante... Et un foutu bon album de rock'n'roll, donc avec, qui plus est, la révélation d'un extraordinaire et ô combien polyvalent guitariste en la personne de Reeves Gabrels qui bonifie ici souvent le tout-venant... On n'en attendait pas tant.

1. Heaven's in Here 6:01
2. Tin Machine 3:34
3. Prisoner of Love 4:50
4. Crack City 4:36
5. I Can't Read 4:54
6. Under the God 4:06
7. Amazing 3:06
8. Working Class Hero 4:38
9. Bus Stop 1:41
10. Pretty Thing 4:39
11. Video Crime 3:52
12. Run 3:20
13. Sacrifice Yourself 2:08
14. Baby Can Dance 4:57

David Bowie: vocals, guitar
Reeves Gabrels: lead guitar
Hunt Sales: drums, vocals
Tony Sales: bass, vocals
&
Kevin Armstrong: rhythm guitar, Hammond

1989

1991
Tin Machine "Tin Machine II"
ou "Relance 2.0"

Tin Machine II. En toute logique c'est la suite de Tin Machine I, album d'un Bowie (& Co) libéré de toutes contingences commerciales, un Bowie retrouvé parce que planqué, ça a du sens pour un caméléon. Mais Tin Machine II c'est aussi autre chose, une étape vers la reconquête artistique, une nouvelle ambition, un retour à quelques fondamentaux aussi.
En témoigne le line-up, peu ou prou le même que celui du premier album sauf que de nouvelles composantes sonores viennent s'ajouter avec un Bowie ressortant son saxophone, tâtant du piano ou un Reeves Gabrels encore plus impliqué et prospectif (presque tel qu'on le retrouvera sur Outside ou Earthling, en fait). Il y a aussi un nouveau partage des tâches avec un Hunt Sales, batteur de son état, invité à prendre le micro sur deux sympathiques chansons (Stateside et Sorry), ça reste anecdotique mais ça cimente tout de même l'identité "groupe" de l'entreprise, à défaut de plus. Parce que la moelle de ce "II" est ailleurs, dans des titres qui nous rappellent que Bowie a aussi fait Low ou "Heroes" et sait tisser des ambiances particulières et addictives (remember Warszawa...), que Bowie, a son meilleur, est aussi et surtout une magnifique tête chercheuse qui, comme on dit en management, sait générer les énergies. Pas que ce soit si difficile avec un Gabrels qui ne demande que ça et qui pousse au cul.
Ca donne un album plus éclaté, moins "focus" que son prédécesseur, plus éloigné des fondamentaux rock'n'rollesques auparavant déployés par la formation du coup, et globalement un album plus inégal qui rattrape en éclairs de talent ce qu'il perd en cohérence. D'un côté, vous avez ce qui aurait pu être sur le premier album et constitue donc la liaison parfaite, la pérennisation sonique de Tin Machine le groupe. La doublette d'intro, Baby Universal bien speedé et One Shot plus U2ien, en est le parfait résumé : du rock classieux, moderne, presque hard mais jamais tout à fait (la finesse de Gabrels fait, une fois de plus la différence), où la voix d'un Bowie habité se glisse aisément, félinement. C'est d'ailleurs ce qu'on trouve de plu réussi de l'exercice en la matière... Le plus réussi mais pas le plus intéressant d'une galette qui renoue avec le Bowie expérimental comme sur l'aérien Amlapura, du pur sucre référencé 70s autant que les prémices de ce qu'Outside développera. Il y a, comme sur chaque album de David diront certains, quelques faux pas, quelques sorties de piste qui écornent légèrement la belle impression d'ensemble que rattrapent quelques bons rockers (les deux d'intro, donc, mais aussi You Can't Talk ou le punkifié A Big Hurt), des moments plus pop satisfaisants aussi (Shopping for Girls, le Sorry de Hunt Sales, Goodbye Mr. Ed) ou une salutaire inclinaison expérimentale (You Belong in Rock'n'roll, le précité Amlapura), un petit tiers de "déchet", en gros... Un ratio acceptable avec, répétons-le, un festival Reeves Gabrels - que, décidément, Tom Morello de Rage Against the Machine a dû beaucoup écouter - brillant dans tous les instants, valorisant souvent de son propre fait même les morceaux plus accessoires du répertoire, confirmant ainsi l'impressionnant instrumentiste entrevu sur le premier chapitre. Une attraction à lui seul, promis, juré, craché.
Tin Machine s'arrêtera là (pas aidé par les problèmes de drogue de son batteur, Hunt Sales, il faut dire), aura, au passage, requinqué un Bowie fatigué par trop d'exposition et plus assez d'art, aura aussi produit deux albums tout sauf honteux, imparfaits mais attachants qui figurent aujourd'hui dignement dans la discographie de leur leader. Les deux (albums) se valent avec, vous l'aurez compris, des mérites musicaux différents, la cohérence rock pour le I, la relance artistique pour le II, les deux méritent grandement qu'on s'y penche et s'y repenche encore d'autant qu'ils sont loin d'avoir eu le retentissement qu'ils méritaient en leur temps. Il fallait que cela soit dit.

1. Baby Universal 3:18
2. One Shot 5:11
3. You Belong in Rock n' Roll 4:07
4. If There Is Something 4:45
5. Amlapura 3:46
6. Betty Wrong 3:48
7. You Can't Talk 3:09
8. Stateside 5:38
9. Shopping for Girls 3:44
10. A Big Hurt 3:40
11. Sorry 3:29
12. Goodbye Mr. Ed 3:24
13. Hammerhead 0:57

David Bowie: chant, guitare, piano, saxophone, chœurs
Reeves Gabrels: lead guitare, chœurs, vibrators, orgue
Hunt Sales: batterie, percussions, chœurs, chant sur "Stateside"& "Sorry"
Tony Sales: basse, chœurs
&
Kevin Armstrong: guitare sur "If There Is Something", piano sur "Shopping for Girls"
Tim Palmer: percussions, piano additionnel

1991

1997
David Bowie "Earthling"  
ou "Life on Earth?"

A la relance depuis, chronologiquement, les deux Tin Machine, Black Tie White Noise et Outside, c'est un David Bowie tout artistiquement revigoré qui prend fièrement la pose vêtu de son Union-Jack coat le regard rivé sur la campagne anglaise... de dos ! Visuellement, si la pochette "flashe", elle n'est pas exactement belle et ce terrien vraiment trop spatial pour coller à ce bucolique entourage...
De fait l'album n'a pas le moindre cousinage avec quelque folk pastorale que ce soit, quelque badinerie campagnarde non plus, c'est un Bowieà la pointe, qui paraîtrait presque industriel s'il n'y accouplait un maniérisme tout anglais via sa grand-britannité intrinsèque et une bonne grosse louche de pulsions gigotatoires par des patterns drum'n'bass (ou jungle comme on disait alors) bienvenus, spécialité, comme vous n'êtes pas sans le savoir, de quelques DJs anglo-jamaïcains ou anglo-asian (dont Apache Indian ou Goldie (qui invitera d'ailleurs Bowie sur son monumental, et raté, Saturnzreturn).
On a dit que Bowie, tout époustouflé qu'il avait été par les prestations de Trent Reznor et de son Nine Inch Nails lors d'une récente tournée commune, décida de se glisser dans la brèche, de se réinventer, encore !, à la source d'une jeunesse chez lui depuis longtemps envolée. Oui mais, les sources de cette supposée mue industrielle (supposée parce que faut pas pousser, quand même !) ont leurs racines tant dans le Bowie classique, froid et détaché, de la période berlinoise que dans le prédécesseur d'Earthling, Outside, qui déjà mariait musique électronique et rock pour un résultat pas si dissemblable.
Sauf qu'Earthling pousse la logique nettement plus avant, initiative qu'on peut conjointement allouer au leader consentant et à ses deux coproducteurs, co-compositeurs et complices de l'occasion, Reeves Gabrels (déjà dans Tin Machine) et Mark Plati. Et au reste d'un casting de session aux petits oignons dont l'excellent et revenant pianiste Mike Garson (Bowie 70s/90s mais aussi Stan Getz, Stanley Clarke, en solo, etc.). Bref, tout est réuni pour que la satisfaction soit au bout du chemin (et de l'écoute). Et ça nous donne tout de même 6 très bonnes chansons sur 9 soit un ratio 2/3, 1/3 que Bowie n'avait plus atteint depuis Scary Monsters... 17 ans plus tôt !
Déjà il y a l'excellentissime Little Wonder qui, à lui seul, déroule le menu, dévoile la tendance d'un Bowie mélodiquement immédiatement reconnaissable et livré à une formule qui colle comme un gant à son inspiration du moment. La pattern d'nb, le riff, les ambiances tissées par les samples, synthétiseurs et guitares, l'intermède central instrumental... Tout y fonctionne magnifiquement. Du coup, Looking for Satellites, l'une des moins mémorables de l'album, mollassonne comme du Peter Gabriel sous tranxène, fait pâle figure et modère l'enthousiasme originel. Comme les deux autres "ratages" de l'album, The Last Thing You Should Do et Law (Earthlings on Fire), elles souffrent surtout du voisinage d'autres compositions supérieurement réussies parce que ce ne sont pas, fondamentalement, de mauvaises chansons et qu'elles s'écoutent sans déplaisir. Mais sans l'enthousiasme qui nous prend, par exemple, sur un Battle for Britain, du pur Bowie revu et corrigé sur une rythmique jungle et un riff indus light mais du pur Bowie quoiqu'il en soit, ou sur un Seven Years in Tibet, sorte d'exploration Outside du Thin White Duke, saxo râpeux compris avant d'exploser en gros rock Tin Machinesque et de finalement raccommoder les deux... Brillant !
Parce que, voilà, c'est aussi une leçon qu'on peut tirer de cet excellent Earthling, Bowie n'est pas soluble dans la (les) mode(s). David Bowie, quelque soit le panorama qui l'entoure restera toujours David Bowie, marque d'un Grand. Et quand en plus, comme c'est le cas ici, l'écrin est presque "plus-que-parfait", les Himalaya ne sont jamais bien loin, la satisfaction béate non plus.

1. Little Wonder 6:02
2. Looking for Satellites 5:21
3. Battle for Britain (The Letter) 4:48
4. Seven Years in Tibet 6:22
5. Dead Man Walking 6:50
6. Telling Lies 4:49
7. The Last Thing You Should Do 4:57
8. I'm Afraid of Americans 5:00
9. Law (Earthlings on Fire) 4:48

David Bowie: vocals, guitar, alto saxophone, samples, keyboards, production
Reeves Gabrels: programming, synthesisers, real and sampled guitars, vocals, production
Mark Plati: programming, loops, samples, keyboards, production
Gail Ann Dorsey: bass, vocals
Zachary Alford: drum loops, acoustic drums, electronic percussion
Mike Garson: keyboards, piano

1997

2013
David Bowie "The Next Day (Extra)"
ou "David Is Alive!"

Le billet de l'édition standard :
10 ans après, le jour d'après... Il nous a manqué, Bowie, c'est indéniable. Des pires doutes sur sa santé (toujours pas complètement éteints), de son invisibilité caractérisée, à une quasi totale absence de nouvelles, on le croyait perdu ! Et puis une affiche, "the next day" dans un carré blanc sur la pochette de "Heroes" que, forcément, on repère facilement, un nouvel album !, enfin ! C'est moche, on croit à un teaser, ce sera finalement la pochette, drôle de choix. Quoique... Comme un signe que le jour d'après sera aussi beau que le jour d'avant ? Comme un aveu de retour vers des sources ô combien prolifiques, un raccrochage de wagon vers une gloire passée ? A voir... A entendre surtout.
Bon, autant éventer le "secret" tout de suite, ce n'est pas du grand Bowie, pas le retour miraculeux qu'on n'attendait de toute façon pas. Ce n'est pas indigne non plus, rassurez-vous. Des dires de Tony Visconti, producteur de la galette et collaborateur récurrent de David depuis plus de 30 ans, c'est Bowie qui a eu de nouveau envie de faire des chansons et, fatalement, de faire un album, un album qu'on n'attendait plus et qu'on prend donc pour ce qu'il est avec la réalisation de la chance que nous avons d'avoir un nouveau Bowie en 2013 si ce n'est un grand Bowie, ce à quoi nous sommes de toute façon habitué, pour retrouver un Grand Bowie, il faut quand même se reporter une trentaine d'année en arrière...
Pas un grand mais un bon Bowie qui a toujours la voix (même si un peu moins de voix), bon signe. Un bon Bowie avec son lot de pépites, plutôt plus généreux que ne l'avaient été Reality, Hours et Heathen, des pépites qui, si elles ne révolutionneront rien à la perception qu'on les gens de l'artiste, font bien plaisir à entendre ! Et ça commence dès le morceau titre et introductif de la galette qui, rock solide et énergique, rappelle autant "Heroes" que Tin Machine tout en dégageant une fugace impression de mélancolie qui ne lâchera que rarement l'album. Impression renforcée par la ballade tristoune Where Are We Know?, une des plus belles réussites de l'ensemble, ceci dit en passant. Et implosée par la conclusion (de l'album classique, rallongé de 3 pistes bonus dans sa version "deluxe"), le froid et beau Heat qui convoque, magnifiquement pour le coup, la veine dramatique jadis habitée par le Scott Walker de la fin des 60s. Mais un Bowie qui s'amuse aussi comme sur le Kurt-Weilien/ Tom-Waitsien mais en même temps si BowieienDirty Boys, comme sur le joliment BeatlesValentine's Day (où la voix de David et la guitare d'Earl Slick font la différence), comme quand il nous balance sans crier gare en plein Outside (If You Can See Me) pour un exercice "Drum'n'Rock" réussi. comme quand il cold-rocke avec classe sur le new-waveux Boss of Me. Etc. Oui, il y a plus qu'aisément matière à se réjouir dans une tracklist ceci dit pas d'une folle cohérence... un poil "éclatée".
Parce que, forcément, il y a une tenace impression de revisitation continuelle des cannons passés, un jeu de piste à identifier à quelle période d'hier se réfère chaque chanson d'aujourd'hui, une sorte de relecture à l'aulne du jour d'un passé lointain mais toujours vivace. C'est souvent le jeu des vieux rockers que de revenir à la source de leurs exploits (voir McCartney, Springsteen ou Robert Plant pour ceux qui le réussissent le mieux), de tenter, dans le procédé, de se réinventer ou, à minima, de faire ce qu'ils savent faire, ce qui leur vient naturellement et donc, fatalement, de rappeler qu'ils sont qui ils sont... Bowie n'est pas une exception en la matière. A ceux que l'absence de toute épiphanie créatrice, de quelque inespérée et miraculeuse régénération chagrine, on répondra que Mr. David Bowie a maintenant 66 ans, s'est déjà recréé un bonne demi-douzaine de fois pour finir par être lui, somme de tous ses possibles, miraculé d'excès qui en ont laissé moult sur le carreau. C'est déjà beaucoup.
Beaucoup parce que The Next Day est un bon album, du Bowie supra-classique, du Bowie qui satisfait en ratissant large mais en restant digne parce que, et nous ne tirerons pas sur les quelques ambulances qui traversent l'opus, les chansons sont bonnes, bien arrangées, bien jouées (par peu ou prou la même équipe que Reality), bien enregistrées, bien mixées... Bien. Ce n'est pas Hunky Dory, ce n'est pas Ziggy Stardust, ce n'est pas Low, ces références immortelles appartiennent à un passé créatif qui ne revivra plus ou plus que fugitivement, c'est le cru 2013 plus qu'honorable d'un mec qui nous a tous, à un moment ou un autre, fait quelque chose... Et qui réussit au moins à nous rajeunir les tympans d'au moins une décennie en se ressemblant juste ce qu'il faut, et donc en se différenciant légèrement aussi de ce qu'il fut, pour ne pas paraître incongru, ou bêtement revivaliste.
Evidemment, l'évènement se suffisant à lui-même, l'album cartonne avec des numéros 1 en Argentine, Belgique, Croatie, Tchéquie, Danemark, Pays-Bas, Finlande, Allemagne, Eire, Nouvelle-Zélande, Norvège, Pologne, Portugal, Royaume Uni, Suède, Suisse et Etats Unis d'Amérique, et pas loin derrière dans le reste des pays où la musique pop est disponible. Ce n'est, dans le fond, que mérité, couronnant comme il se doit la carrière d'une icône qui a, comme vous l'aurez compris, de forts beaux restes, qu'il a su savamment déployer sur cette résurrectionnelle galette. Que l'avenir réserve-t-il à Bowie ? Quelles seront ses prochaines aventures ? Y aura-t-il seulement de nouvelles aventures ? Autant de questions qui restent pour le moment sans réponse. Reste la satisfaction de tenir, je le répète, un bon Bowie, en 2013, toujours vivant !, et ça, ce n'est pas rien !

Et celui de l'édition "Extra" :
La voilà l'édition super-deluxe-de-la-mort-qui-tue parce que la vache a encore du lait ou quelque chose du genre. Ne le nions pas, l'objet sent le commerce a plein nez, l'exploitation avide d'une œuvre déjà survendue comme le miraculeux retour d'un grand monsieur.
David Bowie est un grand monsieur, à l'évidence, mais The Next Day n'était pas l'implacable machine de guerre qu'une promotion rouleau-compresseur a voulu nous vendre... Ceci dit, ce n'était pas non plus la Bérézina, un bon album qui puisait largement dans le passé son inspiration, un retour qui faisait du bien aussi d'un David Bowie que la rumeur nous disait perdu.
Et donc, The Next Day: Extra, 7 nouvelles pistes pour ceux qui s'étaient procuré, il y a quelques petits mois, l'édition Deluxe, 10 pour ceux qui avaient misé sur l'album lambda. Et un DVD de quatre clips, pour justifier la parution (relativement discrète, cette fois) de l'ultime édition (souhaitons !) The Next Day. Bon, l'album en lui-même vaut ce qu'il vaut, c'est David Bowie faisant du David Bowie"comme avant" avec l'inspiration moindre de ses vieilles années, régressif en diable mais pas désagréable avec quelques très beaux moments et pas de grande déception, suffisant en attendant une hypothétique suite... Mais ce sont donc les bonus qui constituent le sel de la présente édition c'est donc sur leur qualité et celle de l'objet que je la jugerai.
Comme l'album précédemment, la présentation est sobre : une boîte cartonnée, 3 disques dans leur pochette individuelle, 3 livrets avec respectivement les paroles, quelques photos artistiques et un totalement vierge destiné à l'auditeur, pas forcément très utile mais on apprécie l'intention, merci David, donc. Mais là n'est pas l'essentiel qui est, évidemment, représenté par le contenu audio et visuel.
Côté musique, il y a déjà les trois titres bonus de l'édition deluxe (So She, Plan et I'll Take You There), de bons titres. Ajoutez-y un Atomica bien rock et dynamique qu'on croirait presque sorti des sessions d'un Let's Dance recadré 70s. The InformerBowie exploite son signature sound de la première moitié des septantes (plus Ziggy que le Duke) supplémenté d'amusants chœurs doo-wop. Like a Rocket Man itou, encore du Bowie qui rocke electro-acoustique cette fois sur ce charmant shuffle. Born in a UFO est un poil en-deçà, un rock encore il ne possède pas une mélodie assez accrocheuse pour réellement intéresser mais c'est bien joué (joli solo d'Earl Slick) et s'écoute sans déplaisir, c'est déjà ça. Last but not least, avec les vrais inédits, God Bless the Girl, titre plus nuancé et moins caractéristique des habitudes compositionnelles de David, il alterne couplets balladisants, et refrain énergique avec succès pour finir sur une belle envolée gospelisante, et une belle performance de groupe en plus !. Quatre réussites sur cinq, well done Mr. Jones !
Il y a ensuite deux remixes : I'd Rather Be High (Venetian Mix) proche de la version album s'il n'y avait ce synthé en son de clavecin lui donnant un je-ne-sais-quoi de baroque pas désagréable, et Love Is Lost (Hello Steve Reich Mix) qui comme son titre l'indique entraîne la composition vers d'inattendus panoramas sonores avec sa lente progression d'une bossa clappée et électronique vers un onirisme minimaliste groovy bienvenu avant de nous cueillir en explosant en new wave typique reprenant même la petite boucle bien connue d'Ashes to Ashes, etc. Deux réussites donc.
Côté vidéo, pas de docu/making of, pas de live bien sûr (c'est pour quand, David ?), juste quatre clips pour Where Are You Now?, The Stars (Are Out Tonight), The Next Day et Valentine's Day. N'étant, personnellement, pas très sensible au format, je m'abstiendrait de tout jugement de valeur. C'est un bonus de plus, et du bon boulot, n'en doutons pas, pas vraiment de quoi se plaindre.
Bon, comme le machin ne coûte quand même pas un bras, on se remet facilement d'avoir eu, encore, à passer au tiroir-caisse (même si on se dit, un jour ou l'autre, qu'il faudra bien apprendre l'art délicat de la patience). La qualité du matériau proposé, la prospective (puisque l'inspiration était audiblement là !) d'un futur pour Mr. Jones, suffisent à rendre l'objet attrayant à défaut d'indispensable. Cela mérite-t-il l'investissement ? Les fans, évidemment, se rueront dessus, et n'auront pas tort ce faisant, ceux qui ont déjà l'album et ne ressentent pas le besoin urgent d'un complément (ils ont tort, bien sûr !) pourront s'en passer, reste ceux qui n'avaient pas The Next Day, à ceux-ci on conseillera définitivement cette version de belle facture et ses enrichissements plutôt très utiles.

CD 1
1. The Next Day 3:26
2. Dirty Boys 2:58
3. The Stars (Are Out Tonight) 3:57
4. Love Is Lost 3:57
5. Where Are We Now? 4:09
6. Valentine's Day 3:02
7. If You Can See Me 3:12
8. I'd Rather Be High 3:45
9. Boss Of Me 4:09
10. Dancing Out In Space 3:21
11. How Does The Grass Grow? 4:34
12. (You Will) Set The World On Fire 3:32
13. You Feel So Lonely You Could Die 4:37
14. Heat 4:25

CD 2
1. Atomica 4:05
2. Love Is Lost (Hello Steve Reich Mix by James Murphy for the DFA) 10:24
3. Plan 2:02
4. The Informer 4:31
5. I'd Rather Be High (Venetian Mix)  3:49
6. Like a Rocket Man 3:29
7. Born in a UFO 3:02
8. I'll Take You There 2:41
9. God Bless the Girl 4:11
10. So She 2:31

David Bowie: vocals (1-15, 17), producer, guitar (1, 16), string arrangement (1, 3, 15),
acoustic guitar (3, 13-15, 17), keyboards (4, 5, 7, 10, 11, 15-17), percussion (16)
Tony Visconti - engineer, mixing, producer, string arrangement (1, 3, 13-15),
guitar (2, 13, 15, 17), recorder (3, 9), strings (5), bass guitar (6, 12, 15)
Zachary Alford: drums (1-5, 7-11, 13-17), percussion (7)
Sterling Campbell: drums (6, 12), tambourine (12)
Gail Ann Dorsey: bass guitar (1, 3, 4, 10, 11, 13, 14, 17),
backing vocals (3, 7, 9, 11-13, 17)
Steve Elson: baritone saxophone (2, 3, 9), contrabass clarinet (3)
Henry Hey: piano (5, 13)
Gerry Leonard: guitar (1-5, 7-15, 17), keyboards (15)
Tony Levin: bass guitar (2, 5, 7-9)
Janice Pendarvis: backing vocals (3, 9, 12, 13, 17)
Earl Slick: guitar (2, 6, 12)
David Torn: guitar (1, 3, 7, 10, 11, 13-15, 17)
Hiroko Taguchi: strings (1, 3, 13-15)
Antoine Silverman: strings (1, 3, 13-15)
Maxim Moston: strings (1, 3, 13-15)
Anja Wood: strings (1, 3, 13-15)

2013

1972
Lou Reed "Transformer"
ou "Lou sous influence"

Si son éponyme sorti quelques mois plus tôt avait tout l'air d'un "solde de tous comptes", exclusivement composé de chansons originellement destinés au Velvet Underground, c'est avec Transformer qui constitue les vrais débuts d'artiste solo d'un Lou Reed composant pour lui-même avec, présentement, comment ne pas les nommer ?, l'assistance ô combien précieuse de deux fameuses araignées martiennes, David Bowie et Mick Ronson.
Contrairement à Iggy Pop quelques années plus tard (The Idiot, 1977), Lou est l'auteur de tout l'album ne partageant qu'un petit crédit avec son coproducteur de l'exercice, Wagon Wheel, créé lors d'une jam avec David, mais comme Iggy il bénéficie du savoir-faire et des penchants stylistiques de la doublette qui l'a pris sous son aile. Le résultat est un album de pop/rock classique de son temps, les seventies, où l'inspiration, la qualité de l'interprétation et des arrangements font la différence. Alors, évidemment, il y a les trois tubes, les classiques qui continuent de hanter les ondes radiophoniques, le solaire et harmonieux mais ultimement un poil dépressif Perfect Day (une belle journée ! j'aurais aimé la passer avec toi...) et son penchant de la nuit qu'est le sexuellement chargé de Walk on the Wild Side, sa ligne de basse légendaire, son petit chorus de saxo bienvenu, et, bien-sûr, un Satellite of Love enluminé de chœurs accrocheurs pourvu, en partie, par un Bowie qu'on entend vraiment très bien sur le dernier refrain. Pour ces trois-là, pas besoin de faire l'article mais il ne faudrait pas limiter l'opus à ces fiers baobabs parce que, vraiment, c'est l'entièreté de Transformer qui en impose dans un ensemble frais et varié où le ton détaché, sarcastique presque, de Reed fait merveille.
Avec l'assistance on ne peut plus précieuse de David Bowie et Mick Ronson, Lou Reed redémarre en trombe une carrière solo qui connaîtra d'autres hauts (les deux authentiques classiques des 70s que sont Rock & Roll Animal et Coney Island Baby, ou, plus tard, Songs For Drella excellent hommage à Andy Warhol en duo avec John Cale ou New York sur la foi de son propre talent) mais aussi quelques bas (l'accessoire Sally Can't Dance, Metal Machine Music, entreprise de sado-masochisme sonique s'il en fut, ou Rock And Roll Heart qui manquait cruellement du dernier, le cœur). De ce tout, à creuser, il y a des merveilles !, Transformer demeure l'apex, un immanquable.

1. Vicious 2:55
2. Andy's Chest 3:17
3. Perfect Day 3:43
4. Hangin''Round 3:39
5. Walk on the Wild Side 4:12
6. Make Up 2:58
7. Satellite of Love 3:40
8. Wagon Wheel 3:19
9. New York Telephone Conversation 1:31
10. I'm So Free 3:07
11. Goodnight Ladies 4:19

Lou Reed - guitar, vocals
Herbie Flowers - bass guitar, double-bass, tuba on "Goodnight Ladies" and "Make Up"
Mick Ronson - lead guitar, piano, recorder, backing vocals, string arrangements
John Halsey - drums
&
David Bowie: backing vocals, keyboards
Ronnie Ross - baritone saxophone on "Goodnight Ladies" and "Walk on the Wild Side"
The Thunder Thighs - backing vocals
Barry DeSouza - drums
Ritchie Dharma - drums
Klaus Voormann - bass on "Goodnight Ladies" and "Make Up"

avec Lou Reed

1977
Iggy Pop "The Idiot"
ou "Iggy (encore plus) sous influence"

C'est le premier album de l'iguane, un album qui, comme le fantastique Transformer de Lou Reed quelques années plus tôt, porte le sceau d'un David Bowie toujours partant pour aider un pote à sa relance, quitte à vampiriser son "sujet".
Parce que, indéniablement, dès un titre en référence à Fiodor Dostoïevski (j'sais pas vous mais, moi, j'ai du mal à imaginer Iggy potasser les classiques de la littérature russe), d'une approche, une esthétique musicale typique de la période berlinoise de l'homme aux yeux vairons, jusqu'à des crédits intégralement partagés par l'auteur et son mentor/producteur, on a très souvent l'impression d'écouter un album de David Bowie chanté par Iggy Pop. Comme c'est un bon David Bowie, option post-kraut new-waveuse avant l'heure à fond les bananes !, avec quelques vrais highlights (Sister Midnight, co-écrit avec le guitariste Carlos Alomar, l'imparable Nightclubbing morceau culte s'il en fut, un Funtime cousin-Kraut, ou un China Girl que Bowie n'hésitera pas à transformer en hit mondial quelques années plus tard en le débarrassant de son initiale noirceur), on ne boude pas son plaisir et plonge dans les méandres d'un album mené par la voix du mort-de-faim, un peu à la ramasse depuis la séparation des Stooges et son séjour psychiatrique, cet Iggy plus vraiment ce symbole proto-punk, introverti et nihiliste.
The Idiot, plus qu'une première œuvre, demeure un des tous meilleurs album d'Iggy avec, évidemment, Lust for Life sorti la même année et reconduisant presque la formule et l'équipe, une puissante et artistique déclaration d'intention qui ne sera pas, hélas, toujours suivie d'effets dans la suite de la carrière de Mister Pop.

1. Sister Midnight 4:19
2. Nightclubbing 4:14
3. Funtime 2:54
4. Baby 3:24
5. China Girl 5:08
6. Dum Dum Boys 7:12
7. Tiny Girls 2:59
8. Mass Production 8:24

Iggy Pop - vocals
David Bowie - keyboards, synthesizer, guitar, piano, saxophone, xylophone, backing vocals
Carlos Alomar - guitar
Dennis Davis - drums
George Murray - bass guitar
Phil Palmer - guitar
Michel Santangeli - drums
Laurent Thibault - bass

avec Iggy Pop

DAVIDs (1/2)

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Une petite série de David(s), ça vous tente ? Et ce n'est que le premier des deux volumes avec, à tout seigneur tout honneur, un début avec le grand partant du moment. Allez, sans plus de commentaires, enjoie !

HeRo
David Bowie "Space Oddity" (1969)
ou "(presque) le Vrai Bowie"

Bowie n'est plus ce dandy kinksien, walkerien et surtout profondément anglais d'un éponyme au retentissement commercial exactement opposé aux ambitions de son auteur.
Et donc, scratch that, Bowie décide de fondamentalement revoir sa copie et, comme de bien entendu, de coller au plus près au psychédélisme baba florissant de l'époque quitte à carrément lorgner vers Donovan, absolu champion du genre. L'idée, pas mauvaise au demeurant, permet à la jeune pousse de tester son écriture dans un nouveau registre s'aguerrissant encore un peu plus à l'art de la chansonnette où il a déjà de belles aptitudes. Et puis, surtout, ça lui offre son premier tube, un truc un peu "novelty" sur les bords puisque, le thè.me allant bien, le management et la maison de disque de l'ex-Mister Jones décident de le proposer pour qu'il coïncide au plus près avec la fièvre spatiale de l'alunissage originel, comme en plus c'est une bonne chanson, une excellente chanson même qui tient encore la route aujourd'hui, on n'ira pas se plaindre d'un carriérisme intelligent qui a, de toute manière, toujours été la marque du sieur Bowie.
Hélas, la suite de l'œuvre est loin d'être aussi convaincante : Le rock psyché à la Grateful Dead de Unwashed and Somewhat Slightly Dazed n'est pas désagréable mais un peu trop fouilli et brouillon pour vraiment marquer (malgré la belle performance guitaristique de Tim Renwick), Letter to Hermione, pour sa petite amie d'alors, c'est pas mignon ça ?, est, justement mignonne tout plein mais marche trop sur les plates-bandes du précité Donovan, comme An Occasional Dream un peu plus tard,  et ne marque pas suffisamment mélodiquement pour qu'on en fasse grand cas, mais c'est charmant, c'est sûr. Signet Committee, où l'influence tend plus vers les beat-epics de Dylan, est bien fichue mais un peu trop longuette pour ne pas lasser et perdre un peu l'auditeur. Janine, qui aurait facilement être de son opus de 67, est une jolie kinkserieélectroacoustique certes un poil dérivative mais satisfaisante. Après un ultime numéro "à la", une chanson orchestrale quelque part entre les Beatles et Scott Walker (Wild Eyed Boy from Freecloud, assez réussi au demeurant), on tombe, enfin !, sur les deux autres raisons de vraiment s'enthousiasmer pour ce Space Oddity sinon mi-figue mi-raisin, avec d'abord une folk-rockerie qui annonce The Man Who Sold the World et Hunky Dory (God Knows I'm Good) et, surtout, l'épique et trippant Memory of a Free Festival qui, assurément, sent fortement le patchouli et la cigarette qui fait rire mais est si impeccablement mené, final en chœur compris, qu'on aurait mauvaise grâce à tenter d'y résister. 
Déjà produit par Tony Visconti (boucle hélas bouclée aujourd'hui), pas encore tout à fait mûr mais montrant une personnalité s'affirmant, Space Oddity n'est assurément pas un essentiel du catalogue de David Bowie, il n'en demeure pas moins, absolument de son époque qu'il est, un agréable témoignage d'un temps que les moins de (wow !) 60 ans, etc. Accessoire mais recommandé tout de même, donc.

1. Space Oddity 5:16
2. Unwashed and Somewhat Slightly Dazed 6:12
3. (Don't Sit Down) 0:42
4. Letter to Hermione 2:36
5. Cygnet Committee 9:35
6. Janine 3:25
7. An Occasional Dream 3:01
8. Wild Eyed Boy from Freecloud 4:52
9. God Knows I'm Good 3:21
10. Memory of a Free Festival 7:09

David Bowie– vocals, 12-string guitar, acoustic guitar, Stylophone, organ, kalimba
Rick Wakeman– mellotron, electric harpsichord, keyboards
Terry Cox– drums
Tim Renwick– electric guitar
Keith Christmas– acoustic guitar
Mick Wayne– guitar
Tony Visconti– bass guitar, flute, recorder
Herbie Flowers– bass guitar
Benny Marshall and friends– harmonica
Paul Buckmaster– cello

DAVID BOWIE

MySTiC
David Axelrod "Songs of Experience" (1969)
ou "Song Cycle"

L'homonymie est trompeuse, d'autant plus que le nom n'est pas courant, alors précisions que David Axelrod le musicien n'a strictement rien à voir avec David Axelrod le consultant politique qui œuvra activement à l'élection de Barack Obama et en est aujourd'hui le conseiller. Non, l'Axelrod qui nous intéresse, et dont va nous parler Dioneo (Guts of Darkness) est un compositeur, arrangeur et producteur connu pour son travail fidèle avec l'excellent Cannonball Adderley, pas qu'il fasse vraiment du jazz ici, notez. Et donc, aux mots du chroniqueur "convoqué" :
"L’Expérience est multiple. Éclatement, recoupements. Les sens s’attachent et voguent sur des objets divers. Des êtres se rencontrent. Le cœur trébuche et s’endurcit. Se relève et brille et se gonfle à nouveau. L’œil, des années plus tard, se pose ou passe, lucide, sur la fillette perdue, l’écolier qui va, grave ou insouciant. Avec nostalgie, indulgence ; ou bien envie, regrets, remords ; ou bien indifférence. Elle fait des êtres finis – ceux qui pour leur malheur la tiennent comme somme achevée, butin thésaurisé, jaloux. Elle fait les Blasés. Elle fait les Libertins. Elle fait des Décadents avec des Audacieux ou des volontés faibles. Elle fait les Visionnaires. Des Baudelaire, des De Quincey… Des Blake. Parfois, comme par faveur, elle fait la Force de l ‘Âge… Elle contemple ses stases et tous ses bonds passés, tout ce qu’elle a frôlé ou qui l’a pénétrée. Elle dessine la trame, l’invariable matière au fond des mutations. Connaissance gagnée au-delà des intuitions de la prime jeunesse. L’existence n’est plus vierge…
En 1969, un an à peine après Song of innocence– premier volet d’un diptyque prévu s’inspirant des œuvres de l’Anglais William Blake– entre deux séances d’enregistrement pour le nouvel album de Cannonball Aderley, la bande-son du prochain coup d’Hollywood ou d’une quelconque série télé, David Axelrod s’apprête à donner suite. Une même foison de pupitres est mobilisée. Une écriture semblablement vaste, aérée, dense, détermine la forme, la dimension du nouveau cycle. Un même usage des genres, des styles, des techniques – contrastés et confondus. Une même puissance d’évocation l’anime – mais cette fois-ci traçant son plan selon une autre échelle. Song of Innocence s’attachait à révéler des détails, donnait à sentir des instants en leur conformation, leur poids, leur grain ; captivait le regard par voie d’orchestration – synesthésie, mon amie… – sur un mode parfois presque hallucinatoire. Le Voyageur Mental, à sa dernière plage, apercevait la route, vaguement inquiet, curieux. Début d’exil volontaire, premier pas de l’Initiation. Songs of Experience nous donne l’instant de son retour. La Chute a bien eu lieu, le désenchantement. C’est au pied de L’Arbre Empoisonné que nous le retrouvons. Mais ses tourments ne nous seront pas contés, les épisodes, la mécanique du processus où s’est défaite toute illusion. Sa vision décillée, à la place, nous échoit en partage. Les huit plages du cycle, globalement, ralentissent le pas. Imperceptiblement, alentissent, feutrent le battement. Élargissent la focale, en effet de recul. Ce sont, cette fois – plutôt que des impressions qui nous seraient transmises, passées – des lieux qui nous sont dévoilés, offerts. Des villes, des rues saisies dans leurs détails et leur ensemble ; leurs mouvements, leurs mécaniques, les failles de leurs architectures ; les directions de leurs accidents. Des personnages en cheminement – déambulations, errances, marches et stations au but – là où le premier volet campait des archétypes, terribles et fascinants avec leurs Livres de Métal, attirant au point d’effacer tout décor. Ils sont maintenant prochains… Ennemis, inconnus, semblables, camarades. La courtisane, sous sa beauté, ses parades plastiques, est une Rose Malade, prêtresse vénérienne, chair accueillante et vénéneuse. La poésie – auparavant sarabande d’images révélées, reflets arrachés aux reliefs – se fait symbolisme matois. Renversements compris, joueurs, malicieux. Charades hermétiques. Un trombone énonce, module, allonge, rétracte un motif, une courte phrase. L’explore, l’essaye. L’Abstraction Humaine déroule son équation métaphysique. Un parfum – à travers les étoffes, dans la foule – vient frapper l’odorat. L’esprit, de nouveau, est tiré au dehors. Song of Innocence était contemplation ardente, couleurs en arêtes vives qui imprimaient leurs traits aux pupilles grandes ouvertes, jaillissements impromptus de lyrisme électrique.
Songs of Experience décline des timbres plus mats, des périodes aux variations d’abord à peine perceptibles. Rien n’y est terne, pour autant. L'expectative, le suspens, souvent, dessine son pas. L’Innocence, en partant, emmène les chatoiements – mais l’Expérience, par la grâce d’un discernement affiné, apparie les nuances, distingue les parties, s’absorbe aux dégradés. Les lignes instrumentales, ici, s’articulent autrement, en dialogues plus doux. En commerces tactiles délicats, en torsions harmoniques effleurées. En effacements discrets jusqu’au moment propice où elles se délieront. Les mélodies, les cellules qui d’une pièce à l’autre se répondent, se répètent, s’énoncent plus brièvement – en rappels furtifs, parfois presque inaperçus. Les levées lyriques des archets s’infléchissent cette fois d’orientalismes – comme on dirait en peinture : manière, modelé sensuels mais lumière mesurée, tamisée, assourdie délibérément par places. En courbures mineures, chromatismes ambigus. Une mouche bourdonne – l’herméneutique s’en mêle. Et l’ironie libère le tableau de son cadre, défait la Vanité dans le regard mobile. La chair est corruptible – l’homme est mortel. Mais pour l’heure elle se tient, campée dans son enveloppe. Rien n’est figé, rien n’est ennui au fil de ces huit plages. Mais l’enchantement, cette fois, est affaire d’alchimie, de science donnée comme telle, acceptée, pratiquée. Le jeu des émotions n'est pas plus qu’autrefois un simple ballet de masques. Mais l'ouvrage, maintenant, porte en un même instant zones ombrées et halos – par mesure, par justesse, pour ne rien épuiser. L’Expérience pose un choix : retourner au Monde en connaissance des gouffres, des pièges, des tricheries corps et âme. "And Love the human Form, Divine …". Ou bien poursuivre encore l’originelle pureté – au risque de la perdre et de la contrefaire. "And Peace, the Human dress". L’Expérience, quand elle ne trouve pas, n’admet pas les limites de son entendement, peut sceller l’existence, l’isoler hors la vie. Une note tenue, presque continue, une attente – une angoisse ? – tend la toute dernière plage, à l'achèvement du cycle. L’Image Divine est œuvre humaine, forme créée, beauté délibérée. L’intellect se dénoue au son du sang qui courre. "And all must love the human form, in heathen, Turk, or Jew ; Where Mercy, Love, and Pity dwell, there God is dwelling too". L’Art de Blake, une fois encore, rencontre cette époque à quoi rien ne le destinait. Axelrod, encore, fait le lien. L’Expérience, à nouveau, dépassant la butée, s’est faite inspiration."
Oui, tout ça !

1. A Poison Tree 3:10
2. A Little Girl Lost 3:24
3. London 2:47
4. The Sick Rose 4:47
5. The School Boy 2:30
6. The Human Abstract 5:32
7. The Fly 4:50
8. A Divine Image 4:39

DAVID AXELROD

SoLo
David Crosby "If I Could Only Remember My Name" (1971)
ou "Capitaine Crosby"

Enfin capitaine de son propre navire après moult collaborations, David Crosby ne s'éloigne pourtant pas franchement de ce qu'on a appris à connaître et à aimer de son œuvre, du folk rock tout en finesse et en distinction mais se permet tout de mêmes quelques extravagances, une certaine liberté comme va nous l'évoquer Frank (Rawpowermagazine.com) :
"Crosby Stills Nash & Young. L'association de ces quatre noms suffit à évoquer une autre époque, celle de la fin des sixties, âge d'or pour la scène californienne. Pourtant le groupe fut particulièrement éphémère, deux très bons albums, Crosby Stills & Nash (1969) et Déjà Vu avec Young (1970) et un album live dispensable (4th Way street en 1971) avant une mise en sommeil de six ans et une reformation en 1977 assez inutile.
Mais ce que l'histoire a cru bon d'oublier c'est que derrière ce super groupe (Crosby vient des Byrds, Nash des Hollies et Stills de Buffalo Springfield, excusez du peu), se cache des musiciens de talent qui auront tôt fait de voler de leurs propres ailes et surtout de sortir tour à tour des albums au succès indéniable.
Et parmi ces quatre artistes, le premier album de David Crosby mérite vraiment que l'on s'y attarde, un disque d'une qualité, osons-le, au moins égale à son éphémère groupe..
Les premiers pas solos de l'ex-Byrds ont en effet débouché sur un album essentiel à toute discothèque qui se respecte. Enfin, album solo si l'on considère que Crosby a écrit 6 des 9 morceaux présents sur ce If I Could Only Rember My Name, cosignant les autres, car au niveau line-up David Crosby n'a pas fait les choses à moitié s'entourant de la crème des musiciens West Coast de l'époque : sous la houlette de Stephen Barncard, on retrouve pêle mêle, des membres du Jefferson Airplane (Grace Slick, Paul Kantner, Jack Casady et Jorma Kaukonen), de Grateful Dead (Jerry Garcia, Phil Lesh, Bill Kreutzmann et Mickey Hart), Greg Rollie et Michael Shrieve qui officient chez Santana, David Freiberg de Quicksilver Messenger Service et Joni Mitchell. Festivités auxquelles sont également conviés les compères Neil Young et Graham Nash.
Un album de famille en quelque sorte.
Crosby propose de purs moments de grâce, des mélodies cristallines comme lui et ses compagnons de CSN&Y ont seuls le secret : "Music Is Love" petite ritournelle acoustique enrichi de congas, "Traction On The Rain", "Laughing" qui répond au mysticisme d'un George Harrison ou ce "Song With No Words" tout en délicatesse, embelli par le piano de Greg Rollie.
Pour autant, ce premier album est un disque varié qui doit beaucoup aux apports de musiciens irréprochables, les guitaristes Jerry Garcia et Jorma Kankaunen en tête qui transcendent l'hypnotique "Tamalpais High" sans doute le morceau le plus connu du disque. Un Jerry Garcia au top de sa forme sur le plus rock "Cowboy Movie" qui multiplie les solos, portent à lui seul le morceau pendant que Crosby déclame plus qu'il ne chante des paroles énigmatiques a priori rapportant la séparation de CSN&Y. Même si on est circonspect sur cette explication, le morceau reste un sommet d'acid folk.
La conception du disque, entre morceaux écrits au fil des années par Crosby et improvisations lors de jam sessions, fait de ce disque un petit miracle mais aussi la démonstration du talent de tous ces musiciens. La construction d'un titre comme "What Are Their Names" est tout simplement remarquable : le morceau débute lentement par quelques accords de guitares signées Crosby et Garcia, puis progressivement vient se greffer la basse de Phil Lesh, la batterie de Bill Kreutzman avant les envolées vocales de toute la clique présente ce jour là !
Le travail remarquable de Stephen Barncard qui offre le parfait écrin aux compositions de Crosby, usant avec intelligence et parcimonie des possibilités des studios, sans abuser des effets de manche, apportant juste le petit plus qui transcende un morceau, n'est pas pour rien dans le charme intemporel de If You Could Only Remember My Name.
Le disque eut un succès relatif et ce malgré quelques critiques négatives à son encontre notamment de la part de Lester Bangs.
Pourtant il constitue à la fois un témoignage du talent (immense) de Crosby mais aussi du foisonnement créatif et de l'ambiance de franche camaraderie qui caractérisait la scène californienne de l'époque (l'opposé du contexte politique et social plus que tendu...)
Cet album est assurément un de ceux à emporter sur une île déserte.
"
Et vous hésitez encore ?

1. Music Is Love 3:16
2. Cowboy Movie 8:02
3. Tamalpais High (at about 3) 3:29
4. Laughing 5:20
5. What Are Their Names 4:09
6. Traction in the Rain 3:40
7. Song with No Words (Tree with No Leaves) 5:53
8. Orleans 1:56
9. I'd Swear There Was Somebody Here 1:19

David Crosby— vocals, guitars
Graham Nash— guitar, vocal on "Music Is Love"; vocals on "Tamalpais High,""Laughing,""What Are Their Names,""Traction in the Rain," and "Song with No Words"
Jerry Garcia— electric guitar on "Cowboy Movie,""Tamalpais High,""What Are Their Names," and "Song with No Words"; pedal steel guitar on "Laughing"; guitars on "Kids and Dogs"; vocal on "What Are Their Names"
Neil Young— guitars, vocals on "Music Is Love" and "What Are Their Names"; bass, vibraphone, congas on "Music Is Love"
Jorma Kaukonen— electric guitar on "Tamalpais High" and "Song with No Words"
Laura Allan— autoharp, vocal on "Traction in the Rain"
Gregg Rolie— piano on "Song with No Words"
Phil Lesh— bass on "Cowboy Movie,""Tamalpais High,""Laughing," and "What Are Their Names"; vocal on "What Are Their Names"
Jack Casady— bass on "Song with No Words"
Bill Kreutzmann— drums on "Tamalpais High" and "Laughing"; tambourine on "Cowboy Movie"
Michael Shrieve— drums on "What Are Their Names" and "Song with No Words"
Mickey Hart— drums on "Cowboy Movie"
Joni Mitchell— vocals on "Laughing" and "What Are Their Names"
David Freiberg, Paul Kantner, Grace Slick— vocals on "What Are Their Names"

DAVID CROSBY

FaLLeN aNGeL
David Byron "Baby Faced Killer" (1978)
ou "out of Heep"

Dans la courte carrière solitaire de celui qui demeurera à jamais LE vocaliste de Uriah Heep, David Byronévidemment, il y a Take No Prisoners enregistré comme une récréation d'avec son groupe mais avec des membres d'icelui, dérivatif si sympathique, c'est un opus avant tout recommandé aux fans des "Deep Purple du pauvre". Mais, forcément, quand Byron quitte (ou se fait virer selon les version par) ses compagnons, il n'a qu'une envie, trouver sa voie(x).
Il y a d'abord l'album de Rough Diamond (avec Clem Clempson de chez Humble Pie et Colosseum et l'ex-batteur des Wings, Geoff Briton) mais ce classic rock pas franchement excitant n'est définitivement pas le tremplin idéal pour sa nouvelle carrière. Aussi, accompagné d'un vieux pote dans le rôle du co-créateur et producteur, Daniel Boone, se lance-t-il dans Baby Faced Killer, indéniablement son œuvre la plus variée. Ca commence très fort par un disco-rock habité de synthés spatiaux (Baby Faced Killer), ca continue avec un quasi-rockab' réussi (Rich Man's Lady, Acetylene Jean), un machin cousin de Seals and Crofts (Sleepless Night) qui fait son petit effet, une bizarrerie évoquant Kraftwerk et le Roi Lion (African Breeze), une belle ballade un brin hippie (Everybody's Star), un petit coup de rock à la Heep pour ne pas complètement perdre les fans (Heaven or Hell, Dont Let Me Down) pas franchement folichons d'ailleurs mais pas indignes non plus, un petit tour du côté de chez Queen et 10cc (Only You Can Do It), pour finir par une belle ballade (I Remember) au solo rappelant fortement Brian May. Du coup, si la majorité des chansons sont bien fichues et distrayantes, à défaut d'être tout à fait à la hauteur des haut-faits passés du sieur Byron, il y a sur Baby Faced Killer un éclatement qui n'aidera pas et conduira à son cuisant et injuste échec commercial et perdra un peu le public fervent du chanteur. 
Disparu en 1985, un prix que beaucoup de ceux qui comme David brûlèrent la chandelle par les deux bouts eurent à payer, Byron prouve ici qu'il était bien plus qu'un bête chanteur de hard rock, ce n'était pas gagné d'avance et fait de Baby Faced Killer une curiosité recommandée aux adorateurs de Byron, aux zélotes du Heep et, plus généralement, à toutes celles et tous ceux curieux d'entendre un album certes mineur, certes non-exempt de quelques lourdeurs caractéristiques de son temps, mais si diablement fun qu'on peine à y résister.

1. Baby Faced Killer 3:10
2. Rich Man's Lady 3:51
3. Sleepless Nights 3:48
4. African Breeze 4:12
5. Everybody's Star 4:20
6. Heaven Or Hell 4:42
7. Only You Can Do It 4:04
8. Don't Let Me Down 3:21
9. Acetylene Jean 3:19
10. I Remember 4:08

David Byron: Lead Vocals
Stuart Elliott: Drums
Alan Jones: Bass
Daniel Boone: Guitars, Keyboards & Percussion
&
Barry Desouza: Drums
Lester Fry: Timpanis and Chimes
Backing Vocals: Lelly Boone, Gabriele Byron, Alyson Mcinness, Muff Murfin and Brad Davies

DAVID BYRON

DiaMoND
David Lee Roth "Eat 'Em and Smile" (1986)
ou "Plus fort que les frères"

Dire qu'on l'attendait au tournant - alors qu'il avait quitté la poule aux aeufs d'or et sorti un EP de reprises certes sympathique mais pas transcendant - relève du doux euphémisme. Le moins que l'on puisse dire c'est que David Lee Roth remporte ici le challenge voire enfonce la tête des ses ex-partenaires sous l'eau.
Car enfin, si on devait comparer cet Eat 'Em and Smile au 5150 des frères bataves, il ne faudrait pas bien longtemps pour déclarer David et sa nouvelle bande d'allumés vainqueurs par KO.
Pour remplacer Edward, Steve Vai est un choix judicieux. Technicien hors pair mais pas franchement un boute-en-train, Vai - ici poussé dans ses retranchements par le patron - livre une des ses plus mémorables performances... ce qui n'est pas peu dire.
L'ex Talas Bill Sheehan (basse) et le session-man Greg Bisonette (batterie) composent quand à eux une section rythmique cohérente et efficace quelque soit l'orientation prise par l'album.
Car, et c'est bien là la force de David Lee sur ses anciens compagnons, la fantaisie et la variété sont au rendez-vous. Du hard rock bien furieux (Shyboy, Elephant Gun), du big bang (I'm Easy, That's Life), du bon gros big rock comme Van Halen ne savait plus en faire (Yankee Rose, Goin' Crazy)... Tout est là !
Cerise sur le gâteau, c'est Ted Templeman - qui avait si bien mis en son la discographie de Van Halen - qui produit l'album... à la perfection.
Jamais plus David Lee ne refera un album de ce calibre (mention tout de même à Skyscraper et Your Filfthy Little Mouth) mais, bon, peu d'artistes peuvent se targuer d'avoir ne serait-ce qu'un album de cette qualité à leur actif.
Essentiel donc.

PS : je vous ai mis la version hispanophone en bonus !

1. Yankee Rose 3:55
2. Shyboy 3:24
3. I'm Easy 2:11
4. Ladies' Nite In Buffalo? 4:08
5. Goin' Crazy! 3:10
6. Tobacco Road 2:29
7. Elephant Gun 2:26
8. Big Trouble 3:59
9. Bump And Grind 2:32
10. That's Life 2:45

David Lee Roth - vocals, backing vocals
Steve Vai - guitars, horn arrangement on 3
Billy Sheehan - bass, backing vocals on 2, 3, 5, and 6
Gregg Bissonette - drums, backing vocals on 3
&
Jeff Bova - keyboards on 1
Jesse Harms - keyboards on 5
Sammy Figueroa - percussion on 5
The Waters Family - backing vocals on 10
The Sidney Sharp Strings - strings on 10
Jimmie Haskell - horn and string arrangement on 10

DAVID LEE ROTH

TWo BRaiNS
David Fiuczynski & John Medeski "Lunar Crush" (1994)
ou "Ensemble, fusionnons !"

C'est la rencontre de deux musiciens encore presque débutants mais destinés à de grandes choses, celle d'un guitariste capable de tout (David Fiuczynski) et d'un claviériste déjà leader de sa propre formation (Medeski Martin & Wood), à l'époque ce n'est pas grand chose mais, à y revenir aujourd'hui, c'est une toute autre histoire.
Une chose est claire, ces deux là se sont bien trouvés, amateurs de jazz à la marge, de gros groove qui tue ils n'eurent pas à beaucoup chercher pour se trouver des points communs ni à beaucoup de forcer pour collaborer, sur des compositions de Fiuczynski, et se trouver un son qui leur agrée, et ils sont bien entourés, le bougres, avec le bassites Fima Ephron (qui accompagnera Fiuczynski dans ses Screaming Headless Torsos ou Gil Scott-Heron sur le très réussi Spirits), le batteur Jojo Mayer (même parcours que le précité mais aussi leader de sa propre formation, Nerve), et aussi Gene Lake (batteur aussi, entre autres chez Henry Threadgill, Dave Douglas, etc.), bref, du beau monde pour une belle fête évoquant parfois les funkeries jazzistiques du Lifetime de Tony Williams. en plus de pontes de l'avant-garde fusion tels que Sun Ra, Sonny Sharrock ou Pharoah Sanders. Allez, pour minorer un tout petit peu l'enthousiasme, on avouera que les chansons avec vocaux (Pacifica, Gloria Ascending, Lillies That Fester...) sont un peu moins enthousiasmantes que leurs voisines instrumentales, mais c'est vraiment tout ce qu'on peut reprocher à un album sinon d'excellente tenue.
Vous aimez le jazz qui funke dur ?, celui qui balance sévère sans oublier la finesse ? Ne cherchez pas plus loin que ce Lunar Crush certes ancien, plus de vingt ans !, mais toujours d'actualité.

1. Vog 6:41
2 Pacifica 4:25
3 Gloria Ascending 6:01
4 Pineapple 3:55
5 Quest 6:37
6 Freelance Brown 6:33
7 Slow Blues for Fuzy's Mama 6:50
8 Lillies That Fester... 4:25
9 122 St. Marks 5:19
10 Fima's Sunrise 6:10

David Fiuczynski - guitar
John Medeski - keyboards
Fima Ephron - bass
Gene Lake - drums
Jojo Mayer - cymbals, drums
Gloria Tropp, Michelle Johnson - vocals

DAVID FIUCZYNSKI

BouRDoN
David Sylvian "Dead Bees on a Cake" (1999)
ou "Sylvianisation"

Il a été la principale force vive d'un des plus beaux spécimens de la new wave (Japan), il a collaboré avec Ryuichi Sakamoto, Holger Czukay (Can) ou Robert Fripp (King Crimson), présentement à son cinquième album solo, le premier depuis 1987, un vrai retour en somme, David Sylvian propose son œuvre la plus éthérée et rêveuse, Dead Bees on a Cake.
On y reconnaît exactement la patte de Sylvian, ces tentations d'accouplement du synthétique et de l'organique, du moderne et de l'ancien. On y retrouve aussi cette classieuse propension à orchestrer dans l'élégance les éléments qu'il a amoureusement collectés. Mais si Sylvian cherche, et trouve la plupart du temps, il n'en oublie pas pour autant qu'il est, fondamentalement, un compositeur pop qui sait créer de belles ambiances éthérées comme sur les très réussis I Surrender (un petit quelque chose de trip-hop pour soutenir la belle voix grave de David), Cafe Europa (une planerie qui sonne largement comme la fugitive renaissance de Japan sous l'appellation Rain Tree Cow), Krishna Blue (aux dépaysantes ambiances indiennes), ou le sensuel velours de Wanderlust. Ailleurs, glissant vers le blues tout en restant lui-même (Dobro #1, Midnight Sun, l'un avec Frisell, l'autre avec Ribot, on a vu pire...), apportant des touches jazzées à son cool sound (Thalheim avec le bugle au swing délicat de Kenny Wheeler), semblant parfois vouloir faire son Tom Waits (le percussif Good Man), ou se laissant porter par de belles cordes émouvantes (The Shining of Things), c'est un Sylvian esthète cohérent qui s'offre à nous.
Mer de tranquilité secouée de quelques ponctuels orages, Dead Bees on the Cake, au casting impressionnant (voir plus bas), est une totale réussite d'un artiste à qui la liberté va décidemment merveilleusement au teint.

1. I Surrender 9:24
2. Dobro #1 1:30
3. Midnight Sun 4:00
4. Thalheim 6:07
5. God Man 4:02
6. Alphabet Angel 2:06
7. Krishna Blue 8:08
8. The Shining of Things 3:09
9. Cafe Europa 6:58
10. Pollen Path 3:25
11. All of My Mother's Names 6:11
12. Wanderlust 6:43
13. Praise 4:02
14. Darkest Dreaming 4:01

David Sylvian– vocals, guitars (all tracks except 2, 6, 8), keyboards (exc. 8, 13), bass (5), drum programming (4, 5, 7, 9), samples (1, 3, 10, 14), string arrangements (1, 8)
Ryuichi Sakamoto– Fender Rhodes (1, 6, 11), orchestrations and string arrangements (1, 8), brass arrangements (3), sampled guitar and bansuri (7), insects (10)
Tommy Barbarella– Fender Rhodes (4, 12)
Marc Ribot– electric guitar (1, 3, 11), acoustic guitar (5, 10), slide guitar (10)
Bill Frisell– dobro (2, 7), acoustic guitar (7)
Kenny Wheeler– flugelhorn (1, 4)
Lawrence Feldman– flute (1)
Deepak Ram– bansuri (7)
John Giblin– bass (4, 12)
Chris Minh Doky– double bass (11)
Steve Jansen– percussion (1, 7, 9), loops (4, 5), cymbals (4)
Ged Lynch– original drum track (4), drums (10, 12)
Scooter Warner– original drum track (5), drums (11)
Talvin Singh– tabla and percussion (7, 11)
Steve Tibbetts– gong (7)
Ingrid Chavez– vocals (7, 9)
Shree Maa– vocals (13)

DAVID SYLVIAN

ZoRNoPHaGie
David Krakauer "Pruflas" (2012)
ou "Anges Agités"

Il aura fallu attendre plus d'un an pour que le Book of Angels de Cyro Baptista et son Banquet of the Spirits arrive dans les bacs. C'est inhabituellement long mais le jeu en valait la chandelle, particulièrement quand le présent volume nous propose la rencontre au sommet de deux légendes. Un programme si alléchant qu'on le savoure avant d'en avoir entendu la moindre note !
La rencontre de deux légendes donc. Dans le coin gauche, l'hyperactif et révéré compositeur / arrangeur / multi-instrumentiste / patron de label / producteur (n'en jetez plus !) : John Zorn. Dans le coin droit, le clarinettiste / compositeur (et arrangeur pour la circonstance) qui a fait exploser le cadre traditionnel du klezmer (musique juive ashkénaze) la revitalisant en la fusionnant avec des influences nouvelles (du hip-hop, au rock en passant par le jazz et le funk) : David Krakauer, dont ce n'est que le 8ème long jeu depuis 1995.
Autant le dire, musicalement, cet album n'est pas franchement surprenant et couvre, comme c'était attendu, les compositions de Zorn des atours habituels de Krakauer. Ainsi, si le hip-hop est cette fois aux abonnés absents, les autres inflexions de David sont-elles au rendez-vous. Etant entendu que ce cocktail est absolument compatible avec l'écriture zornienne, l'essentiel reposait donc sur la qualité des compositions et des arrangements. Le fait est qu'il n'y a pas ici de thème aussi immédiatement porteur (quoique Vual et Tandal n'en soient vraiment pas loin) que sur, par exemple, le Lucifer de Bar Kokhba, un Himalaya de la série du Livre des Anges. Ceci dit, il faut entendre Krakauer souffler furieusement dans sa clarinette, la guitariste Sheryl Baile descendre expertement son manche, quel trip ! Et comme les musiciens excellent également, on ne peut dignement pas bouder son plaisir face à cette bacchanale judéo-jazzante. Côté arrangements, Krakauer a plutôt joué la sécurité et l'efficacité, à l'écoute de l'album, on se dit que c'était sans doute la bonne solution.
Particulièrement addictif et révélant à chaque écoute de nouvelles nuances (c'est toujours bon signe), Pruflas est indéniablement une réussite, donc, et un retour en fanfare d'une série des Book of Angels déjà riche de nombreux trésors dont celui-ci n'est pas le moindre.
Chaudement recommandé !

1. Ebuhuel 3:52
2. Kasbeel 4:18
3. Vual 4:59
4. Parzial-Oranir 11:11
5. Egion 5:44
6. Neriah-Mahariel 7:03
7. Tandal 3:36
8. Monadel 5:52

David Krakauer: clarinette, clarinette basse
Michael Sarin: batterie
Sheryl Baile: guitare
Jerome Harris: basse, voix
Keepalive: Laptop

DAVID KRAKAUER

SCReeNaRT
David Arnold and Michael Price "Sherlock Original TV Soundtrack - Music From Series 3" (2014)
ou "Sherlocked!"

Vous ne connaissez pas encore la série ? Vous vivez dans une grotte, peut-être... Parce que Sherlock, relecture moderne mais fidèle du mythe Sherlock Holmes par la BBC, sous la bienveillante et maniaque supervision de Steven Moffatt et Mark Gatiss (qui y joue également Mycroft Holmes, le frère du fameux détective), est ce qu'il est convenu d'appeler un énorme succès, et un succès énormément mérité qui plus est, parce que la série est intelligente, nerveuse, magnifiquement filmée, montée, et jouée (Benedict Cumberbatch, dans le rôle titre, y est parfait, Martin Freeman, en Docteur Watson, encore un peu plus que ça !), merveilleusement scénarisée. Même que la concurrence (les films avec Robert Downey Jr., Elementary qui s'essaye au même sport sans y réussir) fait grise mine, jalouse cette maestria de tous les instants.
Et donc la musique, de la toute nouvelle saison diffusée en début d'année par la BBC, la troisième, composée par David Arnold, Michael Price et Rael Jones (ce dernier crédité des musiques additionnelles mais également instrumentiste) ? La musique est à la hauteur de l'image et arrive même, ce n'est pas si courant, à se suffire à elle-même.
Comme la série, elle est fermement ancrée dans le présent sans pourtant cracher sur la tradition. Orchestrale, oui, mais avec des élans de modernité, des ajouts bienvenus, une vraie dynamique aussi, elle colle à l'image, (à la vision de la série) sait se faire discrète mais, donc, ne perd pas toute substance privée de son support visuel.
Pour la situer stylistiquement, on citera volontiers Hans Zimmer dont les climats de héroïques sont souvent évoqués ici, John Barry pour les mélodies accrocheuses de thèmes (et en filiation logique, David Arnold s'étant souvent adonné à composer pour 007John s'était déjà aventuré avec succès) et Trent Reznor (de Nine Inch Nails pour ceux qui devraient vraiment sortir de leur grotte !) pour des penchants techno-rockants bienvenus qui s'imbriquent excellemment à l'ensemble. Evidemment, série oblige, le thème principal y reparait de temps en temps, décliné à l'envie et à l'illustration audiovisuelle voulue, vu la qualité d'icelui, on ne s'en plaindra pas et accueillera comme il se doit ces savoureuses virgules mélodiques.
On savait la série du calibre de celle dont on fait les légendes. Trop pris par les effets d'une réalisation virtuose, les scenarii diaboliques et les performances d'acteurs au diapason, on se doutait seulement de la qualité de sa bande-son. A l'écoute isolée de l'image, on est épaté par un score tout à fait de son temps tout en restant traditionnel, une update aussi réussie musicalement que Sherlock-la série l'est filmiquement, ce n'est pas peu dire ! Que les amateurs de BO de qualité n'hésitent pas, ceci en est une.

The Empty Hearse (23:55)
1. How It Was Done 2:44
2. God Rest His Soul 1:43
3. Floating Dust 3:28
4. #SherlockLives 2:49
5. Back to Work 2:57
6. Vanishing Underground 2:28
7. John is Quite a Guy 4:06
8. Lazarus 3:36
The Sign of Three (17:49)
9. Lestrade - The Movie 3:07
10. To Battle 4:02
11. Stag Night 2:15
12. Mayfly Man 4:17
13. Major Sholto 2:58
14. Waltz for John and Mary 1:07
His Last Vow (31:34)
15. Magnussen 3:33
16. Forwards or Backwards 4:42
17. Redbeard 2:11
18. The Lie in Leinster Gardens 3:14
19. Addicted to a Certain Lifestyle 3:50
20. The Problems of Your Future 5:32
21. Appledore 3:38
22. The East Wind 4:00
23. End Titles 0:50

David Arnold, Michael Price - composition, production
Rael Jones - additional music, guitars, mandolins, percussion
Anthony Weeden - orchestration
The London Session Orchestra, direction Michael Price
Thomas Bowes - orchestra leader
Caroline Tate, Tim Gill - solo cello
Peter Gregson - electric cello
Janet Mooney - vocals

DAVID ARNOLD

iN SPaCe
David Chaim Smith, Bill Laswell, John Zorn "The Dream Membrane" (2014)
ou "Supertrip"
 
Que se passe-t'il quand un auteur kabbaliste, un bassiste amoureux de dub, d'ambient et d'industriel, et un avant-gardiste curieux de tout et de judéité en particulier, présentement au sax alto et au shofar (une corne utilisée pour les cérémonies de Rosh Hashanah et Yom Kippur) se rencontrent ? Et que, en plus les trois, le premier lisant sa prose mystique, les deux autres l'illustrant musicalement sur le fait, s'accaparent respectivement ? C'est ce qu'on entend sur The Dream Membrane, suite des aventures de Zorn instrumentiste dans la nouvelle série du label Tzadik (Spectrum, comme Sonic Rivers) où se produisent les recontres, et plus c'est improbable, mieux c'est !
D'ailleurs, dans le genre improbable, The Dream Membrane se pose un peu là ! Un album ambient, un album qui passe comme un rêve éveillé, un rêve peuplé d'étranges apparitions, de peu communes visions, d'hallucinations auditives, croirait-on. Evidemment, on est parfois témoin des résurgences ouatées d'un certain Painkiller, d'un "pin-pon saxophonien" digne d'un Classic Guide to Strategy, mais, bon, comme dirait Lavoisier...
Mais c'est bien là autre chose que la somme de ses parts, d'autant qu'il ne faut pas ignorer l'élément, non des moindres puisque central, que constitue la performance de David Chaim Smith, rabbi posé, présence apaisante poussant la performance vers l'éther. Faut-il pour autant s'intéresser au contenu textuel ? Elles ne sont pas reproduites dans le livret, après tout, ces paroles ! Alors peut-être, surtout si on n'est pas plus intéressé que ça par la Kabbale, ne faut-il prendre la voix comme le troisième instrument, comme un verbiage rythmique, en courant alternatif, complétant la performance.
Une belle performance parce que Laswell y installe un climat ambient/dub new-ageux qui sied, que Zorn y produit de beaux sons, et d'autres moins mais contribuant au trip, et que ces deux là, vieux partenaires qu'ils sont, savent s'imbriquer sans frottements inutiles.
Enfin, il faut aussi savoir, vouloir se laisser porter, s'installer confortablement, voiler l'éclairage et accepter de donner 47 minutes et 50 secondes de son temps, de son attention, de son capital imaginatif... Et alors ça fonctionne, parce que The Dream Membrane n'est pas un album exactement difficile, juste une œuvre qui demande votre temps. Comme quoi l'ambient, peut-être parce qu'elle est aussi jazz, avant-gardiste et "spoken-wordisée", n'est pas forcément que de la musique "papier-peint".
Œuvre exigeante, beauté évidente qui ne se révèle vraiment qu'à la contemplation, The Dream Membrane est une belle offrande dans une série qui en promet bien d'autres. Excellente nouvelle.

1. The Dream Membrane 47:50

David Chaim Smith - voice, texts
Bill Laswell - bass, drones
John Zorn - shofar, alto saxophone

DAVID CHAIM SMITH

DAVIDs (2/2)

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10 nouveaux David(s) et un retour sur le plus essentiel de tous, 11 albums pour le plaisir de tous d'autant que ça va quasiment tous azimuts... Enjoie !

BeL aLaNGui
David Bowie "The Man Who Sold the World" (1970)
ou "Enfin !"

Ce n'est plus le dandy, ce n'est plus le hippie c'est, enfin !, le Bowie, le vrai !, qui nous arrive en 1970 avec The Man Who Sold the World.
A vrai dire, le premier abord, la pochette, est trompeur, ce Bowie alangui sur sa liseuse, vêtu d'une robe à fleur, plus qu'androgyne, transformiste, a un côté Joan Baez ou Bobbie Gentry qui, visuellement, ne laisse pas augurer le festin musical. Parce que sous le patronage sonore du reconduit Tony Visconti, il était déjà de Space Oddity une petite année plus tôt, avec l'adjonction d'un vrai sidekick de la mort, le guitariste Mick Ronsonévidemment, David Bowie entre dans les septantes avec un appétit d'ogre et une nouvelle formule qui fera florès.
S'il n'y a pas de hit sur l'album, quoique The Man Who Sold the World, surtout depuis son sauvetage populaire par les petits gars de Nirvana lors d'un Unplugged resté dans les annales n'en est désormais pas loin, il qu'on ne connaissait pas dans le répertoire précédent du futur Ziggy Stardust. Sur The Man Who Sold the World, il y a la naissance d'une approche frontalement électrique où Bowie, pas encore la glam star qu'il ne tardera plus à devenir mais plus très loin, auteur de toutes les pistes de l'album, se repose beaucoup sur la puissance de feu et l'inventivité d'un Ronson, trouvaille décisive pour un David jusqu'alors en quête d'identité. Dans les faits, ça donne 7 titres qui rockent sans manquer de finesse et desquels l'énorme The Width of a Circle d'ouverture, tout en basse fuzz et guitare échevelée, le plus mesuré mais non moins réussi et fondamentalement encore plus fou (vu son thème) All the Madmen, ou l'épique et habité Saviour Machine, un machin qui louche furieusement vers le rock progressif sans jamais tout à fait en être, sont les plus beaux représentants. A côté de ça, il n'y a que deux opportunités pour l'auditeur de mettre un peu ses tympans au repos, et quelles opportunités !, After All qui semble convoquer les fantômes du Bowie débutant, la maîtrise en plus, et la chanson titre où c'est simplement le meilleur de la pop anglaise qui est convoqué dans un morceau qui s'il ne sera pas un tube mérite grandement aujourd'hui son statut d'intouchable classique.
Bref, étape essentielle d'un artiste qui va vite devenir un incontournable, un essentiel et, évidemment, une énorme perte depuis le 10 janvier dernier, The Man Who Sold the World n'est peut-être pas aussi décisif que ses trois successeurs directs (Hunky Dory, Ziggy Stardust et Aladdin Sane, excusez du peu !), ça n'en demeure pas moins une étape essentielle à qui veut comprendre et apprécier la carrière de David Jones, et une excellente galette de hard rock psyché inventif et prospectif, aussi.

1. The Width of a Circle 8:05
2. All the Madmen 5:38
3. Black Country Rock 3:32
4. After All 3:52
5. Running Gun Blues 3:11
6. Saviour Machine 4:25
7. She Shook Me Cold 4:13
8. The Man Who Sold the World 3:55
9. The Supermen 3:38

David Bowie– vocals, guitars, Stylophone, organ, saxophone
Mick Ronson– guitars, backing vocals
Tony Visconti– bass guitar, piano, guitar, recorder, producer, backing vocals
Mick Woodmansey– drums, percussion
Ralph Mace– Moog modular synthesizer

DAVID BOWIE

MuSiC BooK
David Bedford "Rime of the Ancient Mariner" (1975)
ou "Raconte-moi une histoire"

Vous n'avez jamais entendu parler de ce machin là, on ne vous en voudra pas !
Déjà, David Bedford, hein, c'est pas franchement le plus coté des compositeurs, arrangeurs, claviéristes de la musique progressive des années 70, voyez du côté de Rick Wakeman, Klaus Schulze, Vangelis ou, chez nous, Jean-Michel Jarre. Pas qu'il n'ait pas cotoyé du beau monde, notez, parce que de Kevin Ayersà Mike Oldfield (présent ici) en passant par Lol Coxhill, Steve Hillage ou Roy Harper, le carnet de bal de l'homme n'est pas dénué de pointures. Mais la carrière de Bedford, ce qu'il décida d'en faire surtout, entre jazz, prog, classique, musiques de films et sessions, fut plus un jeu d'opportunités qu'un missile à tête chercheuse.
De fait, dans le domaine qui nous intéresse, sa discographie est plutôt courte, 7 albums entre 1972 et 1985 avant de passer à autre chose. De cette collection de long-jeux, The Odyssey (1976) et ce The Rime of the Ancient Mariner, de 75, sont les plus fréquemment célébrés (quoique par un très petit nombre d'afficionados maniaque dont l'ultime mission semble être d'exhumer tous les disques oubliés ou presque). Si Odyssey est une œuvre de facture plutôt classique et accessible, du prog mélodieux avec chorale et modérés mais remarquées interventions virtuoses (dont un Andy Summers tout jeune et déjà très vaillant), Rime of the Ancient Mariner est ambitieux quitte à en être, au premier abord, hermétique. Parce qu'il faut pouvoir plonger dans ces deux longues plages toutes en ambiances de pianos, d'orgues, de synthétiseurs, où un chœur soutient un récitatif discret, où les guitares de Mike Oldfield sont trop souvent noyées dans la masse n'attirant que de trop rares rayons solaires. Pas facile. Mais il s'apprivoise le bestiau et, doucement, tranquillement, dévoile les trésors mélodiques d'un Bedford inspiré, nous embarque en un rêve éveillé dans cette évocation finalement réussie du poème épique de Samuel Taylor Coleridge.
Tout ça ne fait pas du Rime of the Ancient Mariner de David Bedford un classique, pas même une petite pépite sauvée des eaux, juste une belle galette absolument typique de son époque mais suffisamment bien conservée pour que, 40 ans plus tard, on puisse la déguster avec le recul critique de l'auditeur éclairé de 2016.

1. The Rime of the Ancient Mariner Part I 20:32
2. The Rime of the Ancient Mariner Part II 20:38
un extrait ICI

David Bedford - Grand Piano, Lowrie Organ, Challenger Gem Organ, Chur Organ, Piano Strings, Recorders, Chime Bars, Winebottlephone, Glorfindel Sound Machine, Flute, Violin, Cymbals, Gong
Mike Oldfield - Guitar
Diana Coulson - Vocals
Lucy Blackburn - Vocals
Classes 2 and 3 from Queen's College - choir
Robert Powell - Narrator

DAVID BEDFORD

NeaRSNaKe
David Coverdale "Northwinds" (1978)
ou "On y est presque"

Northwinds est le second album de David Coverdale depuis la fin d'activité de Deep Purple. Son prédécesseur, White Snake avait proposé un rock gorgé de soul et de blues, cette fois, le vocaliste opte pour une approche plus directement rock sans toute fois totalement dévier de sa ligne.
Produit par Roger Glover et accessoirement dernière sortie, en mars 1978, d'un Purple Records en voie de cessation d'activité, Northwinds est, grosso modo, l'embryon de ce qui va devenir un vrai groupe seulement quelques mois plus tard, dès septembre 78 et l'EP Snakebite d'ailleurs supplémenté, gonflé, de 4 titres du présent opus, dont les trois co-créées avec Micky Moody, pour le grossir en album. En attendant, toujours sous le nom de son mâle leader, avec déjà Moody, donc, distillant quelques licks six-cordés juteusement bluesy, on n'y est pas tout à fait, mais presque. Il manque encore de la niaque développée par le Serpent Blanc avant qu'il ne glisse irrémédiablement vers des sonorités plus FM et américanisées. Parce qu'il reste quelques fantaisies, un petit violon par-ci, un harmonica par-là, des invités, M. et Mme Dio venus pousser la chansonnette sur Give Me Kindness, Lee Brilleaux de chez le Docteur Feelgood (duquel on retrouve aussi le claviériste Tim Hinkley) soufflant furieusement dans son harmo sur le très réussi Keep On Giving Me Love, et même un Coverdale tâtant du piano sur trois titres (Northwinds, Time and Again, Give Me Kindness), autant d'éléments atypiques qui contribuent à la relative légèreté d'un David hésitant encore à se relancer dans le hard rock qui a fait de lui ce qu'il est.
Tout ça nous donne un album sympathique et distrayant, un peu le séant entre deux chaises, entre le soul blues rock de White Snake, première offrande solo de l'ex-vocaliste de Deep Purple, et le hard bluesy d'un Whitesnake (le groupe cette fois) qui fera sa seconde gloire. Un bon album bourré de relents 70s, chaud comme la saucisse qu'on glisse dans le petit pain (ha ha ha !), et recommandé, bien sûr parce qu'encore frais de l'innocence d'un futur en devenir.

1. Keep On Giving Me Love 5:16
2. Northwinds 6:13
3. Give Me Kindness 4:34
4. Time & Again 4:02
5. Queen of Hearts 5:16
6. Only My Soul 4:36
7. Say You Love Me 4:21
8. Breakdown 5:15
Bonus
9. Shame the Devil 3:35
10. Sweet Mistreater 3:45

David Coverdale - lead vocals, piano ("Northwinds"), electric piano ("Give Me Kindness" and "Time and Again")
Micky Moody - guitars, backing vocals
Tim Hinkley - keyboards, backing vocals
Alan Spenner - bass
Tony Newman - drums, percussion
Roger Glover - synthesizer, clavinet, cowbell, production
Graham Preskett - violin
Lee Brilleaux - harmonica on "Keep On Giving Me Love"
Ronnie James Dio, Wendy Dio - backing vocals on "Give Me Kindness"

DAVID COVERDALE

LaTiNeRie
David Byrne "Rei Momo" (1989)
ou "David change d'hémisphère"

David Byrne a coupé le cordon avec ses Têtes Parlantes, présentement, il coupe aussi le cordon avec l'occident et se dirige loin au sud de son point d'origine, en Amérique du Sud. Le résultat ? Bluffant !
Et encore plus quand on considère que c'est le premier vrai album solo de David après une belle carrière dans le cocon d'un groupe et une collaboration avec l'alors producteur régulier des Talking Heads, Brian Eno, 8 ans plus tôt. Un saut dans l'inconnu, juste après la séparation de son groupe d'autant plus ardu que, rien qu'à zyeuter l'impressionnante liste des participants (ça n'en finit pas !) il a fallu gérer. Mais David a l'estomac pour assumer l'appétit de son ambition comme le prouve la belle cohérence et les magnifiques arrangement donnant corps à ce Rei Momo d'exception.
Musicalement, David y retrouve les aspirations voyageuses d'une partie conséquente de Remain In Light sauf qu'à l'Afrique de Fela, il y préfère les douceurs chaloupées sud-américaines. Et c'est un festival qui nous fait voyager de la Havane à Rio de Janeiro en passant par Mexico City ou même Bogota. Et le truc incroyable c'est qu'au milieu de tout ça, alors que beaucoup seraient irrémédiablement perdus, Byrne y est mélodiquement tout à fait reconnaissable prouvant, l'air de rien, que son écriture, sa voix, si elles peuvent se transposer dans bien des univers, gardent leur authentique personnalité, la marque des grands.
Le détail des chansons ? Ce serait gâcher la surprise, voyons ! Il n'y a, en vérité qu'une chose à dire : Rei Momo ? courez-y vous ne serez pas déçus !

1. Independence Day 5:45
2. Make Believe Mambo 5:23
3. The Call of the Wild 4:55
4. Dirty Old Town 4:12
5. The Rose Tattoo 3:50
6. Loco de Amor 3:51
7. The Dream Police 3:00
8. Don't Want to Be Part of Your World 4:55
9. Marching Through the Wilderness 4:30
10. Good and Evil 4:35
11. Lie to Me 3:40
12. Office Cowboy 3:40
13. Women vs Men 4:06
14. Carnival Eyes 4:04
15. I Know Sometimes a Man Is Wrong 3:11

David Byrne - Guitar, String Arrangements, Vocals
Milton Cardona Bata - Choir/Chorus, Claves, Congas, Iya, Quinto, Shekere, Tambor, vocals (Background)
Acua Turree Ensemble - Strings
Robby Ameen - Drums
Luis Arias - Congas
Cyro Baptista - Agogo, Caxixi, Tambourine
Lucinho Bizadao - Cavaquinho
Sergio Brandão - Bass
Sam Burtis - Trombone
Floyd Carter - Violin
Willie Colón - Choir/Chorus
Celia Cruz - Vocals
Jorge Jose Da Silva - Repique, Tambourine
Joe de Jesus - Trombone
Felix Farrar - Violin
James Fearnley - Accordion
Lawrence Feldman - Sax
Reinaldo Fernandes - Repique, Tamborim
Angel Fernandez - Trumpet, Woodwind
Mitch Frohman - Sax
Jose Gallegos - Keyboards
Elvis Garcia - Bass
Andy González - Bass, Contrabass
Leini Guerrero - Piano
Steve Guttman - Trumpet
Kenneth Hitchcock - Sax
Ite Jerez - Trumpet
Lewis Kahn - Trombone, Violin
Arto Lindsay - Vocals
Romero Lubambo - Guitar
Kirsty MacColl - Vocals (Background)
Tom "Bones" Malone - Trombone
Jose Mangual Jr. - Bata, Bells, Bongos, Choir/Chorus, Congas, Guichero, Guira, guiro
Luis Manuel - Guira
Juan Martinez - Drums
Shunzo Ohno - Trumpet
Barry Olsen - Trombone
Agusto Onna, Jr. - Choir/Chorus, Trumpet
Keith O'Quinn - Trombone
Enrique Orengo - Cello
Johnny Pacheco - Choir/Chorus, Composer, Congas
Agapito Pasqual - Accordion
Santiago Pasqual - Guira, Unknown Contributor Role
Paquito Pastor - Fender Rhodes, Piano
Oscar Peña - Sax
Lucy Penabaz - Vocals (Background)
Bobby Porcelli - Sax
Marc Quifiones - Bata, Timbales
Rubén Rodríguez - Bass
Huti Rodriquez - Tamboura
Barry Rogers - Trombone
David Sacks - Trombone
Steve Sacks - Sax
Charlie Santiago - Timbales
Charlie Sepulveda - Trumpet
Joe Shepley - Trumpet
Mauricio Smith - Flute
Cuto Soto - Choir/Chorus
David Taylor - Trombone
Yomo Toro - Cuatro
Dale Turk - Trombone
Herbert Vianna - Vocals
Eric Weissberg - Mandolin, Pedal Steel

DAVID BYRNE

ReaL aMeRiCa
David Baerwald "Triage" (1992)
ou "Fine plume"

Dans la série : "Je vous parie que vous n'avez jamais entendu parler de cet oiseau-là", je vous présente David Baerwald, auteur/compositeur/interprète ayant connu quelques succès au sein de David & David dans la seconde moitié des années 80 ou pour sa participation à la bande-originale du Moulin Rouge de Baz Luhrman. David Baerwald a souvent aeuvré loin des préoccupations du grand public qui ne sait pas ce qu'il perd.
Triage est le second album solo de Baerwald après l'aimable mais pas transcendant Bedtime Stories, un album trop poli pour que les chansons qu'on y trouve accomplissent leur plein potentiel. C'est, évidemment, une tout autre histoire avec ce Triage ou Baerwald"explose" son adult-folk-rock pour lui faire rejoindre des sommets rarement atteints.
Dès la première composition, "A Secret Silken World", il est évident qu'une énorme somme de travail a été engagée pour obtenir un tel résultat. Pourtant le morceau est fluide mais regorge, ce que démontre une "inspection" détaillée, de moult détails enrichissant subtilement une composition déjà d'une grande force où les esprits des Beach Boys et de Miles Davis sont discrètement convoqués pour un résultat du plus bel effet.
Tout l'album est à l'avenant, avec son lot de guitares tranchantes (juste ce qu'il faut), d'influences folk ou jazz, de textures sonores visiblement très pensées et de textes finement politisés. Autant de preuves de l'excellence de Baerwald en tant que songwriter (pas surprenant quand on voit la longue liste d'artistes avec lesquels il a collaboré sous son nom ou un pseudonyme de l'iconique Pavarotti, à la chanteuse country LeAnn Rimes, l'ex Bangles Susana Hoffs ou encore l'outlaw ultime de la country, Waylon Jennings).
A vrai dire, on a beau chercher, il n'est pas simple de trouver quelque faille que ce soit en ce Triage. Eventuellement, ceux qui sont particulièrement allergique à toute musique (dans l'ensemble) adulte ne trouveront pas ici leur bonheur. Il est vrai qu'à chercher à comparer cet album à ceux d'autres artistes contemporains, on évoquera volontiers Sting et Peter Gabriel - bien qu'une évidente américanité démarque Triage des aeuvres de ces deux icones britanniques- ou encore de Paul Simon ou Randy Newman pour ses compatriotes. Aucune de ces comparaisons ne rendant tout à fait justice à la large palette de Baerwald, une écoute attentive sera la meilleure façon de juger de la qualité de l'ensemble.
Personnellement, ayant découvert cet album dès sa sortie, je suis surpris de la relative absence d'usure que de nombreuses écoutes auraient, en toute logique, dû entraîner. Il n'en est rien ici et si Triage demeure une aeuvre d'une telle force quasiment vingt ans après sa sortie c'est tout simplement à la force des ses compositions et à la relative intemporalité de son écriture qu'il le doit.

1. A Secret Silken World 7:41
2. The Got No Shotgun Hydra Head Octopus Blues 4:26
3. Nobody 4:33
4. The Waiter 5:03
5. AIDS and Armageddon 5:32
6. The Postman 5:35
7. A Bitter Tree 3:32
8. China Lake 4:37
9. A Brand New Morning 4:38
10. Born for Love 6:22

David Baerwald: Bass, Guitar, Keyboards, Organ, Vocals
Bill Bottrell: Guitar, Keyboards, Loops, Vocals
Dan Schwartz: Bass, Guitar
Kevin Gilbert: Drums, Piano
Herb Alpert: Trumpet
Gregg Arreguin: Guitar
David Kemper: Drums
Brian Macleod: Drums

DAVID BAERWALD

TeCHNiMaGe
David Holmes "Bow Down to the Exit Sign" (2000)
ou "Electrocœur"

Pour le coup, je vous livre la chronique qui m'a donné envie de me procurer l'album, c'était dans l'excellent Magic RPM et c'était signé de Sylvain Colin :
"Jusqu’ici, David Holmes n’était qu’un producteur. Avec tout ce que le terme peut cacher de très bon et d’un peu moins. Aussi délicieux que pouvait sembler Let’s Get Killed, son deuxième album, on se prenait souvent à penser que l’homme n’est jamais meilleur que lorsqu’il travaille pour ou avec d’autres, que ce soit Ashley Beedle (avec leur éphémère projet commun Disco Evangelists en 1993), Sabres Of Paradise, Saint Etienne, U2, The Aloof ou plus récemment Primal Scream. La musique qu’il composa, il y a deux ans, pour Resurrection Man de Marc Evans et, surtout, pour Out Of Sight de Steven Soderbergh (le réalisateur de Sexe, Mensonges Et Vidéo devrait s’adresser à lui une nouvelle fois pour la musique d’un film sur le Rat Pack, l’équipe formée par Dean Martin, Sammy Davis Jr et Franck Sinatra) ne faisaient que confirmer ce postulat. Mais Bow Down To The Exit Sign va à l’exact opposé de ses travaux précédents.
Pour l’anecdote, il s’agit aussi de la musique d’un film, encore au stade embryonnaire de scénario, écrit par une amie à lui et où chacun des chanteurs endosse, sur le disque, le rôle d’un personnage.
Le héros est donc ici Bobby Gillespie, qui a ramené une partie de sa bande avec lui : Andrew Innes, Duncan McKay et Jim Hunt mais aussi quelques-uns des architectes sonores de XTRMNTR, tels que Phil Mossman ou les fidèles à Holmes que sont Tim Goldsworthy et Keith Tenniswood. Pas étonnant, donc, si les ambiances et le son (une basse diabolique, en véritable épine dorsale de cette « groove machine », est omniprésente de bout en bout de l’album) semblent avoir été empruntés à Primal Scream.
Mais qu’on ne s’y trompe pas. S’il partage l’affiche avec une pléthore d’artistes, c’est bien David Holmes qui tient fermement la barre de ce disque et chacun des invités est entièrement dévoué à la cause de Bow Down To The Exit Sign, sans pour autant s’effacer et se contenter de jouer les figurants.
Le décollage s’effectue tout en douceur sur Compared To What, une chanson jazz des 60’s de Gene McDaniels colorée de la voix chaleureuse de Carl Hancock-Rux, poète et écrivain noir de Brooklyn, auteur de deux recueils de poésies et d’un album produit, entre autres, par John King des Dust Brothers. Mais le ton monte très vite avec l’hommage de Gillespie aux Stooges et à The Fall sur le détonnant Sick City, exact contrepoint de Slip Your Skin, où le leader de Primal Scream calme le jeu et qui ne dépareillerait pas trop sur Vanishing Point (en moins pataud évidemment). Jon Spencer, quant à lui, conduit un blues psychédélique et… explosif sur les ambiances éthérées et oppressantes de Bad Thing, un peu comme si Dr John réécrivait la BO d’Angel Heart.
Tout le savoir-faire d’Holmes s’exprime ici, au cours de ces savants mélanges entre son art et celui de ses invités. Outrun en est la parfaite illustration. Le morceau replonge l’ex-compagne et chanteuse de Tricky, Martina Toppley-Bird, dans ces ambiances suffocantes qu’elle connaît par cœur
, comme pour la mettre en confiance et la métamorphoser complètement par la suite. L’association se poursuit autrement sur Zero Tolerance, qui conjugue alors les guitares salement plombées d’un Sonic Youth avec une mélodie à la sensualité retenue d’une Suzanne Vega ou une PJ Harvey. Après un tel vol, l’atterrissage se fait lui aussi tout en douceur. À l’aide de David Arnold, qui n’a pas son pareil pour singer à merveille les arrangements de cordes de John Barry, Holmes nous a concocté un thème final de facture plus ordinaire mais aux consonances jazz lounge non moins délicieuses.
À l’instar de Primal Scream ou d’UNKLE, et avec une ligne directrice diamétralement opposée mais cohérente, David Holmes arrive à réunir quelques fortes têtes de la pop et à associer ses talents de producteurs et de compositeurs avec ceux de ses invités. Le mélange de rock psychédélique, funk, blues, gospel, jazz et musique de film qui constitue la matière première de Bow Down To The Exit Sign s’entrelace souvent et s’entrechoque parfois, sans pour autant donner naissance à un monstre à plusieurs têtes. David Holmes est désormais bien plus qu’un producteur… Il est devenu un alchimiste génial.
"
Et, vous voulez que je vous dise ? C'est exactement ça !

1. Live From The Peppermint Store 0:44
2. Compared To What (featuring Carl Hancock Rux) 6:15
3. Sick City (featuring Bobby Gillespie) 4:20
4. Drexler's Apt - Aftermath, Afternoon 0:52
5. Bad Thing (featuring Jon Spencer, Martina Topley-Bird) 5:42
6. Voices, Siren, Rain 0:22
7. Incite A Riot 4:57
8. 69 Police 4:31
9. Outrun (featuring Martina Topley-Bird) 4:46
10. Living Room (featuring Carl Hancock Rux) 6:43
11. Happiness 1:10
12. Slip Your Skin (featuring Bobby Gillespie)  4:20
13. Zero Tolerance (featuring Martina Topley-Bird) 4:00
14. Commercial Break 0:32
15. Hey Lisa 4:38

DAVID HOLMES

JaZZFaN
David El-Malek "Organza" (2001)
ou "Tonitruants débuts"

Comment ça vous ne connaissez pas David El-Malek ? Pourtant, en quelques albums, en tant que leader ou en sideman de Baptiste Trottignon ou Pierre de Bethmann (qui est d'ailleurs d'Organza), le saxophoniste francilien a fait sa petite impression sur une scène jazz française sans cesse en éruption de nouveaux talents.
Or donc, en 2001, 15 ans déjà, comme le temps passe, David El-Malek propose un premier album entre modernisme et tradition, entre judaïté assumée et références étatsuniennes, aussi. Ici, en 9 titres (et un planqué en ghost track à la fin, qu'on se demande bien pourquoi tant il est bon), démontrant une technique sans faille où l'influence de Coltrane est souvent évidente (Pression, petit cousin de Countdown, et son furieux galop saxophonique), mais aussi celle de Wayne Shorter dont il reprend d'ailleurs le Children of the Night, et de racines juives exprimées via une refonte jazz classieuse de thèmes traditionnels (trois en tout, Tora Tsiva le plus réussi d'iceux). Bien entouré de sidemen compétents, il n'y a qu'à écouter la performance d'équipe sur le crépitant Fast for Booker pour s'en convaincre, David se permet même la fantaisie de glisser vers un acid jazz de bon ton  (Gentleman) invitant pour la circonstance la délicieuse Laika Fatien, bonne pioche !
Globalement un jazz classique mais tellement rondement mené qu'on ne trouve pas à y redire, Organzaétait l'excellente introduction d'un instrumentiste et compositeur qui a depuis fait son trou, avec un pareil début, il n'y a rien de surprenant !

1. Tora Tsiva 8:40
2. Impulsion 8:36
3. Pression 1:48
4. Fast for Booker 5:34
5. Organza 7:54
6. Hatikva 5:17
7. Children of the night 6:26
8. Bashana 5:02
9. Gentleman 5:18
10. Untitled 8:25

David El Malek - tenor saxophone, programmation (9)
Daniel Bruno Garcia - drums (sauf  9), congas (8)
Pierre de Bethmann - piano, Fender Rhodes
Laika Fatien - vocals (9)
Alban Sautour - guitar (9)


DAVID EL-MALEK

oLD & WiSe
Dave Brubeck "The Gates of Justice" (2004)
ou "Décalé mystique"

Du jazz au classique, du séculaire au sacré, on peut dire que les talents de Dave Brubeck n'étaient limités qu'à ses envies musicales.
Prenez Gates of Justice, créé en 1969, présentement proposé dans la version Naxos captée en 2004, ont y est à cent-mille lieues d'un Take Five ou d'un Rondo jazzifié, et pourtant on n'est pas exactement surpris de ce qu'on y entend, ayant toujours pressenti les accointances du sieur Brubeck pour la chose liturgique et classique. Mais Gates of Justice va plus loin étant, dixit son auteur, une œuvre appelant à l'amitié et la fraternité entre les communautés noires et juives étatsuniennes, un programme ambitieux et humaniste, d'autant qu'on peut le généraliser à la condition humaine tout court comme le précisa Brubeck, auquel on ne peut que souscrire.
Musicalement, avec un son trio, et chœur et deux voix, ont est évidemment très loin des ébats swinguants du répertoire habituel du vénérable Brubeck (84 ans au moment de l'enregistrement, tout de même !), pas besoin cependant d'être un afficionado de chorale ou quelqu'un de particulièrement religieux (on peut même ne pas l'être du tout) pour apprécier la puissance émotionnelle et harmonique d'une collection de musiques mêlant tradition hébraïques et spirituals. De la première note de Lord, the Heavens Cannot Contain Thee à l'ultime de Oh, Come Let Us Sing a New Song, on est conquis par cette musique qui a autant de cœur que d'âme, qui sait profiter d'un trio d'exception pour s'élever encore un peu plus haut, une musique sacrée, oui, sacrément belle surtout !
David Warren Brubeck nous a quitté en décembre 2012 au grand âge de 91 ans, on célèbre encore et toujours, et on a bien raison d'ailleurs, ses accomplissements dans le domaine du jazz, The Gates of Justice est là pour rappeler que son œuvre est encore plus impressionnante et variée que ça. Recommandé.

1. I. Lord, the Heavens Cannot Contain Thee 3:08 
2. II. Oh, Come Let Us Sing 3:45 
3. IIIa. Open the Gates 4:34 
4. IIIb. Chorale 5:04  
5. IVa. Except the Lord Build the House 2:05 
6. IVb. Except the Lord Build the House (improvisation) 2:17 
7. V. Lord, Lord 5:59  
8. VI. Ye Shall Be Holy 1:05 
9. VII. Shout unto the Lord 8:24 
10. VIII. When I Behold Thy Heavens 3:02 
11. IX. How Glorious Is Thy Name 1:49  
12. X. The Lord Is Good 3:45 
13. XI. His Truth Is a Shield 4:14 
14. XII. Oh, Come Let Us Sing a New Song 0:58 

Conductor: Russell Gloyd
Ensemble: Dave Brubeck Trio
(Dave Brubeck– piano, Randy Jones– drums, Michael Moore– double bass)
Choir: Baltimore Choral Arts Society
Vocals: Kevin Deas, Alberto Mizrahi

DAVE BRUBECK

iRoN DiVa
David Readman "David Readman" (2007)
ou "Une voix qui compte"

Un chanteur de metal qui a joué avec beaucoup de monde mais commis qu'un unique album solo au jour d'aujourd'hui ? C'est l'anglais David Readman et son éponyme, album absolument typique d'un metal mélodique lorgnant parfois sur le rock FM. Bref, c'est Souf (Aux Portes du Metal) qui nous l'évoque plus en détail :
"Si le nom de David Readman ne vous interpelle pas, sachez qu'il occupe depuis 1994 le poste de chanteur du groupe Pink Cream 69, groupe de Glam Metal allemand, en remplacement d'Andi Deris parti pour rejoindre Helloween. Cet album éponyme démarre la carrière solo du talentueux vocaliste britannique et, si l'originalité des compositions n'est pas toujours au rendez-vous, leur qualité musicale supplée grandement. Sceptiques ? prenez donc la peine de lire les quelques arguments suivants.
Tout d'abord, les refrains accrocheurs et puissants sont autant d'invitations à faire vibrer vos cordes vocales. Sans conteste des modèles du genre. En outre, les soli de guitare, tantôt véloces, tantôt posés, sauront gagner l'estime des férus de six-cordes. Mais avant toute chose, la voix de David Readman, authentique don, se détache : chaude, mélodieuse, mimétique, épousant à merveille les inflexions rythmiques, elle constitue un instrument à part entière, à la manière de David Coverdale, Jorn Lande ou encore Geoff Tate de Queensrÿche.
Bref, si vous appréciez Pretty Maids, Europe ou Poison, nul doute que cet album sera votre prochaine acquisition. Les paroles, bien que grand public, conservent un certain charme; pour preuve le refrain de "Long Way to Heaven" : "I've lost my emotion, there's no more devotion, it's true, such a long way to heaven". A noter qu'un hommage splendide est rendu au Black Man Hippy Jimmy Hendrix dans "New Messiah" (avec pour clin d'oeil l'insertion réussie dans le solo du riff cultissime de Purple Haze).
Chaque morceau a son tempérament propre : les tempi varient, allant de la sauvagerie métallique débridée d'un "Wild in the City"à la tendresse toute délicate de "Gentle Touch". Les thématiques abordées, quoique stéréotypées pour la plupart (les titres sont éloquents à cet égard), n'en sont pas moins diverses et le tracklisting bien pensé promet à l'auditeur exigeant un renouvellement constant de l'émotion. Bienvenue dans les méandres nombreux de l'univers musical de David Readman. Une belle virée vous attend.
"
Original ? Absolument pas mais ce n'était de toute façon pas l'intention d'un album audiblement réservé aux amateurs de metal mélodique, millimétré et bien produit qui pourront y aller sans crainte.

1. Without You 5:02
2. Evil Combination 5:19
3. Take These Tears 4:50
4. Don't Let It Slip Away 4:41
5. No Peace for the Wicked 3:52
6. Long Way to Heaven 4:41
7. Wild in the City 4:28
8. Gentle Touch 4:45
9. Prisioner of Shame 3:55
10. New Messiah 4:56
11. Over the Ocean 4:41
12. Love in Vain 5:17

David Readman - Guitars, Keyboards, Vocals 
&
Paul Logue
 - Bass 
Alex Beyrodt - Guitars 
Gerald Sänger - Guitars 
Tommy Denander - Guitars 
Uwe Reitenauer - Guitars 
Eric Ragno - Keyboards 
Günter Verno - Keyboards 
Dirk Briunenberg - Drums 
Chris Schmidt - Drums 

DAVID READMAN

WeiRDo
David Lynch "Crazy Clown Time" (2011)
ou "à son Image"

S'il peut s'avérer surprenant, à priori, de voir Lynch se lancer sur le tard dans la « chanson », ce serait oublier l'importance allouée à la musique dans ses films, sa très proche collaboration avec son compositeur favori, Angelo Badalamenti, et sa fugitive participation aux travaux d'indie rockers tout à fait recommandables (Dark Night Of The Soul de Danger Mouse et Sparklehorse Lynch« pige » sur deux pistes). C'est évident, l'exercice le taraudait, il était donc plus que temps qu'il passe, en 2011, aux choses sérieuses avec un premier album à son image : Crazy Clown Time.
A son image... Soit d'une étrange beauté. Une musique de rideaux rouges, de nains en reverse et de trips psychotiques nocturnes sur de vastes routes rectilignes bordées par le désert. Parce que, c'est un fait acquis, la bizarrerie est compagne du réalisateur, il n'y avait pas de raison qu'il en soit autrement pour le musicien. Et pourtant, les deux compositions inaugurales affichant un inhabituel voile de normalité masquerait presque ces fêlures, que ce soit le presque trip-hopant Pinky's Dream (avec la chanteuse des Yeah Yeah Yeahs, Karen O, en invitée de marque) ou le synth-pop vocodé Good Day Today, deux réussites, ceci dit.
La suite répond plus à comment on imaginait que la musique de Lynch se devait de sonner. Une sorte de Neil Young (duquel on ne résiste pas de rapprocher son timbre) mal dans sa peau, maladif qui aurait entrepris de faire un album « à la Tricky» sur des guitares primitives et des beats, nappes et glitches synthétiques concassés qui n'agréeront pas avec tout le monde. En vérité, l'album, 69 minutes !, traîne un peu en longueur pour les variations rythmiques - il est majoritairement très lent - qu'il a à offrir, heureusement, ses belles hauteurs (les deux morceaux d'ouverture, Noah's Ark, Strange and Unproductive Thinking, et quelques autres) en justifient aisément l'écoute.
A son image (Lynch!), Crazy Clown Time l'est indéniablement. C'est un machin bizarroïde qu'on déconseillera aux dépressifs chroniques, un album à la beauté oblique pas toujours très compréhensible mais jamais bêtement nonsensique. Reste à espérer que son géniteur poursuive l'expérience parce que le potentiel est là et qu'on est curieux d'entendre de quoi il en retournera.

1. Pinky's Dream 4:00
2. Good Day Today 4:39
3. So Glad 3:35
4. Noah's Ark 4:54
5. Football Game 4:20
6. I Know 4:03
7. Strange and Unproductive Thinking 7:29
8. The Night Bell with Lightning 4:59
9. Stone's Gone Up 5:21
10. Crazy Clown Time 7:00
11. These Are My Friends 4:58
12. Speed Roadster 3:55
13. Movin' On 4:14
14. She Rise Up 5:16

David Lynch: chant, guitare, synthétiseurs, percussions
Dean Hurley: batterie, guitare, basse, programmations, synthétiseurs, Hammond
Karen O: chant sur "Pinky's Dream"

DAVID LYNCH

SoLoBoy
Dave Stewart "Lucky Numbers" (2013)
ou "Et alors ?"

Dave Stewart en solo ? Autant le dire, tout le monde ou presque s'en moque. Dur dur d'être un homme de l'ombre, d'Eurythmicsà Vegas en passant par ses nombreuses collaborations et productions, de s'imposer en solitaire.
Et donc Lucky Numbers, cru 2013 du barbu, ne fit pas exception et fut largement ignoré par un public qui s'intéresse plus au clinquant qu'à la substance, au joli qui brille qu'au laborieux qui fonctionne. Présentement, pourtant, avec un groupe bien développé et de nombreux invités, Stewart fait le métier et le fait bien. Il faut dire que Dave est tout sauf un débutant en solo, Lucky Numbers est tout de même son 8ème album, et un faiseur particulièrement roué pour d'autres (de Joss Stoneà Stevie Nicks en passant par Tom Petty et ses Heartbreakers ou Ringo Starr). Certes, ses travaux solitaires en dents de scie, du réussi Greetings From The Gutter au très moyen premier opus de ses Spiritual Cowboys, ne plaide pas pour un intérêt systématique de son œuvre mais, tout de même !, voir l'indifférence dans laquelle il est confiné alors qu'il fut instrumental dans une des plus belles réussites des 80s, Eurythmicsévidemment, tient de la plus crasse injustice. Et donc Lucky Numbers, un album de qualité à défaut d'être transcendant, mérite l'attention de ceux qui apprécient leur rock avec un art de la nuance consommé et un savoir-faire certain. De fait, on y retrouve quelques excellentes chansons et pas beaucoup de faux-pas autour. Quelque part entre rock d'aujourd'hui et d'hier, country (oui, country !), blues et pop, il propose, par exemple, une jolie introduction en duo avec Martina McBride (Every Single Night), un blue rock gospelisant de qualité (Drugs Taught Me a Lesson), une bonne chanson d'inspiration cajun toute en chaloupe (How to Ruin a Romance), un rock bien solide au riff presque zeppelinien (Satellite), une apte ballade countrysante (Nashville Show), ou, toujours dans le voisinage de la plouc music américaine, un bien troussé Never Met a Woman Like You, ou encore un folk rock pas très éloigné du Mellencamp de The Lonesome Jubilee (One Step Too Far). Autant de chansons prouvant que le sieur Stewart sait y faire tant en tant que compositeur que d'arrangeur ou de producteur.
Clairement, Lucky Numbers ne révolutionne rien, ce n'est pas son ambition de toute manière, mais sait, varié qu'il est, toucher à de nombreux domaines sans perdre un iota de cohérence. Une jolie réussite, dommage que ça ne se sache pas plus.

1. Every Single Night 6:45
2. Drugs Taught Me A Lesson 5:27
3. How to Ruin a Romance 3:22
4. What Is Wrong With Me? 5:08
5. Satellite 3:15
6. Why Can't We Be Friends 6:01
7. You and I 4:09
8. Nashville Snow 4:08
9. Never Met A Woman Like You 3:41
10. One Step Too Far 3:27
11. Lucky Numbers 4:40
12. Every Single Night (Radio Edit) 3:50

Dave Stewart - vocals, guitars
Chad Cromwell - drums, percussion
Michael Rhodes - bass
Tom Bukovac - guitar
Dan Dugmore - lap steel & pedal guitar
Mike Rojas - keyboards
Kieran Kiely - accordion, bodhran, low whistle
&
Vanessa Amorosi
- vocals (2, 3, 4)
Martina McBride - vocals (1)
Laura Michelle Kelly - vocals (7)
Karen Elson - vocals (8)
Holy Quin Rah - vocals (11)
Josh Bohlinger - lead guitar (9)
Allison Bond, Andie Jane de la Torre - backing vocals (9)
Ann Marie Calhoun - violin (7)
The Ringmaster's Choir - backing vocals (2, 4)
musicians on "Why Can't We Be Friends"
Randy Cooke - drums
Michael Bradford - bass
Caitlin "Bird" Evanson - violin
Jeff Paris - piano
Amy Keys, Sierra Swan - backing vocals

DAVE STEWART

SynthPop III: Gloire ! (Deuxième Partie, 1982-1984)

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On avnnce doucement mais sûrement arrivant dans ce qu'il est convenu d'appeler le pic de la période de gloire synthpop/néo-romantique soit le royaume du synthétiseur roi de la pop... Enjoie !

LeS HoMMeS De...
Duran Duran "Rio" (05/1982)
ou "Triomphe Arena Synth"

Après avoir conquis leur mère-patrie avec un premier opus de synthpop triomphante, c'est vers les Etats-Unis que se tournent les cinq larrons de Duran Duran en, malin qu'ils sont, modifiant leur son juste ce qu'il faut pour agréer avec la jeunesse d'outre-Atlantique. C'est Erwin (Forces Parallèles) qui nous évoque ce cas d'école d'opportunisme commercial dont découle un vrai succès artistique :
"Chez les DURAN on n’est pas des angliches moyens, on a un look, du talent, on sait utiliser nos instruments. Blam, mise en place d’une stratégie pour attaquer de front le marché US, peu sensible à la base à la synth pop pratiquée par les bellâtres. Tournages de vidéos efficaces mettant en valeur le look des éphèbes, Simon Le Bon et John Taylor se préparent à intégrer les rangs des sex symbols de ces folles années. Du coup, le package est incontestablement à la hauteur, l’image de la pochette est devenue un classique, il ne reste plus qu’à faire de même pour le contenu. Quatre singles vont être tirés de ce deuxième album. C’est un déferlement, un véritable débarquement pratiqué par les rosbifs en terre de l’oncle Sam, il faut asphyxier le billboard sous les singles, et ne pas relâcher la pression.
« My own way» a l’insigne honneur de sortir peu avant l’album, héraut des futurs fab five. Petite ritournelle sans prétentions majeures, le titre est certes dansant, mais peu flamboyant, et d’ailleurs la vidéo ne fait guère mouche sur MTV, principal vecteur des succès d’alors – Ouais on n’avait pas internet… Si si, on a réussi à survivre sans ! - . Pas découragés pour deux sous, les gravures de mode sortent leur deuxième single « Hungry like the wolf», plus new wave dans l’esprit avec cette petite rythmique de guitare si reconnaissable d’Andy Taylor qui sort en mai 82. Plus efficace, plus mélodique, le titre fait mouche et est aujourd’hui un des classiques du groupe, il atteint la 3eme place du billboard et est matraqué par MTV. Sur une compo du clavieriste Nick Rhodes sur une vidéo de Russell Mulcahy le désormais réalisateur préposé à toutes leurs créations flashy…
La dynamique se poursuit avec « Save a prayer», qui sera maintenu à l’écart de la première place du billboard par le méga hit « Eye of the tiger» des SURVIVOR, une chanson très axée sur les synthés, et dont la vidéo est un souvenir épique pour tous, tournée au fin fond du Sri Lanka. L’image « romantique » du groupe grandit peu à peu. Enfin, l’éponyme « Rio» à l’esprit beaucoup plus rentre dedans, est le dernier single de la livraison, vidéo filmée cette fois à Antigua dans les Caraïbes, on va pas s’emmerder pour si peu ! Un morceau bien agréable dont le refrain est un trademark pour les fans du groupe.
Cela dit, il n’y a pas que les singles, car l’opus contient ma chanson préférée des DURAN DURAN, il s’agit de l’atmosphérique « The chauffeur», une poésie musicale composée par Simon Le Bon avant de devenir chanteur du groupe, il y joue de l’ocarina lui-même, et on se souviendra du tonitruant refrain « Sing blue silver» de cette compo, qui donnera son nom à la tournée qui s’ensuivra. Pour le reste, « Last chance on the stairway» est bien sympa, malgré sa discrétion et la dynamique de « Hold back the rain» est toujours aussi agréable malgré les années. Toute cette jolie farandole de sons et de couleurs représente l’archétype du mouvement des nouveaux romantiques-synth pop de la new wave des eighties, soit un véritable pan d’histoire ! C’était la mode, eh oui !! On avait l’air débile ? Eh oui… Mais vous vous êtes pas regardés avec vos coupes de cheveux « plumeaux » les mecs, on en reparle dans 20 ans !
D’un point de vue musical, l’ensemble a plutôt belle allure, même si on ne le conseillera pas aux oreilles des djeuns des 2010. Pour ceux qui l’ont vécu en revanche, c’est le top be bop de ce qui existait à cet instant précis. D’un point de vue historique donc, l’importance de Rio est évidente sur l’évolution du genre.
"
Rien à ajouter si ce n'est que, vu les revivalistes tendances actuelles, je me désolidarise d'Erwin sur le conseil aux jeunes pousses, qu'elles se lancent !

1. Rio 5:33
2. My Own Way 4:51
3. Lonely In Your Nightmare 3:50
4. Hungry Like the Wolf 3:41
5. Hold Back the Rain 3:59
6. New Religion 5:31
7. Last Chance on the Stairway 4:21
8. Save a Prayer 5:33
9. The Chauffeur 5:13

Simon Le Bon– lead vocals; vibes on "New Religion"; ocarina on "The Chauffeur", acoustic guitar on "Save a Prayer"
Nick Rhodes– keyboards; sound effects; synthesizer, marimba, backing vocals on "Last Chance on the Stairway"
John Taylor– bass guitar, background vocals
Roger Taylor– drums, other percussion
Andy Taylor– guitar, background vocals
&
Andy Hamilton
- tenor saxophone on "Rio"

DURAN DURAN

aLPHaBeT STaRS
ABC "The Lexicon of Love" (06/1982)
ou "New Heroes"

Totalement de son temps, ayant bien vieilli ce pendant, le Lexicon of Love d'ABC est une galette qui fera mouche dans les charts et influencera moult formations plus ou moins cousines, le rayonnement du groupe dépassant le pré-carré de sa synthpop de compétition, comme va nous l'explique Francois Alvarez (Music Story) :
"Les cordes frémissent dans une intro inspirée de la musique classique, le rythme explose soudain avec une basse funky, des variations tout droit venues de Roxy Music ou de David Bowie donnent au titre son charme indélébile. « Show Me» est le premier titre imparable de The Lexicon of Love, album essentiel et précurseur de soul aux yeux bleus.
A peine remise des excentricités des nouveaux romantiques, de la préciosité de la mode pirate, l'Angleterre voit arriver ABC. Le groupe est inspiré de la Northern Soul et de ses hangars à danser, de l'attitude sophistiquée des rois du glam androgyne, des synthés sautillants de Visage et autres Spandau Ballet.
« Poison Arrow» entretient le plaisir et ouvre les portes du Top anglais à la 6ème place. Martin Fry, le chanteur, joue de sa voix capable de moduler sur des arrangements de cuivre cossus, sur des guitares suant la soul.« Tears are Not Enough» amours adolescentes ou garçons et filles se cherchent dans un pas de danse d'une soirée.
Pour « Valentine 's Day» ce sont les syncopes du xylophone qui donnent le ton, la carte postale de l'amour tourbillonne dans les éclats de lumière blanche. Mais « wow, wow, wow », tout le monde se lève pour l'immense et impérial « The Look of Love», qui a le look de l'amour ? Visiblement, l'arlequin de « Ashes to Ashes» recyclé sans vergogne dans le clip, Martin Fry n'imite pas que la mèche blonde et tombante de l'ancien Mince Duc Blanc.
« The Look of Love» se classe seulement No 4, The Lexicon of Love lui égrène son alphabet comme No 1 anglais du 3 au 23 juillet 1982. Produit par Trevor Horn, il annonce la dance musclée et ambigüe de Frankie Goes to Hollywood. The Lexicon of Love est un album de l'époque des show lasers, des boules à facettes, du poppers et d'un temps qui parie sur l'insouciance après les secousses du No Future. Grand album peut être pas, album marquant sans l'ombre d'un doute.
"
C'est dit et c'est bien dit et donc recommandé aux amateurs du genre, aux nostalgiques du spandex et aux jeunes-gens curieux de voir ce que leurs aînés ont tant aimé.

1. Show Me 4:02
2. Poison Arrow 3:24
3. Many Happy Returns 3:56
4. Tears Are Not Enough 3:31
5. Valentine's Day 3:42
6. The Look of Love (Part One) 3:26
7. Date Stamp 3:51
8. All of My Heart 5:12
9. 4 Ever 2 Gether 5:30
10. The Look of Love (Part Four) 1:02
Bonus
11. Theme from Man Trap 4:19

Martin Fry - vocals
David Palmer - drums, percussion
Stephen Singleton - alto and tenor saxophones
Mark White - guitars, keyboards
&
Mark Lickley - bass guitar on "Tears Are Not Enough", "Poison Arrow" and "The Look of Love"
David Robinson - drums on single/demo versions of "Tears Are Not Enough"
Anne Dudley - keyboards and orchestration
Brad Lang - bass guitar
J. J. Jeczalik - Fairlight CMI programming
Kim Wear - trumpet
Andy Gray - trombone on "Tears Are Not Enough"
Luís Jardim - additional percussion
Tessa Webb - female vocal lead on "Date Stamp"
Gaynor Sadler - harp
Karen Clayton - female speaking voice in "Poison Arrow"

ABC

SyNTH-HoLLiS
Talk Talk "The Party's Over" (07/1982)
ou "Avant la Mue"

Avant qu'Hollis ne s'éveille à ses propres ambitions, avant que Talk Talk devienne le véhicule du plus exceptionnel compositeur à être sorti de la scène synthpop/new romantic, The Party's Over, premier album d'un quatuor fun et frais mais pas sans quelques fêlures, est déjà une belle surprise.
Certes, avec le recrutement opportuniste du producteur de Duran Duran, les stars du moment, en la personne de Colin Thurston, on sait déjà à quelle sauce sonore tout ceci a été mitonné, de fait, claviers omniprésents, beats vaguement dansants, et batteries électroniques sont, sans la moindre surprise, le lot de The Party's Over. Oui, mais, Mark Hollis n'est pas Simon LeBon et, dès le Talk Talk d'ouverture, où le break piano/percussions n'est pas sans rappeler les agissements d'un certain Peter Gabriel, on sent que sous ce vernis synthpop de bon ton puisque c'est la mode, une écriture nettement plus fragile et délicate se cache déjà. Ok, le single star de la galette, un top 20 en leur mère-patrie, Today, a carrément mal vieilli et ne se déguste donc plus que comme une vignette nostalgique, mais ailleurs, de la chanson éponyme à l'ambitieux The Party's Over, aux premiers exemples de l'écriture solitaire d'Hollis pour celles qui sont définitivement les plus sensibles de l'opus (Have You Heard the News? et Candy, Mirror Manétant nettement moins intéressant) et assurément une piste qui ne fera que de se développer sur les quatre albums suivants de la formation.
Après ce premier essai encore maladroit, trop typique de son époque pour être tout à fait honnête aussi, perdant un de ses membres (le claviériste Simon Brenner) mais gagnant un producteur/co-créateur qui n'abandonnera plus le navire avant qu'il ne soit mis en cale sèche (Tim Friese-Greene) commencera, comme vous le savez, pas conquérir les charts à coups de singles irrésistibles (Such a Shame, It's My Life) avant de doucement glisser vers l'art-rock pour l'immense bénéfice de tous les mélomanes exigeants de la planète mais, ça, c'est une autre histoire qui, cependant, permet de mettre en perspective cette œuvre encore embryonnaire d'un génie en devenir.

1. Talk Talk 3:23
2. It's So Serious 3:21
3. Today 3:30
4. The Party's Over 6:12
5. Hate 3:58
6. Have You Heard the News? 5:07
7. Mirror Man 3:21
8. Another Word 3:14
9. Candy 4:41

Mark Hollis– vocals
Simon Brenner– keyboards
Lee Harris– drums
Paul Webb– bass guitar

TALK TALK

MiXiTé 1
Yazoo "Upstairs at Eric's" (08/1982)
ou "Waves of Synth"

Parti de chez Depeche Mode, pas encore à la barre du projet qui l'habite toujours aujourd'hui, Erasure, Vince Clarke se rapproche d'Alison Moyet (ex-The Vandals) et propose une très belle galette de synthpop.
Parce que l'addiction de Clarke pour les synthétiseurs analogiques déjà clairement décelée sur Speak & Spell de ses anciens collègues est, cette fois, nettement plus maîtrisée ce qui est évident dès l'énorme tube d'introduction, Don't Go, ou Kraftwerk rencontre la blue-eyed soul pour une entêtante mélodie menée tambours battants sur un beat electro à faire swinguer les petits blancs d'Albion. Il faut dire que l'assistance créative et la voix polyvalente, chaude et délicate d'Alison aide grandement à la tâche imposant Yazoo comme le concurrent n°1 d'un Eurythmics encore débutant (on peut, en fait, voix Yazoo un modèle dont s'inspireront Lennox et Stewart pour produire leur premier succès populaire, Sweet Dreams). Et comme le reste de l'album, d'un Bad Connection entrainant et joyeux, d'un Midnigh gorgé de soul électronique, d'un claustrophobe, froid et déstructuré In My Room, d'un tendre et caressant Only You,  du groove irrésistible d'un Tuesday à l'absolue beauté du planant Winter Kills, est une fiesta de tous les instants des possibles d'un duo en grosse inspiration, il n'en faut pas plus pour confirmer que l'excitation critique et populaire de l'époque était bel et bien justifiée et qu'en plus Upstairs at Eric's, quoique qu'absolument typique de ce qu'on imagine d'un album de synthpop de la première moitié des 80s, a admirablement résisté à l'usure des ans.
Un second album suivra l'année suivante, You and Me Both, pas tout à fait aussi réussi mais presque, avant que le duo ne se sépare pour incompatibilité relationnelle (Alison voulait un grand ami, Vince est du genre froid et distant, pas une bonne combinaison). Reste cet opus débutant, et triomphant !, qu'on n'a de cesse de recommander à tous ceux qui souhaitent entendre le meilleur de la synthpop.

1. Don't Go 3:08
2. Too Pieces 3:14
3. Bad Connection 3:20
4. I Before E Except After C 4:36
5. Midnight 4:22
6. In My Room 3:52
7. Only You 3:14
8. Goodbye 70's 2:35
9. Tuesday 3:22
10. Winter Kills 4:06
11. Bring Your Love Down (Didn't I) 4:40

Alison Moyet– vocals, piano
Vince Clarke– instrumentation
&
Daniel Miller
– additional production and noises on "Don't Go", "Too Pieces", "In My Room", "Only You" and "Situation"
Eric's mum– extra chit-chat on "I Before E Except After C"
D. Davis– extra chit-chat on "In My Room"

YAZOO

HeRoiC
Simple Minds "New Gold Dream (81-82-83-84)" (09/1982)
ou "Heureux les simples d'esprit"

Plus sombre que les collègues synthpop mais définitivement cousins, le Simple Minds de 1982, le sommet de la formation de l'avis de votre serviteur, est une exceptionnelle machine à rêves et à cauchemars que va nous évoquer Raven (Guts of Darkness) :
"Une bouffée d'air pur. Un peu comme dans les publicités pour désodorisants 'fraîcheur marine', mais sans les dégénérescences cancérigènes.
Simple Minds, adolescents nocturnes voire inquiétants, ont mis de la couleur dans leur ciel, leur cold wave a depuis quelques temps rosi, et les réverbères de leur quartier ont éclos. "Car les réverbères sont des fleurs et les concubins s'enlaçant à leur pied les neveux de la Lune" (Robert Burns). Les mélodies sont reines dans New Gold Dream.
La production aussi (parmi les premières armes de Peter Walsh, qui sera rien de moins que l'habilleur en charge sur les Scott Walker de Climate Of Hunter / Tilt / The Drift). La structure post-punk se fond parfaitement dans cette chair synth pop qui épouse délicatement leur forme abrupte, comme des doigts dans une femme. Guitares d'un cristallin policier, basse bien nourrie, batterie drue comme le ressac, qu'un généreux limon de synthétiseurs vient couvrir, menés par un Jim Kerr dont on ne sait trop s'il est plus Bowie ou plus Ocasek mais qu'au final peu nous chaut tant sa flanelle vocale enchante nos cochlées. Comme dirait mon ami Pat Bateman, "le groupe a indéniablement trouvé sa voie, commercialement et artistiquement", et même si New Gold Dream ne fait jamais partie des deux ou trois disques régulièrement cités comme le sommet de Simple Minds, il reste rigoureusement indispensable et je contre-attaquerais sans hésiter le cinglant dédain de mon cher collègue Progmonsterà son égard (cf sa chronique de Reel to Real Cacophony), en érigeant New Gold Dream comme leur chef d'œuvre - du moins, leur album le plus gracieux et intense émotionnellement parlant. Je n'hésiterais pas à parler de synthèse concernant ce suprême de new wave. "Synthèse" est un terme qui sied parfaitement à cette collection de slows moirés, dont les moments d'accalmie sont parfois proche du point d'évaporation "publicité pour eau minérale", voire coquille vide, au vu des quelques divagations instrumentales aseptisées et pas forcément indispensables qui heureusement n'y tiennent un rôle que secondaire. Un peu comme les métaphores onaniques dans mes chroniques si vous préférez.
La tête d'affiche de New Gold Dream reste cette aura romantique aveuglante, qui excuse bien des sirops et des écumes. Même le feeling pompier et douteux d'un "Glittering Prize" qu'on aurait pas vraiment regretté. Car c'est l'émotion qui domine ici, et qui se lance vaillamment à l'assaut de notre panthéon 80's, telle la Vierge à l'épée dans un champ de roses fanées fouettées par les alizés de la Mélancolie... L'introduction parle d'elle même (même si, hélas, elle est aussi le climax et que par conséquent tout ce qui suit sera forcément moins intense) : "Someone Somewhere (in Summertime)" happe l'auditeur dans sa grandiloquence turquoise hallucinée, transcendée par un Jim Kerr aux abois, probablement dévasté par une perte sentimentale aussi regrettable que lycéenne, un Kerr qu'on devine dans le studio agenouillé au centre d'un cercle de bougies parfumées, les bras tendus vers le ciel et les yeux noyés de larmes... Une chanson belle à en crever, tant la mélancolie, la nostalgie y brûlent et affleurent de partout. "Hunter & The Hunted" (finissant sur ce solo de synthétiseur très pink floydien signé Herbie Hancock) et "King Is White and in the Crowd" viendront rappeler cette noblesse dans le fuchsia sentimental et cette générosité mélodique des écossais en fin d'album, tout simplement magique, et au milieu un titre comme "Big Sleep" fera la transition idéale pour ceux qui furent éblouis par Empires & Dance et le doublé Sisters / Sons. Cette new wave coule comme le Clyde dans les Lowlands, elle est naturelle, minérale plus que synthétique. Synthèse, pourtant. Synthèse du nouveau romantisme alors en vogue, qui parvient ici au point de patine et de crémeux ultime, ce moment crucial où la glace était pas encore complètement du sucre candi, juste avant que ne débarquent des atrocités mutantes avec des noms comme Kajagoogoo. Et synthèse de paroisses pas forcément faites pour s'apprécier : les amateurs de pop sophistiquée aux arrangements classieux, les gothiques tolérants au glucose, les ex-punks mariés-deux-enfants, les midinettes mouillant sur Duran Duran... et, j'en mets mon gant pur agneau griffé Hermès à couper, les gutsiens, qui savent toujours différencier le cosmétique de la beauté (n'est-ce pas).
Voici la new wave que j'écoute quand je suis d'humeur chose, quand je vaque à mes aubes incertaines, celle qui résonnera le jour où ma Lady Di s'en ira déguster d'autres piliers... La new wave rassurante et transcendante d'un automne dont les pluies minces ne finissent jamais de chuter et dont les mauves remembrances illuminent mon cœur gorgé de regrets. À jamais."
Et vous hésitez encore ?

1. Someone Somewhere in Summertime 4:36
2. Colours Fly and Catherine Wheel 3:49
3. Promised You a Miracle 4:28
4. Big Sleep 5:00
5. Somebody Up There Likes You 5:02
6. New Gold Dream (81-82-83-84) 5:39
7. Glittering Prize 4:33
8. Hunter and the Hunted 5:55
9. King Is White and in the Crowd 7:00

Jim Kerr - lead vocals
Charlie Burchill - guitars and effects
Michael MacNeil - keyboards and effects
Derek Forbes - bass guitar
&
Mel Gaynor
- drums on "Someone Somewhere in Summertime", "Big Sleep", "New Gold Dream (81-82-83-84)", "Glittering Prize", "Hunter and the Hunted", and "The King is White and in the Crowd"
Mike Ogletree - drums on "Colours Fly and Catherine Wheel", "Somebody Up There Likes You", and "New Gold Dream (81-82-83-84)"
Kenny Hyslop - drums on "Promised You a Miracle"
Sharon Campbell - girl's voice on "Colours Fly and Catherine Wheel" and "Glittering Prize"
Herbie Hancock - guest keyboardist on "Hunter and the Hunted"

SIMPLE MINDS

MiXiTé 2
Eurythmics "Sweet Dreams (Are Made of This)" (01/1983)
ou "Rêve doré"

Après la courte aventure des Tourists, Dave Stewart et Annie Lennox continuent en duo. En 1981, ils sortent un premier album, le peu concluant In the Garden, avant d'enfin trouver la formule avec leur second opus, Sweet Dreams (Are Made of This) et le reste, comme on dit, is history.
La formule ? Transcender une synth-pop alors en vogue en y incluant une bonne dose de soul, bien vu !, et de féminité, forcément, et ainsi générer une mouture originale et, on le verra, décisive, d'un genre confiné à la prude Albion et à des explorations majoritairement masculines. C'est tout simple en fait, il suffisait d'y penser, et d'avoir les armes pour fourbir tel arsenal. Evidemment, sans bonnes chansons, tout ceci resterait un vœu pieux mais les bonnes chansons, justement, sont là et propulsent le deux d'aspirants vers les sommets des charts mondiaux avec d'abord le morceau titre de la galette auquel il fut alors impossible de résister. Mais ce n'est pas tout. Sur la foi de cette excellente saillie, moult autres sucreries qui filent droit au but et aux chœurs d'auditeurs qui n'en croient pas leurs oreilles. Des exemples ? L'introductif Love Is a Stranger déjà, une excellente façon d'installer l'esthétique chic et pop et pas idiote du duo, I've Got an Angel, où Lennox déploie tout le potentiel de son impressionnant organe, The Walk, qui a tout d'une réponse aestrogènée au mâles du mouvement en plus d'un catalogue de tous les trucs de production du père Stewart, ou la longue ballade rampante qui clôt l'album d'origine, This City Never Sleeps. Et encore plus dans la version bien remasterisée et généreusement bonussée proposant quelques douceurs supplémentaires telles qu'une jolie reprise du Satellite of Love de Lou Reed ou l'inédit Home Is Where the Heart Is, ou de plus accessoires tels les deux remixes des deux tubes de l'opus.
Sweet Dreams (Are Made of This), la chanson et l'album, contribueront largement à installer, durablement qui plus est, un duo qui s'est bien trouvé parmi le best of d'années 80 souvent décriées mais qui, présentement, apportent leur eau au moulin de la pop musique, toutes époques confondues. Et dire qu'Eurythmics feront encore mieux, la même année avec Touch, à peine croyable !

1. Love Is a Stranger 3:43
2. I've Got an Angel 2:45
3. Wrap It Up 3:33
4. I Could Give You (A Mirror) 3:51
5. The Walk 4:40
6. Sweet Dreams (Are Made of This) 3:36
7. Jennifer 5:06
8. This Is the House 4:56
9. Somebody Told Me 3:29
10. This City Never Sleeps 6:33
Bonus
11. Home Is Where the Heart Is 3:03
12. Monkey Monkey 4:14
13. Baby's Gone Blue 5:15
14. Sweet Dreams (Are Made of This) (Hot Remix) 5:17
15. Love Is a Stranger (Coldcut Remix) 7:18
16. Satellite of Love 4:37

Annie Lennox - vocals, keyboards, synthesisers, flute
David A. Stewart - guitar, keyboards, synthesisers, programming, backing vocals
&
Robert Crash
- guitar, e-drums, synth, robotic vocals
Green Gartside - guest vocal duet on "Wrap it Up"
Dick Cuthell - trumpet
Adam Williams - bass, synthesiser
Andy Brown - bass
Reynard Falconer - synthesisers
John Turnbull - guitar

EURYTHMICS

TWiNS DeLuXe
Thompson Twins "Quick Step and Side Kick" (02/1983)
ou "Lords of the Synth-Dance"

Pour les Thompson Twins qui passeront à la postérité, tout part en fait d'un single de leur second album ayant réussi à se hisser jusqu'à la première place des charts dance étatsuniens, In the Name of Love, enregistré avec un spécialiste du genre, Thomas Dolby. Décidant de poursuivre sur cette voix jusqu'alors inhabituelle pour le groupe, le leader naturel de la bande, Tom Bailey garde les deux membres les plus compatibles avec sa vision, Alannah Currie et Joe Leeway pour réaliser la conversion des new-waveux en new romantics synthpop.
Et c'est à Quick Step & Side Kick que revient l'honneur et l'avantage d'étrenner le néo-trio en ses nouveaux habits de conquérants d'une jeune génération amoureuse de beats dansants, de synthétiseurs omniprésents et de mélodies, les refrains en particulier, mémorables, diablement accrocheurs. Produit par Alex Sadkin, qui a travaillé avec Bob Marley ou Joe Cocker mais surtout Grace Jones (d'ailleurs présente sur une des pistes de l'opus présent) dont il a réalisé la mise en son des trois albums des 80s débutantes et collaborera bientôt avec Duran Duran (Seven and the Ragged Tiger), l'album est dans de bonne mains. Et les compos me direz-vous, elles sont à l'avenant, clinquantes, pimpantes, d'un optimisme qu'on a, aujourd'hui, peine à comprendre sauf à avoir connu de près le triomphe consumériste à épaulettes et crinières crêpées d'une première moitié des années 80 d'Angleterre pas encore pourries par Miss Maggie et ses embrouilles libérales. Bref, les Thompson Twins font de la musique fun et sautillante qu'il ne faut surtout pas tenter de sur-analyser, elle n'est pas faite pour ça.
Et donc, sans rentrer dans le détail des titres mais en vous assurant que c'est une fiesta de tous les instants pour les amateurs du genre, on ne peut que recommander Quick Step & Side Kick, une entière réussite de synthpop certes un poil décérébrée mais tellement jouissive...
 
1. Love On Your Side 4:25
2. Lies 3:12
3. If You Were Here 2:55
4. Judy Do 3:47
5. Tears 5:02
6. Watching 3:58
7. We Are Detective 3:05
8. Kamikaze 3:55
9. Love Lies Bleeding 2:49
10. All Fall Out 5:26

Tom Bailey - vocals, synthesizer, drum programming
Alannah Currie - xylophone, percussion, vocals
Joe Leeway - congas, synthesizer, vocals
&
Boris Williams
- cymbals on "If You Were Here"& "Tears"
Grace Jones - background vocals on "Watching"
Monte Brown - guitar on "Watching"

THOMPSON TWINS

uN ouBLié
Howard Jones "Human's Lib" (03/1984)
ou "les couleurs d'Howard"

Vous connaissez l'histoire par cœur, une bonne petite gueule avec la coupe et les nippes à l'unisson, quelques chansons infectieuses et immédiates, les arrangements et la mise en son qui va bien pour l'époque de sa conception, il n'en fallut pas plus pour imposer un jeune inconnu, Howard Jones, comme un des stars montantes d'années 80 britanniques débutantes où tout va bien et tout le monde veut s'amuser.
Or donc, Howard Jones est un cas d'école de la synthpop en plus d'un artiste qui disparaîtra avec la mode faute, sans doute, d'avoir su se renouveler à temps. Pour l'heure, sur un premier album enregistré quasiment en solitaire (deux saxophones sur Pearl in the Shell et basta mais on n'est pas pour autant chez Rémy Bricka !), le petit prince New Romantic étale un vrai beau talent de compositeur pop bien servi par la production hi-tech d'un Rupert Hine qui sort à peine de l'album de renaissance de Tina Turner, Private Dancer, offre toutes ses capacités au jeune anglais. Et, le moins que l'on puisse dire, c'est qu'avec des chansons aussi addictives que les deux singles stars de l'opus (What Is Love?, et New Song, cette dernière confiée à la console de Colin Thurston, ex-adjoint de Tony Visconti) mais aussi quelques belles pièces de complément (Hide and Seek, Conditioning ou Pearl in the Shell), on est généreusement servi. Alors certes, parce qu'Howardà son style et ses tics, peut-être aussi parce qu'il est seul et que la musique, voyez-vous, c'est à un art qui profite au partage, et tout ceci tourne un peu en rond dans son petit monde où, accueillant et coloré comme pas deux (malgré l'austérité de la pochette), le sieur Jones sait nous inviter. Reste à savoir si, une trentaine d'années après sa sortie, Human's Lib a aussi bien tenu le choc que les meilleurs représentants du genre et, là, il faut reconnaître que l'album sera plutôt à réserver aux nostalgiques qui seraient passés à côté de ce gars-là qu'à une plus jeune génération qui, même amoureuse de son rétro, risque de trouver cette musique bien datée.
Bref, Human's Lib, une réussite malgré les limites précitées, n'est pas le plus grand album du genre mais, indéniablement, un efficace "shoot" de techno-pop qui amènera un sourire béat et un peu idiot, normal, les années 80 quoi !, sur tous les visages des amateurs de la chose. Et puis, Howard, pour cet  album surtout, mérite bien qu'on le sorte du quasi-total anonymat où il se trouve chez nous alors que, tout de même, son art est nettement plus performant que, au hasard, les affreux Partenaire Particulier. Allez, zou !, je vous l'emballe et on n'en parle plus !

1. Conditioning 4:32
2. What Is Love? 3:45
3. Pearl in the Shell 4:03
4. Hide and Seek 5:34
5. Hunt the Self 3:42
6. New Song 4:15
7. Don't Always Look at the Rain 4:13
8. Equality 4:26
9. Natural 4:25
10. Human's Lib 4:03
Bonus
11. China Dance 3:49

Howard Jones– synthesizers, keyboards, vocals, drum machines
&
Davey Payne
, Stephen W. Tayler– saxophone on "Pearl in the Shell"

HOWARD JONES

GeRMaNie, auSSi !
Alphaville "Forever Young" (09/1984)
ou "Das Techno-Pop"

Certes, la synthpop des 80s naissantes est principalement britannique, il y a cependant des continentaux, des teutons en l'occurrence, qui suivent le rythme et concurrencent franchement les sujets de sa gracieuse majesté sur leur propre terrain, shocking ! On pense évidemment à Alphaville dont on va laisser Realmean (musicwaves.fr) nous parler plus avant :
"Comment ouvrir le ban sur l’un des emblèmes de la scène pop des années 80 ? Et qui plus est, toujours en activité à l’heure d’aujourd’hui ? Alphaville, formation germanique qui fera d’emblée le choix stratégique de l’anglais pour ses vocalises, s’installe résolument dans un registre synthpop qui ne se démentira guère, tout au long de la discographie. Sa musique sera sans détour accusée d’accointances avec la Disco-pop, et les sacro-saints commandements de la bande FM. Et il est vrai que si bon nombre d’artistes à cette époque ont assez vite évolué vers le Rock, Marian Gold, Bernhard Lloyd (et Ricky Echolette, remplaçant Frank Mertens aussitôt après ce premier album) auront maintenu le cap d’un writing fougueusement épique et d’une sonorité décapée au blanc d’Espagne. Ne cherchez pas ici les assauts rocailleux de guitares punk ou autres psychotropes hallucinogènes de six cordes à la Pink Floyd… Ce serait peine perdue.
Alors, en quoi consiste la recette du succès ? La réponse tient en une phrase : le vocal impérial de Marian Gold, proprement habité par la passion, capable de couvrir une gamme tonale exceptionnelle, et une qualité de composition et d’arrangements tout bonnement sidérante. Dès les premiers moments de 'Victory Of Love', on s’aperçoit que le credo des Allemands n’est pas celui d’une synthpop de ritournelles kilométriques. En s’attardant sur 'To Germany With Love', on finira subjugué par le chassé-croisé de la batterie, des vocalises, de claviers fantomatiques et de bruitages aux accents épouvantés. Et qui aura oublié le tubesque et sentencieux 'Big In Japan' (s’étant très rapidement classé n°1, ou dans les premières places de la plupart des charts européens), ou encore la mélodie du titre éponyme, clôturée d’un cérémonial de cuivres parmi les plus célestes que le genre musical ait pu compter ? Ce slow mythique fut également (et superbement) décliné en version Dance, et excusez du peu, maxi 45 tours, pour le plus grand bonheur des aficionados de rythmiques disco.
L’album ne tarira plus de talents mélodiques et sonores, passant par le bien nommé 'Sounds Like A Melody', alliant tous les points forts et déchaînant un véritable déluge de sensations symphoniques, jusqu’au très éclairé 'Jet Set', un splendide élan festif, mais tout en finesse narrative, jonglant sur la multitude de registres vocaux de Marian Gold.
S’il fallait émettre une réserve ? On pourrait notifier le formatage de la rythmique, très uniforme, et affublée par ailleurs d’une sonorité un peu sèche, façon boîte à rythme. Ce qui limitera l’appréciation mais, à l’image (et aux paroles !) du diluvien 'Fallen Angel', (comprendre, en terme d’emphase romantique), la musique de "Forever Young" est une pluie d’émotions addictives et euphorisantes : She’s an invader, She’s from another world… Les clips ont certes pris un petit coup de vieux, mais quelle farouche vitalité dans cette musique… Jeune pour toujours
!"
Forever Young qu'il disaient... Pari gagné ? Ja

1. A Victory of Love 4:14
2. Summer in Berlin 4:42
3. Big in Japan 4:43
4. To Germany with Love 4:15
5. Fallen Angel 3:55
6. Forever Young 3:45
7. In the Mood 4:29
8. Sounds Like a Melody 4:42
9. Lies 3:32
10. The Jet Set 4:52

Hartwig Schierbaum: Vocals
Bernhard Gößling: Keyboards, programming
Frank Mertens: Keyboards
&
Ken Taylor
: Bass
Curt Cress: Drums, percussion
Wednesday, Gulfstream, The Rosie Singers, The Claudias: Backing vocals
Deutsche Opera: Strings/string arrangements

ALPHAVILLE

Autour du Bon, du Méchant et de la Reine

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Où l'on tourne autour d'un des derniers "supergroupes" en date avec l'album, bien-sûr, mais surtout une œuvre de chacun de ses membres histoire que le festin soit vraiment beau. Enjoie !

SuPeRGRouPe
The Good, the Bad & the Queen "The Good, the Bad & the Queen" (2007)
ou "Albarn à la barre"

On en attend sans doute trop des rencontres entre musiciens célèbres et/ou respectés, ce qu'il était naguère convenu d'appeler supergroupe mais qu'il a tellement déçu qu'on n'ose plus trop.
Dans le cas présent, génération différente oblige (quoique Paul Simonon et surtout Tony Allen commencèrent leurs carrières dans les septantes), le problème ne vient probablement pas de sempiternelles guerres égotiques entrainant une œuvre auto-satisfaite et ampoulée, mais problème il y a tout de même... Alors quoi ? L'omniprésence de celui dont on sait sans le moindre doute qu'il est le force créatrice motrice du projet, Damon Albarn en l'occurrence qui, a trop vouloir contrôler tout ce qu'il l'entoure réussit de vrais tours de force (Mali Music, les deux premiers Gorillaz, son magnifique album solo, Everyday Robots) mais, présentement, nie à The Good, The Bad & The Queen l'apport d'un collectif pourtant bien construit avec l'ex-The Verve et partenaire récurrent de Damon depuis un moment, Simon Tong, et, évidemment !, une section rythmique que, composée d'un Clash au batteur de l'immense Fela, on aurait aimée vouée à de plus jammesques instants.
Attention, ne vous méprenez pas, ces 12 titres et 40 et quelques minutes sont une sympathique démonstration des talents mélodiques du sieur Albarn aboutissant à un aimable galette d'indie-pop plutôt très bien troussée, sauf qu'on en attendait plus (trop ?) d'un collectif au promesses fusionnantes alléchantes mais, ultimement, absente du cocktail proposé. C'est donc avant tout aux fans du gars Damon qu'on conseillera un album que, franchement, il aurait dû sortir en son nom propre et avec lequel il ne faut donc surtout pas attendre autre chose que ce que le leader de Blur sait très bien faire.

1. History Song 3:05
2. 80's Life 3:28
3. Northern Whale 3:54
4. Kingdom of Doom 2:42
5. Herculean 3:59
6. Behind the Sun 2:38
7. The Bunting Song 3:47
8. Nature Springs 3:10
9. A Soldier's Tale 2:30
10. Three Changes 4:15
11. Green Fields 2:26
12. The Good, the Bad & the Queen 7:00

Damon Albarn– lead vocals, keyboards, back cover
Paul Simonon– bass, backing vocals, illustrations
Simon Tong– guitar
Tony Allen– drums
&
Danger Mouse– percussion (track 4), synthesizers (tracks 5 & 12), production
Harry Christophers– choir (track 5)
Julia Doyle– choir (track 5)
Grace Davidson– choir (track 5)
Kirsty Hopkin– choir (track 5)
Charlotte Mobbs– choir (track 5)
Andrew Olleson– choir (track 5)
Ian Aitkenhead– choir (track 5)
David Clegg– choir (track 5)
Christopher Royall– choir (track 5)
Adrian Lowe– choir (track 5)
Ben Rayfield– choir (track 5)
Mark Dobell– choir (track 5)
Simon Berridge– choir (track 5)
James Holliday– choir (track 5)
Julian Empett– choir (track 5)
Sam Evans– choir (track 5)
Antonia Pagulatos– violin (tracks 5, 6, 8–10 & 12)
Sally Jackson– violin (tracks 5, 8, 9 & 12)
Alice Pratley– violin (tracks 5, 8, 9 & 12)
Gillon Cameron– violin (tracks 6 & 10)
Stella Page– viola (tracks 5, 6, 8–10 & 12)
Amanda Drummond– viola (tracks 5, 8, 9 & 12)
Emma Owens– viola (tracks 6 & 10)
Izzi Dunn– cello (tracks 5, 6, 8–10 & 12)
Al Mobbs– double bass (tracks 5, 6, 8–10 & 12)
Emma Smith– double bass (tracks 6 & 10)
Eslam Jawaad - additional vocals on "Mr. Whippy"

THE GOOD, THE BAD & THE QUEEN

ToNy aLLeN
Fela "Gentleman/Confusion" (1973/75)
ou "African Pulse"

D'une autre planète... l'Afrique ! Pas une Afrique de carte postale, une Afrique ouverte sur le monde, violente souvent, sensuelle toujours, à la fois si proche et si loin de nous...
De la riche discographie de Fela, Gentleman est celui que je préfère (suivi de près par Confusion de 1975 auquel il est groupé dans la présente réédition), un album politique bien-sûr, comme le fut toute l'aeuvre de Fela Anikulapo Kuti, un album pour lequel il a spécialement appris à jouer du saxophone afin de remplacer, au cours des sessions, un Igo Chico démissionnaire, il impressionne dans l'exercice, d'ailleurs sur un album suant et groovant, tribal et jammy, chaud, lourd, céleste... Tout ça !
Comme à l'accoutumé dans l'afrobeat de Fela, ce funk de la jungle, jazzy et libre dont il est le géniteur, les pistes sont longues, largement improvisés, avec de vibrantes chorales tribales, de rutilants cuivres et de trépidantes rythmiques panafricaines (Ha! Tony Allen !). C'est vibrant, aussi étourdissant de virtuosité que de vérité, une musique de ghetto pour sortir du ghetto, un gospel impossible pour le droit des hommes.
A la mort de Fela Kuti, on a pleuré la mort d'un grand homme , pas seulement d'un grand homme africain, d'un grand musicien aussi dont l'impressionnant catalogue est évidemment à revisiter souvent, religieusement. Gentleman, en diamant sur la couronne, est une parfaite introduction à l'homme et à son art.

Confusion (1975)
1. Confusion (part 1 & 2) 25:35
Gentleman (1973)
2. Gentleman 14:32
3. Fefe Naa Efe 8:06
4. Igbe 8:14

Fela Ransome-Kuti - alto saxophone, arrangements, electric piano, production, tenor saxophone, vocals
Tunde Williams - trumpet
Igo Chico - tenor saxophone (tracks 2, 3)
Tony Allen - drums
(autres musiciens inconnus)

FELA

PauL SiMoNoN
The Clash "Combat Rock" (1982)
ou "la fin du début, le début de la fin"

Combat Rock, c'est le Clash du regroupement sur les fondamentaux, pas qu'ils abandonnent la diversité qui a notablement élargi leurs possibles depuis leur fracassants débuts en bruit blanc énervé, cette fois, ce n'est plus le double si rondement mené (London Calling) ni l'extravagant triple qui se paume parfois un peu (Sandinista), ce sont 12 chansons pour à peine plus de trois quart d'heure, un retour à la norme pour un groupe toujours pas comme les autres.
A l'origine, pourtant, les Clash avaient encore prévu un double, qu'ils auraient titré Rat Patrol for Fort Bragg, mais les tourments d'un groupe où tout n'est pas au beau fixe, notamment les prises de bec entre Joe et Mick avec chacun leur idée de ce que le groupe devait devenir qui conduira fatalement au départ de Jones et à la réalisation que Strummer avait besoin de son "frère ennemi" en contrepoids créatif (le fiasco Cut the Crap est là pour en témoigner), Combat Rock sera donc simple, resserré et le mixage (le remixage en fait après le rejet de la version de Mick Jones) confié à l'efficace Glyn Johns qui mène rondement l'affaire, ce n'est pas de ce côté là qu'il faut chercher la faille... Alors, où, justement ? Dans les tensions internes qui ont fini par pourrir l'ambiance au point de nuire à la séminale volonté exploratrice et rebelle, feu brûlant de la genèse des meilleurs moments du quatuor ? Probablement. Mais il reste tout de même moult motifs de  satisfaction sur cet ultime album du vrai Clash. Des singles d'un confondante efficacité déjà, qu'ils rockent bien blanc (Should I Stay or Should I Go) ou groovent bien black (Rock the Casbah) et qui font, tant ils sont bons, oublier le troisième du lot qui n'est qu'une chanson mineure de la formation (Know Your Rights, sympathique au demeurant). Mais ce n'est pas tout parce que si, indéniablement, le répertoire n'est plus de la qualité qu'on attend des "idoles", un bon rock qu'on pourrait croire extrait d'un monde parallèle où Strummer serait Richards et Jaggerà la fois circa 1972 (Car Jamming), une excellente étrangeté où Clash hésite entre pop synthétique et reggae dub tout de même dominant (Straight to Hell), un reggae rock bien troussé sur un texte glaçant (Ghetto Defendant, avec le beat-poet Allen Ginsberg). Le reste ? Chaque morceau a ses bons moments et ses faux-pas. Ca ressemble, en fait, beaucoup aux pistes les plus expérimentales, et souvent les moins réussies, de Sandinista, sauf que c'est un peu mieux, mais juste un peu...
Alors, oui, et même plus de trente ans plus tard on a peine à l'écrire, le Clash de Combat Rock, s'il est encore loin de l'indignité, n'est plus cette bouillonnante machine qui d'un séminal éponyme et de son tout aussi recommandé successeur (Give 'Em Enough Rope) en forme de mètre-étalons punk rock, d'un London Calling en grande ouverture triomphante de la richesse de ses idées, d'un Sandinista qui, ramené à de plus humbles proportions, un double par exemple, comme son devancier, n'aurait pas été loin de le taquiner, c'est un Clash souffrant mais encore volontaire, encore capable de pondre quelques grandes chansons même si, on le sent, on le craint, la fin n'est plus très loin. Conseillé tout de même Combat Rock ? Oui, parce que même un Clash souffrant (et pas agonisant voir rongé par les vers de Cut the Crap), a des trésors à vous offrir et que ses "maladies" sont aussi attirantes que les sordides détails d'un fresque de Jérôme Bosch.

1. Know Your Rights 3:39
2. Car Jamming 3:58
3. Should I Stay or Should I Go 3:06
4. Rock the Casbah 3:44
5. Red Angel Dragnet 3:48
6. Straight to Hell 5:30
7. Overpowered by Funk 4:55
8. Atom Tan 2:32
9. Sean Flynn 4:30
10. Ghetto Defendant 4:45
11. Inoculated City 2:43
12. Death Is a Star 3:13

Joe Strummer– lead vocals, guitars, harmonica, piano
Mick Jones– guitars, vocals, keyboards, sound effects
Paul Simonon– bass, vocals
Topper Headon– drums, piano and bass on "Rock the Casbah"
&
Allen Ginsberg– guest vocals on "Ghetto Defendant"
Futura 2000– guest vocals on "Overpowered by Funk"
Ellen Foley– backing vocals on "Car Jamming"
Joe Ely– backing vocals on "Should I Stay or Should I Go?"
Tymon Dogg– piano on "Death Is a Star"
Tommy Mandel– keyboards on "Overpowered by Funk"
Gary Barnacle– saxophone on "Sean Flynn"
Kosmo Vinyl - vocals on "Red Angel Dragnet"

THE CLASH

SiMoN ToNG
The Verve "Urban Hymns" (1997)
ou "Bitter Sweet Poppery"

Je me souviens que l'enthousiasme de Christophe Basterra fit tellement de bien à lire que je n'hésitait pas longtemps avant d'acquérir ce The Verve revenant, troisième opus d'une formation n'ayant pas encore fait son trou malgré un talent si évidemment au-dessus de la moyenne. Voici donc le billet d'époque publié dans l'excellent mensuel Magic RPM :
"Certains vous diront le contraire, mais, surtout, ne les croyez pas, The Verve a toujours été un groupe extraordinaire.
Et comme tous les groupes extraordinaires les rares, devrait-on préciser , The Verve a côtoyé le meilleur, mais aussi le pire. Le pire ? Un premier album, A Storm Made In Heaven, gâché par un manque d’expérience notoire et une production paresseuse signée pourtant John Leckie. Le meilleur ? Quelques morceaux hypnotiques en singles A Man Called Sun, forcément sublime , des concerts extatiques et surtout, surtout, un deuxième album absolument divin, A Northern Soul quel titre ! , qui mariait les guitares les plus puissantes aux ambiances les plus sombres, porté vers le firmament par une chanson obsédante nommée History. Dans l’Histoire, on a bien cru que The Verve n’y entrerait jamais pour cause de séparation impromptue, due aux mésententes entre un chanteur charismatique, Richard Ashcroft, et un guitariste surdoué, Nick McCabe. On aura donc retenu son souffle pendant deux ans. Heureusement, les deux intéressés ont fini par entendre raison et The Verve est de nouveau réuni, augmenté d’un cinquième membre, pour… le meilleur. Seulement pour le meilleur.
The Verve est sans doute l’un des derniers grands groupes de rock de cette fin de siècle : puissant, romantique, nonchalant, sombre, grandiose, flamboyant, héroïque. En ouverture, le single Bitter Sweet Symphony, tube annoncé qui a ouvert au groupe la voie royale méritée, s’avère être d’une incroyable fadeur face aux titres suivants. A commencer par Sonnet ou The Drugs Don’t Work, deux ballades grandioses et belles à pleurer. De son côté, Catching The Butterfly, insidieux et mystérieux, doit bien être le meilleur morceau que U2 ait écrit depuis le début de cette décennie. Avec Weeping Willow, le quintette renoue avec ce groove lancinant, porté par des arabesques de guitares et un refrain implacable. Ambiances veloutées et mystérieuses, mysticisme mélodique, fureur rock ‘n’ roll incontrôlée le fédérateur Come On , The Verve maîtrise tout. The Verve sait tout faire. The Verve est intouchable...
Alors, oui, un jour, Richard Ashcroft pourra voler."
Un poil excessif tout ceci, peut-être... Mais indéniablement un album totalement réussi, une des plus belles perles du collier britpop.

1. Bitter Sweet Symphony 5:58
2. Sonnet 4:21
3. The Rolling People 7:01
4. The Drugs Don't Work 5:05
5. Catching the Butterfly 6:26
6. Neon Wilderness 2:37
7. Space and Time 5:36
8. Weeping Willow 4:49
9. Lucky Man 4:53
10. One Day 5:03
11. This Time 3:50
12. Velvet Morning 4:57
13. Come On 15:15

Richard Ashcroft– vocals, guitar
Nick McCabe– lead guitar
Simon Jones– bass guitar
Peter Salisbury– drums
Simon Tong– guitar, keyboards
&
Liam Gallagher– backing vocals ("Come On"), claps ("Space and Time")
Mel Wesson– programming
Paul Anthony Taylor– programming
Will Malone– conductor, string arrangements

THE VERVE

DaMoN aLBaRN
Damon Albarn, Afel Bocoum, Toumani Diabaté & Friends "Mali Music" (2002)
ou "Damon in Africa"

On connaît Damon Albarn parce qu'il a revigoré la musique anglaise en partant de la britpop pour arriver (presque) au krautrock, on connaît Damon Albarn pour avoir fomenté un des projets électro-hip-pop les plus fameux de l'univers, on connaît moins le Damon Albarn Tintin musical parti explorer le Mali, une excellente nouvelle captée sur le savoureux Mali Music qui nous intéresse.
Ici, sans jamais tout à fait disparaître d'un mix où sa patte mélodique et ses trucs d'arrangeur influencent ses rencontres africaines, Damon prouve, mine de rien, que sa forte personnalité, si elle sait s'adapter à toutes les circonstances, n'est pas soluble dans la touffeur sub-saharienne. De fait, c'est un peu comme si son personnage de Gorillaz avait décidé de quitter ses petits amis animés pour s'en créer de nouveaux à Bamako. Et comme les nouveaux amis en question ont pour nom, par exemple, Afel Bocoum ou Toumani Diabaté (tous deux croisés chez l'ultime figure tutélaire malienne, le regretté Ali Farka Touré), on sait d'emblée que le projet est en de bonnes mains. Dans la manière, petites jams impromptues captées in vivo puis retravaillées, habillées dans un studio professionnel tout ce qu'il y a de plus classique, c'est à un joli bouquet de chansons tantôt plus africaines, tantôt plus occidentales mais toujours gorgées d'émotion, toujours profondément marquées par leur territoire d'origine. Ceci dit, coordinateur omniprésent, Damon Albarn sait parfois se faire extrêmement discret, cédant bien volontiers le devant de la scène à ses comparses de l'occasion.
Le résultat, au-delà d'espérances pourtant élevées, est un album tout en ambiances et délicatesse, une œuvre d'une rare cohérence et humanité qui, loin de suivre la voix tracée par ses devanciers (de Paul Simonà Peter Gabriel ou David Byrne qui épicèrent leur petit monde d'Afrique), voit Albarn et ses associés de circonstance créer une fusion où le grand continent, et son enclave malienne en particulier, mènent le bal d'une parfaite fusion. Chaudement recommandé.

1. Spoons 5:19
2. Bamako City 4:09
3. Le Relax 3:51
4. Nabintou Diakité 1:46
5. Makelekele 4:24
6. The Djembe 4:34
7. Tennessee Hotel 3:41
8. Niger 3:52
9. 4AM at Toumani's 3:06
10. Institut National Des Arts 4:14
11. Kela Village 3:10
12. Griot Village 1:12
13. Le Mogon 3:51
14. Sunset Coming On 4:14
15. Ko Kan Ko Sata Doumbia on River 1:04
16. Les Escrocs 5:08

Damon Albarn - Bass, Guitar, Hand Drums, Kalimba, Keyboards, Melodica, Percussion, Piano, Vocals 
&
Afel Bocoum
- Choir/Chorus, Guitar, Vocals 
Cass Browne - Drums
Simon Burwell - Bass, Hand Drums, Keyboards, Melodica, Organ, Piano, Vocals, Xylophone 
Yoro Cisse - Monochord, Njarka Fiddle
Junior Dan - Bass
Kassé-Mady Diabaté - Vocals 
Toumani Diabaté - Kora
Nabintou Diakite - Vocals 
Ko Kan Ko Sata Doumbia - Ngoni
Shakar Fani - Drums
Baba Kone - Percussion 
Brehima Kouyaté - Bass 
Neba Solo - Balafon
Lobi Traoré - Guitar, Vocals 
Djurr Tx'allo - Bass, Piano, Xylophone

DAMON ALBARN

DaNGeR MouSe
Gnarls Barkley "St. Elsewhere" (2006)
ou "The Age of Digital Soul"

Comme c'est la chronique qui m'a décidé à acheter l'album n'en ayant entendu que l'emblématique single (Crazy, évidemment !), ce sont les mots d'époque de Stéphane Deschamps (Les Inrocks) qui vont illustrer le tour de force que demeure l'opus originel de Gnarls Barkley :
"Gnarls Barkley est le projet bicéphale et quadrupède de messieurs Brian Burton et Thomas DeCarlo Callaway, alias Danger Mouse et Cee-Lo. Avant même d’avoir sorti le moindre disque, le duo était déjà entré dans la petite histoire pour avoir hissé son single Crazy en tête des charts anglais uniquement via le téléchargement payant. Télé-déchargement, plutôt.
St. Elsewhere est aussi fou que Crazy. Ce disque évoque la découverte en accéléré d’une cinquantaine d’années de musique soul dans un train fantôme de fête foraine, avec deux clowns psychotiques (ou tout au moins psychédéliques) dans le wagon de tête. Le premier morceau s’appelle Go Go Gadget Gospel, il est effectivement influencé par le gospel, mais lâché sur un dance-hall jamaïcain, puis plongé dans une machine à pop-corn. L’influence du gospel est grande sur St. Elsewhere, disque plein de chant. Mais ce gospel est endiablé, défroqué, débauché, catapulté dans l’espace à la rencontre des petits hommes verts. Le saint homme de Gnarls Barkley, c’est Cee-Lo, grand (et gros) chanteur dont la voix d’or pille les mines du roi Solomon Burke. Si on isolait la voix de Cee-Lo du reste du disque, on entendrait un prêcheur fou haranguant ses ouailles jusqu’à la transe. Mais pourquoi on ferait ça ? Pour exister, le saint homme a besoin de son diablotin Danger Mouse, qui lui refile des beats et des arrangements drogués ? une fois aux amphétamines, une fois aux champignons hallucinogènes. Les deux hommes sont insatiables, ils n’ont pas peur des mélanges. Il est impossible de coller une étiquette sur ces chansons qui ne tiennent pas en place. Dans la musique pop au sens XL (peut-être la seule étiquette valable pour Gnarls Barkley), l’habit fait souvent le moine. Cee-Lo et Danger Mouse s’habillent n’importe comment, et ils jouent n’importe quoi, même une reprise osée et très réussie du classique Gone Daddy Gone, composé en 1982 par les héros hillbilly-punk Violent Femmes. Ça ne nous rajeunit pas, mais ça rajeunit le morceau.
Sur The Boogie Monster, on pense à une novelty song de Louis Armstrong. Ailleurs, Gnarls Barkley se dévoile aussi sexy que Prince il y a vingt ans. Ultramélodique et facétieux, pétulant et coloré, Gnarls Barkley rappelle aussi De La Soul. Et pas de doute, c’est de la soul. Au début et à la fin du disque, on entend un cliquetis qui évoque la rotation d’une bobine sur un projecteur. Tout ça, c’était donc du cinéma, une comédie musicale en couleur et en super grand huit.
"

1. Go-Go Gadget Gospel 2:19
2. Crazy 2:59
3. St. Elsewhere 2:30
4. Gone Daddy Gone 2:28
5. Smiley Faces 3:05
6. The Boogie Monster 2:50
7. Feng Shui 1:26
8. Just a Thought 3:42
9. Transformer 2:17
10. Who Cares? 2:27
11. Online 1:48
12. Necromancer 2:57
13. Storm Coming 3:08
14. The Last Time 3:25

Danger Mouse– producer
Cee-Lo Green– vocals
Ben H. Allen– bass, guitar
Eric Bobo– drums
Ced Keys International– piano
Dr. President– keyboards, bass, guitar, organ
Daniele Luppi– bass, Minimoog, organ, synthesizer
Menta Malone– background vocals
David Piltch– bass
Chris Tedesco– trumpet
Eddie Reyes– acoustic guitar
Tomika Walden– background vocals

GNARLS BARKLEY

SynthPop IV: Gloire ! (Troisième Partie, 1984-1989)

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Un petit saut de puce entre la fin du billet précédent et le début de celui-ci, un tout petit mois de rien du tout !, certes, mais il semblerait que la synthpop, en se popularisant, en prenant de la bouteille aussi, prennent des accents de plus en plus riches comme en témoigne la sélection nous amenant jusqu'à la fin de la vague, et la fin des 80s (parce qu'il n'y a jamais vraiment de hasard) !

THe VoiCe
Bronski Beat "The Age of Consent" (10/1984)
ou "Silence Equals Death"

Comme je n'aurai pas dit mieux tout en ayant une expérience tout à fait différente d'un album découvert sur le tard, je laisse la parole à Twilight (Guts of Darkness) qui va vous entretenir d'un authentique chef d'œuvre synthpop un peu plus substantiel que les autres :
"Comme les temps changent...quand on voit la merde que l'on passe aujourd'hui dans les hit-parades des radios ou de certaines TV, comme si faire de la pop était devenu une insulte ou synonyme de bêtise...
Je me revois sur le coup de mes 13 ans lorsque parmi les têtes de classement de l'époque on pouvait trouver un trio avec au chant un petit bonhomme à l'étrange timbre vocal, proche de celui d'un castrat, tel qu'on pouvait le trouver chez Klaus Nomi ou Antony and the Johnson aujourd'hui, qui chantait la détresse des homosexuels obligés de fuir les villes de province pour gagner Londres et espérer y trouver plus de tolérance ('Smalltown boy') ou passés à tabac en raison de leur inclinaison sexuelle ('Why'). Bien sûr, nous ne nous en rendions pas compte alors mais sous couvert de pop, 'The Age of consent' (l'âge légal autorisant les relations gays) et son triangle rose (symbole homosexuel) est un album de souffrance. Il suffit de se pencher sur les textes de Jimmy Sommerville pour comprendre, que ce soit dans 'Why', 'Smalltown boy', 'Screaming'...les thèmes principaux en sont la souffrance et l'incompréhension face au rejet des familles, la violence des contemporains et l'intolérance vis-à-vis des gays. Nulle surprise à trouver une forme de mélancolie bien plus profonde qu'il n'y paraît dans les lignes du décidément culte 'Smalltown boy' mais également dans les accents jazzy de la reprise du 'Ain't necessarily so' de Gershwin ou le calme triste de 'Screaming'. Mais tout l'album ne tourne pas seulement autour de la cause gay. L'excellent 'Junk', sorte de version plus sombre de Soft Cell ou la reprise électro wave du 'I feel love' de Donna Summer (la version en duo avec Marc Almond, ici en bonus, est meilleure encore) sont écrites sur des rythmes plus pêchus et assez typiques d'une pop new wave électronique intelligente telle qu'on la trouvait chez Alphaville, Tears for Fears, Depeche Mode...D'autres chansons sont plus calmes, voir sensuelles ('Heatwave'), mêlant inspirations bluesy, jazzy, cabaret aux bases pop wave du duo. Mais il est clair que la marque de fabrique de Bronski Beatétait cette voix si particulière de Jimmy Sommerville, haut perchée, capable d'atteindre des aigus surprenants et empreinte d'une touche de mélancolie discrète mais profonde. Cela est frappant sur les bonus comme le très gospel 'Memories' ou un 'Puit d'amour' a capella bouleversant. Certes, pour qui ne la supporterait pas, c'est l'univers du trio qui lui ferme ses portes.
Pour ma part, voilà un bon disque pop que j'ai toujours plaisir à réécouter avec nostalgie."
Idem.

1. Why? 4:04
2. It Ain't Necessarily So 4:43
3. Screaming 4:15
4. No More War 3:55
5. Love and Money 5:07
6. Smalltown Boy 5:02
7. Heatwave 2:40
8. Junk 4:17
9. Need-a-Man Blues 4:20
10. I Feel Love/Johnny Remember Me 5:59
Bonus
11. I Feel Love (Medley with Marc Almond) 8:22
12. Run from Love (remix from "Hundreds and Thousands") 8:14
13. Hard Rain (remix from "Hundreds and Thousands") 7:54
14. Memories 2:54
15. Puit d'Amour 1:30
16. Heatwave (remix from "Hundreds and Thousands") 5:44

Steve Bronski - keyboards, percussion
Larry Steinbachek - keyboards, percussion
Jimmy Somerville - vocals
&
Cellos - Beverly Lauridsen, Jesse Levy, Mark Shuman
Choir - The Pink Singers
Congas - John Folarin
Horns - Uptown Horns (Cris Cioe (alto sax & solo, "Love And Money"), Arno Hecht (tenor sax and clarinet solo, "It Ain't Necessarily So"), Hollywood Paul (trumpet) and Bob Funk (trombone))
Tap Dance - Caroline O'connor

BRONSKI BEAT

ReLaX!
Frankie Goes to Hollywood "Welcome to the Pleasuredome" (10/1984)
ou "Synth-Opera"

Il y a ceux qui font dans la mesure, dans la délicatesse et le bon goût et il y a ceux qui n'en font qu'à leur tête quitte à ne pas se faire que des amis, c'est certainement dans la seconde catégorie qu'on trouve Frankie Goes to Hollywood et son magnum opus, Welcome to the Pleasuredome, que va nous évoquer Erwin (Forces Parallèles) :
"Nous voici face au plus bel ovni très identifié de la nouvelle vague. Incontournable, avant-gardiste, visionnaire, la sensation anglaise de l’année 1984 débarque comme il se doit de la ville des scarabées, des docks de Liverpool, cité de musique s’il en est. Quelques années de galère dans le tour club de la ville et le groupe se stabilise autour d’un line up forgé par la voix aisément identifiable de Holly Johnson. Bien entendu, la filiation homosexuelle notoire –Johnson et Rutherford sont gays - est un des éléments clés de leur succès… Non pas que tout le monde soit devenu gay du jour au lendemain, mais nous sommes en pleine éclosion des phénomènes de reconnaissance de cette frange de la population jusqu’alors mise au ban de la société, Rock Hudson vient de décéder du Sida –Holly est aujourd’hui porteur du VIH- , Freddy Mercury assume son rôle avec conviction, l’heure est au combat. Quoi de mieux que cet album à la bizzaroïde peinture Picassienne et une série de hits incomparables pour symboliser cette révolution. L’histoire est en marche !
Car « Relax» déboule en cette fin d’année 1983 avec une vidéo résolument agressive articulée autour du monde gay et de ses excès. La première écoute de ce titre historique surprend toujours. Les interdictions fleurissent de partout –MTV !- mais n’empêchent nullement le titre de truster toutes les premières places des billboards, comme il se doit. Apocalyptique, une tranche d’agressivité que l’on n’aurait pas crû possible en jouant de la New Wave. Le single de cette année 84, assurément.
« Two tribes» prend alors le relais, avec la même débauche de basse surpuissante et ce penchant avéré pour l’agression dans la voix de Holly, superbe performer et désormais figure emblématique des mouvements gay. Là encore la vidéo fait mouche et dépeint les leaders russes et américains en train de s’étriper sur un pseudo ring. Le résultat est à la hauteur et prouve que les mecs ne sont pas que des marionnettes de carnaval, qu’ils ont des trucs « sérieux » à dire. Pas de doute c’est du classique.
Et pour en remettre une couche, voila que nos Frankies sortent un troisième single à l’opposé de ces deux bombes. Il s’agit de l’universel slow « The power of love». D’une douceur étonnante, la vidéo dépeint les scènes de la nativité avec une certaine justesse… On s’attendait à plus de subversion… Finalement ce sont des mecs bien en plus ? En tout cas cette chanson immortelle complète le triptyque des numéros 1 du Billlboard que FGTH sera le seul à atteindre dans les eighties avec cette régularité de métronome.
Et ce n’est pas tout, nous pouvons citer l’antiguerrière « War», sa basse slapée et son rythme étudié pour les dancefloors. L’autoproclamée « Welcome to the pleasure dome»… Le slow « Ferry» ou Holly fait montre d’une belle technique vocale. La jazzy samba « San jose »… Ca part dans tous les sens, et la reprise pêchue de SPRINGSTEEN« Born to run» passe comme une lettre à la poste, on y notera d’ailleurs le superbe solo de basse. Il y a même avec « The ballad of 32» un instrumental Bowiesque.
Sur la seule force de ses trois singles ainsi que des deux autres classiques que sont « War» et « Welcome to the pleasure dome», l’opus ne peut que prétendre à la note maximale. Rajoutons que les musicos ne sont pas des manchots –écoutez la basse omniprésente de Mark O’Toole -, que Holly est un leader de choix, et même si la présence du choriste - ?- Paul Rutherford est inexplicable, le groupe a une gueule terrible. Et c’est ainsi que nous voila avec un des plus grands disques de l’histoire de la musique populaire.
Doit figurer dans toute discothèque qui se respecte.
"
Et avec les bonus de la présente édition Deluxe, c'est encore plus vrai. Foncez !

CD 1 - Album
1. The World is My Oyster (Including Well, Snatch of Fury) 1:58
2. Welcome To The Pleasuredome 13:40
3. Relax (Come Fighting) 3:56
4. War (...and Hide) 6:13
5. Two Tribes 3:28
6. for the victims of ravishment 0:35
7. Ferry (Go) 1:49
8. Born To Run 3:59
9. San Jose (The Way) 3:10
10. Wish (The Lads Were Here) 2:48
11. including the Ballad Of 32 4:49
12. Krisco Kisses 2:58
13. Black Night White Light 4:09
14. The Only Star in Heaven 4:16
15. The Power Of Love 5:31
16. bang 1:09

CD 2 - Bonus
1. Relax (Greatest Bits) 16:59
2. One September Monday 4:49
3. The Power of Love (12 inch version) 9:30
4. Disneyland 3:07
5. Two Tribes (Between Rulers And Ruling) 4:10
6. War (Between Hidden And Hiding) 4:00
7. Welcome To The Pleasuredome (Cut Rough) 5:40
8. One February Friday 5:00
9. The Ballad of 32 (Mix 2) 11:03
10. Who Then Devised the Torment? 0:16
11. Relax (Greek Disco Mix) 6:18
12. Watusi Love Juicy 4:03
13. The Last Voice 1:14

Holly Johnson: lead vocals
Paul Rutherford: backing vocals
Brian Nash: guitar
Mark O'Toole: bass
Peter Gill: drums
&
J. J. Jeczalik: keyboards, programming, software
Andrew Richards: keyboards
Luís Jardim: percussion
Anne Dudley: keyboards, string arrangement on "The Power of Love"
Stephen Lipson: guitar
Steve Howe: acoustic guitar on "Welcome to the Pleasuredome"
Trevor Rabin: guitar, keyboards
Trevor Horn: backing vocals, bass

FRANKIE GOES TO HOLLYWOOD

SyNTH-iNDuSTRy
Cabaret Voltaire "Micro-Phonies" (11/1984)
ou "Bienvenu au Théâtre Monstrueux"
 
La synthpop triomphe alors, forcément, ça donne quelques idées à des formations plus à la marge comme les industrieux de Cabaret Voltaire et leur Micro-Phonies dont EmixaM (X.Silence.net) va nous entretenir :
"En 1984, la synthpop préside dans les charts. Le synthé mis en exergue dès la début des années 70 par Kraftwerk devient prédominant en Angleterre vers 1977/1978. Le punk anglais se mixe avec l'électronique millimétrée allemande ce qui donne naissance au genre synthpop et new wave. Des groupes tels que Tubeway Army, Human League, Depeche Mode ou encore John Foxx se forment et deviennent des superstars en campant les premières places des charts...
De l'autre coté, des groupes beaucoup plus punk décident d'expérimenter ces nouveaux sons afin de créer un genre de musique très abstraite, industrielle et expérimentale. Parmi ces groupes, on peut citer Throbbing Gristle, et bien-sûr Cabaret Voltaire dans leur première période.
Entre 1974 et 1982, Cabaret Voltaire joue sur les sons, les rares synthés, les bandes préenregistrées et le duo guitare/basse passée a la distorsion.
Le groupe comprend alors les membres suivants; Stephen Mallinder (chant, basse, synthé), Chris Watson (synthé, magnéto et effets) ainsi que Richard.H Kirk (guitare, synthé). Après quatre albums de musique abstraite et industrielle (dont un superbe Three Mantras) et quelques EP dans le même style (Extended Play ou 2x45 pour ne citer qu'eux), Chris Watson quitte le groupe en 1982 et laisse le duo Mal/Kirk prendre une nouvelle direction. Après une tournée mondiale en 1982 (qui les emmènera notamment au Japon, voir l'album live Hai), le groupe change de direction sonore et en 1983 avec l'album The Crackdown passent au synthpop/funk industriel.
Après une courte tournée de promo pour The Crackdown (qui verra leur premier et dernier passage en France, novembre 1983), le duo se tourne de nouveau vers la composition afin d'enregistrer un nouvel album studio. Cet album sortira en fin 1984 et baptisé Micro-Phonies. C'est leur plus gros succès commercial a ce jour.
Ce succès est dû a l'arrivée dans les charts indie de deux singles extrait de l'album; "James Brown" et surtout "Sensoria" dont le clip réalisé par Peter Care se verra massivement diffusé par MTV a l'époque et élu meilleur clip de l'année 1984 par le LA Times.
Subjectivement, Micro-Phonies n'est pas le meilleur album de Cabaret Voltaire (cet honneur revient a The Crackdown ex-aequo avec la compilation video Gasoline In Your Eye sortie fin-1985). Cependant, l'album est bien mixé et la continuité est bien présente. "Do Right" ouvre l'album sur une rythmique très eighties avec une ligne de synthbass très représentative de l'époque. On retrouve dès ce premier morceau l'usage quasiment abusif de samples, marque de fabrique chez Cabaret Voltaire (et de toutes les productions Richard H Kirk). "The Operative", second morceau rappelle Joy Division dans une version plus funky et industrielle a la fois. Il faut alors rappeler que les Cabs et que les membres de Joy Division/New Order étaient amis... (cf leur demo commune de 1980 avec Rob Gretton a la voix...) "Digital Rasta" est une sorte de petite blague sympathique de Cabaret Voltaire aux mélanges des genres qui avait lieu a cette époque ; le morceau reprends la structure d'un morceau de reggae/dub a la sauce electro/industriallofunk des Cabs, ce qui a un effet surprenant car assez bon. Vient ensuite "Spies In The Wires", hymne funk froid et sombre à l'espionnage omniprésent dans le contexte de guerre froide. La face A se termine sur "Theme From Earthshaker". Ce morceau devait être le thème principal du second film de Cabaret Voltaire qui ne fut finalement pas tourné (le premier étant Johnny Yesno, projet de 1981/82 qui a abouti a un film d'une heure et demie sur l'aliénation de la société par le travail d'usine, le film est visible sur youtube). Le morceau sonne donc comme un thème de film d'horreur style John Carpenter.
La face B démarre sur l'autre grand succès public des Cabs a cette époque, le morceau "James Brown" qui sans contenir de samples du maitre fait quand même sentir une maitrise de l'electro funk industrielle. L'usage de samples de trompettes distordues et distantes au dessus d'un méli-mélo de synthbass funky permet de créer une rythmique dansante et mémorable. "Slammer", plus calme, reste dans la direction du funk industriel mais sans être aussi marquant que le morceau précédent. "Blue Heat" est un morceau sorti sur la face B du single de "Sensoria". Bien rythmé et très typé new wave, il manque un je-ne-sais-quoi a ce morceau pour frapper juste. L'album se termine sur le gros hit des Cabs (le plus gros avec "Nag Nag Nag"), "Sensoria" qui reprend quasiment les mêmes patterns et éléments mélodiques de "Do Right" avec un changement dans la rythmique et la ligne de basse. On retrouve d'ailleurs les même samples "do right, go to church, always work" qui dénoncent bien évidemment la quasi-dictature des groupes extremistes chrétiens et autres sectes...
En conclusion, Micro-Phonies est un bon album dans l'ensemble. Il faut rappeler que c'est le seul véritable album d'électropop de Cabaret Voltaire. Après une tournée mondiale entre fin 1984 et début 1985, les Cabs reviennent a l'électro-industriel avec leur EP Drinking Gasoline (accompagnant la VHS "Gasoline in your Eye" citée plus haut) et surtout l'album suivant, The Covenant The Sword And The Arm of The Lord (qui est nettement moins bon)."
Alors, l'indus à la sauce Synth ? Ca ne se manque pas, voyons !

1. Do Right 6:43
2. The Operative 3:13
3. Digital Rasta 5:39
4. Spies in the Wires 3:19
5. Theme from Earthshaker 2:48
6. James Brown 4:58
7. Slammer 5:38
8. Blue Heat 4:02
9. Sensoria 3:58
Bonus
10. Sensoria (12" Mix) 7:52
11. Blue Heat (12" Mix) 7:25

Richard H. Kirk - Synthesizers, programming & guitars
Stephen Mallinder - Vocals, bass
Roger Quail - Drums
Mark Tattersall - Percussion
Eric Random - Tablas

CABARET VOLTAIRE

CooL-HaND NiK
Nik Kershaw "The Riddle" (11/1984)
ou "Synth Idol"

C'est un peu le syndrome Howard Jones part II, un beau gars avec le look, les chansons et les arrangements qui collent au plus près des goûts d'alors... Sauf que Nik Kershaw a sans doute beaucoup plus à dire et ne cache que maladroitement (youpi !) des racines qui viennent d'avant, quand les synthétiseurs étaient déjà rois mais que les cheveux étaient longs et les chansons itou.
Parce qu'il y a, chez Nik, plus que chez tout autre représentant de la hype générationnelle, une écriture d'un extrême classicisme qui, malgré des arrangements tout à fait de leur époque, reste immensément détectable, en plus d'un bon goût compositionnel qu'il est temps de démontrer. Ca commence en fait dès Don Quixote qui, malgré ses boîtes à rythmes, sa basse funky et ses cuivres synthétiques est nettement plus substantiel et cherché que la moyenne synthpop des octantes, et tant pis si un refrain un peu léger et d'hispanisants oripeaux pas forcément toujours du meilleur effet viennent légèrement noircir le tableau, on est nettement plus dans la tradition d'un Peter Gabriel, d'un Brian Eno voire d'un Robert Fripp que dans une bête relecture pop des préceptes kraftwerkiens. A partir de là, il n'y a pas de surprise à constater que la palette de Kershaw, d'un poil de rock à guitares comme dans You Might ou Wide Boy, d'une esthétique new wave classieuse pas sans rappeler le Japan de David Sylvian (Wild Horses, Save the Whale... jusque dans le maniérisme mélodique du chant de Nik), d'un petit détour vers la Jamaïque (Roses et ses accents reggae bien gérés) ou, évidemment !, d'une adaptation maline d'influences celtiques bienvenues justement couronnée de succès (The Riddle, énorme tube !), a un arsenal à sa disposition que peu des ses condisciples peuvent revendiquer et qui n'est que confirmée dans les inédits de cette version Deluxe dont le délicieux piano/voix So Quiet.
Tout ça pour de la musique légère à visée ouvertement commerciale se morfondront certains. Et alors ? Quand c'est aussi bien fait, et à condition de pouvoir encaisser les différents gimmicks 80s forcément présents, il n'y a pas à bouder son plaisir.

CD 1 - Album
1. Don Quixote 4:55
2. Know How 4:52
3. You Might 3:17
4. Wild Horses 3:59
5. Easy 4:13
6. The Riddle 3:52
7. City of Angels 3:56
8. Roses 3:58
9. Wide Boy 3:28
10. Save the Whale 6:02

CD 2 - Bonus
1. Roses (Live) 4:45
2. The Riddle (Extended) 5:12
3. Know How (Live) 4:54
4. Don Quixote (Extra Special Long Mix) 8:44
5. City Of Angels (Live) 3:59
6. So Quiet 3:13
7. Wild Horses (Live) 3:59
8. Wide Boy (Extended Mix) 5:10
9. You Might (Live) 3:31
10. Don't Lie 3:55
11. Save The Whale (Live) 6:05

NIK KERSHAW

BiG HaiR!
Tears for Fears "Songs from the Big Chair" (02/1985)
ou "Big Sound"

C'est un peu la queue de la comète new-wave, un peu l'apparition d'une nouvelle vague pop parce que, si Tears for Fears ne furent pas de ces météoriques succès, il y a une raison, ils ont du talent quelque soit les atours dont ils usent pour leurs albums, comme sur ce classique, ce Songs from the Big Chair des mid-80s, un triomphe de l'époque jusque dans les arrangements capillaires discutables des deux membres...
Deux ans plus tôt, la formation, encore quatuor avec, en sus d'Orzabal et de de Smith (le premier également principal compositeur), un claviériste (Ian Stanley) et un batteur (Manny Elias), a fait une remarquée apparition avec un premier long-jeu, l'ambitieux et réussi The Hurting, et quelques singles, Mad World, depuis re-popularisé par Gary Hughes sur la BO de Donnie Darko, Change et Pale Shelter qui, s'incrustant toutes trois dans le Top 10 d'Outre-Manche, lancèrent une prometteuse carrière. On y imagine la pression quand il fut temps d'accoucher d'un successeur mais, tranquilles et sûrs de leur fait, n'hésitant pas à marquer une très nette évolution voire une transformation, les membres de Tears for Fears convoquent le gotha des musiciens de studio pour réaliser leur vision. Dans les faits, ça donne un album nettement moins nerveux que son prédécesseur où, des un Shout inaugural promis à une évidente carrière radiophonique (qui continue toujours aujourd'hui) on comprend que ces gars-là sauront satisfaire au-delà des plus folles expériences. La suite, d'un The Working Houréthéré émaillé d'intervention saxophoniques aussi surprenantes que bienvenues (par Mel Collins, de chez King Crimson, oui !, et Will Gregory) et à l'emballage rythmique (la participation de Jerry Marrota aux percus n'a pas dû nuire) absolument passionnant à décortiquer, à un Everybody Wants to Rule the World tube immédiat en plus d'être une chanson excellemment troussée, un cinématique et funko-percussif Mothers du plus bel effet, un I Believe délicieusement cotonneux et jazzy où s'exprime parfaitement la personnalité vocale rêveuse de Curt Smith, et, évidemment, puisque c'est un autre hit, à un très accrocheur Head Over Heels qui s'imprime immédiatement dans les mémoires. Comme en plus, on ne rechigne pas à déguster les bonus de la présente édition, il n'en faut pas plus pour applaudir franchement la performance.
Produit par l'ex-Adam and the Ants, qui en était aussi le producteur d'ailleurs, Chris Hughes, totalement caractéristique de son temps et pourtant étonnamment peu daté aujourd'hui (peut-être parce que les performances instrumentales, du groupe comme de ses invités, y sont particulièrement soignées), Songs from the Big Chair est plus qu'un succès jauni, une galette toujours chaudement recommandé aux amateurs d'une pop rock finement exécutée et instrumentalement développée (dans l'esprit du So de Peter Gabriel ou du Once Upon A Time de Simple Minds).
Tears for Fears en 1985 ? Ils avaient tout bon !

1. Shout 6:32
2. The Working Hour 6:30
3. Everybody Wants to Rule the World 4:10
4. Mothers Talk 5:09
5. I Believe 4:53
6. Broken 2:38
7. Head over Heels/Broken (Live) 5:01
8. Listen 6:48
Bonus
9. The Big Chair 3:21
10. Empire Building 2:52
11. The Marauders 4:16
12. Broken Revisited 5:16
13. The Conflict 4:05
14. Mothers Talk (U.S. remix) 4:13
15. Shout (U.S. remix) 8:02

Roland Orzabal - guitar, keyboards, lead vocals, grand piano on 5, vocal styling on 8, bass synth and LinnDrum Programming on 1
Curt Smith - bass guitar, vocals (lead vocals on 3 and 8)
Ian Stanley - keyboards, synths, LinnDrum programming, arrangements on "Listen"
Manny Elias - drums
&
"Shout": Sandy McLelland - backing vocals, Chris Hughes - drums
"The Working Hour": Jerry Marotta - percussion, Will Gregory - saxophone solos, Mel Collins - saxophone, Andy Davis - grand piano
"Everybody Wants to Rule the World": Neil Taylor - second guitar solo, Chris Hughes - drums and MIDI programming
"Mothers Talk": Stevie Lange - backing vocals
"I Believe": Will Gregory - saxophone
"Broken": Neil Taylor - guitar solo
"Head over Heels": Sandy McLelland - backing vocals, Andy Davis - grand piano, Annie McCaig - backing vocals, Marilyn Davis - backing vocals
"Listen": Marilyn Davis - operatic vocal

TEARS FOR FEARS

L'auTRe aSie
China Crisis "Flaunt the Imperfection" (1985)
ou "Finding Direction"

Comme l'excellent Gérard Bar-David a eu la bonne idée d'ouvrir un blog où il archive ses travaux passés dans la presse rock française, Best en particulier, en plus de continuer son travail d'explorateur, voici une chronique parue dans le numéro 203, juin 1985, de Best justement du Flaunt the Imperfection des synthpoppers de China Crisis :
"Voici trente ans exactement sortait ma kronik du troisième et brillant LP du combo pop de Liverpool China Crisis. Fan de Steely Dan, dont le guitariste Walter Becker est aux commandes de la production, j’avais craqué sur ce « Flaunt The Imperfection» aux irrésistibles accents du duo Donald Fagen-Walter Becker. Trois décennies plus tard, ce joyeux joyau pop n’a pas pris l’ombre d’une ride.
En écrivant ces lignes pour BEST cet été 85, j’ignorais encore que deux mois plus tard je me retrouverais à bord d’un Boeing 747 à destination de San Francisco où les British de China Crisis démarraient leur première tournée Américaine. En attendant de retrouver ce reportage vintage dans votre Gonzomusic favori, voici la chronique de leur LP telle que publiée dans le numéro 203 du mensuel BEST :
Tiens, le nouveau China Crisis est produit par Walter Becker. Son cristallin, perfection assurée, transparence de l’émotion instrumentale, je n’ose y croire. Serait-ce LE Walter Becker, héros du Steely Dan de mon adolescence? Eh oui, après le split du Dan, tandis que Donald Fagen nous balançait son LP solo, Walter entamait sa traversée du désert. Profitant des leçons du génial Gary Katz, le voici réalisateur de China Crisis. Si le mot suave a encore un sens aujourd’hui dans la musique, c’est bien grâce à Steely Dan, les jusqu’au-boutistes de l’empire du son. Plus loin, plus fort, plus intense, Becker adapte la technique du Dan aux petits China Crisis et ce troisième LP éclipse largement les précédents. Pour ce groupe aimable avec ses, titres à tiroirs, l’effet Becker est une terrible mutation. La petite formation liverpuldienne se retrouve projetée sur le devant de la scène. « Flaunt The Imperfection» est une pièce d’orfèvrerie aussi rare dans nos années technologiques qu’une rose des sables chez Interflora. Sans un seul nuage, le ciel limpide de cet album brille de tous ses titres après l’éblouissement initial de « Black Man Ray», le premier single. Beckeréclipse ses confrères et même son faux homonyme Arthur. Versant plus pop du retour anglais à la fraîcheur soft, cette « Crise Chinoise» apporte là une sacrée contribution pour surmonter la crise d’inspiration britannique.
"
Voilà, vous en savez assez pour plonger sans la moindre crainte !

1. The Highest High 4:16
2. Strength of Character 2:50
3. You Did Cut Me 4:18
4. Black Man Ray 3:39
5. Wall of God 5:32
6. Gift of Freedom 4:38
7. King in a Catholic Style 4:32
8. Bigger the Punch I'm Feeling 4:21
9. The World Spins, I'm Part of It 4:12
10. Blue Sea 4:46

Gary Daly– vocals, synthesizer
Eddie Lundon– guitar, vocals
Walter Becker– synthesizer, percussion
Gary "Gazza" Johnson– bass
Kevin Wilkinson– drums, percussion
&
Tim Renwick - all guitar solos

CHINA CRISIS

MiNoR ToMS
Sigue Sigue Sputnik "Flaunt It" (03/1986)
ou "Les Escrocs"

Juste à côté de la synthpop, il y eut des exemples d'expérimentations tentant de recycler le rock avec un surplus de rock additionné. C'est ainsi qu'arriva Sigue Sigue Sputnik, une bande de talentueux escrocs auteurs d'un cyber-glam pseudo-post-apocalyptique ont Twilight (Guts of Darkness) va nous détailler la recette :
"Sigue Sigue Sputnik a failli être un groupe génial...Oui, oui, j'en vois déjà qui rient dans la salle...Laissez-moi donc poursuivre...
Nous sommes en plein milieu des 80's, le punk se veut mort, la new wave est en train de devenir...oui, le mot magique, 'devenir'...le milieu des 80's est une période de construction et de devenir; l'informatique est en plein boum, les cds commencent à sérieusment concurrencer le vinyl, l'économie change... bref, beaucoup de modèles établis chancellent, même si peu de personnes le perçoivent...Voilà que débarque une bande d'allumés qui semblent à la fois sortis de Blade Runner et Mad Max, puant l'américanisme le plus décadent alors qu'ils sont anglais...Oui, riez si vous voulez, Sigue Sigue Sputnik s'annonce comme un groupe punk d'un genre nouveau. Philosophiquement 15 ans trop en avance sur Marilyn Manson et musicalement 15 ans trop en retard sur Suicide, le groupe le paiera très cher...en partie de par sa faute, mais aussi, j'en reste convaincu, de par sa place dans l'histoire du rock.
Bref, explications: bien avant Manson, nos loustics ont compris qu'une nouvelle forme de société est en train d'émerger, toute d'excès et de contradictions, pas toujours positifs d'ailleurs...Dans l'équipe se trouve un certain Tony James, ex-membre d'un groupe punk anglais de seconde zone, Generation X...dont le chanteur, un certain Billy Idol, fera la brillante carrière que l'on sait...Tony, comme son compère Billy, a vite compris l'impasse du punk, mais contrairement à son collègue qui se sent comme un poisson dans l'eau dans certains clichés du rocker pur et dur qui restera à jamais insoumis, il cherche autre chose. Cette société, au lieu de la dénoncer sans succès, son nouveau projet, Sigue Sigue Sputnik, va l'incarner à outrance, en explorer tous les excès, devenant la personification ultime de tout ce qui est critiqué...Débarque une bande de punks aux crêtes roses, vêtus de vinyl, chantant l'âge coca-cola, la consommation à l'extrême, l'explosion de l'informatique et la bisexualité...Musicalement, nos lascars vont opter pour une ligne épurée à l'extrême à la Suicide, basse électro uniforme, presque similaire sur tous les morceaux, un rythme ultra binaire (produit par deux batteurs, là où une boîte à rythmes eut suffi !), un chant scandé plus que chanté, déformé par des tonnes d'effets, quelques lignes de guitare rock'n'roll pour la forme et des millions de samples (de Bachà des extraits de téléjournal)...
Ce n'est pas tout, Sigue Sigue Sputnik pousse l'outrecuidance jusqu'à introduire des plages de pub entre chaque chanson, déforme les classiques du rock, multiplie les déclarations sulfureuses...Le reste appartient à l'histoire; produit par Giorgio Moroder (tout de même !), le groupe se voit décrié de partout, organise une première tournée qui s'avère un flop retentissant...bref, tout pour devenir culte ! Oui, mais voilà, comme certains poètes l'ont dit, c'est dans la chute que l'on reconnait la grandeur d'un homme. Or, Sigue Sigue Sputnik, au lieu de persévérer dans leur voie extrême et assumer leur satut de groupe punk du XXIème siècle va tout gâcher avec un second disque désastreux, produit par les faiseurs de tubes de l'époque, Stock, Waterman et Aitken (à qui l'ont doit des infections comme Kylie Minogue, Rick Astley, etc), détruisant d'un seul coup une réputation de groupe maudit qui eut pu faire leur renommée...
Reste ce premier album génial, 'Flaunt it', personnification des excès des 80's et des questions en devenir, avec des tubes comme 'Love missile F1-11', '21st century boy' ou 'Sex, bomb boogie'...à consommer sans modération !"
Testez-le, mais testez-le vous dis-je !

1. Love Missile F1-11 (Re-Recording Part II) 3:49
2. Atari Baby 4:57
3. Sex-Bomb-Boogie 4:48
4. Rockit Miss U·S·A 6:08
5. 21st Century Boy 5:10
6. Massive Retaliation 5:02
7. Teenage Thunder 5:17
8. She's My Man 5:37

Martin Degville - vocals
Tony James - synth guitar
Neal X - electric guitar
Ray Mayhew - drums
Chris Kavanagh - drums
Miss Yana Ya Ya - special effects

SIGUE SIGUE SPUTNIK

Nu-MoDe
Erasure "Wonderland" (05/1986)
ou "Out of the Closet"

Passé par Depeche Mode, par Yazoo, voici enfin Vince Clarke dans le projet qui tiendra le choc des ans, et qui continue toujours aujourd'hui d'ailleurs, son duo avec le vocaliste Andy Bell, Erasure.
Le programme ? Une synthpop aux accents soul pas sans rappeler le précédent projet de Clarke sauf qu'à la voix féminine d'Alison Moyet s'est substituée celle, souvent androgyne, de Bell... Et puis c'est tout parce que force est de constater que si Clarke et son nouveau partenaire ont réussi une vraie belle pièce de pop sautillante articulée par des synthés totalement 80s et des beats juste dansants ce qu'il faut pour ne surtout pas venir interférer avec la verve mélodique et compositionnelle du duo tout en flattant les envies de déhanchements de jeunes britanniques en demande. Bêta pour autant Wonderland ? On ne va pas se mentir, un peu mais tellement glorieusement troussé, tellement immédiatement addictif qu'on ne le voudrait surtout pas autrement. Il faut dire aussi que le partenaire de jeu de l'ex-Depeche Mode possède un organe qui, s'il ne démontre pas encore toute l'étendue de sa palette, a tout pour séduire comme démontré, par exemple, sur le plus lent et atmosphérique Cry So Easy.
Et donc, avec des singles, pas d'énormes succès à leur sortie, aussi savoureux que le joyeux Who Needs Love Like That ou l'irrésistible rengaine sensualo-kitsch Oh l'Amour, Erasure emballe sa première petite affaire avec un naturel et une facilité qui augurent de lendemains radieux qui ne tarderont d'ailleurs pas à arriver. Recommandé.

1. Who Needs Love Like That 3:17
2. Reunion 3:24
3. Cry So Easy 3:35
4. Senseless 3:26
5. Heavenly Action 3:26
6. Say What 3:56
7. Love is a Loser 3:01
8. March on Down the Line 3:44
9. My Heart... So Blue 4:30
10. Oh L'amour 3:24
Bonus
11. Who Needs Love Like That (The Love That Mix Version) 6:09
12. Oh L'amour (The Funky Sisters Remix) 7:06

Andy Bell - vocals
Vince Clarke - musics

ERASURE

LaTeR oN...
Pet Shop Boys "Actually" (09/1987)
ou "Les derniers Géants"

Ce sont probablement les derniers géants de la synthpop, ceux qui donnèrent au genre ses "palmes académiques" aussi tant il est vrai que les Pet Shop Boys non seulement maintiendront le genre dans une période creuse mais sauront construire dessus une odyssée synthétique d'une variété et d'une richesse qui laisse pantois.
Parce que, présentement, les PSB réussissent le double challenge de faire un authentique album de dance music plein de pop et une œuvre ambitieuse. C'est évident dès la pièce d'ouverture, One More Chance, où, entre refrain entêtant et couplets quasi-expérimentaux sur un beat qui fleure bon les excès estivaux de jeunes anglais en goguette à Ibiza, mais avec un de ces ponts doux-amers et un de ces décrochages club  dont Tennant et Lowe on le secret... Les PSB, quoi ! Mais les PSB plus ultra par rapport à leur inaugural long-jeu, Please, qui pour plus simple n'en était pas moins un premier palier nécessaire au développement de la paire. Assumant totalement un attachement au passé d'ailleurs présent, si évidemment modernisé à l'aulne des possibles de la décennie en cours, non seulement dans une faconde mélodique assurément traditionnaliste et des arrangements empruntant autant à la soul des 60s qu'aux comédies musicales discoïdes des 70s qu'à de très traditionnels songwriters britanniques sans doute mais surtout étatsuniens (il y a définitivement du Cole Porter et du Rodgers et Hammerstein chez ces deux garçons biens sous tous rapports, écoutez It Couldn't Happen Here si vous ne me croyez pas).
Donc la palette s'élargit, et de belle façon, et comme en plus les singles de l'exercice, le délicieusement théâtral et vicieux It's a Sin et le so soul What Have I Done to Deserve This? avec, excusez du peu !, Dusty Springfield venu pousser la chansonnette, classe !, sont deux bombes du genre (synthpop, vous suivez ?) et que le reste est une impeccable collection sur laquelle on gigote avec une petite larme au coin de l'œil (on citera en particulier le magistral Kings's Cross de conclusion, la tête dans les nuages), la marque de fabrique des PSB, il n'y a pas à détailler Actually plus avant pour en recommander chaudement l'écoute appliquée et répétée, parce que les PSB, ce sont des artistes, des vrais !

1. One More Chance 5:30
2. What Have I Done to Deserve This? 4:18
3. Shopping 3:37
4. Rent 5:08
5. Hit Music 4:44
6. It Couldn't Happen Here 5:20
7. It's a Sin 4:59
8. I Want to Wake Up 5:08
9. Heart 3:58
10. King's Cross 5:10

Neil Tennant
Chris Lowe
&
Andy Richards– Fairlight CMI and keyboard programming on tracks 1, 4, 5, 7 and 9
Dusty Springfield– guest vocals on track 2
J.J. Jeczalik– Fairlight CMI programming on track 3
Gary Maughan– additional programming on track 3
Angelo Badalamenti– orchestra arrangement on track 6
Blue Weaver– Fairlight CMI programming on track 6
Adrian Cook– programming on track 8


PET SHOP BOYS
THe LeGeND LiVeS oN
New Order "Technique" (1989)
ou "Statuesque"

On ne pouvait décemment pas finir sans évoquer un des groupes majeurs de la synthpop qui, même quand la musique qu'il pratique se démode, continue de trouver de nouvelles solutions pour lui garder tout son intérêt. Voici donc Technique, 5ème album de New Order, d'après les mots de Seijitsu (Forces Parallèles) :
"L’acid house, tout est parti de là.
L’impact que cette musique provoqua sur l’Angleterre fut sans précédent dans son histoire musicale. Elle fut le terreau fertile pour bien des formations électroniques qui débuteront leur vocation grâce à ça (le plus étonnant étant de constater que bien de ces grands noms comme LFO, APHEX TWIN et AUTECHRE s’intellectualiseront de plus en plus pour être à l’image de leur label : Warp). Pourtant, la popularisation de ce sous genre vient surtout des groupes de rock. Il est vrai qu’il y a eu 808 STATE et THE KLF, mais ces types étaient pas loin d’être des punks (notamment THE KLF en réalité) et ce fut surtout NEW ORDER qui fut l’ambassadeur de cette dance music auprès du public rock.
Technique est donc l’étape supplémentaire pour confirmer l’importance des Mancuniens sur le son électro rock qui allait se développer à l’avenir. Quoi de mieux pour enregistrer un tel disque que de se ressourcer dans un des temples de l’hédonisme house ? Allez hop ! Direction Ibiza pour le groupe qui ne s’est pas fait prier pour concocter son 5ème album là-bas. On imagine bien la bande se prélasser au soleil la journée puis fureter entre les boites de nuits et le studio pour s’acquitter de ce skeud.
Technique est similaire à Brotherhood sur un point : il est toujours schizophrénique mais plus éclaté. Les gars (et la fille) étant partagés entre une dance efficace avant tout et une new wave élégante portée par la basse magique de Peter Hook. On ressent bien que plusieurs fortes personnalités essayent de mettre chacune leur grain de sel. Car on assiste au mélange des différents visages de leur musique, cela renforce encore plus la confusion. Ce qui tombe bien, car l'album est à l’image de sa pochette : irréel, kitsch et coloré.
L’enchaînement entre « Fine Time» et « All the Way» est criant de vérité. Le premier étant un pur titre house délirant au groove imparable (on peut y entendre des bêlements de chèvre, des bruits de pistolet laser… Tout y passe) et le second une perle new wave délicate où ses inoubliables claviers se font une réponse évidente au « Just Like Heaven» des CURE.
A l’exception de « Vanishing Point», qui injecte un chouia de leur mélancolie malgré son beat dansant (une mélancolie qui va s’étendre sur cette conclusion « Dream Attack» qui sent la gueule de bois, donc signifiant que la fête est terminée), NEW ORDER jongle avec sa personnalité pop un poil désenchantée et sa tentation de faire danser les gens. Ce qui en fait évidemment leur disque le plus haï des fans de la première heure et le préféré des personnes qui n’aiment pas le post-punk. A vous de voir dans quelle catégorie vous vous situez.
En dehors de ces considérations subjectives, Technique ne fait pas seulement date dans leur discographie en raison de sa qualité et de sa personnalité, mais parce qu’il est l’un des premiers jalons de cette ère acid house rock qui connaitra son fameux pic en 1991 (grâce à Screamadelica qui atomisera le genre par la même occasion). Un grand témoignage de cette période de fêtes sans fin où l’ecstasy commençait à se répandre telle une trainée de poudre.
Il reste à savoir pourquoi cette sortie était aussi fun. Pour fêter la fin imminente du règne de Margaret Thatcher ? Pour que NEW ORDER puisse conclure la décennie de manière magistrale avant qu’une longue traversée du désert ne pointe le bout de son nez ? Et si ce n’était pas un peu des deux ?
"
Voici qui conclut l'exploration de la synthpop des années 80, la suite s'intéressera... à la suite, évidemment. En attendant, vous avez du synthétiseur sur la planche !

1. Fine Time 4:42
2. All the Way 3:22
3. Love Less 2:58
4. Round & Round 4:29
5. Guilty Partner 4:44
6. Run 4:29
7. Mr. Disco 4:20
8. Vanishing Point 5:15
9. Dream Attack 5:13

Bernard Sumner– vocals, guitars, melodica, synthesizers and programming
Peter Hook– 4 and 6-stringed bass, electronic percussion, synthesizers and programming
Stephen Morris– drums, synthesizers and programming
Gillian Gilbert– synthesizers and programming, guitars

NEW ORDER

Collection Hétéroclite #4

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Une nouvelles collection hétéroclite ! De la musique tous azimuts et dans tous ses états (ou presque) ! Et, pour le coup, le test d'une nouvelle formule* avec des billets plus courts mais tous originaux (parce que c'est bien d'emprunter mais c'est mieux de faire soi-même)... A vos marques... Prêts ? Enjoie !
* sur laquelle j'attends votre retour.

JaZZ TRiP
John Coltrane "Om" (1965)
ou "Spirits in the Sky"

Le plus gros trip de John Coltrane, un album conspué par certains comme un gros n'importe-quoi juste éclairés de quelques bulles d'inspiration (le solo de McCoy Tyner vers la 13ème minute par exemple)... Injuste. Injuste parce que ce trip vaut franchement le détour, parce que l'association de Coltrane avec un de ses disciples les plus doués, Pharoah Sanders, aboutit à un impressionnant mur du son saxophonique, parce que l'élan mystique qui habite l'œuvre en fait un digne successeur d'A Love Supreme certes moins inspiré, moins essentiel mais nullement indigne. Alors, non, ce n'est pas une œuvre aisée, que, 29 minutes durant (en une seule pièce sur cette excellente édition) ont est violenté, puis rassuré, puis bousculé encore, poussé dans des limites que seule le jazz "free form" sait atteindre. Parce qu'en plus d'une expertise instrumentale certaine, comparable à celles des plus beaux exécuteurs du répertoire classique, il y a cette fureur mystique, cette pulsion divine qui fait la différence. Et fait de Om peut-être pas un immense classique mais assurément un essentiel à tout amateur de jazz en liberté et donc de ce Coltrane-ci qui, avec Ornette Coleman ou Cecil Taylor, explosa toutes les restrictions formelles du genre jusqu'à faire se demander à certains si de jazz il était encore question. Qu'importe, en vérité, c'est du chant d'anges iconoclastes dont il s'agit.

1. Om 28:56

John Coltrane - tenor and soprano saxophone
Pharoah Sanders - tenor saxophone
Donald Rafael Garrett - double bass and clarinet
Joe Brazil - flute
McCoy Tyner - piano
Jimmy Garrison - bass
Elvin Jones - drums

JOHN COLTRANE

MiCK aT THe MoVieS
Performance "Original Motion Picture Soundtrack" (1968)
ou "Beat Sounds"

Même si vous n'avez pas vu le film (qui n'est pas si mauvais, d'ailleurs), vous pouvez vous pencher sur la musique. Parce qu'il y a à faire avec la belle sélection assemblée par Jack Nitzcheégalement auteur de la majorité des pistes avec de beaux invités. De beaux invités à commencer par l'acteur du film en la personne de Mick Jagger venu distiller un morceau des Stones qui ne veut pas dire sans nom mais qui, bon gros rock bluesy bien vicieux, ne trompe personne (encore moins quand on connaît son origine chez les Pierres qui Roulent). Le reste, absolument typique de cette fin de la seconde moitié des années 60, va d'un Randy Newman qui n'a jamais rocké aussi fort (Gone Dead Train), à l'invitation des révolutionnaires Last Poets (Wake Up Niggers, proto-hiphop aussi essentiel qu'un Gil Scott-Heron débutant), à une série d'instrumentaux où blues, score orchestral et tentations world music (indiennes en particulier) viennent tisser l'ambiance de l'objet filmique mais aussi donner à l'auditeur dépourvu d'images quelques jolies piécettes où la maîtrise d'instrumentistes bien choisis (de Ry Cooderà Lowell George en passant par Russ Titelman) complète aptement les mélodies. Performance ? Une bande son qu'on recommande !

1. Gone Dead Train (Randy Newman) 2:56
2. Performance (Merry Clayton) 1:49
3. Get Away 2:09
4. Powis Square 2:25
5. Rolls Royce and Acid 1:50
6. Dyed, Dead, Red (Buffy Sainte-Marie) 2:35
7. Harry Flowers 4:03
8. Memo from Turner (Mick Jagger) 4:08
9. Hashishin (Buffy Sainte-Marie) 3:39
0. Wake Up, Niggers (The Last Poets) 2:47
11. Poor White Hound Dog (Merry Clayton) 2:50
12. Natural Magic 1:40
13. Turner's Murder (Merry Clayton Singers) 4:15

Original music by Jack Nitzsche
Conductor: Randy Newman
Singers: Mick Jagger, Merry Clayton, Buffy Sainte-Marie
Santur: Nasser Rastegar-Nejad
Moog synthesiser: Bernard Krause
- Music performers
Ry Cooder - guitar
Amiya Dasgupta - sitar
Lowell George - guitar
Milt Holland - drums and percussion
Gene Parsons - drums and guitars
Russ Titelman - percussion
Bobby West - bass

JACK NITZSCHE

PHaSe 2
T.Rex "Electric Warrior" (1971)
ou "Top of the Glam"

Electric Warrior est l'album de la confirmation, et du triomphe !, d'une transformation entamée un album plus tôt (l'éponyme de 1970) par un beat-poet folkeux à fleurs se réincarnant idole glam rock à l'implacable sens de la chanson qui fait mouche chez les jeunesses britanniques, encore plus fort que Bowie, rien que ça ! Avec, encore et toujours, Tony Viscontià la console (on notera que MarcBolan a travaillé avec l'ingé-son avant son ami/concurrent aux yeux vairons), sur Electric Warrior, un T.Rex cette fois-ci plus groupe que duo se débarrasse de ses derniers tics hippies pour prendre la pleine mesure de son potentiel commercial dans un rock léger et post-adolescent qui commence sérieusement à s'installer. Opportunisme ? Peut-être un peu, mais pas plus qu'un Bowie par exemple, mais surtout quelle claque, quelle classe ! Une classe qui sépare Bolan et son tyrannosaure de la masse qui, peuplée d'aimables formations tout de même fort peu substantielles (Sweet, Slade, Mud, etc.), parait souvent plus racoleuse qu'autre chose. Parce que Bolan sait jouer de sa classieuse androgynie et de son "know-how" compositionnel (rappelons qu'il est loin d'être un débutant) pour éviter de tomber dans le piège de la pompe excessive, du refrain facile ou du riff bêta. Et ça donne 11 chansons inattaquables dont quelques tubes tournés classiques depuis (Mambo Sun, Jeepster, Get It On, Life's a Gas) de rock malin et accrocheur et, forcément, vu le gus aux manettes, impeccablement produit. Avec en plus son énorme lot de bonus, l'édition Deluxe proposée fournira quelques douceurs supplémentaires pas inutiles tant aux fans qu'à ceux qui, mieux vaut tard que jamais, plongent seulement dans la légende de celui qui, avec moins d'excès et un peu plus de chance, aurait sans doute fait une carrière moins météorique que celle qui fut la sienne. Pour conclure, on rappellera, ça parait évident mais disons-le tout de même, qu'Electric Warrior est un immense classique que tout amateur de rock'n'roll se doit de posséder dans sa collection, dans la présente édition généreusement bonussée si possible.

CD 1 - The Original Album 
1. Mambo Sun 3:36 
2. Cosmic Dancer 4:26 
3. Jeepster 4:07 
4. Monolith 3:45 
5. Lean Woman Blues 2:59 
6. Get It On 4:22 
7. Planet Queen 3:10 
8. Girl 2:29 
9. The Motivator 3:56 
10. Life's A Gas 2:23 
11. Rip Off 3:49 
Bonus: Singles 'A'& 'B' Sides 
12. There Was A Time / Raw Ramp (B-Side) 5:14 
13. Hot Love (A Side) 4:55 
14. The King Of The Mountain Cometh (B-Side) 2:26 
15. Woodland Rock (B-Side) 3:53 

CD 2 - Demos & Out-Takes : Previously Unreleased 
1. Electric Warrior Poem (US Radio Promo) 0:21 
2. Mambo Sun (Instrumental Edit) 3:49 
3. Cosmic Dancer (Single Vocal Mix) 4:26 
4. Jeepster (Single Vocal Mix) 4:18 
5. Monolith (Working Version) 2:23 
6. Lean Woman Blues (Working Version) 3:05 
7. Get It On (Full Length Version) 5:48 
8. Planet Queen (Working Version) 2:56 
9. Girl (Alternate Master) 2:29 
10. The Motivator (Working Version) 3:57 
11. Life's A Gas (Working Version) 3:32 
12. Rip Off (Instrumental) 3:18 
13. Raw Ramp (Working Version) 2:21 
14. Electric Boogie (Working Version) 2:06 
15. Untitled Instrumental Aka A Lot Of Rubbish (Studio Out-Take) 1:35 
16. Honey Don't (Studio Out-Take) 3:23 
17. Planet Queen (Electric Home Demo) 2:25 
18. Girl (Acoustic Home Demo) 0:38 
19. Jeepster (Electric Home Demo) 2:34 
20. Get It On (Acoustic Home Demo) 3:15 
21. Electric Warrior Poem And Radio Advert (US Radio Promo) 0:55

Marc Bolan– vocals, guitar
Mickey Finn– conga drums, bongos
Steve Currie– bass guitar
Bill Legend– drums
Howard Kaylan– backing vocals
Mark Volman– backing vocals
Rick Wakeman– keyboards on "Get It On"
Ian McDonald– saxophone
Burt Collins– flugelhorn

T.REX

PoP Deluxe
Iggy Pop "Lust for Life" (1977)
ou "Iggy Top"

Iggy with Bowie, chapitre deux. Et une seconde réussite d'affilée pour une iguane qui trouve tout son avantage à se laisser influencer. Il y gagne un groupe de la mort (de Carlos Alomarà Ricky Gardiner aux frères Sales que Bowie réengagera dans sa renaissance rock, Tin Machine) et les chansons qui vont avec à commencer par un Lust for Life (composé par Bowie) qui trouvera une seconde vie dans les années 90 via la bande-son de Trainspotting et The Passenger (composée par Gardiner) qui reste un immanquable du répertoire de l'ami Iggy. Alors, certes, ce n'est plus tout à fait le trublion punkoïde de Stooges, c'est un Iggy un peu dompté mais, du coup, d'une efficacité, d'une consistance encore jamais entendue (sauf sur The Idiot, premier album de l'association avec David, y a pas de hasard) sur un album de rock où Mister Pop prouve même qu'il a ce qu'il faut pour concurrencer tant son mentor de l'occasion que le lippu vocaliste de certaines Pierres Qui Roulent (écoutez voir l'épique Turn Blue si vous ne me croyez pas !). Lust for Life demeure l'album le plus immédiatement recommandé de son auteur, à raison !

1. Lust for Life 5:13
2. Sixteen 2:26
3. Some Weird Sin 3:42
4. The Passenger 4:44
5. Tonight 3:39
6. Success 4:25
7. Turn Blue 6:56
8. Neighborhood Threat 3:25
9. Fall in Love with Me 6:30

Iggy Pop– vocals
David Bowie– keyboards, piano, organ, backing vocals
Carlos Alomar– rhythm guitar (lead on "Lust For Life"& "Turn Blue"), backing vocals
Ricky Gardiner– lead guitar, backing vocals
Warren Peace - keyboards and backing vocals on "Turn Blue"
Tony Sales– bass, backing vocals
Hunt Sales– drums, backing vocals

IGGY POP

GRaNDeuR eT DéCaDeNCe
Basil Poledouris "Conan The Barbarian" (1982)
ou "La Fantasy en Grandes Pompes"

Il faut le dire, et ne même pas en avoir honte, le Conan de John Milius est un chef d'œuvre expressionniste digne des initiateurs germaniques d'avant la deuxième guerre mondiale, et la musique du gréco-américain Basil Poledouris n'est pas pour rien dans cette surprenante réussite (parce que Schwarzenegger et chef d'œuvre, hein, c'était pas gagné d'avance !). En l'occurrence, et présentement la vision du film ne sera pas inutile, la musique de Poledouris est un personnage à part entière de l'objet filmique de Milius, un personnage tantôt tonitruant et pompier (Riddle of Steel/Riders of Doom), tantôt délicat et dramatique (Funeral Pyre) qui, devant beaucoup à Wagner et à Orff avec une bonne louche de postromantisme ajoutée pour bonne mesure, est le moteur de l'action émotionnelle du film semi-muet d'un réalisateur sachant sans doute qu'il ne pourra pas en demander trop à sa barbaque de casting. Ecouté à distance de son support celluloïd, la musique de Conan le Barbare s'écoutera comme une œuvre néo-classique évocatrice du propre film de l'auditeur, sans doute quelque chose de violent et épique tout de même, et sait donc se suffire à elle-même ce qui est tout de même assez inhabituel pour une bête bande-son de fantasy, statut que la création sonore de Poledouris dépasse donc largement.

1. Anvil Of Crom 2:30 
2. Riddle Of Steel/Riders Of Doom 5:31 
3. Gift Of Fury 3:47 
4. Wheel Of Pain 4:05 
5. Atlantean Sword 3:53 
6. Theology/Civilization 3:10 
7. Wifeing 2:07 
8. The Search 3:05 
9. The Orgy 4:10 
10. Funeral Pyre 4:28 
11. Battle Of The Mounds 4:48 
12. Orphans Of Doom/The Awakening 5:28 

BASIL POLEDOURIS

PoWeRPLay
King's X "Manic Moonlight" (2001)
ou "En forme de trio"

Au début du 3ème millénaire, les inusables King's X, qui sont alors ensemble depuis plus de 20 ans, depuis 1980 précisément, continuent leur petit bonhomme de chemin dans un anonymat et une indifférence qui fait peine à constater. Pas un groupe à perdre l'espoir et à abandonner, ceux qui ont failli révolutionner le monde du metal en y insérant funk et pop continuent inlassablement de dérouler la formule qui a fait leur réputation auprès de collègues qui n'en peuvent plus de dire du bien d'eux, d'une presse qui loue leurs performances et d'un petit noyau de fans fidèles qui attendent avec impatience chaque nouvelle intervention de leurs idoles. Présentement, la dominante funk'n'soul qui colle tant à la peau du bassiste/chanteur de la bande, Doug Pinnick, mène la danse du répertoire du neuvième album studio des texans d'adoption, ça nous donne un album plus simple où le trio ne fait, en substance, pas autre chose que ça a quoi il nous a habitué mais avec une décontraction qu'on ne leur avait jusqu'alors jamais entendu. En chansons, ça nous donne quelques unes de plus belles réussites du trio depuis sa période classique (celle des trois premiers opus) desquels on citera en particulier quelques rockers gorgés de soul et de groove rondement menés (Believe, Yeah, The Other Side ou Jenna) et une ballade particulièrement délicate (False Alarm) compensant aisément quelques autres moins essentiels (Manic Moonlight, Static) dans une sélection globalement solide et réussie. Bref, si vous ne connaissez pas encore King's X et que votre première opportunité ce présente avec ce Manic Moonlight de belle qualité, n'hésitez pas !, c'est d'un des plus beaux groupes de rock américains, et d'un de ses secrets les mieux gardés, dont il s'agit.

1. Believe 4:46
2. Manic Moonlight 4:32
3. Yeah 3:40
4. False Alarm 4:36
5. Static 4:29
6. Skeptical Winds 6:51
7. The Other Side 4:49
8. Vegetable 6:27
9. Jenna 5:06
10. Water Ceremony 0:18

Doug Pinnick- bass/vocals
Ty Tabor- guitar/vocals
Jerry Gaskill- drums/vocals

KING'S X

BLoNDeS aRe MoRe FuN
Blonde Redhead "Misery Is a Butterfly" (2004)
ou "Art Pop"

En passant de Touch & Go a 4AD, il semblerait que les indie étatsuniens de Blonde Redhead aient décidé de remanier leur copie ou, plutôt, de lui offrir un bon coup de ripolin. Le résultat, Misery Is a Butterfly donc, qui a pris le temps du fait de la longue indisponibilité de Kazu Makino après qu'elle se soit faite piétiner par une mauvaise rosse, est un trésor de subtilité mélodique et de trouvailles d'arrangements nettement plus abordable que tout ce que la formation avait proposé précédemment. On y retrouve des chansons douces et désespérées où les voix fragiles de Amedeo Pace et de la précitée Mme Makino font merveille. Pour nous français, et pour les autres aussi il n'y a pas de raison, c'est comme se retrouver sur un album des Flaming Lips conçu sous la bienveillante supervision d'un émule de Serge Gainsbourg (qui, en l'occurrence, s'appelle Eyvind Kang et à concocté des arrangements de cordes d'une confondante beauté), pop donc, malin toujours, avec une instrumentation roots et pourtant totalement actuelle qui nous entraîne, 45 minutes et 11 chansons durant, dans un monde rêveur et distancié, riche mais pas flambeur pour deux sous où il est bon se laisser bercer par l'art d'une formation qui sait faire et n'a d'ailleurs aussi bien fait que sur cette exemplaire sixième galette chaudement recommandée.

1. Elephant Woman 4:49
2. Messenger 3:21
3. Melody 4:36
4. Doll Is Mine 3:06
5. Misery Is a Butterfly 5:07
6. Falling Man 3:26
7. Anticipation 4:04
8. Maddening Cloud 3:20
9. Magic Mountain 3:02
10. Pink Love 6:13
11. Equus 3:50

Amedeo Pace— voice, guitar, baritone guitar
Kazu Makino— voice, clavinet, guitar
Simone Pace— drums, percussion, machines
Skúli Sverrisson— bass guitar
Eyvind Kang, Jane Scarpantoni— strings
Eyvind Kang, Blonde Redhead— string arrangements

BLONDE REDHEAD

NeW GeNeRaTioN
Joy Denalane "Born and Raised" (2006)
ou "NewSoul Lady"

Une nouvelle voix soul venue d'Allemagne ? Et si c'était une des plus belles réussites de genre damant le pion à de chichiteuses américaines ? Parce qu'il faut bien le dire, si le premier opus de Joy Denalane n'invente rien, il réussit parfaitement à faire perdurer une soul d'inspiration sixties remise au goût du jour via une production moderne. Les clés de la réussite ? La bonne voix de la miss Denalane déjà, tout à fait dans la tradition des grandes chanteuses black, la qualité de compositions certes prévisibles mais tout de même franchement accrocheuses ensuite, la qualité de la production et d'arrangements "rétro-modernes" permettant d'éviter la énième resucée R'n'B d'une Aretha Franklin, d'une Diana Ross ou d'une Etta James même s'il y a, fatalement, toujours un peu de ça. Les spécialistes vous diront que Joy Denalane est la petite cousine germanique de Mary J. Blige, n'étant pas un spécialiste, je ne peux que faire une entière confiance en leur allégation tout en conseillant, aux amateurs de soul music sachant encaisser un peu de modernisme ce Born & Raised de si belle facture qu'il n'est même pas besoin de mentionner les vedettes américaines venues y faire un petit coucou.

1. Change (featuring Lupe Fiasco) 4:18
2. Let Go 4:32
3. Be Real 4:16
4. Heaven or Hell (featuring Raekwon) 4:35
5. One in a Million 3:46
6. For the Love 4:07
7. 7 Year Itch 5:00
8. Caught Up 3:31
9. Stranger in This Land 5:38
10. Start Over 4:02
11. Born & Raised 4:08
12. Something Stirrin' Up (featuring Governor) 5:50
13. Despite It All 3:53
14. Soweto '76–'06 4:55
15. Sometimes Love 3:11

Joy Denalane - vocals
Lillo Scrimali - piano, organ, synthesizer
Don Phillipe - wurlitzer
Franc Kuruc - guitar
Tom Krüger - bass
Christoph Sauer - bass
Tommy W. - drums
Dan Abitol - violin
Odile Biard - violin
Felix Borel - violin
Myriam Trück - violin
Klaus Marquardt - violin
Claudia Pfister - violin
Kathrin Distler - cello
Tim Ströble - cello
Matthias Trück - cello
Andreas Fischer - viola
Raphael Sacha - viola
Violina Sauleva - viola
Klaus Graf - saxophone
Ian Cumming - trombone
Klaus Graf - saxophone
Sebastian Studinitzky - horn
Michael Kedaisch - marimba
Dalma Lima - percussion
Chiwoniso Maraire - mbira

JOY DENALANE

TiMeS oF e.
Eels "End Times" (2010)
ou "The Neverending E"

E is the best. Et on pourrait s'arrêter-là tant le gars Mark Oliver Everett (E à la scène donc) était en exceptionnelle verve dans la seconde moitié de la première décennie de ce troisième millénaire. Obsédée par la mort, le vieillissement, les séparations aussi, l'œuvre de Everett n'est pas exactement de celles qui engendre le rire et la bonne humeur, c'était déjà le cas de l'excellent double Blinking Lights & Other Revelations, ça l'était tout autant de l'habité Hombre Lobo, il n'y a pas de raison que ça ne le soit pas sur un disque de rupture tel que End Times, et pour le coup, ça l'est ! Les chansons, elles, vont de l'acoustique soufreteux (The Begining, End Times, Nowadays, etc.), au blues électrique (Gone Man, Paradise Blues), de pièces délicatement bercées d'alternative country rêveuse modernisée (In My Younger Days, et ses petits synthétiseurs malins) à de belles ballades piano rock (A Line in the Dirt) en passant même par un petit détour par le garage rock (Unhinged) ou une espèce de berceuse d'ailleurs très réussie (I Need a Mother) sans jamais, bien sûr, perdre cette patte douce-amère qui est l'indéniable marque de fabrique d'Everett. Que dire de plus ? Que quand les chansons sont aussi belles, que les arrangements les complémentent sans les envahir comme ici, il n'y a pas d'autre alternative que de plonger dans la belle mélancolie d'un songwriter d'exception.

1. The Beginning 2:16
2. Gone Man 2:59
3. In My Younger Days 3:25
4. Mansions of Los Feliz 2:49
5. A Line in the Dirt 3:30
6. End Times 2:58
7. Apple Trees 0:40
8. Paradise Blues 3:03
9. Nowadays 3:09
10. Unhinged 2:26
11. High and Lonesome 1:07
12. I Need a Mother 2:39
13. Little Bird 2:34
14. On My Feet 6:21

E– vocals, guiars, bass guitar, harmonica, piano, Optigan, Hmmond B3 organ, banjo, Harmonium, Vox Continental organ, drums, percussion, and production
Butch– drums on "A Line in the Dirt"
Koool G Murder– bass guitar, guitar, recording and mixing on "Paradise Blues" and "Nowadays"
&
Wayne Bergeron, Chris Bleth, Andy Martin– horns

EELS

So FoLK
Midlake "The Courage of Others" (2010)
ou "Out of Time"

Hors du temps ? Avec leur folk qu'on pourrait croire issue de la fin des années 60 ou du début des années 70, c'est le moins que l'on puisse dire des américains de Midlake, encore plus sur leur troisième opus, The Courage of Others. Bon, on ne va pas dire qu'on est vraiment surpris de l'accentuation d'un démarche revivaliste qui va si bien au teint de la bande de Tim Smith, une formation qui aime à se complaire dans les arpèges délicats de guitares acoustiques cristallines, user de synthétiseurs tellement d'un autre temps qu'ils référencent automatiquement leur musique, et de voix, ha ! ces voix, qui viennent tutoyer celle d'un quatuor expert en la matière (Crosby, Stills, Nash & Young pour enfoncer la porte ouverte) avec, cette fois, une anglicité directement héritée de formations telles que Pentangle ou Steeleye Span, que des références éminemment recommandables, vous le constaterez. Et comme les chansons, substance même de toute œuvre, sont à la hauteur du soigneux emballage dans lequel elles sont délivrées, c'est à un bonheur de tous les instants, à une vraie belle quarantaine de minutes de magie elfique qui nous est offerte. Et, oui, seulement une quarantaine de minutes, c'est vraiment trop court et constitue, in fine, le seul vrai défaut d'un opus sinon totalement réussi. The Courage of Others ? Un rêve de folk qu'on a joie à partager.

1. Acts of Man 2:55
2. Winter Dies 5:04
3. Small Mountain 3:39
4. Core of Nature 4:29
5. Fortune 2:05
6. Rulers, Ruling All Things 4:22
7. Children of the Grounds 3:55
8. Bring Down 3:37
9. The Horn 4:07
10. The Courage of Others 3:17
11. In the Ground 4:15

Tim Smith - Vocals, Acoustic Guitar, Flute, Recorder, Piano, Keyboards
Eric Pulido - Guitars, Dulcimer, Autoharp, Percussion, Backing Vocals
Paul Alexander - Bass, Electric Guitar, Bassoon
McKenzie Smith - Drums, Percussion
Eric Nichelson - Guitars, Autoharp, Percussion
&
Max Townsley
- Electric Guitar
Jesse Chandler - Harpsichord
Fiona Brice - Violin
Stephanie Dosen - Harmony vocals on "Bring Down"

MIDLAKE

SynthPop V: Et après... (1995-2014)

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Et voilà, c'est la que se conclut l'exploration de la chose synthpop avec une sélection forcément très incomplète de ce qui se passa après la période de gloire d'une musique à jamais accolée avec son époque, les années 80. Présentement, même ceux qui ne sont pas client du genre trouveront du grain à moudre, j'ai choisi large et varié. Enjoie !

ReViVaL
The Rentals "Return of the Rentals" (10/1995)
ou "Hier Aujourd'hui"

On commence le parcours actuel avec une version américaine indie-rockisée de la chose Synthpop présentée via un billet de Bruno Juffin (Les Inrocks) :
"Lassé de jouer dans l’ombre du meilleur rock américain ­ Beck, Spain, That Dog, Weezer ­, ce trio libéré enchante.
Trop souvent, ces entreprises empestent le réchauffé. Des seconds couteaux ­ en anglais, sidemen, “ceux qui restent sur le côté” ­ se piquent, parce qu’ils en ont gros sur la patate, de prouver qu’ils en ont aussi dans la carafe ou le pantalon et au bout des doigts. Vanités froissées et aigreurs indigestes font de médiocres conseillères : les bacs à soldes sont familiers des calamiteux caprices de bassistes bassinants, d’ânes bâtés batteurs. Exception inespérée : les Rentals, nouvelle aventure de Petra et Rachel Haden, imprévisibles cavaleuses, reines du zigzag tourneboulant. Deux toupies capables de flanquer une sévère dérouillée au punk-rock sur le Pink noise (Rock me Amadeus) de Beck, de se fondre dans la torpeur ténébreuse du World of blue de Spain, d’animer de leurs piailleries polissonnes les amusants sitcoms de That Dog et de s’acoquiner ici avec Matt Sharp, le bassiste de Weezer. En plaquant leurs habituels employés, les sœurs Haden (filles de Charlie et frangines du ténébreux leader de Spain) et Matt Sharp ont barboté leurs plus précieux trésors, l’ébriété féroce et la malice mordante d’In the garage ou Rockstar, vicieuses volées de bois vert infligées au pompiérisme rock. Ne pas se fier à l’allure savamment nigaude des Rentals. Epais lorgnons de laborantins myopes, raideur d’automates : leur ressemblance avec les regrettés cybernautes de Chapeau melon et bottes de cuir, méchants rétro-futuristes coutumiers des retours vengeurs, n’est pas fortuite. Comme eux, les chansons des Rentals sortent de l’antre d’un savant farfelu, surdoué maniaque des greffes hautement improbables. Derrière leurs dégaines de dadais coincés, les Rentals enchaînent les rengaines racoleuses à foison, le crêpage de chignon de synthés Moogs roturiers mugissants et d’aristocratiques violons voltigeant, les ébats de rythmes bubble-gum gaillardement écervelés et de voix de mijaurées d’une aguicheuse gaminerie, d’une mélancolie mutine. Suppliques surannées et sucrées (Sweetness and tenderness), mignon manifeste de sédition juvénile, Beach Boys synthétiques et pathétiques (ceux d’après la fêlure) pleurant d’impossibles amours estivales et refrains à peine entendus qu’aussitôt indélogeables (la parfaite pop pot de colle de Friends of P), The Return of the Rentals repeint de couleurs fondamentales trente ans de bluettes éplorées. C’est bête comme chou et chouette comme tout.
"
C'était vrai alors, ça l'est toujours aujourd'hui... Recommandé !

1. The Love I'm Searching For 3:36
2. Waiting 3:13
3. Friends of P. 3:32
4. Move On 4:21t
5. Please Let That Be You 3:34
6. My Summer Girl 3:13
7. Brilliant Boy 4:16
8. Naive 2:20
9. These Days 3:00
10. Sweetness and Tenderness 4:22

Matt Sharp - vocals, bass, moog, extra guitars
Cherielynn Westrich - female lead vocals
Patrick Wilson - drums
Petra Haden - viola, harmony vocals
Rod Cervera - main guitars
Tom Grimley - main moog synthesizers
&
Jim Richards - moog on "Please Let That Be You"
Rachel Haden - vocals on "Move On"

THE RENTALS

TRiPSyNTH
Broadcast "Work or Non Work" (06/1997)
ou "from Bristol, with Love"

Alors, Broadcast, est-il la relève du trip-hop ou une continuation de la synthpop (deux genres aussi britanniques que leurs origines) ? Les deux mon général a-t-on envie de dire...
Bref, pour faire aussi court que le petit machin (36 minutes tout de même, pas mal pour un gros EP), Broadcast, collectif de Bristol mené par James Cargill et la regrettée Trish Keenan (qui nous quitta il y a cinq ans déjà des suites d'une pneumonie consécutive d'une infection par le virus de la grippe porcine qui fit les ravages que l'on sait), semble avoir entrepris de faire sa version light et lumineuse des ténèbres trip-hop du grand aîné Portishead. Plus light et lumineux parce que telle est la voix de Trish mais aussi du fait d'arrangements empruntant souvent à la pop synthétique de la toute fin des années 70 (la meilleure vous dirons les puristes qui, c'est bien connu, n'aime rien tant que débiner les honnies 80s) qui, en mélangeant les ans parce que Broadcast précède, n'est pas non plus sans rappeler les moments les plus intimistes et poppisants de Goldfrapp ou la classe naturelle d'un Saint-Etienne.
Ces belles références (Goldfrapp et Portishead, Saint-Etienne, on rajouterait bien Kraftwerk, tiens) qui vous situent bien le monde dans lequel Broadcast opérait même si, évidemment, tout l'intérêt de Work or Non Work est en fait dans les détails, dans toutes les petites trouvailles sonores de claviers, de machines ou d'authentiques être humains qui font de ce mini-lp aujourd'hui pas facile à trouver un réel immanquable d'une époque où tout changeait et l'art se glissait dans les intérêts commerciaux. Précieux.

1. Accidentals 3:28
2. The Book Lovers 4:49
3. Message from Home 4:59
4. Phantom 3:31
5. We've Got Time 4:13
6. Living Room 3:26
7. According to No Plan 3:08
8. The World Backwards 4:00
9. Lights Out 4:32

BROADCAST

SyNTH MeTaL iN GoTHLaND
Paradise Lost "Host" (05/1999)
ou "Quand même les metalleux..."

Une vraie surprise que de retrouver des goth-metalleux ex-death/doom-metalleux en habits de presque clones de Depeche Mode, c'est pourtant bien ce que propose Host et dont va nous entretenir Chris (Thrashocore) :
"C’est la première (et probablement la seule) fois que je remplis la case « Style » d’une chronique avec ce genre d’inepties : « gothique electro new wave machin chose ». Et pourtant quand on se décide à chroniquer un album aussi compliqué et sujet à polémique que « Host», il faut savoir faire des sacrifices…Suivant un « One Second» qui avait amorcé un virage vers une musique encore plus sombre, encore plus mélancolique et moins ancré dans le métal qu’avant, « Host» est l’album qui causera le plus de tort aux Anglais.
Car ici, oubliez le Paradise Lost que vous avez connus autrefois : les guitares sont noyés sous des tonnes d’effets, les solos ont disparus, la batterie sonne comme une boite à rythmes et le chant braillard de Nick Holmes est depuis « One Second» un lointain souvenir… Beaucoup compareront (dans une optique négative) l’évolution flagrante du groupe à Depeche Mode
Dans la tradition des albums de PL, « Host» est avant tout une usine à tubes. Et dans la tradition des usines à tubes, il y a toujours du déchet. Ici on a pas à attendre trop longtemps, vu que c’est le premier titre « So Much is Lost» qui remplit cet office. Voilà un titre purement formatté pour les radios (je me souviens l’avoir entendu dans une grande surface en Allemagne lors de la sortie de l’album), qui n’a aucune accroche si ce n’est son refrain artificiellement…accrocheur, mais en creusant un peu c’est très pauvre. Nick Holmes lui même ne semble pas convaincu quand il le chante, c’est vous dire. Mettant en parallèle ce fameux titre et leur signature avec la major EMI, on saisit vite l’exigence de la maison de disque d’avoir un « single » parfait, la corvée est donc accomplie, passons à la suite…
Et c’est là que pour moi, fan de Paradise Lost et de cet album en particulier, je peux enfin crier au génie. « Host» dévoile une des facettes les plus sombres du groupes, le coté électro ajoutant à des compos déjà pas follichones un aspect déshumanisé et synthétique qui sublime l’ensemble. Certains titres sont de pures chefs d’œuvres, portés par une ambiance intimiste et feutrée qui sert tout à fait le propos du groupe : je pense notamment à « Nothing Sacred», « Harbour », « It’s Too Late», « Wreck» et « Host ». Ces 5 titres sont tout simplement sublimes, de par les émotions exprimés et de la façon touchante dont elles le sont (exprimés, ma phrase est tournée bizarrement je sais :p). Le meilleur exemple (et mon titre préféré) est sans conteste « It’s too Late» qui marque une progression absolument fabuleuse avec ses violons poignants sur l’introduction et le chant de Nick Holmes qui est rejoint petit à petit par un chant féminin absolument sublime pour exploser sur le dernier refrain… Les autres titres sont semblables dans le propos mais possèdent par ailleurs un espoir un peu plus évident, qui les classent pour moi à part des 5 perles précitées. Mais le coté tubesque dont je parlais précédemment est systématiquement présent, il me suffit d’entendre l’intro de n’importe quel titre pour avoir immédiatement le refrain en tête…
« Host» est un album qui s’apprivoise, et nécessite une ouverture d’esprit que très sincèrement je ne pensais pas posséder, amateur de bourrin que je suis. Et pourtant, lui laissant sa chance et ne l’écoutant sans trop de préjugés j’ai pu y déceler cette dose de talent et ces émotions si fortes dont il regorge, et j’espère que vous saurez en faire de même. Un album qui augmente encore mon estime pour ce groupe, qui a prendre un tournant risqué (et réussi artistiquement si ce n’est commercialement) à un moment décisif de sa carrière.
"
Présentement proposé dans son édition japonaise avec deux versions alternatives et un inédit pour encore prolonger l'excellente expérience. Enjoie !

1. So Much Is Lost 4:16
2. Nothing Sacred 4:02
3. In All Honesty 4:02
4. Harbour 4:23
5. Ordinary Days 3:29
6. It's Too Late 4:44
7. Permanent Solution 3:17
8. Behind the Grey 3:13
9. Wreck 4:41
10. Made the Same 3:34
11. Deep 4:00
12. Year of Summer 4:16
13. Host 5:12
Bonus
14. So Much Is Lost (Lost in Space Mix) 6:22
15. Languish 4:08
16. So Much Is Lost (String Version) 4:18

Nick Holmes - lead vocals and lyrics
Gregor Mackintosh - lead guitar on (1-11, 13-16), keyboards, programming, string arrangements on (1, 2, 4, 6, 10 & 13) and all music
Aaron Aedy - rhythm guitar, lead guitar on "Year of Summer"
Steve Edmondson - bass guitar
Lee Morris - drums & backing vocals
&
Audrey Riley
- strings arrangements & cello (1, 4 & 10)
Sally Herbert - string arrangements (2, 6 & 13)
Dinah Beamish - cello (2, 6 & 13)
Sue Dench - viola (1, 4 & 10)
Claire Orster - viola (2, 6 & 13)
Chris Tombling, Leo Payne - violin (1, 4 & 10)
Anne Stephenson, Gini Ball, Jocelyn Pook, Julia Singleton, Sally Herbert - violin (2, 6 & 13)

PARADISE LOST

FReNCH TouCH
Phoenix "United" (06/2000)
ou "Débuts fracassants"

Des petits gars de Versailles (comme Daft Punk, comme Air, etc.) qui font de la musique en toute décontraction, un premier album mélangeant avec goût et ludisme les univers ? La French Touch en version pop ? C'est Phoenix et son inaugural long-jeu, United.
L'affaire, quelque part entre les années 70 et leurs descendantes directes, commence par un court instrumental, School Rules, tout en guitare électrique baveuse du plus bel effet, continue par un Too Young qui rappelle des racines synthpop certes assumées mais, surtout, transcendées par de vrais musiciens ne se servant de synthétiseurs qu'en malin usage de complément. Suivent de délicieuses petites bulles toutes plus fraiches les unes que les autres avec, dans l'ordre, une jolie ballade planante idéale pour un câlinage en règle(Honeymoon), une belle pop gorgée d'un groove funky absolument irrésistible (If I Ever Feel Better), du garage rock plus vrai que nature (Party Time), encore un coup de remuage de hanches sur le très cool On Fire, un instrumental jazzy et orchestral du plus bel effet (Embuscade), un charmant Summer Days aux élans country bienvenus, et, sautant un cran, mais pas pour longtemps, une outro instrumentale so 80s, Definitive Breaks, qui clôt admirablement le bal. Mais, donc, ce n'est pas tout puisque nous n'avons pas encore évoqué le gros machin de l'album, ce Funky Squaredance de près de 10 minutes découpé en trois parties : de la country vocoderisé à faire vibrer votre Stetson, du funk cybernétique à faire chauffer le déambulateur de tata Suzanne, et, bonheur ultime, une troisième partie navigant entre électro, synthpop et hard rock (ce solo de guitare !) pour couronner une pleine et entière réussite.
Pleine et entière réussite qu'est, en fait, tout l'album de ces garçons bien sous tous rapports qui feront, et font toujours d'ailleurs, de fort belles choses mais jamais plus du niveau de cet United inaugural varié et pourtant cohérent, malin et ludique aussi... Essentiel, tout simplement et d'un retentissement mondial absolument mérité. Bravo Phoenix !
 
1. School's Rules 1:32
2. Too Young 3:19
3. Honeymoon 5:00
4. If I Ever Feel Better 4:26
5. Party Time 2:14
6. On Fire 2:49
7. Embuscade 3:57
8. Summer Days 3:15
9. Funky Squaredance 9:38
10. Definitive Breaks 1:40

Laurent Brancowitz
Christian Mazzalai
Deck d'Arcy
Thomas Mars Jr.
&
Rob– clavinet ("School's Rules", "Too Young", "If I Ever Feel Better", "Embuscade")
Cubain– percussion ("Too Young", "Honeymoon", "On Fire", "Embuscade")
Sandrine Longuet– harp ("Honeymoon")
Jean-Philippe Dary– clavinet ("On Fire")
Julia and Oliza– backing vocals ("On Fire")
Camille Baz Baz– Hammond organ ("On Fire")
Hugo Ferran– saxophone ("On Fire", "Embuscade", "Definitive Breaks"), string and horn arrangement ("Embuscade", "Summer Days")
Andrew Crocker– trumpet ("On Fire", "Embuscade")
Thomas Bangalter– Yamaha CS-60 synthesizer ("Embuscade")
Paddy Sherlock– trombone ("Embuscade")
P. Nadal– strings conductor ("Embuscade", "Summer Days")
 Marlon - drums ("Summer Days", "Funky Squaredance Part One")
Eddie Efira– pedal steel ("Summer Days", "Funky Squaredance Part One")
Bryce de la Menardière– Epinette ("Funky Squaredance Part One")
The Love Choral Society– screams ("Funky Squaredance Part Two")
Morgan– Hammond organ and Wurlitzer ("Funky Squaredance Part Two")
Pedro Winter– Rapman synthesizer ("Funky Squaredance Part Two")
Noe Efira– lead guitar ("Funky Squaredance Part Three")
The Arcysian Vocal Ensemble– vocals ("Funky Squaredance Part Three")
The Hector Berliz Choir– vocals ("Funky Squaredance Part Three")
Jean-Claude Soubeyrand– conductor ("Funky Squaredance Part Three)
Junior Carrera– guitar ("Definitive Breaks")

PHOENIX

iNDie-SyNTH 1
The Postal Service "Give Up" (02/2003)
ou "Such Great Heights, indeed"

Quand le chanteur et guitariste de Death Cab for Cutie et l'artiste électronique qu'on connait sour le nom de Dntel s'unissent pour composer un hommage informel à la synth-pop anglaises du début des années 80, ça donne The Postal Service et leur, pour le moment, unique album (qui le restera malheureusement probablement), le délicieux Give Up.
Présentement, c'est de l'édition Deluxe dont il s'agit, celle-là même qui sortit à l'occasion du dixième anniversaire d'un album qui avait marqué lors de son run originel. En toute logique, on retrouve sur le 1er Cd l'intégrale dudit album soit 10 morceaux synthpop revus et corrigés à l'aulne d'une écriture indie rock déjà développée par Benjamin Gibbard chez Death Cab for Cutie ici enluminée des trésors synthétiques d'un Jimmy Tamborello s'en donnant à cœur-joie à réinterpréter les trucs et astuces de New Order, Depeche Mode, Pet Shop Boys (etc.). Et c'est une splendeur sans la moindre faille pour qui est amateur du genre, une splendeur ou brillent particulièrement quelques chansons encore plus réussies que leurs voisines (c'est dire) que sont The District Sleeps Alone Tonight, le tube Such Great Heights et We Will Become Silhouettes.
Voilà, ça c'est pour l'album, que beaucoup connaissent déjà étant donné qu'il eut un joli succès culte. Mais le "gras" de l'édition, ce qui justifie qu'un groupe n'ayant sorti qu'un album orphelin se voit boosté dans la catégorie des grands à qui les éditions prestigieuses sont permises, se trouve sur un généreux second cd de 15 titres, rien que ça ! Qu'y trouve-t'on ? 4 inédits de belle tenue, 3 reprises assez surprenante et tout à fait réussies (écoutez donc celle d'Against All Odds de Phil Collins, ce n'était pas gagné sur le papier, c'est un triomphe dans les oreilles !), 5 remixes plutôt plus intéressants que la moyenne, 1 live et 2 reprises de deux des plus belles chansons de l'album, Such Great Heights et We Will Become Silhouettes par, respectivement, The Shins et Iron & Wine prouvant que ces compostions, en l'occurrence, tiennent le choc d'un shift d'arrangements assez radical sans perdre de leur qualité.
La collection est en fait l'intégrale du matériel de The Postal Service, ne manquent à cette généreuse sélection complémentaire que les remixes de la formation pour d'autres artistes, sans doute une question de droits qui n'empêche nullement de goûter au talent d'un duo, et de ses quelques guests, dont on aurait bien aimé entendre de nouvelles aventures comme ce fut, en fait, prévu. Las, entre les calendriers respectivement bien remplis des deux leaders et les essais infructueux quand la chance parvint à les réunir, Give Up restera solitaire, et référentiel donc, et recommandé surtout !

CD 1 - Album
1. The District Sleeps Alone Tonight 4:43
2. Such Great Heights 4:26
3. Sleeping In 4:21
4. Nothing Better 3:46
5. Recycled Air 4:29
6. Clark Gable 4:54
7. We Will Become Silhouettes 5:00
8. This Place Is a Prison 4:12
9. Brand New Colony 4:12
10. Natural Anthem 5:07

CD 2 - Bonus
1. Turn Around 3:45
2. A Tattered Line of String 2:56
3. Be Still My Heart 3:03
4. There's Never Enough Time 3:32
5. Suddenly Everything Has Changed (The Flaming Lips cover) 3:26
6. Against All Odds (Take a Look at Me Now) (Phil Collins cover) 4:17
7. Grow Old With Me (John Lennon cover) 2:31
8. Such Great Heights (John Tejada Remix) 5:49
9. The District Sleeps Alone Tonight (DJ Downfall Persistent Beat Mix) 6:54
10. Be Still My Heart (Nobody Remix) 3:54
11. We Will Become Silhouettes (Matthew Dear's Not Scared Remix) 5:05
12. Nothing Better (Styrofoam Remix) 3:27
13. Recycled Air (Live on KEXP) 2:59
14. We Will Become Silhouettes (Performed by The Shins) 3:01
15. Such Great Heights (Performed by Iron & Wine) 4:16

Benjamin Gibbard - lead vocals, lyrics, guitars (1, 2, 3, 5, 9), additional keyboards (2, 7) , electric piano (8), drums (6, 8, 9)
Jimmy Tamborello - programming, accordion (8), additional keyboards (8), electric drums, production, glitching
&
Chris Walla - piano (4), production
Jenny Lewis - backing vocals (1, 3, 5, 6, 7, 9)
Jen Wood - backing vocals (2), vocals (4)
The Shins (14)
Iron & Wine (15)

THE POSTAL SERVICE

Ha! éMiLie!
Emilie Simon "Emilie Simon" (05/2003)
ou "Premier feux"

A tout seigneur tout honneur, c'est le billet d'époque de Christophe Conte (Les Inrocks), sans lequel je n'aurais peut-être jamais découvert la divine Emilie, que je vous propose :
"En l’entendant susurrer I Wanna Be Your Dog des Stooges, au creux d’un album qu’elle a par ailleurs entièrement composé, écrit et façonné, on en connaît qui iront aussitôt prendre leur carte de la SPA. S’il ne ressemble à aucun autre disque français déjà entendu, c’est parce que cet album ne sort d’aucune matrice préréglée en usine, et ne porte pas non plus de traces trop profondes d’une longue manipulation, par tous les bouts et par n’importe qui.
Entre les mains d’un producteur chargé de la rendre plus docile et aguicheuse, Emilie Simon aurait pu tomber à plat et apparaître, au final, pour tout ce qu’elle n’est pas : de l’electro-pop inoffensive, servie tiède par une autre de ces Lolitas post-gainsbouriennes. Dans ce piège-là, Emilie ne tombe pas, et pour s’en prémunir, elle a décidé de produire seule son album, d’en fabriquer en grande partie l’écorce musicale.
Toute la singularité de ce premier album est le produit d’ allers-retours permanents entre des domaines et des esthétiques qui au mieux s’ignorent, au pire s’affrontent. Il fallait, par exemple, faire preuve d’une sacrée trempe pour confier sa voix, à l’origine si douce et caressante, aux manipulations d’un ingénieur de l’Ircam, Cyrille Brissot, qui par endroits la détourne et la tiraille comme s’il s’agissait de transformer un fil de soie en fil barbelé.
Et, si l’album n’a rien de foncièrement expérimental, c’est au travers de microdétails embusqués que l’on mesure l’étendue de sa palette. Le ballet que mènent la harpe et les cordes sur le somptueux titre Lise, notamment, transcrivent son amour des écritures anciennes, même si la mécanique electro réoriente l’ensemble dans une perspective moderne. Idem avec Secret et ses sonorités graniteuses, Désert et son halo sablonneux, Il pleut et sa précipitation de petits cliquetis qui tient lieu de colonne vertébrale rythmique.
A ceux qui regarderont en direction de l’Islande et de son ambassadrice numéro un, Björk, on ne pourra franchement pas donner tort. Sur un plan plus large, ce premier album remarquablement maîtrisé apporte la preuve qu’en matière d’audace musicale le “plat pays” qui fut autrefois le nôtre est bel et bien devenu une passionnante terre d’aventures.
"
Björk ? Et Kate Bush monsieur Conte, t'en fais quoi de Kate ? Bon, on ne t'en veut pas parce que tu en parles bien.

1. Désert 3:03
2. Lise 3:55
3. Secret 3:57
4. Il Pleut 3:31
5. I Wanna Be Your Dog 2:42
6. To The Dancers In The Rain 2:42
7. Dernier Lit 3:06
8. Graines D’Étoiles (feat. Perry Blake) 3:00
9. Flowers 2:33
10. Vu D’Ici 3:48
11. Blue Light 3:06
12. Chanson De Toile 4:02

EMILIE SIMON

iNDie-SyNTH 2
Marbles "Expo" (03/2005)
ou "Belles billes"

Quand Robert Schneider ne fait pas les bonheurs des indie poppers néo-psychédéliques d'Apples in Stereo, il s'amuse comme un petit fou à singer la synthpop dont on n'a aucun doute qu'il raffolait en son jeune temps avec Marbles, side project commencé en 1993 et dont Expo, de 2005, est au jour d'aujourd'hui la dernière manifestation.
Une absence qu'on regrette tant le garçon s'y entend à détourner/adapter les sons que d'autres fomentèrent de la toute fin des 70s à la moitié des 80s (pour les vrais créateurs, ceux qui vinrent après étant souvent dérivatifs de leurs aînés). Outre quelques épisodiques guests venues pour pleinement réaliser la vision du sieur Schneider, c'est seul que Robert, aux synthétiseurs, à la guitare, à la basse, aux programmations, à la voix, n'en jetez plus, conçoit un opus court (25 minutes) dont on n'a pas de doute que Brian Eno (voir l'instru planant Jewel of India pour ceux qui douteraient) est la dominante figure tutélaire comme on l'entend dans une sélection de chansons accrocheuses et mélodiques navigant quelque part entre 1977 et 1981 avec leurs allures chics et tenues, dignes !, et les "restes" d'un "seventivisme" assumé via quelques guitares et ambiances devant beaucoup à une espèce de fantasme d'un Syd Barrettà la sauce Beatles.
Sans trop en faire, parce que ce n'est finalement que de la (bonne, précisons) chansonnette, certainement pas du niveau des quelques modèles précités donc si tout à fait digne héritier, Marbles propose un petit album absolument charmant qu'on conseillera aux amateurs de pop synthétique n'ayant pas perdu tout contact avec ce petit quelque chose de plus qui fait baver d'envie les rockers, bien joué.

1. Circuit 2:32
2. Out of Zone 3:46
3. When You Open 3:52
4. Magic 1:50
5. Jewel of India 2:53
6. Hello Sun 2:12
7. Expo 0:59
8. Cruel Sound 1:28
9. Blossoms 1:39
10. Move On 4:14

Robert Schneider– synthesizer, mellotron, organ, toy piano, piano, vocoder, bass synth, electric guitar, Fender bass guitar, horn arrangements, electronic effects, drum machine programming, engineering, lead and backing vocals
&
Hilarie Sidney– drums on "Circuit" and "Hello Sun"
Jim Lindsay– drums on "Cruel Sound" and "Move On"
Rick Benjamin– trombone on "Blossoms"
Merisa Bissinger– flute and alto saxophone on "Blossoms"
Derek Banach– trumpet on "Blossoms"
Hudson Berry– vibraphone on "Jewel of India"

MARBLES

KiNDa LouNGe
The Bird and the Bee "The Bird and the Bee" (01/2007)
ou "Ton corps change..."

Un petit (sous) titre humoristique pour un album plein de charme et de fraicheur ? Allez hop, c'est parti avec le billet de Saab (Paperblog.fr) qui va nous présenter tout ça :
"J'avoue ne pas foncièrement apprécier la pop en elle-même, mélangée à d'autres styles musicaux tels que le folk, le jazz, électro, etc. cela passe déjà mieux et pourtant j'ai craqué pour ce groupe The Bird and The Bee, d'ailleurs je vous en avais déjà touché un mot ici. Pour quelles raisons cet engouement pour ce groupe en particulier ? D'abord, pour la voix craquante et exquise de la chanteuse : Inara George. Mais que serait une voix sans de belles mélodies et une pointe d'imagination ? Pas grand chose, c'est heureusement Greg Kurstin (Beck, Lili Allen, etc.) qui est aux manettes de l'album (production, multi instrumentaliste) et qui assure l'écriture (acidulée, pleine de charme) de l'opus en compagnie de sa compagne musicale la douce et radieuse Inara.
Leur musique pop s'inspire de beaucoup de courants musicaux : on songe à la pop orchestrale de Bacharach et à la pop ensoleillée des Beach Boys ainsi qu'au tropicalisme brésilien et è la fusion lounge/jazz/easy lisening le tout agrémenté d'une touche de psychédélisme synthétique et même d'une pincée inattendue de hip pop. Depuis quelques mois, j'écoute souvent en boucle leur premier album Eponyme et je ne me lasse jamais de ce petit bijou qui doit certainement compter parmi les meilleurs albums pop de 2007. certes, l'album n'offre rien de foncièrement original mais la pop que le groupe propose sort des sentiers battus en ce que les ficelles ne sont pas trop grosses : même les morceaux que l'on peut qualifier de "up tempo" restent toujours dans une forme de légèreté, de poésie, de sensibilité et de subtilité que l'on retrouve trop rarement au sein la scène musical pop souvent pieds et poings liés par les vieillîtes commerciales des musiques de disques.
Si l'on passe l'album sous la loupe, nous ne pouvons nous empêcher de citer les deux morceaux qui tuent tout sur leur passage : Again and Again et Fucking Boyfriend, il est, en effet, difficile de faire plus addictif que ces deux pépites pop qui ont l'outrecuidance de survivre à des centaines d'écoute assidues. Trop Fort. Entre ces deux morceaux se cache le calme, subtil et discret The Birds and The Bees qui permet à Inara de montrer l'étendue de ses capacités vocales. Superbe. Je suis toujours subjugiée par I'm a Broken Heart, c'est plus fort que moi, je ne peux résister aux arrangements rétro et luxuriants, à la légère tension sensuelle de ce morceau beau comme un camion. De même le psychédélique et foisonnant La La La qui consitue également l'un de mes morceaux préférés. Un pur joyau.
La deuxième partie de l'album est plus calme et sombre : le sophistiqué et doucement mystérieux My Fair Lady ouvre le bal. L'influence de John Barry n'est pas loin, ce morceau est une pépite. Le synthétique I Hate Camera est vraiment pas mal, dommage que le refrain soit légèrement trop prévisible car le reste du morceau est excellent. Je vous parlé de hip hop et bien voici Because légèrement influencé par ce courant musical : le rythme indolent et le phrasé d'Inara font mouche. Preparedness est clairement plus introspectif que le reste de l'album : quelques percussions qui instaurent une ambiance nerveuse et les choeurs éthérés d'Inara font en sorte que ce morceau soit sombre et brûlant. Un bijou. La clôture se fait sur une note magistrale sous la forme du morceau nommé Spark : cette ballade vaporeuse et somptueuse sort des sentiers tracés précédemment par le groupe afin de nous démontrer qu'ils ne sont pas qu'un groupe pop, leurs possibilités sont illimitées.
Dansant, attendrissant, candide, subtil, sophistiqué et élégant, mené de main de maître par Greg Kurstin qui donne le meilleur de lui-même et surtout par Inara qui chante divinement bien. Un excellent album pop, l'un des meilleurs de 2007.
"
Bienvenus chez les oiseaux et les abeilles !

1. Again & Again 2:46
2. Birds and the Bees 3:51
3. Fucking Boyfriend 3:15
4. I'm a Broken Heart 4:31
5. La La La 3:19
6. My Fair Lady 3:36
7. I Hate Camera 3:05
8. Because 3:38
9. Preparedness 3:36
10. Spark 4:08

Greg Kurstin– engineer, instrumentation, mixing, producer
Inara George– vocals (all tracks); fuzz bass (1)
&
David Ralicke– horn (4)

THE BIRD AND THE BEE

MaNWeRK
Karl Bartos "Off the Record" (03/2013)
ou "Karl and his Kraft"

Bien que n'en étant pas un membre fondateur (il n'arriva dans la formation qu'en 75, pour leur déjà 5ème album), Karl Bartos est inséparable de sa partition au krauteux-electroniques de Kraftwerk. Pas étonnant, donc, que son deuxième album en solitaire (presqu'une décade après l'inaugural Communication de 2004) rappelle si fortement la fratrie robotique de Düsseldorf...
Encore moins quand on sait que la base des enregistrements d'Off the Record provient d'archives que le sieur Bartos accumula entre 1975 et 1993 et qu'il a, pour la circonstance, retravaillés de fond en comble. Rien que de très logique pour un musicien n'ayant jamais souhaité capitaliser sur la notoriété de son ancienne "maison" mais en étant, fondamentalement, indivisible.
Ici, Bartos fait tout, une habitude prise sur son précédent opus solitaire, une nécessité créatrice aussi, sûrement, pour un architecte sonore sachant exactement où il souhaite en venir et ne désirant pas, pour ce faire, s'encombrer de collaborateurs aux vues forcément, ne serait-ce que marginalement, différentes. De fait, peu importe que cette destination apparaisse si évidemment dérivative des travaux de ses anciens partenaires avec, en l'occurrence, l'emphase audiblement mise sur l'efficacité mélodique évidente dès un Atomium d'ouverture cousin du fameux Radio-Activity de qui vous savez.
La question, à partir de là, n'est pas de savoir si Off the Record fait avancer le schmilblick mais s'il fonctionne comme on est en droit de l'attendre. La réponse, présentement, est clairement positive et cette électro-pop aux nombreux hooks synthétiques, pas franchement prospective mais diablement efficace néanmoins, atteint son dérivatif but. Et ce n'est pas une pochette extrêmement référencée qui viendra nier cet état de fait.
Reste à savoir si, en 2013, cette musique trouvera son public ailleurs que chez quelques nostalgiques patentés. On peut légitimement en douter sans que ça n'enlève quoique ce soit à la réussite avérée du projet.

1. Atomium 3:16
2. Nachtfahrt 3:30
3. International Velvet 4:38
4. Without a Trace of Emotion 3:28
5. The Binary Code 1:42
6. Musica Ex Machina 5:16
7. The Tuning of the World 3:33
8. Instant Bayeruth 3:36
9. Vox Humana 2:56
10. Rhythmus 4:17
11. Silence 0:06
12. Hausmusik 3:30

KARL BARTOS

NeW WaVe
Chvrches "The Bones of What You Believe" (09/2013)
ou "Synth Toujours"

Le revival synthpop est là !, et c'est Yoann Kermet (butwehavemusic.com) qui vous en parle maintenant, tout de suite :
"En 2012, nous découvrions CHVRCHES via la sortie de deux singles très prometteurs, Lies et The Mother We Share. Le trio de Glasgow offrait au travers de ses deux titres un son électro synthpop porté par la voix adolescente de Lauren Mayberry et les compositions très années 80 de Iian Cook et Martin Doherty, aux influences qui penchent du côté de chez M83, Passion Pit voire Depeche Mode. Bénéficiant d’un buzz justifié et d’une notoriété quasi immédiate, le groupe était donc très attendu.
The Bones Of What You Believe est le premier album du groupe. Quatre des titres ont déjà bénéficié d’une sortie dans l’année qui a précédé l’album. On pourrait craindre le manque d’effet de surprises, pourtant on trouve de vraies surprises sur cet album, et le fait de retrouver des titres connus dans un contexte d’album leur donne une nouvelle saveur.
Difficile de mettre un titre de l’album de côté, face à tous ces tubes en puissance brillamment produits. Tether est certainement le titre le plus ambitieux et surprenant : riffs de guitare (on en retrouvera d’ailleurs quasiment plus) et tempo assez lent, avant de se laisser peu à peu totalement submerger par des synthés plus entrainants.
Sans prétention, CHVRCHES offre également beaucoup d’émotions. Derrière la froideur des sons électroniques s’impose la voix de Lauren Mayberry qui donne une humanité aux morceaux. Le choix de laisser l’initiative de deux morceaux à Martin Doherty donne également une dimension supplémentaire à l’album, et ces deux titres viennent se placer de façon très judicieuse dans la construction de l’album. La concordance et la résonance des voix féminines et masculines sont parfaitement maîtrisées tout au long de l’album, on notera le soin plus particulier apporté à Night Sky.
CHVRCHES s’impose aussi par l’écriture, pas si facile dans le créneau de la synthpop. Avec mélancolie, le groupe retrace les affres des relations amoureuses et les ruptures. Sur Recover, Lauren Mayberryévoque son désespoir vain à sauver une relation ayant déjà échoué « And you take what you need/ And you don’t need me».
Venant rompre avec la lignée des groupes folk et rock de Glasgow, CHVRCHES offre une pop sans prétention, facile d’accès et quasi immédiate à apprécier. Ce premier essai est une belle confirmation du talent du groupe et est très prometteur quant à son avenir. Le groupe réussit en effet à transposer son univers sur un format long, là où beaucoup de groupes ne parviennent pas à captiver au delà de deux ou trois bons morceaux. The Bones Of What You Believe est une des très bonnes surprises de 2013, CHVRCHES vaut définitivement bien plus que la hype qui l’entoure.
"
Absolument réussi, absolument délicieux, absolument recommandé !

1. The Mother We Share 3:12
2. We Sink 3:34
3. Gun 3:53
4. Tether 4:46
5. Lies 3:41
6. Under the Tide 4:32
7. Recover 3:45
8. Night Sky 3:51
9. Science/Visions 3:58
10. Lungs 3:02
11. By the Throat 4:09
12. You Caught the Light 5:37
Bonus
13. Strong Hand 3:25
14. The Mother We Share (Errors RMX) 3:17

Iain Cook - Guitar, bass, keyboards, sampler
Martin Doherty - Keyboards, sampler, guitar, vocals
Lauren Mayberry - Vocals, Drums, Keyboards

CHVRCHES

SyNTH'N'SouL
Little Dragon "Nabuma Rubberband" (2014)
ou "Short-Snout"

Last but not least, des suédois avec une chanteuse japonaise qui naviguent quelque part entre trip-hop, syntpop et soul alternative, c'est vachement bien, Nobuma Rubberband (ce titre !) est leur 4ème opus, le dernier en date, ils s'appellent Little Dragon et c'est Stéphane El Menshawi (Froggy's Delight) qui nous en parle :
"Il aura fallu près de quatre albums à Little Dragon pour finalement capter un grand nombre d'oreilles à travers le globe. Comprendre qu'avec le succès de Ritual Union sorti en 2011, le groupe mené par la voix de Yukimi Nagano avait fini par enregistrer un titre à des fins purement commerciales (une bande son pour une bière diffusée pendant le super bowl).
Trois années plus tard, de retour avec un nouvel album coincé sous le bras, le groupe se retrouve à un croisement ouvrant sur toute une collection de possibilités, s'étiolant depuis une éventuelle réédition fade des hits passés, à l'hypothètique sortie d'un opus trop obscur pour massivement remporter l'adhésion du public.
Nabuma Rubberband, nom barbare définissant ce quatrième né, est en réalité une jonction, un carrefour auquel sont rendus les quatre membres de Little Dragon. Passage charnière et obligé pour tout groupe ayant perduré une décennie durant et devant à un point donné se remettre en question.
De l'aveu même du groupe, cet album s'est construit dans une atmosphère d'adversité. Chaque membre s'étant formé une identité musicale solide durant les années passées, créer un album sur ses antagonismes relevait de la gageure. À l'écoute, le défi a été relevé avec une énergie nouvelle, à peine domptée par la dimension sensuelle du chant Yukimi Nagano. Ainsi, même sur le très bien nommé "Klapp Klapp", les grosses percussions ainsi que l'infatigable ligne de basse n'arrivent jamais à occulter l'organe de la chanteur d'origine japonaise.
Les synthés - marque de fabrique historique du groupe - sont toujours bien présents et se doublent bien plus volontiers d'harmonie vocales ("Underbart"), alors que des titres comme "Paris"établissent un parallèle avec la rythmique de l'opus précédant. "Killing Me" est quant à lui le point d'orgue statufiant sur l'équilibre diabolique sur lequel le groupe repose désormais : Yukimi occupe tout un pan de l'espace, sensualisant les mots "Killing Me" aussi banalement que les claviers et les basses annexent les oreilles.
Disque courageux, Nabuma Rubberband n'hésite pas à jouer les cartes de la redondance rythmique et minimaliste sur son titre éponyme ou à accentuer les traits exotiques de ses productions ("LetGo" et surtout "Pink Cloud"), s'affirmant comme un disque brillamment éclectique.
On repassera pour la panne d'inspiration, visiblement le collectif de Little Dragon a encore du carburant à brûler. Les dragons font donc bel et bien feu de tout bois.
"
Laissez-vous tenter, vous ne serez pas déçus !

1. Mirror 3:25
2. Klapp Klapp 3:37
3. Pretty Girls 3:43
4. Underbart 4:05
5. Cat Rider 4:33
6. Paris 3:24
7. Lurad 0:08
8. Nabuma Rubberband 3:15
9. Only One 4:06
10. Killing Me 3:44
11. Pink Cloud 4:46
12. Let Go 4:04

Yukimi Nagano– vocals, percussion
Fredrik Källgren Wallin– keyboards, bass guitar
Håkan Wirenstrand– keyboards
Erik Bodin– drums

LITTLE DRAGON

Ces chers disparus... 2015 (Première Partie, décembre-octobre)

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Pas besoin de long commentaire, ceci est la première partie d'un hommage aux grands disparus du monde de la musique en 2015. Respect.

(DéCeMBRe)
Bye Bye NaTaLie
Natalie Cole "Natalie...Live!" (1978)
ou "Heart & Soul"

Fille de l'immense Nat King Cole, artiste soul respectée ayant rencontré un grand succès avant quelque vaches maigres et une reconvertion au jazz dans sa deuxième partie de carrière, depuis un mémorable duo virtuel avec Papa, Natalie Cole nous a quitté le 31 décembre dernier. Il n'est que temps de rendre hommage à la grande soul lady qu'elle fut avec, occurrence finalement rare dans un genre misant plus sur les singles que les long-jeux trop couteux pour leur auditoire, un double album représentatif de sa période glorieuse des seventies, Natalie...Live!. Double cire noire généreuse à l'époque retranscrite sur un double cd sans bonus mais bien remasterisé (ça garde le cachet et ça ne pousse pas trop les potards), c'est près d'une heure et demie de pur bonheur où standards et originaux voisinent sans la moindre escarmouche, sans la moindre baisse de niveau, qui nous est offerte. Il faut dire qu'avec un groupe, option big band parce qu'il y a du cash dans la production, aux petits oignons (le line-up ci-dessous, hélas incomplet faute de plus d'informations oublie l'extraordinaire section de cuivres), cette musique pleine d'émotion et de sensualité s'épanouit avec grâce et une intensité inhérente à l'exercice live qu'il fait bon ouïr. Et que dire de la performance de Natalie si ce n'est qu'elle est absolument à la hauteur de l'évènement et propose toute l'étendue d'une exceptionnelle vocaliste qui n'a pas à rougir, malgré sa moindre réputation en la matière, et se sortirait même plutôt à son avantage dans une comparaison avec de grandes dames de la soul telles que Diana Ross, Aretha Franklin ou, plus obscure parce que disparue trop tôt, Minnie Riperton. Oui, en 1978 Natalie Cole a la grande classe soul sur ce live first class qu'on ne peut, par conséquent, que recommander, et pas seulement pour pleurer son "départ", parce que c'est un grand live, tout simplement.

CD 1
1. Sophisticated Lady 3:35
2. Que Sera, Sera 7:36
3. Lovers 3:10
4. I'm Catching Hell 7:28
5. Mr. Melody 3:33
6. This Will Be (An Everlasting Love) 3:16
7. Party Lights" 4:58
8. I've Got Love on My Mind 7:52

CD 2
1. Lucy in the Sky with Diamonds 8:06
2. Inseparable 2:51
3. Cry Baby 5:09
4. Can We Get Together Again 4:00
5. I Can't Say No 6:28
6. Something's Got a Hold on Me 4:32
7. Be Thankful 7:32
8. Our Love 7:08

Natalie Cole - Vocals
Linda Williams - Conductor, Keyboards
Michael Wycoff - Keyboards, Background Vocals
Anita Anderson - Background Vocals
Sissy Peoples - Background Vocals
Charles Bynum - Guitar
Andy Kastner - Guitar
Bobby Eaton - Bass
Wayne Habersham - Percussion, Background Vocals
Louis Pajomo - Percussion
Ted Sparks - Drums

Natalie Cole
(6/2/1950 - 31/12/2015)

To JoHN
The Specials "Specials" (1979)
ou "Premium Ska"

Ca fait chier ! Voilà, c'est dit, ça fait chier ! Non mais, franchement, ils ne peuvent pas arrêter de mourir tous ces vénérables (pas si) anciens qui peuplèrent les rêves de nos vertes années ? Alors, ok, John Bradbury, essentiellement batteur des skamen des Specials, n'a pas fait la une des médias (les "cadors" comme Lemmy ou Bowie ne sont pas légion), ça n'en reste pas moins une vraie perte pour qui s'est aguerri aux tressautements de son corps blanc au rythme chaloupé que ce diable d'homme produisait. Alors un Specials pour lui rendre hommage, forcément. Le premier d'iceux (le meilleur diraient les puristes) où un groupe mixte (y a du jamaïcain dedans !) revisite quelques classiques du rocksteady en plus de créer leur propre, et tout à fait épatant, répertoire. En vérité, c'est le genre d'album qu'on n'a plus à "vendre", rien que l'énonciation de quelques unes de ses pistes devraient suffire à attirer le chaland : A Message to You Rudy, Doesn't Make It Alright, Concrete Jungle, Monkey Man, Too Much Too Young ou You're Wondering Now. N'est-ce pas ? Si vous hésitez encore, je vous rajoute Elvis Costello aux manettes et Chrissie Hynde venue pousser la chansonnette avec ses potes. Dans le genre musique qui file la pêche et fait danser en plus de ne pas être idiote du tout, c'est un immanquable ! Un immanquable qu'on écoutera désormais avec une petite larme à l'œil en pensant à ce badaboumeur émérite qui nous a tant fais suer... Goodbye John.

1. A Message to You, Rudy 2:53
2. Do the Dog 2:09
3. It's Up to You 3:25
4. Nite Klub 3:22
5. Doesn't Make It Alright 3:26
6. Concrete Jungle 3:18
7. Too Hot 3:09
8. Monkey Man 2:45
9. (Dawning of A) New Era 2:24
10. Blank Expression 2:43
11. Stupid Marriage 3:49
12. Too Much Too Young 6:06
13. Little Bitch 2:31
14. You're Wondering Now 2:36

Terry Hall– vocals
Neville Staple– vocals
Lynval Golding– rhythm guitar, vocals
Roddy Radiation– lead guitar, vocals on track six
Jerry Dammers– keyboards
Sir Horace Gentleman– bass guitar
John Bradbury– drums
&
Chrissie Hynde– vocals
Rico Rodriguez– trombone
Dick Cuthell– horns

John Bradbury
(16/02/1953 - 28/12/2015)
 
LeMMy CRy
Motörhead "Bomber" (1979)
ou "Triomphante Machine"

4ème album* de la machine de guerre fomentée par Lemmy Kilmister depuis son éviction d'Hawkwind, Bomber a l'insigne mais délicat honneur de suivre l'album de l'explosion, celui où le trio, qui a déjà essuyé les plâtres avec un éponyme d'honnête facture, se trouve tel qu'en lui même, freaks on speed playing loud and fast rock and roll, sur un Overkill dûment passé depuis dans la légende.
Quoiqu'ils s'en fichent probablement comme de leur dernière crise acnéique, ces trois pistoleros formant l'archétype du power trio hard'n'heavy survitaminé, la réponse "baffe dans ta tronche"à des petits punks qui pensaient sûrement avoir l'exclusivité du bruit blanc rentre-dedans. Parce que, présentement, Motörhead reproduit l'exploit, prolonge la magie d'un Overkill ravageur dans un Bomber thermonucléaire, seulement 7 mois après le précédente salve, c'est fort, très fort. Comme si le trio n'avait pas de temps à perdre et que ça s'entendait dans leur gros rock amphétaminé et graisseux. Alors c'est parti pour 10 titres et 37 petites minutes, ce qui pourrait paraître bien court sauf qu'à toujours appuyer sur le champignon et à pousser les amplis à 11, la dose est parfaite. Enfin, pas toujours pied au plancher comme le montre, occurrence finalement assez rare dans le répertoire de Lemmy, Fast Eddie et Philthy, un Sweet Revenge inhabituellement lent glissant même vers le blues avec le grand coup de slide du guitariste ou, plus loin, un Step Out du même acabit chanté, cette fois, par Mister Clarke qui fait, vocalement, ce qu'il peut mais n'a définitivement pas les tuyaux blindés de son bassiste de compagnon. Mais, soyons clair, ces deux-là sont les exception qui confirment la règle. Ailleurs, Motörhead speede comme si sa vie en dépendait et pond, accessoirement, quelques morceaux qui deviendront d'authentiques classiques de son répertoire (de Dead Man Tell No Talesà Stone Dead Forever en passant par la chanson titre de la galette, Bomber), c'est dire l'inspiration d'alors des trois vilains pas beaux et la salvatrice décharge d'électricité qui atteint l'auditeur à l'écoute de ce album de toute première bourre. Mais le bonheur n'est vraiment complet que dans la version remaster où d'une bonne face B (Over the Top) à une belle séquence live de quatre titres (dont Leaving Here et Too Late Too Late qui ne figurent pas sur l'album) on a la possibilité de prolonger encore l'expérience de cette délicieuse série d'uppercuts rock'n'rolliens.
Dire que la suite, Ace of Spadesévidemment !, confirmera tient distinctement du doux euphémisme mais, présentement, avec leur second classique d'affilée, Motörhead s'impose comme une force avec laquelle il faudra compter et, d'ailleurs, avec laquelle on a compté jusqu'à la disparition de son patibulaire leader qu'on avait fini par croire éternel (si seulement...).
 
* même si le tout premier (On Parole, sans le line-up classique, ne sortira finalement que quelques mois après celui qui nous intéresse)

1. Dead Men Tell No Tales 3:07
2. Lawman 3:56
3. Sweet Revenge 4:10
4. Sharpshooter 3:19
5. Poison 2:54
6. Stone Dead Forever 4:54
7. All the Aces 3:24
8. Step Down 3:41
9. Talking Head 3:40
10. Bomber 3:43
Bonus
11. Over the Top 3:21
12. Leaving Here 3:02
13. Stone Dead Forever (Live) 5:20
14. Dead Men Tell No Tales (Live) 2:54
15. Too Late Too Late (Live)3:21

Lemmy Kilmister - lead vocals, bass guitar, eight-string bass
"Fast" Eddie Clarke - guitar, backing vocals, lead vocals on "Step Down"
Phil "Philthy Animal" Taylor - drums

Lemmy Kilmister
(24/12/1945 - 28/12/2015)
 
STeVeLeSS
The Easybeats "The Definitive Anthology" (2003)
ou "Aussie Fab"

Little Stevie Wright, vous connaissez ? Non ? Le chanteur d'australiens bien partis pour concurrencer leur compétition britannique dans les happy sixties ? Toujours pas ? Friday on My Mind, Hello How Are You, She's So Fine ? Rien ? Avec George Young et Harry Vanda qui deviendront bientôt les producteurs du groupe des frères du premier, AC/DC pour ne pas les nommer ? Ha !, là vous commencez à situer... Hé bien, figurez-vous que la voix d'or des Easybeats, Stevie Wright donc, nous a quitté fin 2015 dans une indifférence française générale ce qui n'est pas surprenant les Easybeats n'ayant jamais vraiment fait leur trou chez nous. Du coup, il n'est pas inutile de ressortir cette roborative Definitive Anthology qui, avec ses 56 titres et plus de deux heures et demie, étanchera la soif de connaissance de curieux qui auront bien raison. Bien raison parce que ces "australiens" (les guillemets parce qu'aucun n'est natif de la grande île exemplifiant, de fait, l'influence des vagues migratoires d'après la seconde guerre mondiale sur une population en pleine extension) commettront quelques haut-faits avant de se séparer en 1969, parce que, quelque part entre les Hollies, les Kinks et les Beatles, ces petits gars surent trouver leur place et déployer, surtout, un arsenal compositionnel qui n'a pas à rougir de la comparaison avec celui de ses modèles. Pour ces raisons, et pour se souvenir des belles capacités vocales d'un des plus vocalistes du genre aussi, cette Definitive Anthology mérite le détour et l'attention des amateurs de pop/rock vintage de qualité. Recommandé.

CD 1
1. Friday On My Mind 2:41 
2. Good Times 3:21 
3. St.Louis 3:12 
4. Rock And Roll Boogie 2:29 
5. Who'll Be The One 2:37 
6. Heaven And Hell 2:42 
7. The Music Goes Round My Head 2:50 
8. Hello How Are You 3:18 
9. Land Of Make Believe 3:12 
10. I Can't Stand It 2:55 
11. Falling Off The Edge Of The World 2:58 
12. Made My Bed Gonna Lie In It 2:55 
13. Saturday Night 3:25 
14. Pretty Girl 2:16 
15. Remember Sam 2:32 
16. Come In You'll Get Pneumonia 3:44 
17. For My Woman 3:06 
18. She's So Fine 2:06 
19. The Old Oak Tree 3:02 
20. Wedding Ring 2:02 
21. It's So Easy 2:09 
22. I'm A Madman 2:51 
23. She Said Alright 2:13 
24. You Got It Off Me 2:27 
25. Sad And Lonely And Blue 2:16 
26. Women (Make You Feel Alright) 2:35 
27. Come And See Her 2:41 
28. I'll Make You Happy 3:10 

CD 2
1. Let Me Be 2:06 
2. Somethin' Wrong 2:16 
3. Sorry 2:16 
4. Funny Feelin' 2:28 
5. Goin' Out Of My Mind 2:40 
6. Not In Love With You 2:37 
7. The Last Day Of May 1:56 
8. Today 2:14 
9. Can't You Leave Her 1:57 
10. River Deep, Mountain High 3:57 
11. Do You Have A Soul 3:38 
12. You Me We Love 3:22 
13. Happy Is The Man 2:41 
14. Hound Dog 3:15 
15. All Gone Boy 2:14 
16. The Music Goes Round My Head (Fast Version) 2:18 
17. Lay Me Down And Die (Instrumental) 3:00 
18. Fancy Seeing You Here 2:35 
19. Bring A Little Lovin' 2:22 
20. Lay Me Down And Die (Vocal) 2:49 
21. Can't Find Love 3:28 
22. Peculiar Hole In The Sky 2:58 
23. I Love Mary 2:37 
24. Who Are My Friends 3:13 
25. Such A Lovely Day 3:12 
26. Little Queenie 2:39 
27. Lisa 3:12 
28. Amanda Storey 2:47

Stevie Wright - Vocals
Harry Vanda - Guitar  
George Young - Guitar
Dick Dimonde - Bass 
Gordon Fleet - Drums 

Stevie Wright
(20/12/1947 - 27/12/2015)
 
aBuS Dangereux
Scott Weiland "12 Bar Blues" (1998)
ou "Gone Solo"

Celui qui connut la gloire en tant que vocaliste des grungers adaptables de Stone Temple Pilots et frontman du supergroupe Velvet Revolver n'est plus, une vie d'excès en tous genres, narcotiques particulièrement, aura fini par le rattraper et ainsi nous voler l'un des plus beaux spécimens de lucky loser que l'Amérique nous ait offerte depuis les années 90 comme exemplairement démontré par son premier album solo, 12 Bar Blues. Un album qui diffère notablement des travaux de ses partenaires d'alors. La petite trentaine, Weiland y explore ses possibles, y assouvit ses envies entrainant l'auditeur dans une aventure auditive à laquelle il ne s'attendait sans doute pas. Parce que Weiland ose !, ne réussit pas toujours mais a tellement, palpablement, envie qu'on ne peut qu'être séduit sans même avoir à prêter attention aux quelques guests de luxe de la galette (Sheryl Crow, à l'accordéon !, et Brad Mehldau). Ainsi, du glam mutant d'ouverture (Desperation #5, y  du Bowie dedans !), d'une power-pop bricolée à l'électro (Barbarella), d'une belle power-ballad qui prouve qu'il peut faire aussi bien que son groupe sans lui (Where's the Man) à un genre de cyber-groove depuis lourdement usité par Muse (Jimmy Was a Stimulator), il y a du grain à moudre et de la qualité à dénicher dans un album parfois un peu too much, la marque des débuts où l'on veut trop bien faire, mais éminemment sympathique hélas aujourd'hui difficile à trouver puisque pour le moment plus édité. Et unique dans la discographie de son auteur qui, comme ses collègues de l'époque, Layne Staley d'Alice In Chains et Kurt Cobain de qui vous savez, aura ultimement été emporté par son malaise. R.I.P.

1. Desperation #5 4:05
2. Barbarella 6:36
3. About Nothing 4:48
4. Where's the Man 4:55
5. Divider 4:23
6. Cool Kiss 4:55
7. The Date 5:21
8. Son 5:04
9. Jimmy Was a Stimulator 3:58
10. Lady, Your Roof Brings Me Down 5:26
11. Mockingbird Girl 5:02
12. Opposite Octave Reaction 4:18

Scott Weiland– lead vocals, beatbox, guitar, keyboards, piano, bass, synthesized bass, drum loops
Tracy Chisolm– theremin
Blair Lamb– beatbox
Holly Reiger– guitars
Jeff Nolan– guitars
Zander Schloss– guitars
Sheryl Crow– accordion
Brad Mehldau– piano
Peter DiStefano– guitars, bass
Victor Indrizzo– vocals, guitar, piano, keyboards, bass, drums
Daniel Lanois– synthesizers
Tony Castaneda– guitars, bass
Martyn LeNoble– bass, cello
Michael Weiland– drums, percussion, drum loops
Suzie Katayama– cello
Novi Novog– viola
Joel Derouin, Robin Lorentz– violin

Scott Weiland
(27/10/1967 - 03/12/2015)
 
(NoVeMBRe)
SoN oF NeW oRLeaNS
Allen Toussaint "The Bright Mississippi" (2009)
ou "Mississippi Memories"

Fils de la Nouvelle Orléans, les diverses actions qu'il organisa ou auxquelles il participa après le cyclone Katrina sont là pour en témoigner, Allen Toussaintétait aussi, surtout !, un compositeur et instrumentiste d'exception. C'est évident sur un album à part de sa discographie, son dernier aussi, malheureusement, parce que c'est un album de presque pur jazz, genre que Toussaint croisa souvent sans jamais tout à fait s'y installer... Alors oui, The Bright Mississippi est une pleine et entière réussite qui ne fait, du coup, que regretter plus amèrement encore la disparition de son auteur parce qu'il permet, en plus, de mettre en lumière celui qui a tellement sévi dans l'ombre (avec les excellents Meters par exemple) sous un jour qui lui sied à merveille. Ainsi est-on plongé dans un bain moite et chaud revisitant de vrais grands standards avec une classe il faut dire bien secondée par une équipe de cadors reconnus (de Marc Ribotà Brad Mehldau en passant par Joshua Redman ou Nicholas Payton) qui se glisse parfaitement dans le fourreau revivaliste de la galette. Et que dire de la performance du maître de cérémonie, qu'il s'attaque à Bechet, Jelly Roll Morton, Django Reinhardt, Monk ou au Duke, il le fait toujours avec talent, délicatesse et un immense respect pour les monstres sacrés qu'il a l'audace de reprendre. Ultime offrande à apprécier à sa juste et immense valeur, The Bright Mississippi est un délice à recommander à tous !

1. Egyptian Fantasy 4:41
2. Dear Old Southland 6:19
3. St. James Infirmary 3:52
4. Singin’ the Blues 5:40
5. Whinin’ Boy Blues 6:42
6. West End Blues 3:52
7. Blue Drag 4:22
8. Just a Closer Walk with Thee 5:11
9. Bright Mississippi 5:08
10. Day Dream 5:27
11. Long, Long Journey 4:51
12. Solitude 5:31

Allen Toussaint– piano and vocal
Don Byron– clarinet
Nicholas Payton– trumpet
Marc Ribot– acoustic guitar
David Piltch– upright bass
Jay Bellerose– drums and percussion
Brad Mehldau– piano
Joshua Redman– tenor saxophone


Allen Toussaint
(14/01/1938 - 10/11/2015)


BaTTeur BaTTu
Motörhead "1916" (1991)
ou "à l'ouverture"

Quelques semaines seulement avant son pote et ex-patron, Phil Taylor tirait sa révérence. Une petite larme au coin de l'œil, parce qu'on l'aimait bien le dégoutant animal (Philthy Animal, son surnom), batteur puissant et speedé idéal pour la mixture rock'n'rollesque de l'ami Lemmy qu'il honora de sa présence de 75 à 84 puis de 87 à 92. Présentement, nous sommes dans sa deuxième pige, alors que, Motörhead, pour la première fois de sa carrière, joue en quatuor avec, donc, deux guitaristes, Phil Campbell qui restera jusqu'à la fin et Würzel (décédé en 2011) qui restera 9 ans et six albums avant que le groupe ne reprenne sa marche de fier power-trio, mais ça c'est une autre histoire... Parce qu'en 1991, pour ce 1916 neuvième long-jeu studio de sa discographie, Motörhead, qu'on croyait ne jamais entendre changer d'un iota immuable machine de guerre qu'il semblait être, a des envies d'ouverture, qui vont jusqu'à une ballade orchestrale (sur la première guerre mondiale, on ne s'aventure tout de même pas dans les frivolités habituelles de l'exercice) qui donne d'ailleurs son titre à l'album et est d'ailleurs aussi surprenante que réussie. Ca ne veut évidemment pas dire qu'on ne retrouve pas le trademark sound de ces affreux, dès The One Who Sing the Blues, et à moult occasions ensuite, Lemmy et se acolytes défouraillent sévère sur un matériau qui tient tout à fait la route (voir les supra-efficaces I'm So Bad (Baby I Don't Care)Make My Day, R.A.M.O.N.E.S. et Shut You Down) et contentera l'amoureux de hard rock'n'roll rentre-dedans comme seule la Tête-de-Moteur sait en produire. Mais donc il y a aussi des libertés avec le dogme qui sont prises, un refrain presque hard-pop sur No Voices in the Sky, un rock'n'roll "fiftiesant" sur l'excellent Going to Brazil et le correct Angel City, une étrangeté péri-progressive un peu ratée mais pas inintéressante (Nightmare/The Dreamtime), une authentique, typique même !, power-ballad qui fonctionne étonnamment bien considérant l'organe particulier du sieur Kilmister (Love Me Forever). Tout ça fait de 1916, ultime participation intégrale à un album de Motörhead du regretté Phil Taylor, un album un peu à part dans la discographie de la légendaire formation qu'on recommande, du coup, aussi à ceux qui pensent que ces gars-là ne font que du bruit blanc.

1. The One to Sing the Blues 3:07
2. I'm So Bad (Baby I Don't Care) 3:13
3. No Voices in the Sky 4:12
4. Going to Brazil 2:30
5. Nightmare/The Dreamtime 4:40
6. Love Me Forever 5:27
7. Angel City 3:57
8. Make My Day 4:24
9. R.A.M.O.N.E.S. 1:26
10. Shut You Down 2:41
11. 1916 3:44

Lemmy– bass, vocals
Phil "Wizzö" Campbell– guitar
Würzel– guitar
Phil "Philthy Animal" Taylor– drums

Phil "Philthy Animal" Taylor
(21/09/1954 - 11/11/2015)
 
No JeRiCHo
Sly and the Family Stone "There's a Riot Goin' On" (1971)
ou "Funk Fires"

En hommage à la trompettiste Cynthia Robinson, quoi de mieux que le grand classique  auquel elle participa ?.... Situons,  mai 1971 Marvin Gaye sort son chef d'œuvre absolu, What's Going On, album politique dont les notes d'espoir sont sans aucun doute influencées par le positivisme humaniste de Martin Luther King. Même pas une demi-année plus tard, Sly Stone, un tout autre genre d'animal, semble lui répondre, Malcolm X musical du Luther Gaye, There's a riot goin' on. Lucide, le gars.
Et bouillant album de rupture ou la contestation joyeuse de Stand! se mue en colère sourde. Parce qu'en ces seventies commençantes, Sly n'est plus tout à fait le même, et l'Amérique plus tout à fait la même non plus.
Parce que, dans l'Amérique des années 70, les luttes sociales, raciales et sociétales ne se sont pas éteintes, elles ne font, de fait, que se radicaliser à mesure que les différents camps s'organisent, idéologiquement comme matériellement, et parce que Sly commence à sérieusement souffrir des addictions qui l'éloigneront petit à petit des spotlights, et d'enregistrements de qualité. Mais nous n'en sommes pas là, Sly et son collectif multiracial sont toujours une fantastique machine à groover avec le poing dressé et la menton haut, apanage d'une jeunesse ne se suffisant pas d'un ordre établi claustrophobe. Ca nous donne un album notablement plus sombre, plus extrême même quand il se frotte à des thèmes plus frivoles, véhiculant la violence de la résignation comme peu réussirent à le faire. Un album évidemment doté de quelques immortels aux premiers desquels on citera le blues languissant Just Like a Baby, la soul presque naturaliste de Family Affair (un beau concurrent pour les tubes de Stevie Wonder de la même époque), le jammy et délicieux Africa Talks to You et ses inclinaisons gospel post-Woodstock, le léger et délicat (You Caught Me) Smilin' essentiel comme l'un des rares rais de lumière de la galette, ou l'adaptation réussie de Thank You (Falettinme Be Mice Elf Agin) en funk lent et lourd qu'est Thank You for Talkin' to Me Africa. Mais ce ne sont que quelques exemples d'une galette sans faux-pas, égale en qualité à l'essentiel Stand!, autre pinacle du funk "sly-stonien".
Album admirablement de son temps à la mise en son sourde et organique (faut aimer les basses !), There's a Riot Goin' On restera hélas l'ultime coup d'éclat de Sly et de sa famille complètement stone, dommage ! Dommage parce qu'avec Funkadelic/Parliament, Gil Scott-Heron et quelques autres, Sly Stone représentait un possible d'une black musique intelligente et concernée par le monde qui l'entoure transcendant les communautés et les genres avec un naturel et une classe qu'on aimerait rencontrer plus souvent. Raison de plus pour ne pas bouder son plaisir en plongeant ou replongeant dans ce furieux bain sonique, et encore moins dans cette édition remasterisée définitive rendant enfin justice à l'édition de cire noire originelle. Impeccable, quoi ! Et une petite pensée pour la grande dame qui nous a quitté, Cynthia Robinson.

1. Luv n' Haight 4:01
2. Just Like a Baby 5:12
3. Poet 3:01
4. Family Affair 3:06
5. Africa Talks to You 'The Asphalt Jungle' 8:45
6. There's a Riot Goin' On 0:00
7. Brave & Strong 3:28
8. (You Caught Me) Smilin' 2:53
9. Time 3:03
10. Spaced Cowboy 3:57
11. Runnin' Away 2:51
12. Thank You for Talkin' to Me Africa 7:14
Bonus
13. Runnin' Away (mono single version) 2:44
14. My Gorilla Is My Butler (instrumental) 3:11
15. Do You Know What? (instrumental) 7:16
16. That's Pretty Clean (instrumental) 4:12

Sly Stone - arrangements, drums, drum programming, keyboard programming, synthesizers, guitar, bass, keyboards, vocals
Larry Graham - bass, backing vocals
Greg Errico, Gerry Gibson - drums
Bobby Womack, Freddie Stone, Ike Turner - guitar
Billy Preston - keyboards
Jerry Martini - tenor saxophone
Cynthia Robinson - trumpet
Rose Stone - vocals, keyboards
Vet Stewart, Elva "Tiny" Mouton, Mary McCreary (aka Little Sister) - backing vocals


Cynthia Robinson
(12/01/1944 - 23/11/2015)
 
JeaN Du PauVRe
Jacques Brel "Les Bonbons" (1966)
ou "Joli paquet"

Quand on pense accordéoniste de Brel, on pense forcément, en premier lieu, à Marcel Azzola, il ne faudrait cependant pas en oublier Jean Corti qui accompagna aussi l'homme du Plat Pays et vient de nous quitter. Des collaborations du ténor du piano du pauvre et du flamand contrarié, LesBonbons (cru 1966 auquel on attribue le titre de sa première chanson) est, sans aucun doute, la plus belle pièce. Il n'y a, en fait, qu'à regarder la liste des compositions proposées, quasiment que des classiques !, pour s'en persuader mais, puisque c'est aussi d'un hommage à Jean Corti dont il s'agit, intéressons nous à sa performance : de discrète sur le chef d'œuvre de tristesse qu'est Les Vieux, bien cadrée et mélodique sur l'intense Dernier Repas, fière sur Les Toros, joliment jazzy sur Les Filles et les Chiens, jusqu'au coup de java des Bigotes et sa pièce majeure d'un exercice où il ne s'impose jamais lourdement, Les Fenêtres, où il se voit offrir le plus de latitude, c'est d'un immense professionnalisme en plus d'une évidente maîtrise instrumentale dont il s'agit démontrant que son instrument de prédilection est bien plus qu'un "soufflet à guincher". Evidemment, avec de pareilles compositions (les seules que vous ne connaissez peut-être pas déjà, J'aimais et Les Fenêtres méritent votre attention) sur de pareils textes, Brelà son sommet et ce n'est pas fini !, c'est de caviar dont il s'agit pour un musicien. Et pour l'auditeur qui s'y rendra compte que cette musique-là a peut-être un demi-siècle, elle n'en a pas pour autant pris la moindre ride. Essentiel.

1. Les Bonbons 3:29
2. Les Vieux 4:04
3. La Parlote 3:25
4. Le Dernier Repas 3:25
5. Titine 2:24
6. Au suivant 3:05
7. Les Toros 2:18
8. La Fanette 4:06
9. J'aimais 4:01
10. Les Filles et les Chiens 2:55
11. Les Bigotes 2:40
12. Les Fenêtres 2:45
Bonus
13. Quand maman reviendra 3:45
14. Les Amants de cœur 4:44

Jacques Brel ; chant
Jean Corti : accordéon
François Rauber : Arrangements et direction d'orchestre

Jean Corti
(1929 - 25/11/2015)
 
(oCToBRe)
FuRieuX TRoMBLoN
The Stooges "Funhouse" (1970)
ou "House of Holy Noise"

Le moins connu des Stooges ? Probablement, et pourtant, quel abattage ! Parce que le sax hurlant de Steve Mackay, qui arrive tout juste, et encore juste sur la deuxième face de ce séminal Funhouse, mais sera dès lors de toutes les formations des furieux étatsuniens, c'est tout de même quelque chose ! Or donc, puisque c'est de ce surpuissant souffleur de chaos dont il s'agit à l'occasion de sa regrettée disparition, et sans oublier la très haute tenue d'une première face où les Stooges n'ont jamais été aussi tight (merci Don Gallucci, de chez les Kingsmen, et sa production offrant un cadre presque live aux bostoniens et aux progrès de Ron Asheton sur ses six cordes), intéressons nous à cette face B qui commence très fort avec un 1970 en forme de perfection garage où le soli furieusement jazzy de Mackay vient juste à point pour créer l'élément de surprise qui couronne la réussite, se poursuit avec un Fun House délicieusement jammy (et un Steve omniprésent) et se conclut sur un apocalyptique et jouissif grand n'importe quoi L.A. Blues tout en furie et sorties de routes... Fort, très fort. A l'image, en vérité, d'un album capturant la substantifique moelle de ces Stooges chenapans protopunks d'absolue référence, avec Iggy qui influencera tellement ce que signifie un frontman possédé, qui ne feront plus mieux mais ça, c'est une autre histoire... Funhouse ? Immanquable, tout simplement !

1. Down on the Street 3:42
2. Loose 3:33
3. T.V. Eye 4:17
4. Dirt 7:00
5. 1970 5:14
6. Fun House 7:45
7. L.A. Blues 4:52

Iggy Pop– vocals
Ron Asheton– guitar
Dave Alexander– bass guitar
Scott Asheton– drums
Steve Mackay– saxophone
Don Gallucci– production, organ overdubs

Steve Mackay
(25/09/1949 - 11/10/2015)
 

Meat Is Murder #2

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C'est le retour des végétariens ! C'est surtout l'occasion de vous proposer de bons albums par de beaux artistes qui se trouvent, en plus, n'en déplaise aux amateurs de carcasse, ne feraient pas de mal à une mouche. Enjoie !

DaMoN aLBaRN
Blur "Modern Life Is Rubbish" (1993)
ou "Avant la gloire"

Avant la gloire mais déjà les dents plantées dedans parce qu'après un premier album relativement anonyme, et s'adaptant à la nouvelle donne qui voit le curseur de la tendance pencher une fois de plus vers la pop, donc un peu opportuniste mais suffisamment talentueux pour pouvoir se le permettre, Blur sort un second album qui est, en fait, le vrai lancement de sa carrière vers les sommets. Et donc fini le shoegaze, welcome à la britpop dans un album varié et malin où la formation se cherche encore un peu mais se trouve déjà largement quand elle approche de la muse qui jadis honora Ray Davies (les très kinksiens For Tomorrow, Colin Zeal et Coping sur un album qui, globalement, doit beaucoup à la plus sous-estimée des formations britanniques des sixties) taquine le Bowie des early seventies (Star Shaped) ou semble hommager ce grand fou de Syd Barrett (Oily Water, Miss America, Resigned) voire des Beatles qui ne sont jamais bien loin (Sunday Sunday) ou offrir une résurgence punkoïde bien troussée (Advert), tout ceci en développant quand même une vraie personnalité parce que les vocalises d'Albarn, les parties souvent un peu à la marge de Graham Coxon et la basse chantante d'Alex James sont  déjà des caractéristiques fortes d'une formation prête pour la gloire... qui ne tardera plus. Alors, certes Modern Life Is Rubbish n'est peut-être pas la pièce la plus essentielle du répertoire de Blur mais, parce qu'elle possède ce petit quelque chose de frais et d'innocent qui lui donne un vrai charme supplémentaire, c'en est assurément une qu'il ne faut pas négliger et qu'on recommande donc, chaudement.

1. For Tomorrow 4:18
2. Advert 3:43
3. Colin Zeal 3:14
4. Pressure on Julian 3:30
5. Star Shaped 3:25
6. Blue Jeans 3:53
7. Chemical World 4:02
   Intermission 2:27
8. Sunday Sunday 2:36
9. Oily Water 4:59
10. Miss America 5:34
11. Villa Rosie 3:54
12. Coping 3:23
13. Turn It Up 3:21
14. Resigned 5:13
    Commercial Break 0:56

Damon Albarn – vocals, piano, keyboards
Graham Coxon – guitar, backing vocals
Alex James – bass guitar
Dave Rowntree – drums
&
Kick Horns – brass ("Sunday Sunday")
Kate St John – oboe ("Star Shaped")

DAMON ALBARN

RiCHaRD Ashcroft
The Verve "Forth" (2008)
ou "Le Retour"

On ne les attendait pas (plus ?) et d'ailleurs ils ne font que passer... Il faut dire que Forth, l'album du retour temporaire de The Verve, 8 ans après leur séparation, 11 depuis leur dernier long-jeu, a un petit côté opportuniste quand on sait à quel point Ashcroft, dont la carrière solitaire ne décollait pas, s'était récrié que jamais The Verve ne reviendrait, qu'on avait plus de chance de réunir les quatre Beatles sur scène que de voir son ancienne formation revenir. Et puis si, et John Lennon n'en est pas revenu d'entre les morts pour autant, Cool Georgie itou, et pourtant il est bien là ce quatrième album dans les nuages. C'est dire si les trois autres ont bataillé pour convaincre Richard de rechausser ses space-boots ! Mais le jeu en vaut-il la chandelle ? Oui et non. Dans les faits, c'est d'un bon album dont il s'agit avec des chansons qui fonctionnent admirablement, un Ashcroft qui sort enfin de son endormissement solo grâce à la saine électricité de ses trois compères (le guitariste, Nick McCabe, en particulier), que les ambiances planantes, pop et même parfois dansantes (Love Is Noise groove joliment) "roulent Raoul" sans tomber dans le racolage, que les capacités à créer de beaux climats tendus et spatiaux n'a pas déserté le quatuor (le bien nommé Noise Epic est là pour le prouver, magistralement), bref, c'est du bel ouvrage. Mais non parce que le coup d'avant, une éternité plus tôt, sur un Urban Hymns parfait équilibre de tous les possibles de la formation en plus d'une mine à singles (Bittersweet Symphony bien sûr mais aussi The Drugs Don't Work et, à un moindre degré, Lucky Man), The Verve avait trouvé quelque chose qu'il n'arrive pas à reproduire ici, plus préoccupé par un psychédélisme trippant que par un "banking" sur l'événementiel d'un album qui, de toute façon, se vendit fort bien. Voilà, c'est Forth, un album finalement plus à recommander à ceux qui pensent que leur plus fameux long jeu était un peu une trahison d'une éthique artistique plus élevée. En bref, choisis ton camp camarade mais sache que The Verve revenant n'est pas un ratage, juste un album qui fait beaucoup moins de concessions que ce qu'on aurait pu imaginer.

1. Sit and Wonder 6:52
2. Love Is Noise 5:29
3. Rather Be 5:38
4. Judas 6:18
5. Numbness 6:34
6. I See Houses 5:37
7. Noise Epic 8:13
8. Valium Skies 4:34
9. Columbo 7:30
10. Appalachian Springs 7:33

Richard Ashcroft– vocals, acoustic guitars, keyboards
Nick McCabe– lead guitar, keyboards, vibraphone, autoharp
Simon Jones– bass guitar
Peter Salisbury– drums, percussion
&
Davide Rossi
– string arrangements, violins (tracks 1, 2, 3, 4, 6 and 8)

RICHARD ASHCROFT

PauL MCCaRTNey
Paul McCartney "Memory Almost Full" (2007)
ou "Pop Mémoires"

Même pas deux ans depuis son retour triomphal à une pop plus Beatles que jamais (sur le très recommandé Chaos and Creation in the Backyard) et, déjà, Paulo revient aux affaires, Macca fait son retour discographique sur le terrain où on l'attend tous (alors qu'on se fiche de ses délires néo-classiques comme cet Ecce CorMeum sorti quelques mois plus tôt), dire que Memory Almost Full est, du coup, sérieusement attendu au tournant, parce qu'un vieux crouton comme lui ne peut pas nous faire le coup deux fois de suite, impossible !, tient du doux euphémisme. Et on n'est presque pas déçu. Mais presque, ça veut dire qu'on est tout de même un peu déçu et, du coup, on en cherche la raison. On remarque que l'album est une création contemporaine de son prédécesseur discographique, qu'on y retrouve une équipe plus resserrée aussi, 6 chansons avec ses musiciens de scène, sept autres absolument seul, plus dans la tradition de Macca en solo que des Beatles seconde période (la meilleure !), mais, surtout, qu'à l'anglais Nigel Goldrich qui, dit-on, aurait poussé papy dans ses retranchements, se substitue l'américain David Kahne au parcours multicarte laissant deviner qu'il est là pour faire le boulot que souhaite le client. Ce qui influence sans doute le côté plus pépère d'un album très agréable mais, indéniablement, un rien routinier. Mais agréable !, avec de bonnes chansons où l'orfèvre pop assume parfaitement sa nostalgie douce-amère. Rentrer dans le détail, à partir de là, n'est pas franchement nécessaire, vous savez ce que vous y entendrez, de la pop évidemment qui, acoustique, orchestrale, électrique prouve, une fois encore, que ce monsieur a plus que de beaux restes. Oui mais ça ne vaut pas Chaos and Creation in the Backyard (gna gna gna, on se répète) ce qui est, en vérité, le seul vrai défaut de ce Memory Almost Full de très belle tenue.

1. Dance Tonight 2:54
2. Ever Present Past 2:57
3. See Your Sunshine 3:20
4. Only Mama Knows 4:17
5. You Tell Me 3:15
6. Mr. Bellamy 3:39
7. Gratitude 3:19
8. Vintage Clothes 2:22
9. That Was Me 2:38
10. Feet in the Clouds 3:24
11. House of Wax 4:59
12. The End of the End 2:57
13. Nod Your Head 1:58

Paul McCartney played all instruments except for "Only Mama Knows", "You Tell Me", "Vintage Clothes", "That Was Me", "Feet in the Clouds", and "House of Wax", where he was joined by the following musicians (all from his touring band):
Paul 'Wix' Wickens– keyboards
Rusty Anderson– lead guitar
Abe Laboriel Jr.– drums
Brian Ray– rhythm guitar

PAUL MCCARTNEY

JeFF BeCK
Jeff Beck "Who Else!" (1999)
ou "Electrojeff"

Un album de musique électronique pour guitariste ? Satriani s'y est cassé les dents (Engines of Creation), Jeff Beck relève le gant, y a pas à dire, si les deux axemen sont du même monde, leurs inspirations sont des planètes opposées entre classe intégrale pour l'ex-Yardbirds et clinquant systématique pour le chauve ricain (ce qui ne retire absolument rien à son excellente technique d'authentique virtuose). Evidemment, on vous dira que les deux sont d'une autre génération, d'une autre culture et que ça fait toute la différence, ce sont surtout deux personnalités musicales fort différentes avec un Satriani qui raccroche tout à son univers quand Jeff sait se laisser aller, s'immerger totalement dans son sujet de choix comme c'est évident dès un What Mama Said où l'alliance qu'il a fomenté avec quelques habitués invités mais surtout l'ancienne guitariste de Michael Jackson, Jennifer Batten et un Tony Hymas omniprésent et compositeur de la majorité des pistes et coproducteur de la galette avec le maître de cérémonie découle sur un mix où il parait tout à fait naturel qu'un six-cordiste de 55 balais sonne comme Prodigy. Mais si Jeff a dédié son album à une évolution technoïde qui lui va bien au teint, il n'en oublie pas pour autant les fondamentaux comme sur un Brush with the Blues qui, devinez quoi !, est un blues, tout a fait réussi d'ailleurs, un Blast from the East aux flaveurs orientales bienvenues, ou de la guitare qui pleure et plane comme sur Angel (Footsteps) ou Declan. Au bout du compte, force est de constater que Who Else! est une vraie réussite de plus pour un Jeff Beck toujours aussi polyvalent et talentueux.

1. What Mama Said 3:22
2. Psycho Sam 4:55
3. Brush with the Blues 6:24
4. Blast from the East 4:46
5. Space for the Papa 7:41
6. Angel (Footsteps) 6:30
7. THX138 6:15
8. Hip-Notica 4:40
9. Even Odds 3:29
10. Declan 4:02
11. Another Place 1:48

Jeff Beck– guitar
Jennifer Batten– guitar, guitar synthesizer
Mark John– guitar (track 10)
Tony Hymas– keyboard (except track 9), sound effects
Jan Hammer– keyboard (track 9), drums (track 9)
Simon Wallace– synthesizer (track 10)
Steve Alexander– drums (except tracks 2, 9)
Manu Katché– drums (track 2), percussion (track 2)
Randy Hope-Taylor– bass (except track 2)
Pino Palladino– bass (track 2)
Bob Loveday– violin (track 10)
Clive Bell– flute (track 10)

JEFF BECK

KaTe BuSH
Kate Bush "Aerial" (2005)
ou "High as Kate"

12 ans ! C'est le temps qu'il aura fallu pour enfin découvrir le successeur d'un Red Shoes qui n'avait que partiellement convaincu, une éternité. Tellement qu'on craint presque les retrouvailles, parce qu'on a tant aimé Kate Bush... Alors on glisse la première des deux galettes dans le tiroir prévu à cet effet et découvre ce que cette Mer de Miel nous réserve. Et, pas de doute, c'est Kate que l'on retrouve, inchangée sauf à considérer les détails d'arrangements précieux, conçus dans son propre studio, comme un facteur d'évolution, d'innovation déterminant. Mais comme de King of the Mountain (qui rappelle que Kate est une cousine (pas si) éloignée de Peter Gabriel), d'un π tournant allégrement autour de la folk music, d'un Bertie qu'on croirait sorti de temps immémoriaux avec ses allures de musique classique de la renaissance, à un Coral Roomà l'instrumentation aussi minimale que son impact émotionnel est important, c'est une excellente collection que nous nous voyons offerte, on ne se plaint pas et, au contraire, célèbre le retour en force d'une grande artiste. Après une telle fête, on se dit que c'est trop beau pour durer que le second disque argenté ne peut décemment par relever le challenge de son  si brillant devancier. Et puis A Sky of Honey, 9 pistes indépendantes dans la première édition fondues en une dans les suivantes, encore plus planant, encore plus mystique, encore plus elfique, un rêve éveillé qui nous emmène haut, si haut ! En vérité, le tour de force ne se décrit pas sauf à dire qu'on fera mieux de s'y abandonner totalement pour un impact maximal, impact dans le cœur évidemment parce que la poudre, sauf celle de perlimpinpin ?, est logiquement absente de cette excellente planerie. Retour en force d'une grande dame qui avait partiellement déçu, rachat qui se confirmera avec TheDirector's Cut (une correction de son Sensual World et de The Red Shoes) et 50 Words for Snow qui, certes, n'égalent pas la grâce du présent opus mais s'en sortent cependant avec plus que les honneurs. Reste donc Aerial, un obligatoire pour ceux qui aiment voyager dans leur tête sur des sons venus d'un autre monde, celui de Madame Kate Bush.

CD 1
A Sea of Honey

1. King of the Mountain 4:53
2. π 6:09
3. Bertie 4:18
4. Mrs. Bartolozzi 5:58
5. How to Be Invisible 5:32
6. Joanni 4:56
7. A Coral Room 6:12

CD 2
A Sky of Honey

1. Prelude 1:26
2. Prologue 5:42
3. An Architect's Dream 4:50
4. The Painter's Link 1:35
5. Sunset 5:58
6. Aerial Tal 1:01
7. Somewhere in Between 5:00
8. Nocturn 8:34
9. Aerial 7:52

Kate Bush– vocals, piano and keyboards
Peter Erskine, Stuart Elliott, Steve Sanger– drums
Eberhard Weber, John Giblin, Del Palmer– bass
Bosco D'Oliveira– percussion
Dan McIntosh– electric and acoustic guitars
Gary Brooker– hammond organ
Rolf Harris– didgeridoo
Lol Creme, Gary Brooker, Paddy Bush– backing vocals
Michael Wood– male vocal on "A Coral Room"
Chris Hall– accordion
Richard Campbell, Susan Pell– viols
Eligio Quinteiro– renaissance guitar
Robin Jeffrey– renaissance percussion
Rolf Harris– as The Painter (a character in "A Sky of Honey")
Albert McIntosh– as The Sun (a character in "A Sky of Honey")

KATE BUSH

DouG MaRTSCH
Built to Spill "Keep It Like a Secret" (1999)
ou "Secret Stars"

Un des secrets les mieux gardés du rock indépendant nord-américain, Built to Spill est de ces groupes auquel seul un petit clan semble vouloir s'intéresser même si, parfois, le vu-mètre de la renommée semble vaciller en leur faveur comme sur le cru de fin de millénaire, Keep It Like a Secret. On pourrait dire qu'on a ici affaire à un excellent jeu de piste et on aurait raison parce que, indéniablement, la musique de Built for Spill est extrêmement référencée (Neil Young vous pète à la gueule dès le premier titre, par exemple, vocalement et instrumentalement) mais c'est dans la qualité des chansons de Doug Martsch que réside la substantifique moelle de l'alors trio. Parce que le petit gars de Boise, Idaho a le truc pour vous pondre du rock intelligent et créatif des petits bouts qu'il a choppé ailleurs et qu'il fait présentement plus que recycler, qu'il s'approprie pour en faire sa propre créature. Alors, forcément, il y a un petit côté Pixies là dedans, une dose du Dinosaur Jr. De J Mascis aussi, un cousinage avec WeezerGrandaddy ou Pavement (que des références hautement estimables ceci dit en passant) mais quand ça donne des machins aussi réussis et addictifs que le passionné The Plan, le malin Center of the Universe (qui vous trottera longtemps dans le ciboulot), le surprenant Time Trap (qui ne sait jamais trop à quel style il appartient et qu'on aime pour ça), le ludique You Were Right qui s'amuse à réutiliser les fameuses phrases d'autres artistes devenues depuis autant de clichés (que les anglophones s'y collent, c'est excellent) ou le trip final du très Crazy HorseBroken Chairs et ses presque 9 minutes d'électricité créative, on n'a nullement matière à se plaindre. Built to Spill a, avant et après ce quatrième album si réussi, sorti moult opus fort recommandables (toute leur discographie mérite le détour si vous mordez à l'hameçon de celui-ci) aussi dire que Keep It Like a Secret est leur plus beau fleuron devraient vous indiquer à quel point il vous le faut, là, maintenant, tout de suite !

1. The Plan 3:29
2. Center of the Universe 2:43
3. Carry the Zero 5:44
4. Sidewalk 3:51
5. Bad Light 3:22
6. Time Trap 5:22
7. Else 4:09
8. You Were Right 4:45
9. Temporarily Blind 4:48
10. Broken Chairs 8:40

Doug Martsch - guitar, vocals, producer
Brett Nelson - bass
Scott Plouf - drums
&
Sam Coomes
- keyboards on "Broken Chairs"

DOUG MARTSCH

BRiaN May
Brian May "Back to the Light" (1992)
ou "Another Brian"

Brian May le dit lui-même, Back to the Lightétait sa façon de ne pas sombrer dans une fatale dépression suite aux disparitions successives de son père (qui conçut avec lui sa "signature guitar") et de Freddie Mercury. Se plonger dans le travail pour éviter de se noyer dans les larmes : un exutoire efficace pour l'élégant axeman de Queen. Et, il faut avouer, l'album n'est pas mal du tout. Pas exempt de ressemblances avec son groupe historique non plus. Ce qui n'est que logique, me direz-vous, l'importance de la "touche May" chez la Reine n'ayant échappé à personne. Ainsi, outre les rifferies et soli habituels, retrouve-t-on d'autres éléments marquants du "son Queen" : refrains chorales quasi-opératiques, mélodies accrocheuses entre pop, hard rock et stadium rock, arrangements au cordeau enrichissant la performance, etc. Evidemment, il y a aussi des différences parce May n'est pas Mercury vocalement mais aussi parce que, guitariste de son état, il centre sa musique sur son instrument et sa capacité de le rendre émouvant et toujours supra-mélodique, ça va sans dire mais disons-le quand même. Côté compositions, ça se traduit par une jolie collection où aucun titre ne déçoit même si certains convainquent plus que d'autres. Des exemples ? Back to the Light, rocker mid tempo au refrain si Queenesque qu'on s'y croirait presque. Resurrection, puissant et racé où May nous désosse les feuilles à grands coups de guitares tranchantes qui, pour le coup, rappellerait plus le Rainbow du début des 80s. Too Much Love Will Kill You, repiqué version Mercury pour Made In Heaven (et initialement prévu pour The Miracle), ballade péri-orchestrale toute en émotion. Driven by You et I'm Scared, deux hard rock mid-tempo comme savait en faire qui vous savez. Last Horizon, instrumental où May démontre, entre prodiges instrumentaux et émotionnels le fantastique six-cordiste qu'il est et combien son "trademark sound" est inimitable. Let Your Love Rule Your Head et ses effluves country rock du meilleur effet. Oui, vraiment, une belle collection d'autant que le reste, plus anecdotique mais néanmoins éminemment sympathique, s'écoute avec un vrai plaisir. Evidemment, le fantôme de Freddie est souvent présent sur la galette tant et si bien qu'on se demande régulièrement ce qu'il serait advenu de ces titres traités par la Reine. Ca n'en amoindri nullement le plaisir d'un album salvateur pour son compositeur et fondamentalement très réussi.

1. The Dark 2:20
2. Back to the Light 4:59
3. Love Token 5:55
4. Resurrection 5:27
5. Too Much Love Will Kill You 4:28
6. Driven by You 4:11
7. Nothin' But Blue 3:31
8. I'm Scared 4:00
9. Last Horizon 4:10
10. Let Your Heart Rule Your Head 3:51
11. Just One Life 3:38
12. Rollin' Over 4:36

Brian May - tout sauf...
Cozy Powell - batterie (2, 3, 4, 7, 8)
Goeff Dugmore - batterie (10, 12)
Gary Tibbs - basse (2, 10, 11, 12)
Neil Murray - basse (3, 8)
John Deacon - basse (7)
Suzie O'List, Gill O'Donovan - chœurs (10)
Mike Moran - piano (3, 12), claviers (9)
Don Airey - claviers additionnels (4, 7)

BRIAN MAY

BoB MaRLey
Bob Marley & the Wailers "Exodus" (1977)
ou "Reggae Deluxe"

Il fait indéniablement partie de ceux qu'on ne vend pas parce que, c'est entendu, la carrière de Bob Marley, avec ou sans les deux autres vrais Wailers, Bunny et Peter, présentement absents depuis deux albums, est entrée au Panthéon des grands classiques. On n'en viendrait presque à oublier l'étrangeté de l'accession à la "staritude" internationale d'un petit gars de la Jamaïque avec une drôle de coiffure et de drôles de cigarettes chantant sur un drôle de rythme chaloupé des paroles spirituelles ou revendicatrices. Bob Marley, première star de la "world music", évidemment, est donc seul capitaine à bord de son groupe et tout va bien, les albums s'enchainent et le succès ne fait que croître et personne ne trouve rien à y redire parce qu'il est mérité. Il faut dire qu'en 1977, loin du punk sauf à considérer une communion d'âme avec les plus politisés des britishs énervés, Bob est non seulement au sommet de sa gloire mais aussi une mine à grandes chansons. De fait, Exodus, un épatant déroulé de sa verve, est une galette sans faux-pas qui, d'un Natural Mystic impeccablement planant, où la performance du guitariste Junior Marvin est particulièrement remarquée, à l'excellent chant de paix clôturant l'opus originel (One Love/People Get Ready qui hommage au passage Curtis Mayfield), il n'y a rien à jeter. Evidemment, certaines sont plus connues du grand public (celui qui a Legend), mais le reste, du pur roots reggae de compétition, mérite autant l'attention de l'auditeur (en particulier l'excellente ballade Turn Your Lights Down). Deluxe oblige, il y a une sacrée quantité de matériau bonus à la belle réussite d'époque, un inédit de qualité et quelques versions alternatives ou dubs sur la première galette, et sur la deuxième un excellent live au Rainbow de Londres et de précieuses sessions avec Lee Perry pour les essentiels Punky Reggae Party et Keep On Moving et leur dubs respectifs (une spécialité du démoniaque Scratch, c'est dire la qualité). Parfait. Bien remasterisé, excellemment bonussé, Exodus est un essentiel de toute collection qui se respecte, point barre.

CD 1
1. Natural Mystic 3:28
2. So Much Things to Say 3:08
3. Guiltiness 3:19
4. The Heathen 2:32
5. Exodus 7:40
6. Jamming 3:31
7. Waiting in Vain 4:16
8. Turn Your Lights Down Low 3:39
9. Three Little Birds 3:00
10. One Love/People Get Ready 2:52
Bonus
11. Roots (b-side of "Waiting in Vain") 3:42
12. Waiting in Vain (alternative version) 4:43
13. Jamming (long version) 5:52
14. Jamming (Version) 3:04
15. Exodus (Version) 3:08

CD 2
Exodus tour (Live at the Rainbow Theatre, London, 4 June 1977)

1. The Heathen 6:48
2. Crazy Baldhead/Running Away 9:21
3. War/No More Trouble 7:44
4. Jamming 7:07
5. Exodus 11:46
Sessions with Lee Perry, July / August 1977
6. Punky Reggae Party 9:18
7. Punky Reggae Party (dub) 8:47
8. Keep on Moving 6:25
9. Keep on Moving (dub) 6:15
10. Exodus/Waiting in Vain (advertisement) 1:07

Bob Marley– lead vocal, rhythm guitar, acoustic guitar, percussion
Aston "Family Man" Barrett– Fender bass, guitar, percussion
Carlton Barrett– drums, percussion
Tyrone Downie– keyboards, percussion, backing vocals
Alvin "Seeco" Patterson– percussion
Julian (Junior) Marvin– lead guitar
I Threes (Rita Marley, Marcia Griffiths, Judy Mowatt) – backing vocals

BOB MARLEY

Eddie VeDDeR
Pearl Jam "No Code" (1996)
ou "Classic Rock"

Pearl Jam change, Pearl Jamévolue, Pearl Jam surprend... Mais seulement ceux qui n'avaient pas prêté attention aux racines bien implantées de cinq de Seattle, et de leur quasi-inamovible producteur, Brendan O'Brien. Les racines en question sont celles qui relient Vedder et ses amis à Bruce Springsteen, Neil Young et plus généralement à toute la tradition du rock américain blue collar concerné. Il y avait déjà de très présents indices sur Ten, Vs. et Vitalogy, de plus en plus évidents à chaque album, sur No Code, la transition est accomplie. Ce n'est pas à dire que toute trace d'agressivité électrique punkoïde ait disparue, non, encore cette fois, depuis Vitalogy en fait, ces gars-là savent faire parler la poudre dans de courtes saillies cure-tympans de première bourre (Hail Hail, Habit, Lukin, tous très réussis) mais, cette fois, ils s'aventurent aussi très souvent dans de territoires qu'ils n'avaient précédemment qu'effleuré d'une folk rock plus que convaincante (Who You Are et ses flaveurs indiennes, Off He Goes ou le Boss romantique bien revisité, l'aérien Present Tense ou la magnifique ballade "à la Neil" de clôture, Around the Bend) à un rock mesuré encore bouseux sous les semelles (un Sometimes rampant d'ouverture, un Smile ou un Red Mosquito qui doivent beaucoup au Loner). Et donc, fidèle à lui-même et malgré tout en constante évolution, avec cette fois une production "normale" (contrairement aux délires de Vitalogy) qui met parfaitement en valeur les qualités d'auteurs de Gossard, Ament& Cie, mais surtout d'Eddie Vedder qui s'y impose, encore plus que le coup d'avant où il dominait pourtant, comme l'aiguillon d'une formation qui sait où elle va, directement au Panthéon des grands rockers étatsuniens !

1. Sometimes 2:40
2. Hail, Hail 3:41
3. Who You Are 3:50
4. In My Tree 3:59
5. Smile 3:52
6. Off He Goes 6:02
7. Habit 3:35
8. Red Mosquito 4:03
9. Lukin 1:02
10. Present Tense 5:46
11. Mankind 3:28
12. I'm Open 2:57
13. Around the Bend 4:35

Jeff Ament– bass guitar, guitar, Chapman, vocals
Stone Gossard– guitar, vocals, piano, lead vocals on "Mankind"
Jack Irons– drums
Mike McCready– guitar
Eddie Vedder– lead vocals, guitar, harmonica
&
Brendan O'Brien
– piano

EDDIE VEDDER

Ces chers disparus... 2015 (Deuxième Partie, septembre-juin)

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Où l'on continue la revue de ceux qui ont déserté l'effectif, qui nous manquent beaucoup et qu'il n'est donc que temps de célébrer, en musique évidemment.

(septembre)
MoRe RiCo!
The Specials "More Specials" (1980)
ou "Second service"
 
Voici bien un album qui, dès son titre trompeur, More Specials, ne nous dit pas à quelle sauce on va être mangé ou, plutôt, nous fait croire qu'il s'agit exactement de la même que le coup d'avant alors que, nettement, les Specials ont des envies d'ailleurs. Ceci dit, on ne va pas se mentir, le second service des Specials de Terry Hall, la voix, et Jerry Dammers, le cœur, n'est pas tout à fait du niveau de son glorieux devancier mais, donc, ce qu'il perd en urgence, il le gagne dans un goût de l'aventure musicale qui épice joliment la galette. Une galette bien emballée par un Enjoy Yourself enjoué au début, bringuebalant à la fin (version "reprise") et savoureuse en son cœur avec, au hasard parce qu'il n'y a rien à jeter, un Stereotypes ou un Holiday Fortnightà la sauce tex-mex, l'amèrement passionné Do Nothing, un excellent duo de soul jamaïcaine anglicisée avec Rhoda Dakar (Pearl's Cafe), ou d'absolus classiques ska tel que Man at C&A et son atmosphère post-apocalyptique ou Sock It to 'Em J.B. en émérite rock steady "james-bondesque". Il faut dire qu'avec un groupe qui se connaît forcément mieux, et qui en jette même sur le papier avec, notamment, Lee Thompson de chez Madness ou l'excellent Rico Rodriguez (dont la carrière, remontant au début des années soixante en sa Jamaïque d'adoption est impressionnante et qui nous a quitté en septembre dernier), respectivement au sax sur Hey Little Rich Girl et au trombone sur tout l'album, et les compositions, et quelques reprises, au diapason, les Specials, cette fois produits par Dammers lui-même, c'est qui le chef ?, ont mis les petits plats dans les grands. Ca ne fait pas de More Specials un opus aussi joyeusement sudatoire que celui d'avant mais une jolie réussite dans doute déjà symptomatique (l'éparpillement...) des dissensions internes qui viendront bientôt à bout de la formation.

1. Enjoy Yourself 3:39
2. Man at C & A 3:36
3. Hey, Little Rich Girl 3:35
4. Do Nothing 3:43
5. Pearl's Cafe 3:07
6. Sock It to 'Em J.B. 2:56
7. Stereotype/Stereotype, Pt. 2 7:24
8. Holiday Fortnight 2:45
9. I Can't Stand It 4:01
10. International Jet Set 5:37
11. Enjoy Yourself (Reprise) 1:46

Terry Hall - vocals
Lynval Golding - vocals, guitar
Neville Staple - vocals, percussion
Jerry Dammers - organ, piano, keyboards
Roddy Byers - guitar
Sir Horace Gentleman - bass guitar
John Bradbury - drums
Rico Rodriguez - trombone
Dick Cuthell - cornet, flugelhorn, horn
Lee Thompson - saxophone
Paul Heskett - saxophone
Rhoda Dakar - vocals
Belinda, Charlotte and Jane - background vocals

Rico Rodriguez
(17/10/1934 - 4/9/2015)

NeW DaMNeD
The Damned "Phantasmagoria" (1985)
ou "Goth Allures"

Si Captain Sensible est parti, Dave Vanian, Rat Scabies et leurs nouveaux associés, dont un Roman Jugg reconduit, n'ont pas perdu l'envie de faire évoluer l'entité The Damned vers des domaines toujours plus raffinés. Et toujours plus centrés autour des capacités vocales graves de Dave Vanian entraînant, présentement, les punks recyclés dans un rock gothique qui leur va parfaitement au teint. Et donc, les synthétiseurs tisseurs d'ambiances sont de plus en plus présents, les tempi nettement ralentis par rapport aux séminales premières éructations avec l'admirable Brian James, à peine si on les reconnaît, en vérité. Mais ce qui est fort, très fort même, c'est que si les Damned changent, ce n'est pas la première fois et ce n'est pas prêt de s'arrêter, ils n'y perdent pas une once de leur intérêt et, au contraire, relèvent nettement le niveau d'un Black Album et d'un Strawberries pleins de bonnes intentions mais éminemment perfectibles (si pas exempt, chacun, d'excellents moments) où Vanian& Cie sont encore loin de l'indignité d'un Anything franchement raté (et qui entrainera d'ailleurs la première séparation de la formation). Mais pas de ça ici, de bonnes chansons dont quelques single méritants qui iront se glisser dans les charts de leur mère-patrie (Shadow of Love, Is It a Dream, Grimly Fiendish) sans toutefois vraiment casser la baraque  mais aussi une excellente étrangeté comme le titre authentiquement pop interprété par Roman Jugg (Edward the Bear). Bref, avec un groupe solide et compétent parfaitement construit pour l'occasion (pour mémoire, on citera le bassiste de l'exercice, Bryn Merrick, qui nous a quitté il y a quelques mois), une apte production signée du groupe et de Jon Kelly (Chris Rea, Kate Bush, Prefab Sprout, Heather Nova, etc.), ça roule pour ces Damned goths, on recommande !

1. Street of Dreams 5:38
2. Shadow of Love 3:51
3. There'll Come a Day 4:15
4. Sanctum Sanctorum 6:27
5. Is It a Dream 3:27
6. Grimly Fiendish 3:50
7. Edward the Bear 3:37
8. The Eighth Day 3:46
9. Trojans 4:53
Bonus
10. Grimly Fiendish [The Bad Trip Mix] 5:11
11. The Shadow of Love [10 Inches of Hell Mix] 6:41

Dave Vanian - vocals
Roman Jugg - guitar, vocals on track 7, keyboards
Bryn Merrick - bass
Rat Scabies - drums
Andy Richards - additional keyboards
Luís Jardim - percussion
Gary Barnacle - saxophone

Bryn Merrick
(12/10/1958 - 12/9/2015)

Le SuRViVaNT a DiSPaRu
Bar-Kays "Soul Finger" (1967)
ou "Funky avant l'heure"

C'est un peu du Otis en version instrumentale et ce n'est que logique considérant qu'il sagit du backing band de la dernière tournée de Redding. Bien sûr, le cousinage avec Booker T & the MG's est évident, les deux formations sont instrumentales et proposent toutes deux un rythm'n'blues chaud et poisseux typique du Stax Sound des sixties. C'est aussi le seul album d'un groupe qui sera décimé par l'accident d'avion qui coutera aussi la vie à leur patron. Seul le trompettiste Ben Cauley survivra (il vient de nous quitter, R.I.P.) au crash et formera une nouvelle mouture des Bar-Kays avec le bassiste James Alexander (qui avait pris un autre avion du fait du manque de place dans le premier). Vu les circonstances, on aurait aimé - pour rendre un hommage appuyé et mérité aux quatre membres défunts - dire que cet album est du calibre dont on fait les légendes. Ce n'est hélas pas le cas. Il n'en demeure pas moins éminemment sympathique avec son charme si typiquement 60s. On imagine volontiers, par exemple, le Bar-Kays Boogaloo en soundtrack d'une fête dans un film de la même période et, de fait, tout l'album peut s'écouter comme un bande originale de film... avec quelques thèmes nettement plus marquants que d'autres (le précité Boogaloo, l'introductif Soul Finger ou le nuancé Theme from Hell's Angels). Simple et efficace, la musique des Bar-Kays l'est alors. On ne se prend ici pas la tête et se contente de confectionner ce qu'il est convenu d'appeler de la dance music. L'effet a certes été un peu amoindri par les ans mais est loin d'avoir tout à fait disparu. Les amateurs du genre apprécieront.

1. Soul Finger 2:18
2. Knucklehead 2:25
3. With a Child's Heart 2:56
4. Bar-Kay's Boogaloo 2:16
5. Theme from Hell's Angels 2:46
6. You Can't Sit Down 3:05
7. House Shoes 2:45
8. Pearl High 2:32
9. I Want Someone 3:08
10. Hole in the Wall 2:31
11. Don't Do That 2:47

James Alexander - bass
Jimmy King - guitar
Ronnie Caldwell - organ
Carl Cunningham - drums
Phalon Jones - saxophone
Ben Cauley - trumpet
Jim Stewart - supervision

Ben Cauley
(3/10/1947 - 21/9/2015)

FoR Ray
Rollercoaster "Wonderin'" (1980)
ou "Fusion Got Soul"

Une belle équipe bien fusionnante, un répertoire qui s'y prête, un album hélas trop méconnu d'une formation à la courte vie, c'est Wonderin', premier album de Rollercoaster, le suivant arrivera 20 ans plus tard... Pour le répertoire, c'est très simple, outre un original (un délicat et court Mr. W., par le leader de la formation, Karl Jenkins), c'est du Stevie Wonderà tous les étages, 5 sélections, choisis dans son répertoire de 1973 à 1976 (de Innervisionà Songs in the Key of Life) où les trémoussantes funkeries du petit gars de la Motown s'habillent de fusionnants atours. Et ça fonctionne, parfaitement, parce que les morceaux s'y prêtaient particulièrement. Tout juste pourra-t-on regretter des synthés un poil trop 80s, à la pointe à l'époque, cruellement démodés aujourd'hui, parce que, sinon, avec des performers de la trempe de Mike Ratledge (Soft Machine), d'Alan Parker (pas le cinéaste, le guitariste !) ou du regretté saxophoniste Ray Warleigh (Mike Oldfield, Nick Drake et même... Stevie Wonder, tiens donc !), c'est une belle usine à groove cuivrés qu'on découvre. Un classique ? Sans doute pas. Une vraie petite perle perdue dans la multitude et les limbes du temps plutôt, un album aussi rare que délicieux qui réchauffe bien l'oreille et donne des envies de gigoter. Pas si mal, non ?

1. I Wish 7:29
2. Boogie On Reggae Woman 6:47
3. Higher Ground 6:38
4. Superstition 7:24
5. Mr. W. 2:37
6. Living for the City 7:28

Ron Mathewson - Bass
Barry Morgan - Drums
Alan Parker - Guitar
Karl Jenkins, Mike Ratledge - Keyboards
Mike Pyne - Piano
Dick Morrissey, Ray Warleigh - Saxophones
Chris Pyne - Trombone
Derek Watkins - Trumpet

Ray Warleigh
(28/9/1938 - 21/9/2015)

(août)
La Grande Faucheuse est en vacances !

(juillet)
youNG MiLeS
Miles Davis and the Lighthouse All-Stars "At Last!" (1953)
ou "Avant la gloire"

Si, clairement, nous sommes loin du Miles cool puis modal qui révolutionnera le monde du jazz, At Last!, dès sa pochette un peu kitsch et ses musiciens blancs en chemises bariolées (on remarquera que, déjà, Davis se détache), est une utile petite bulle temporelle permettant d'entendre le phénomène en ses (très) jeunes années. Qu'y découvre t-on ? Un instrumentiste déjà très doué mais pas seul puisque partageant deux des cinq pistes sur lesquels il joue avec un Rolf Ericson qui ne connaîtra pas le même destin que lui. Et sinon ? Musicalement on est exactement dans ce le jazz des années 50 qui, déjà largement affranchi du swing dont la gloire a passé, laisse de petites formations et leurs individualités s'exprimer à loisir, comme Miles sur un'Round Midnight où, seul cuivre, il peut laisser libre cours à sa sensuelle approche de la trompette. On notera que, sur cette très sympathique collection, Miles n'est pas la seule star en devenir présente, que les présences, excusez du peu !, de Chet Baker, Bud Shank et Max Roach (uni au contrebassiste Howard Rumsey décédé en 2015), viendront encore attiser l'appétit de l'amateur qui ne sera pas déçu si pas franchement renversé non plus par une galette de belle tenue mais pas légendaire pour autant qui vaut cependant aussi pour son ambiance (c'est du vrai live dans un vrai club) où l'on entend les gens discuter, rire et même, ou alors je rêve, les glaçons s'entrechoquer dans les verres... Tout une époque.

1. Infinity Promenade 12:20
2. 'Round Midnight 5:48
3. Night in Tunisia 12:03
4. Drum Conversation 4:07
5. At Last 5:19

Miles Davis (trompette sur titres 1, 2 et 3)
Chet Baker (trompette sur titres 4 et 5)
Rolf Ericson (trompette sur titres 1 et 3)
Bob Cooper (saxophone ténor sur titres 1 et 3)
Bud Shank (saxophone alto, flûte, saxophone baryton sur titres 1 et 3)
Lorraine Geller (piano)
Russ Freeman (piano)
Howard Rumsey (contrebasse)
Max Roach (batterie)

Howard Rumsey
(7/11/1917 - 15/7/2015)

SPaCe GeRMaiNS
Harmonia "Musik von Harmonia" (1974)
ou "Kraut Deluxe"

Avec Dieter Moebius, qui nous a quitté en juillet 2015, snif, et ses amis, c'est dans l'avant-garde de la musique électronique que nous sommes. Dans celle du krautrock aussi. Il faut dire, sans trop dévoiler le contenu d'une galette qui gagne largement à être découverte "in vivo" que les gars d'harmonia, tous rompus aux expérimentations de leur teutonne scène (Roedelius et Moebius avec Cluster, Rother avec Neu!, deux formations ô combien recommandées aux amateurs de progressisme aventureux et trippé), savent y faire pour tisser d'énigmatiques et dépaysants panoramas que l'auditeur visitera préférablement la tête déjà un peu dans les nuages histoire d'être tout à fait prêt. Plus abstrait et sale que Kraftwerk ou Cluster, mais quand même plus cadré que les malades de Neu!, Can ou Faust, et entièrement instrumental, ce qui évitera à certains de violentes réactions allergiques à l'apparition du vocalisateur de service, l'Harmonia inaugural, Musik von Harmonia donc, est un vrai beau trip et ce n'est pas Brian Eno, qui louangea la galette à qui mieux mieux et participera même à quelques efforts créatifs de ces excellents germains, qui dira le contraire !

1. Watussi 6:00
2. Sehr Kosmisch 10:50
3. Sonnenschein 3:50
4. Dino 3:30
5. Ohrwurm 5:05
6. Ahoi! 5:00
7. Veterano 3:55
8. Hausmusik 4:30

Hans-Joachim Roedelius– organ, piano, guitar, electric percussion
Michael Rother– guitar, piano, organ, electric percussion
Dieter Moebius– synthesizer, guitar, electric percussion

Dieter Moebius
(16/1/1944 - 20/7/2015)

(juin)
FRee aT LaST
Ornette Coleman "The Shape of Jazz to Come" (1959)
ou "Légendaire !"

Un saxophone en plastique (!), un trio de lieutenants aussi furieux que lui et, évidemment, un vorace appétit à révolutionner un idiome ancien, c'est The Shape of Jazz to Come d'Ornette Coleman, un album qui porte merveilleusement son titre parce que, franchement, s'il y a un album de jazz de cette fin des années cinquante qui chamboule tout, c'est bien celui-ci. Il fallait bien un agitateur comme Coleman pour parvenir à ce haut fait, qui devait s'appeler Congeniality (comme la chanson) avant que le boss d'Atlantic, Ahmet Ertegun, ne le renomme ô combien à raison, pour confectionner ce jazz chaotique et barré, sans compromis on peut le dire, qui n'en finit pas de faire des petits, d'influencer de jeunes pousses (même dans le rock !). Evidemment, contrairement à quelques autres grands albums de l'an, on pense évidemment à la référence ultime, le Kind of Blue de Miles Davis, il faut un estomac bien accroché voire une éducation auditive poussée pour "comprendre" tout ce qui s'y passe mais, vraiment, une fois passé l'obligatoire délai d'adaptation à la folie furieuse du présent quatuor où chacun brille et fait briller son voisin (et quels voisins avec le fameux cornettiste, et trompettiste mais pas ici, Don Cherry, le contrebassiste Charlie Haden qui nous a récemment quitté, RIP, et le spectaculaire batteur qu'est Billy Higgins, le moins connu du lot et c'est injuste !), ce n'est que du bonheur, si un bonheur, ne le nions pas, un poil masochiste. Parce qu'ici la mélodie est torturée, dévoyée, détournée, déconstruite et reconstruite pour arriver à un résultat... Ben, révolutionnaire, il n'y a pas d'autre mot ! Après The Shape of Jazz to Come, et ce malgré l'accueil d'époque plutôt frais qui lui fit fait, et vu le choc que ça a dû être on peut presque le comprendre, rien ne sera plus jamais vraiment pareil... Et c'est très bien comme ça ! Alors on dit quoi ? Bravo Mister Coleman ! Et merci pour ces longues et riches années de prospection musicale, vous nous manquez déjà.

1. Lonely Woman 4:59
2. Eventually 4:20
3. Peace 9:04
4. Focus on Sanity 6:50
5. Congeniality 6:41
6. Chronology 6:05

Ornette Coleman– alto saxophone
Don Cherry– cornet
Charlie Haden– bass
Billy Higgins– drums


Ornette Coleman
(9/3/1930 - 11/6/2015)

PoMPFeST
Yes "Fragile" (1971)
ou "Yes they can!"

C'est le Yes du progressisme triomphant, celui d'avant les errances mégalomaniaques d'océans peut-être topographiques mais assurément ampoulés, alourdis de trop de frasques instrumentales pour ne pas un peu ennuyer, celui de Fragile, peut-être le tout meilleur album de Yes, dès 1971. Concrètement, 4ème album des anglais, premier avec le claviériste Rick Wakeman, c'est tout sauf un détail, Fragile marque le moment où Yes trouve vraiment son style, où, avec le complément d'un nouvel instrumentiste capable de répondre aux ambitions symphoniques de ses petits camarades de jeu, les londoniens réussissent leur plus beau coup qui sera, ce qui n'était que mérité, leur explosion critique et commerciale. Parce qu'avec un virtuose de plus dans ses rangs, un maître du Moog (là où Tony Kaye, son prédécesseur, se refusait au synthétiseur "in"), Anderson, Howe, Squire (il n'a pas fini de nous manquer, celui-là) et Bruford on trouvé la cinquième colonne capable de supporter leur grandiloquent édifice. Howe y trouve un partenaire avec qui il peut dialoguer lors de précieux soli, Anderson un support idéal pour ses vocalises androgynes et emphatiques, Squire et Bruford un véhicule vrombissant pour complémenter leurs excès rythmiques, bref, l'équipe idéale. Et les chansons qui vont avec, en plus, parce que de Roundabout, un titre qui vient encore hanter les setlist du groupe aujourd'hui, au majestueux Heart of Sunrise, la collection épate. Parce qu'il y faut évidemment plus que ces deux mastodontes pour faire de Fragile la référence qu'il est devenu, on trouve d'autres vrais délices dans la galette dont quelque jolies miniatures (le précieux détournement instrumental du Johannes de Cans and Brahms, le chaeur hippie We Have Heaven, l'intermède fusion Five Per Cent for Nothing, un orientalisant The Fish créé par Chris Squire, le Mood for a Day d'Howeà la guitare classique), une petite chanson presque pop qui fait son effet (Long Distance Runaround) et bien sûr un South Side of the Sky pour nous faire décoller vers les étoiles. Un sans faute ! Auquel, remaster oblige, se rajoute un vrai beau bonus avec la belle reprise de l'America de Simon & Garfunkel que le groupe avait en tête depuis longtemps (avant même de se renommer Yes, en fait) qui, imaginative et maîtrisée, rallonge agréablement le festin. Parfait jusque dans sa production (signée du groupe et d'Eddy Offord, qui travailla aussi avec ELP, Rory Gallagher ou la Baker Gurvitz Army), Fragile est un indéniable pilier du rock progressif des années 70, un album où l'évident virtuosité n'est pas encore onanisme, un must tout simplement !

1. Roundabout 8:30
2. Cans and Brahms 1:38
3. We Have Heaven 1:40
4. South Side of the Sky 8:02
5. Five Per Cent for Nothing 0:35
6. Long Distance Runaround 3:30
7. The Fish (Schindleria Praematurus) 2:39
8. Mood for a Day 3:00
9. Heart of the Sunrise 11:27
Bonus
10. America 10:33
11. Roundabout (Early Rough Mix) 8:35

Jon Anderson - lead and backing vocals
Steve Howe - electric and acoustic guitars, backing vocals
Chris Squire - bass guitars, backing vocals, electric guitar
Rick Wakeman - Hammond organ, grand piano, RMI 368 Electra-Piano and Harpsichord, Mellotron, Minimoog
Bill Bruford - drums, percussion

Chris Squire
(4/3/1948 - 27/6/2015)
L'oRGaNiSTe
Eddy Louiss "Porgy & Bess" (1971)
ou "Gershwin in Paris"

Un big band de qualité, un répertoire inattaquable, Porgy & Bess !, mené par un duo de choc, l'organiste Eddy Louiss (R.I.P.) et l'arrangeur/trompettiste Ivan Jullien, ce volume de la série Jazz in Paris a tout pour séduire. Et il séduit parce que les arrangements aux petits oignons (du pur big band qui swingue sa maman et met même un peu de fusion dans son bouillon) font carrément mouche en trouvant leur propre chemin dans un répertoire pourtant surexploité, que la performance de  tous les solistes mais plus particulièrement d'un EddyLouiss particulièrement inspiré par le matériel (qui évite l'éculé Summertime, parfait) et d'un André Ceccarelli en mode "Buddy Rich sinon rien" font leur petit effet, que la prise de son d'excellente qualité permet de parfaitement gouter à la performance d'ensemble comme individuelle... Bref, une belle galette de jazz de chez nous qu'on recommande chaudement, et pas seulement, même si ça contribue, pour se souvenir qu'Eddy Louiss était bien plus qu'un organiste ayant, à l'occasion, servi de sideman à Claude Nougaro.

1 My Man's Gone Now  6:59 
2 There's A Boat Dat's Leavin' Soon For New York  7:53 
3 Gone, Gone, Gone!  10:33 
4 Street Cries (Strawberry Woman, Crab Man)  1:17 
5 Bess, You Is My Woman Now  6:35 
6 Clara, Don't You Be Downhearted  3:02 

Organ – Eddy Louiss
Alto Saxophone – Jacques DiDonato, Pierre Gossez
Arranged By, Conductor – Ivan Jullien
Baritone Saxophone – Jacques Nourredine
Double Bass – Jacky Samson
Drums – André Ceccarelli
Electric Bass – Francis Darizcuren
Electric Guitar – Pierre Cullaz
Engineer – Francis Miannay
French Horn – Jean-Jacques Justafre, Yves Valada
Percussion – Bernard Lubat, Luis Agudo, Marc Chantereau
Piano, Electric Piano – Michel Graillier
Tenor Saxophone – Robert Garcia, Jean-Louis Chautemps
Trombone – André Paquinet, Benny Vasseur, Christian Guizien, Gérard Massot, Jacques Bolognesi
Trumpet – Fernand Verstraete, Ivan Jullien, Jean Baissat, Maurice Thomas, Michel Poli, Tony Russo
Tuba – Marc Steckar

Eddy Louiss
(2/5/1947 - 30/6/2015)

Brothers & Sisters (Volume 1)

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Des frères, des sœurs, de la bonne musique surtout !, voici une série où l'on ne va pas se prendre la tête alors, sans plus de préambule... Enjoie !

FRèReS De PLaGe
The Beach Boys "Pet Sounds" (1966)
ou "Wonderpop"
(Brian, Dennis & Carl Wilson)

Un album pop aussi légendaire que Sgt. Pepper de qui vous savez, une éminence grise qui ne tardera pas à péter les plombs même que c'est déjà bien en chemin, un obligatoire qu'on n'a pas le droit de manquer... Pet Sounds, évidemment ! Pour vanter l'exercice, on pourrait dire qu'il est constitué de 13 compositions pop absolument parfaites dont certaines (Wouldn't It Be Nice, God Only Knows) continuent de squatter l'inconscient collectif un demi-siècle après la sortie de l'opus, que les arrangements détaillés, maniaques, pointillistes et pointilleux, à l'image de leur auteur en vérité, Brian, l'ainé des frères Wilson et leader incontestables de ces Beach Boys qui ont fait un chemin considérable depuis leurs débuts surf, demeurent un mètre-étalon rarement égalé du genre, que la prise de son idoine sert à merveille le festin, bref, que Pet Sounds est une perfection qui laisserait sans mot si l'enthousiasme ne nous rendait aussi volubile... Mais vous savez déjà tout ça alors, faire l'articlé sur un pareil haut-fait ? Inutile !, il suffira de recommander à ceux qui ne se sont pas encore intéressé à "l'animal" d'y plonger au plus vite !

PS : Généreux que je suis, je vous ai mis les versions mono et stéréo. Enjoie !

1. Wouldn't It Be Nice 2:25
2. You Still Believe in Me 2:31
3. That's Not Me 2:28
4. Don't Talk (Put Your Head on My Shoulder) 2:53
5. I'm Waiting for the Day 3:05
6. Let's Go Away for Awhile 2:18
7. Sloop John B 2:58
8. God Only Knows 2:51
9. I Know There's an Answer 3:09
10. Here Today 2:54
11. I Just Wasn't Made for These Times 3:12
12. Pet Sounds 2:22
13. Caroline, No 2:51

Al Jardine– lead, harmony and backing vocals, tambourine
Bruce Johnston– harmony and backing vocals
Mike Love– lead, harmony and backing vocals
Brian Wilson– lead, harmony and backing vocals, dog whistles, organ, piano, sound effects
Carl Wilson– lead, harmony and backing vocals, guitar, twelve-string guitar
Dennis Wilson– harmony and backing vocals, drums

&
Tony Asher– plucked piano strings
Arnold Belnick– violin
Chuck Berghofer– string bass
Hal Blaine– bongos, drums, timpani
Norman Botnick– viola
Glen Campbell– guitar, twelve-string electric guitar
Frank Capp– bells, glockenspiel, latin percussion, percussion, timpani, vibraphone
Al Casey– guitar
Roy Caton– trumpet
Jerry Cole– electric guitar, guitar, mandolin
Gary Coleman– bongos, timpani
Mike Deasy– guitar
Al De Lory– harpsichord, organ, piano, tack piano
Joseph DiFiore– viola
Justin DiTullio– cello
Steve Douglas– clarinet, flute, percussion, tenor saxophone, saxophone
Jesse Erlich– cello
Carl Fortina– accordion
Ritchie Frost– drums, empty Coca-Cola cans, percussion
James Getzoff– violin
Jim Gordon– drums, percussion
Bill Green– flute, percussion, saxophone, tenor saxophone
Leonard Hartman– bass clarinet, clarinet, english horn
Jim Horn– baritone saxophone, flute, tenor saxophone, saxophone
Paul Horn– tenor saxophone
Harry Hyams– viola
Jules Jacob– flute
Plas Johnson– flute, percussion, saxophone, tenor saxophone
Carol Kaye– electric bass
Barney Kessel– guitar, mandolin
Bobby Klein– tenor saxophone
Larry Knechtel– organ
William Kurasch– violin
Leonard Malarsky– violin
Frank Marocco– accordion
Gail Martin– trombone
Nick Martinis– drums
Terry Melcher– tambourine
Mike Melvoin– harpsichord
Jay Migliori– baritone saxophone, bass clarinet, clarinet, flute, saxophone
Tommy Morgan– harmonica
Jack Nimitz– baritone saxophone
Bill Pittman– guitar
Ray Pohlman– Danelectro bass, electric bass, mandolin, guitar
Don Randi– piano
Alan Robinson– french horn
Jerome Reisler– violin
Lyle Ritz– string bass, ukulele
Joseph Saxon– cello
Ralph Schaeffer– violin
Sid Sharp– violin
Billy Strange– electric guitar, guitar, twelve-string electric guitar
Ron Swallow– tambourine
Ernie Tack– bass trombone
Paul Tanner– Electro-Theremin
Tommy Tedesco– acoustic guitar
Darrel Terwilliger– viola
"Tony"– sleigh bell
Jerry Williams– percussion
Julius Wechter– timpani, latin percussion, percussion, vibraphone
Tibor Zelig– violin

THE BEACH BOYS

BRiT BRoTHeRS
The Kinks "Arthur (Or the Decline and Fall of the British Empire) (mono)" (1969)
ou "So British"
(Ray & Dave Davies)

Le plus classe des groupes de la british invasion, le plus anglais aussi, et leur concept le plus décidément victorien, ha ! Arthur (ou le déclin et la chute de l'empire britannique), c'est tout de même quelque chose ! D'autant plus que les malins frères Davies et leur duo rythmique renouvelé, Mick Avory toujours là et John Dalton qui remplace Pete Quaife, évitent scrupuleusement de tomber dans la hype psychédélique qui hante les albums de leurs condisciples/concurrents conservant, ainsi, un particularisme que beaucoup perdirent (à trop vouloir coller aux Beatles...)... Et quelles chansons, aussi ! Tout part de l'intérêt de Granada TV de voir Ray Davies et les siens développer un fiction musicale pour eux mais surtout œuvre majeure lardée de nostalgie qui semble saluer une Angleterre aujourd'hui disparue, de celle de la Reine Victoria (l'excellent Victoria), à celle des restrictions et de la peur (Mr. Churchill Says, le blitz et tout ça), en passant par la première guerre mondiale (Yes Sir, No Sir et Some Mother's Son), ou celle de l'immigration pour une supposée meilleure vie (Australia). Le tout, glorieusement arrangé, cuivré, cordé, produit est un délice qu'on ne dévoilera pas plus avant, ceux qui le connaissent savent déjà de quoi il en retourne, les autres n'ont plus qu'à découvrir le plus grand album de 1969, carrément ! Et à part ça ? Vive les Kinks, ça oui !

1. Victoria 3:40
2. Yes Sir, No Sir 3:46
3. Some Mother's Son 3:25
4. Drivin' 3:21
5. Brainwashed 2:34
6. Australia 6:46
7. Shangri-La 5:20
8. Mr. Churchill Says 4:42
9. She's Bought a Hat Like Princess Marina 3:07
10. Young and Innocent Days 3:21
11. Nothing to Say 3:08
12. Arthur 5:27

Mick Avory– drums, percussion
John Dalton– bass guitar, background vocals
Dave Davies– lead guitar, background vocals, co-lead vocal on "Australia" and "Arthur", lead vocals on his own tracks
Ray Davies– lead and background vocals, rhythm guitar, keyboards (harpsichord and piano), production
&
Lew Warburton– horn and string arrangements

THE KINKS

a WHoLe FaMiLy!
Sly & The Family Stone "Stand!" (1969)
ou "So Stone!"
(Sly, Freddie, Rose & Vet Stone)

Au rayon du proto-funk, il y a une bande de garçons et de filles de toutes les couleurs qu'il s'agit de ne surtout pas oublier, Sly & the Family Stone bien-sûr, un nom admirablement adéquat avec deux frères et deux sœurs Stone au programme ! Après quelques albums déjà bien sympathiques mais encore pas tout à fait définis montrant un collectif en constante progression (ainsi, Life, le prédécesseur immédiat est-il le plus recommandé), la bande revient avec un féroce appétit et des idées qui jaillissent dans tous les sens. Epoque oblige, tout ceci est gonflé de psychédélisme jammy, d'un flower power militant mais, musicalement, c'est indéniablement un des albums qui définit cette musique à trémousser des hanches, à suer sur les dance-floors au sons de vocaux passionnés et de cuivres rutilants... Le funk ! C'est évident sur I Want to Take You Higher, la "supra-bœufante (13 minutes 45 secondes !) Sex Machine, qui n'est pas une reprise du titre du même nom de James Brown mais une folie psyché/rock/groove du plus bel effet, et le très "street cred'"Sing a Simple Song qu'on imagine bien illustrer un nanar blaxploitation où il serait, bien entendu, la star. Ceci dit, plus généralement, c'est tout l'album qui est infusé de ce groove poisseux et sexuel qui identifie le genre. Alors, évidemment, il reste des échos de la génération Woodstock (c'est d'actualité, après tout) comme sur un Stand! ou un Everyday People des marguerites plein l'afro, deux excellentissimes singles, est-ce encore à préciser ? La collection est si bluffante et tellement passionnément habitée par ses interprètes, et si bien bonnussée dans l'édition remasterisée (deux beaux inédits et les version mono des trois singles), qu'il est tout simplement impossible d'y résister. Si on ajoute l'importance historique de l'album, c'est bel et bien d'un immense classique incontournable dont il s'agit, ce que vous saviez d'ailleurs sans doute déjà. Si ce n'est pas le cas, vous savez ce qu'il vous reste à faire...

1. Stand! 3:08
2. Don't Call Me Nigger, Whitey 5:58
3. I Want to Take You Higher 5:22
4. Somebody's Watching You 3:20
5. Sing a Simple Song 3:56
6. Everyday People 2:21
7. Sex Machine 13:45
8. You Can Make It If You Try 3:37
Bonus
9. Stand! (mono single version) 3:10
10. I Want To Take You Higher (mono single version) 3:03
11. You Can Make It If You Try (mono single version) 3:40
12. Soul Clappin' II (previously unreleased) 3:28
13. My Brain (Zig-Zag) (previously unreleased instrumental) 3:19

Sly Stone: vocals, organ, guitar, piano, harmonica, vocoder, and bass guitar on "You Can Make It If You Try"
Freddie Stone: vocals, guitar
Larry Graham: vocals, bass guitar (tracks one through seven)
Rose Stone: vocals, piano, keyboard
Cynthia Robinson: trumpet, vocal ad-libs, background vocals on "I Want to Take You Higher"
Jerry Martini: saxophone, background vocals on "I Want to Take You Higher"
Greg Errico: drums, background vocals on "I Want to Take You Higher"
Little Sister (Vet Stone, Mary McCreary, Elva Mouton): background vocals on "Stand!", "Sing a Simple Song", "Everyday People", and "I Want to Take you Higher"

SLY & THE FAMILY STONE

SouTHeRN BRoTHeRS
The Allman Brothers Band "At Fillmore East" (1971)
ou "Jam Power"
(Gregg & Duane Allman)

Bien-sûr, on peut opter pour la version originale et sa courte sélection des trois concerts donnés au Fillmore East de New York, la substantifique moelle de l'évènement en somme. On peut aussi choisir la version intégrale, les trois dates en six galettes pleines jusqu'à la garde de ces jams sudistes qui ont fait la réputation des frangins et permettent même d'encaisser sans trop de lassitude les inévitables doublons. Ou encore choisir une édition Deluxe qui, doublant la dose de l'objet originel, s'avère une très satisfaisante sélection élargie. Quelque soit le choix, qui dépendra de la dose d'addiction à l'art consommé de rallonger la sauce à grands coups de soli échevelés de l'Allman Brothers Band, on tombe sur un foutu sacré album live qui continue d'être le mètre étalon, l'ultime standard de "jammerie" blues rock. A tel point qu'il en ferait presque oublier le reste d'une discographie certes en dents de scie, après la disparition ô combien prématurée de Duane, évidemment, ne manquant pourtant pas de bons opus (de Brothers and Sistersà Seven turns et quelques autres). Il est vrai, cependant, que ces Allman-là ne sont jamais aussi décisifs que quand, pris par la transe du live, ils lâchent fièrement les chevaux dans d'imparables versions de classiques du répertoire (Statesboro Blues de Blind Willie McTell, Stormy Monday de T-Bone Walker ou One Way Out d'Elmore James) comme de leurs créations personnelles (la Mountain Jam, génial détournement du gentil folkeux hippie Donovan, Whipping Post ou In Memory of Elizabeth Reed et leur "jazzisme" décontracté quoique bouillonnant). Parce qu'avec un vocaliste gorgé de soul (Greg), une paire de guitaristes à faire pâlir d'envie la concurrence (Duane et sa slide magique, Dickey et son touché gracieux) plus une section rythmique, basse, batterie et percussions, taillée pour le bœuf, un indéniable talent, une absolue connivence dans la performance aussi, ce groupe a quelque chose de magique. Comme on ne croise pas souvent pareil haut-fait, l'autre du répertoire des natifs de Macon, Géorgie, étant l'obligatoire Eat a Peach, on ne peut que recommander à tous, même à ceux qui sont allergiques au southern rock parce que c'est beaucoup plus que ça, cet At Fillmore East, c'est le mot, d'anthologie.

CD 1
1. Statesboro Blues 4:15
2. Trouble No More 3:46
3. Don't Keep Me Wonderin' 3:20
4. In Memory of Elizabeth Reed 12:59
5. One Way Out 4:55
6. Done Somebody Wrong 4:11
7. Stormy Monday 10:19
8. You Don't Love Me 19:24
9. Midnight Rider 2.55

CD 2
1. Hot 'Lanta 5:11
2. Whipping Post 22:37
3. Mountain Jam 33:41
4. Drunken Hearted Boy 7:33

Duane Allman - lead guitar, slide guitar
Gregg Allman - organ, piano, vocals
Dickey Betts - lead guitar
Berry Oakley - bass guitar
Jai Johanny Johanson - drums, congas, timbales
Butch Trucks - drums, tympani
&
Thom Doucette - Harmonica on "Don't Keep Me Wonderin'", "Done Somebody Wrong", "Stormy Monday" and "You Don't Love Me"
Jim Santi - Tambourine

THE ALLMAN BROTHERS BAND

BRoTHeRS iN aRMS
Dire Straits "Dire Straits" (1978)
ou "Débuts remarqués"
(Mark & David Knopfler)

Sortis de nulle part et tellement à l'opposé des excités à crêtes qui secouent alors la vieille Angleterre, Dire Straits s'impose, dès son premier album éponyme, comme une divine étrangeté, un vrai courant d'air frais des grands espaces dans la graisse, la bière et la sueur ambiante. Parce que voir débarquer un groupe qui s'influence ouvertement de J.J. Cale ou de Chet Atkins, maître déclaré du leader des Knopfler, n'est pas franchement ce qu'on attend d'un des plus beaux succès de 1978, un an après l'explosion de colère que vous savez. Mais avec une cool attitude qui tranche notablement, la belle voix traînante de Mark qui lui va comme un gant, et les merveilles guitaristiques du même, également compositeur exclusif d'une galette bien mise en son par Muff Winwood (oui, le frère de Steve), ce country-rock vaguement californien, vaguement dylanien dans l'approche lyrique qui fait son petit effet, et pas seulement sur un tube honoré d'un exceptionnel soli (Sultans of Swing). Evidemment, l'étrange animal perdra vite ce charme débutant à mesure qu'il s'approchera du stadium rock roi de la décade à venir dont il sera l'un des incontestés champions, une bonne raison de plus de revenir sur ce premier long-jeu tranquillement réussi.

1. Down to the Waterline 3:55
2. Water of Love 5:23
3. Setting Me Up 3:18
4. Six Blade Knife 4:10
5. Southbound Again 2:58
6. Sultans of Swing 5:47
7. In the Gallery 6:16
8. Wild West End 4:42
9. Lions 5:05

Mark Knopfler– vocals, lead and rhythm guitars
David Knopfler– rhythm guitar, vocals
John Illsley– bass, vocals
Pick Withers– drums

DIRE STRAITS

auSSie BRoTHeRS
AC/DC "Highway to Hell" (1979)
ou "Hell Ain't a Bad Place to Be"
(Malcolm & Angus Young)

Le dernier tour de roue de l'ami Bon, on n'en sait alors encore rien, mais, surtout !, le tout meilleur album d'une formation qui a fait du hard'n'blues une éthique artistique dans laquelle il s'améliore à chaque album, c'est Highway to Hell, le cru 1979 des frères Young et de leur, hélas bientôt, regretté vocaliste. Alors, évidemment, les détracteurs de cette machine à riffs graisseuses et mâle iront ergoter que tout ceci n'est pas bien malin, que les paroles sexuées, alcoolisées, chargées, motorisées ne sont pas bien raffinées, oui, et alors ? En 10 titres couvrant tout le spectre de leurs possibles, de l'hymnique avec Highway to Hell, du bon hard blues bien entraînant (avec Girl Got Rhythm, Walk All Over You, Touch Too Much, Shot Down in Flames, Get It Hot, If You Want Blood (You've Got It) et Love Hungry Man comme autant de preuve qu'on peu accommoder peu pour faire beaucoup et largement contenter les masses au passage), une petite montée de sève bien nerveuse et bien servie (Beating Around the Bush) et, évidemment le bon gros blues permettant à un Bon au sommet de sa forme de feuler comme jamais et à un Angus Young de faire pleurer sa SG comme lui seul sait faire (l'immense et incontournable Night Prowler). Simple ? Si on a la "machine de guerre" qu'est AC/DC avec son trio rythmique (l'autre frère Young, Malcolm, guitariste rythmique incomparable, et le solide duo basse/batterie Cliff Williams/Phil Rudd) en idéal moteur du vrombissant engin. Et la production d'un Robert John "Mutt" Lange parfaite de puissance et de clarté pour mettre en valeur toutes les valeurs de nos diaboliques aussies. On ose à peine imaginer ce que la suite, les bases de Back in Black existant déjà avant la disparition de Bon, aurait donné avec le graveleux organe de mister Scott... Restent quelques galettes immanquables desquelles Highway to Hell est l'indéniable joyau.

1. Highway to Hell 3:29
2. Girls Got Rhythm 3:24
3. Walk All Over You 5:11
4. Touch Too Much 4:28
5. Beating Around the Bush 3:57
6. Shot Down in Flames 3:23
7. Get It Hot 2:35
8. If You Want Blood (You've Got It) 4:38
9. Love Hungry Man 4:18
10. Night Prowler 6:18

Bon Scott– lead vocals
Angus Young– lead guitar
Malcolm Young– rhythm guitar, backing vocals
Cliff Williams– bass guitar, backing vocals
Phil Rudd– drums

AC/DC

MaD BRoTHeRS X 2
Devo "Freedom of Choice" (1980)
ou "Synth Devo"
(Bob & Gerald Casale
Bob & Mark Mothersbaugh)

C'est Devo avant la chute, avant que les deux paires de frangins et leur copain batteur ne se perdent dans des 80s qui, clinquantes et vulgaires, ne vont pas bien au teint de ces doux-dingues. En attendant, si Devo a un peu perdu de sa folie, il sait encore faire de l'excellente musique ! Et même son album le plus cohérent, le plus cohésif où, certes, ce punk angulaire et foutraque qui a fait leur réputation a fini par disparaître mais où d'excellents hooks synthétiques font admirablement l'affaire. Mais si le son a changé, et la folie s'est canalisée, Devo n'en demeure pas moins un étrange animal comme démontré par un hit sadomasochiste, Whip It, qui, en d'autres mains, aurait probablement sué la vulgarité. Et donc, à coup d'efficaces petites chansons où se glisse leur humour décalé en indispensable épice, les frères Casale et Mothersbaugh et le robotique Myers au drumkit balancent-ils avec un aisance déconcertante autant d'addictives vignettes que l'album comporte de pistes. Car enfin, comment résister à un sautillant Girl U Want, à un délicieusement kraftwerkien Snowball, à un rockant Freedom of Choice, ou à l'irrésistible synthpop d'un Cold War ou d'un Planet Earth ? Impossible ! Une réussite d'ensemble à laquelle le coproducteur, avec Devo, Robert Margouleff, collaborateur du Stevie Wonder de la meilleure période (Innervisions, Talking Book), qui, versé dans la chose synthétique dont il fut l'un des précurseurs, aida grandement la formation à raffiner son son. On dira ce qu'on veut de Freedom of Choice, dans le genre proto-synthpop, mais tout de même décalé du troupeau qui ne tardera plus à débouler (surtout d'Angleterre d'ailleurs), c'est une immense réussite, et le dernier grand album de Devo aussi.

1. Girl U Want 2:55
2. It's Not Right 2:20
3. Whip It 2:37
4. Snowball 2:28
5. Ton o' Luv 2:29
6. Freedom of Choice 3:28
7. Gates of Steel 3:26
8. Cold War 2:30
9. Don't You Know 2:14
10. That's Pep! 2:17
11. Mr. B's Ballroom 2:45
12. Planet Earth 2:45
Bonus
13. Freedom of Choice Theme Song (Live) 2:46
14. Whip It (Live) 2:41
15. Girl U Want (Live) 2:56
16. Gates of Steel (Live) 3:17
17. Be Stiff (Live) 2:50
18. Planet Earth (Live) 2:32

Mark Mothersbaugh– guitar; keyboards; vocals
Gerald V. Casale– bass guitar; keyboards; vocals
Bob Casale– guitar, keyboards; vocals
Bob Mothersbaugh– guitar; vocals
Alan Myers– drums

DEVO

PuNK BRoTHeRS
The Replacements "Tim" (1985)
ou "Les Outsiders"
(Bob & Tommy Stinson)

A Minneapolis il y a Prince, il y a également Hüsker Dü mais il y a aussi les Replacements, un petit groupe qui n'a l'air de rien avec son rock punkifié mais qui, depuis 1981 et ses premiers ébats discographiques, enchaine les impeccables galettes, alors arrivé à Tim, leur 4ème, on sait que ces remplaçants-là ont tout les atouts pour sortir du banc, et qu'on ne sera pas déçu, évidemment. Pour la petite histoire, Tim est le premier album des Replacements pour une major, Sire, un sous-label de la Warner, pas que ça change quoique ce soit à leurs habitudes tant musicales que logistiques. Paul Westerberg et les siens restent donc à Minneapolis mais cette fois sous le bienveillant patronage de Tommy Erdelyi, également connu en tant que batteur sous le pseudonyme de Tommy Ramone, vous savez pour qui !, qui, sans révolutionner leur son, lui donne des moyens et une puissance sonique nouvelle comparée aux précédentes œuvres du quatuor. Sinon, on n'a aucun mal à reconnaître le groupe qui s'est progressivement fait un nom, en particulier grâce à leur opus d'avant, Let It Be, dans une scène étatsunienne indépendante pourtant surpeuplée. Il faut dire que Westerberg, quasi-unique compositeur de la chose, mais bien assisté dans ses efforts par les frères Stinson et le batteur from Mars (Chris), qui n'a jamais autant livré de lui-même dans les paroles que présentement, a le chic pour pondre de la chanson poursuivant la tradition rock'n'roll nord-américaine avec juste ce qu'il faut de détachement, tant lyrique que mélodique, pour imposer son écriture. Ainsi, qu'il donne dans une écriture adulte mais pas rance (Hold My Life, Swingin' Party, left on the Dial), dans d'adolescentes mélopées (I'll Buy, Kiss Me on the Bus), dévoie le country rock (Waitress in the Sky), plonge dans une folk sombre (Here Comes a Regular), ou se rappelle de ses exactions punk de jeunesse (Lay It Down Clown) il le fait toujours avec un talent et une maîtrise qui laisse pantois. Si musicalement la tentation est grande de comparer ces remplaçants à d'autres références de l'époque (R.E.M., Soul Asylym ou Hüsker Dü) il y a chez ces gars-là un je ne sais quoi, dont l'influence d'Alex Chilton et de son Big Star ne sont pas des moindres, qui fait la différence. Pas étonnant, à partir de là, que ce Tim, comme la plupart des albums des Replacements d'ailleurs, soit devenu un album culte... D'un groupe qui ne l'est pas moins parce qu'il faut le dire, si les Replacements ont influencés de nombreux groupes (de Nirvana aux Lemonheads en passant par Urge Overkill ou Buffalo Tom, pour ne citer qu'eux parce que, vraiment, la liste est trop longue pour être exhaustive) ils n'ont jamais, eux-mêmes, eu le succès qu'ils méritaient pourtant largement. Une injustice toujours réparable en commençant, par exemple, par cet opus de 1985 sans le moindre défaut.

1. Hold My Life 4:18
2. I'll Buy 3:20
3. Kiss Me on the Bus 2:48
4. Dose of Thunder 2:16
5. Waitress in the Sky 2:02
6. Swingin Party 3:48
7. Bastards of Young 3:35
8. Lay It Down Clown 2:22
9. Left of the Dial 3:41
10. Little Mascara 3:33
11. Here Comes a Regular 4:46
Bonus
12. Can't Hardly Wait (Acoustic Outtake) 3:52
13. Nowhere Is My Home (Session Outtake) 4:01
14. Can't Hardly Wait (Electric Outtake) 3:09
15. Kiss Me on the Bus (Demo Version) 3:00
16. Waitress in the Sky (Alternate Version) 2:00
17. Here Comes a Regular (Alternate Version) 5:22

Paul Westerberg - Guitar, Piano, Vocals
Chris Mars - Drums, Background Vocals
Bob Stinson - Guitar
Tommy Stinson - Bass
&
Alex Chilton - vocals on "Left of the Dial"
Tommy Erdelyi - guitar solo on "Kiss Me On The Bus"

THE REPLACEMENTS

BRoTHeRS oN SPeeD
Raven "Nothing Exceeds Like Excess" (1988)
ou "Brit Assault"
(John & Mark Gallagher)

Ils sont anglais, ils sont trois, ils aiment le rock qui va à 200 à l'heure, et arrache tout, construit sur des riffs péri-métalliques qui sont un bon carburant... Et non, ce n'est pas de Motörhead dont il s'agit mais bel et bien de Raven, le groupe des autres frères Gallagher (ceux-ci même qu'on ne doit pas confondre avec les deux têtes de c... au nom de boisson fruitée). Comment-ça vous ne connaissez pas Raven ? Pourtant, depuis les débuts des années 80, les deux frangins et leur batteur d'élection du moment (y aura du mouvement avant l'arrivée de Joe Hasselvander), membres, et pas des moindres, de la New Wave of British Heavy Metal, ont imposé leur vision "toute nuancée" d'un rock'n'roll barbare et réjouissant ! Alors, oui, il y a bien eu, 3 petites années avant l'album qui nous intéresse, une tentative, une tentation de quelque chose de plus commercial (The Pack Is Back, un vrai flop mais pas un si mauvais album), c'est bien tout ce qu'on peut reprocher à une formation sinon restée fidèle à une approche testostéronée et sans concession de la chose hard'n'heavy. D'ailleurs, quand sort en 1988 Nothing Exceeds Like Excess, ils ont déjà rectifié le tir sur un "poétique et finaud"Life's a Bitch, écartant le faux-pas précité et ramenant leur power-trio dans un registre qui lui sied bien mieux, et rassuré ce faisant ceux qui pensaient les avoir perdu. Cette seconde salve de relance arrive donc sans qu'on ne doute un seul instant de son contenu, reste à juger de sa qualité. Et là, c'est un vrai "ouf" de soulagement parce que l'essai du précédent (vraiment bon sans être tout à fait exceptionnel) est plus que transformé sur ce qui demeure une des plus belles galettes de la formation, un machin lourd, rapide, agressif, porté par la voix de sirène d'alarme de John (également bassiste), les guitares en fusion de Mark (riffs efficaces, soli inspirés), et la batterie de Joe (à la Phil "Animal" Taylor, la double grosse caisse en sus). Et des compos qui font mouche, toutes !, en ne cherchant surtout pas à se compliquer la tâche ou à innover. Le tout servi par une production mettant parfaitement en valeur la belle, l'énorme énergie du combo. Culte dans la scène, le vrai succès leur échappant systématiquement, inoxydables puisque toujours en activité (avec le même line-up depuis cet album, justement), Raven est une force à réévaluer, un groupe généralement seulement connu pour son grand classique (All for One) mais dont la majeure partie de la discographie en impose. De la seconde division ? Il en faut, et celle-ci a tout d'une grande. Laissez vous donc tenter par ces "Brits on speed" et plus particulièrement par leur cru 1988, vous ne le regretterez pas !

1. Behemoth 1:05
2. Die for Allah 4:58
3. Gimme a Break 3:19
4. Into the Jaws of Death 6:08
5. In the Name of Our Lord 3:46
6. Stick It 3:10
7. Lay Down the Law 4:45
8. You Gotta Screw Loose 4:22
9. Thunderlord 4:30
10. The King 4:25
11. Hard as Nails 5:06
12. Kick Your Ass 3:18
Bonus
13. Lay Down the Law (live bootleg)

John Gallagher - bass, vocals
Mark Gallagher - guitar, backing vocals
Joe Hasselvander - drums, backing vocals

RAVEN

FRèReS BaTaVeS
Van Halen "OU812" (1988)
ou "Rocking without Roth"
(Eddie & Alex Van Halen)

Deuxième service avec le remplaçant de l'irremplaçable, l'ex-Montrose Sammy Hagar qui faillit bien rejoindre le groupe avant David Lee d'ailleurs, celui qui est généralement le plus vilipendé par la critique et même les fans, pourtant, il a de vrais beaux moments le OU812 de frères Van Halen et de leurs associés, aka Van Hagar comme il était alors coutume de les surnommer. A commencer par le bastonnant synth-rocker Mine All Mine mené tambours battants, c'est le cas de le dire, par un Alex Van Halen au meilleur de sa forme. Et la suite est à l'avenant !, avec tout ce qu'on sait devoir désormais espérer de la formation à savoir de la power-ballad tire-larme largement synthétisée (When It's Love, une réussite dans le genre), du big rock puisque c'est le trademark sound du quatuor (le puissant A.F.U., le très David Lee Roth era Source of Infection, le rampant Black and Blue et le rockant Sucker in a 3 Pieceà un moindre niveau), du hard pop simple et efficace en guise de single attendu (Feels So Good accomplit son office), et puis l'obligatoire, nécessaire et salutaire "nod" vers les roots nord-américaines comme sur le joli country-rock Finish What Ya Started et le blues bien emprunté à Little Feat, A Apolitical Blues, tous deux voyants Hagar assister le patron, Eddie, dans ses tâches de six-cordiste. Alors, certes, ce Van Halen est un peu plus vulgaire, un peu plus lourdaud, un peu plus FM que celui d'avec David Lee mais, quand il a de bonnes chansons comme c'est largement le cas ici, ça fonctionne au-delà des espérances même si on regrettera que la production du groupe et de Donn Landee n'offre pas l'écrin de puissante clarté qu'aurait mérité ce très réussi OU812.

1. Mine All Mine 5:11
2. When It's Love 5:36
3. A.F.U. (Naturally Wired) 4:28
4. Cabo Wabo 7:04
5. Source of Infection 3:58
6. Feels So Good 4:27
7. Finish What Ya Started 4:20
8. Black and Blue 5:24
9. Sucker in a 3 Piece 5:52
10. A Apolitical Blues 3:50

Eddie Van Halen - lead guitar, keyboards, synthesizers, slide guitar, piano and backing vocals
Alex Van Halen - drums, percussion, backing vocals
Sammy Hagar - lead, backing vocals, acoustic guitar on "Finish What Ya Started", rhythm guitar on "A Apolitical Blues"
Michael Anthony - bass guitar, backing vocals

VAN HALEN
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